This Is War
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 Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]

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Liam Marsden
In love with JUDASLiam Marsden


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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeDim 24 Oct - 0:02

Il fait froid dans cette pièce sombre, dont la faible lumière transperce à peine l’air opaque, comme solidifié. Aucun souffle ne raisonne hormis le mien, râle laborieux signifiant la fin proche. Mes poumons sont comme emprisonnés dans ma cage thoracique qui se soulève de plus en plus rarement, et de moins en moins haut. J’étouffe. Au-delà de ma propre souffrance je ne distingue rien, ni bruit ni forme, ni espoir ni colère. Peut-être que la mort réside justement dans cette absence cruelle de sentiments, de ressentis ou même d’envie. A croire que je les avais jusque là éprouvé tellement fort que désormais, le stock était épuisé. Mon existence aura décidément été catastrophique, du début jusqu’à la fin il n’y a rien à retenir de moi. Je n’ai jamais rien fait de bien, quoi que l’on puisse en dire ou en penser. A présent je vais rendre l’âme, je le sais, et j’en éprouve une angoisse tétanisante. La peur de la mort est certainement la chose la plus ridicule au monde mais que voulez vous, j’ai toujours fait preuve d’une incroyable lâcheté. Je tousse, crache mes poumons sur ses draps trop blancs, qui font paraître ma peau encore d’avantage jaunâtre, comme sale. Je distingue difficilement mes doigts immobilisés, glacés. Cela n’a aucune importance. Le silence est pesant et me laisse trop de temps pour réfléchir, envisager et me préparer à ce point final qui plus jamais ne verra de retour à la ligne. Je vais mourir, pour une bêtise. Je vais mourir, je le sais. Bientôt, je l’espère, car je souffre le martyr. Respirer me brûle, déglutir me donne la nausée, ouvrir les yeux des vertiges. Je suis à l’aube de la mort pour une bêtise. Une fatale idiotie.

Deux semaines. J’étais officieusement en couple avec Samuel depuis deux semaines. Cet amour intense me consumait d’une telle manière qu’il n’y avait pas une minute durant laquelle mes pensées ne lui étaient destinées, pas une journée sans que je me faufile jusque dans sa chambre pour l’embrasser furtivement. A chaque fois, je trouvais cet homme dont le sourire éblouissant m’était exclusivement destiné, dont les lèvres étaient seules miennes et les caresses entièrement dédiées. Cet homme que j’aimais jusqu’à en perdre pied parfois, et pour lequel mont cœur battait de plus en plus vite. Nos rencontres secrètes avaient une telle importance à mes yeux que j’aurais sans hésiter tout abandonner pour les faire durer toujours quelques minutes de plus, grappiller des baisers et des sourires qui illumineraient mes sombres et solitaires nuits. Le temps en son absence me paraissait s’étirer à l’infini, interminablement long comme une interrogation de mathématiques pour laquelle on n’aurait pas révisé. De plus, nos échanges étaient devenus plus fluides, moins hésitants ou synthétiques. Désormais je ne le repoussais plus, quoi qu’il fasse et même, c’était le plus souvent moi qui me jetais dans ses bras, le serrant à l’en étouffer contre mon torse. Samuel connaissait mes limites et les respectais à merveille, bien que la tentation l’ait déjà kidnappé et qu’il se soit déjà laissé aller. A présent tout allait bien, tout allait mieux. Je vivais comme dans une bulle protectrice, m’empêchant de ressentir toute la haine et la douleur autour de moi. La Communauté avait beau s’agiter, se déchirer, hurler ou pleurer, je demeurais le centre serein au travers duquel rien ne passait. La vie semblait si légère de cette façon. Non pas que je me désintéresse des autres ou les oublie, mais je n’étais plus autant touché, accaparé par leurs problèmes. A présent je possédais une vie, une véritable existence qui nécessitait mes soins et toute mon attention : nous avions tous la notre. Ethan et Katarina, Alexander et Gabrielle, les autres, les autres. Chacun avait ses problèmes et devait les régler et moi, pour une fois que j’en étais libéré, je n’allais pas fouiner chez les autres. J’étais la neutralité parfaite et absolue que rien ne venait tâcher. J’étais la Suisse, le chocolat en moins.

En surface rien n’avait changé, le Liam que tous connaissaient n’avait pas changé. Lorsque l’on nécessitait mon aide ou mon attention je faisais immanquablement preuve de spontanéité et de générosité, car malgré tout je n’oubliais pas mon rôle ici. Depuis que je vivais dans cette communauté je m’étais montré attentif et conciliant, ceci n’allait pas changer. Je ne posais pas de questions et faisais ce que l’on me demandait, demeurait en retrait lorsque l’on ne me demandait rien. Voilà tout. Seul cet incorruptible sourire qui ne me quittait pas trahissait un léger changement dans ma vie, dont personne ne connaissait la cause mis appart Samuel. Ceci dit, tout n’était pas simple et joyeux comme j’aimais à le croire. Lorsque nos regards se croisaient, lorsque tous ces gens étaient près de nous et que je sentais leurs regards se poser sur moi, me charcuter, un éclair de tristesse passait entre nous. Une tristesse dû à ce besoin de discrétion qui m’empêchait d’aller furtivement lui caresser la joue alors que je le croisais chaque jour. J’aurais aimé pouvoir comme chaque couple digne de ce nom me diriger vers l’être aimé, lui adressé un tendre sourire ou un bref baiser avant de m’en retourner à mes occupations mais tout cela nous était interdit et fort heureusement, aucun de nous deux ne commettait de faux pas. Très visiblement Samuel avait saisit l’importance de notre secret et j’étais parfois étonné de remarquer à quel point il jouait merveilleusement bien le jeu : son masque était impeccable, indéchiffrable. Je parvenais moins bien que lui à cacher mes sentiments mais personne ne me prêtait attention, ou du moins je l’espérais. Personne ne cherchait réellement à savoir ou comprendre pourquoi je souriais comme un illuminé sans raison apparente. La seule au courant était Lilly, personne pour laquelle ma confiance demeurait inébranlable et qui me donnait raison. Aucune fuite ne survint, aucun regard soupçonneux et par là j’avais la certitude qu’elle n’avait rien lâché de mes confessions. Parfois, lorsque Samuel Lilly et moi nous retrouvions dans la même pièce, elle souriait doucement en faisant l’aller-retour entre nous et je lui rendais son sourire, heureux. J’avais prévenu Samuel de mes dires et il n’était donc pas étonné. D’autre part, je faisais preuve de d’avantage encore de précautions quant à Lucy et Lucas qui commençaient certainement à se poser des questions, bien qu’ils ne les formulaient pas. Chaque soir après qu’ils soient endormis je m’éclipsais silencieusement mais ils n’étaient pas stupides, au fond ils devaient sûrement se douter de quelque chose.

J’ai froid, tellement froid dans cette espace lugubre.

Au bout de ses deux semaines durant lesquelles nous apprenions à nous connaître, nous aimer, nous rapprocher encore d’avantage, je compris que la passion de la photo manquait terriblement à Samuel, tout comme le piano aurait pu me manquer. Il m’avait montré son appareil, rescapé de la guerre et lorsqu’il m’avoua ne plus posséder de pellicules vierges, une idée me vint à l’esprit. Une idée totalement stupide et folle. J’allais lui en trouver une. Plusieurs, peut-être. Parce que je savais que cela lui ferait plaisir et que ce serait le plus beau cadeau que je sois capable de lui offrir. Cette passion, cette envie quasi irrésistible, je voulais pouvoir la satisfaire, la soulager afin de contempler ce sourire magnifique sur le visage de l’homme de mes rêves. Je m’étais contenté d’hocher stupidement la tête, feignant d’être simplement désolé sans qu’aucune idée ne m’ai traversé l’esprit. Ce devait être une surprise. Une splendide surprise. Commençaient alors les difficultés, car comme il me l’avait expliqué il était presque impossible de dénicher une pellicule désormais. Moi, j’allais le faire. J’étais porté par une telle ivresse que l’illusion de ma force me brouillait totalement la vue, me faisait oublier à quel point cela serait laborieux et sans doute long. Au début je me contentai de glisser un mot ou deux aux communautaires, cherchant vainement quelqu’un en possession de ce que je recherchais avec tant de passion. Seulement, comme j’aurais dû m’y attendre, personne ici-bas n’avait ce genre de chose très certainement futile à notre survie alors que c’était le seul mot que nous avions encore à la bouche. Ma requête paraissait presque débile, comme un caprice impossible à contenter. Aussi le besoin de sortir se fit ressentir, comme une solution qui n’en était en réalité pas une mais qui au final, semblait être la seule issue possible. Si je ne trouvais pas ce que je désirais dans la communauté, je devais partir chercher au dehors, seul de préférence. Seul car je savais que si nous organisions une expédition « officielle », Samuel serait au courant et qu’alors la surprise serait altérée. De plus, je ne pouvais décemment profiter d’une sortie collective pour chercher quelque chose de purement personnel, ces expéditions ayant principalement pour but de dénicher des vivres ou des choses utiles à notre quotidien. Même si l’éventualité de partir seul ne m’enchantait pas, elle valait mieux que de profiter de la présence des autres pour mon bon plaisir. Seulement, je n’étais pas totalement sûr de pouvoir m’en aller seul et lorsque j’en parlais à Alexander, j’eus beaucoup de chance de le trouver trop fatigué pour me le refuser ou me poser des questions. Il semblait perdu si loin dans ses propres réflexions que je n’étais même pas sûr qu’il ai réellement entendu mes propos.

Lorsque les gardes situés à l’entrée de la Communauté me virent, ils eurent d’abord un mouvement de recul et le refus fut catégorique : Je ne sortirai pas seul, à fortiori sans arme et sans motif valable. Je dû discuter longtemps afin de leur expliquer que je possédais l’autorisation du leader et qu’à partir de là, ils ne pouvaient s’opposer à me laisser partir même si au fond je savais qu’ils s’inquiétaient surtout pour moi. De mon côté, je craignais également de faire de mauvaises rencontres mais étais bien décidé à sortir, envers et contre tout. Finalement, l’un deux hocha presque imperceptiblement la tête et l’autre s’écarta, me laissant libre la voie qui me mènerait sans que je le sache droit en Enfer. Je les ai remercié d’un signe de tête avant de m’éloigner et, dans un éclair de lucidité, me retourner et leur dire que si jamais je n’étais pas de retour dans quatre heures, il y avait un problème. Leurs mines s’étaient aussitôt assombries mais je n’allais pas abandonner maintenant, aussi m’étais-je remis en route vers une destination inconnue. Je n’avais alors aucune idée de l’endroit où pouvaient se trouver des pellicules vierges, un ancien magasin de photographie sans doute mais je n’en connaissais aucun à proximité. Lorsque je fus sous la pâle lumière du soleil, je fus impressionné de sentir sa chaleur sur ma peau tant cela faisait longtemps que je n’étais pas remonté des sous terrains. Je ne saurais pas dire si elle m’était agréable ou non, mais elle était et cela suffisait. J’avais longtemps hésité quant au chemin à suivre, et finalement m’étais rapidement éloigné en songeant que demeurer ainsi en un point fixe se révélait extrêmement dangereux. Je devais faire preuve d’une prudence sans tâche si je voulais revenir vivant. Et j’avais marché, longtemps, jusqu’à me retrouvé dans des rues qui m’étaient à peu près familières. A chaque pas je jetais un coup d’œil par-dessus mon épaule, ne m’éloignais pas des murs et sentais chacun de mes sens en éveil, prêt à m’alerter à la moindre chose suspecte. Plus je m’éloignais de la Communauté et plus la peur de ne jamais revoir Samuel et les jumeaux m’empoignait, mais je ne ralentissais pas. Tout allait bien se passer. J’allais rentrer avec cette pellicule et l’offrir à Samuel. Tout allait très bien se passer.

Je n’avais croisé personne, comme je l’avais espéré. Tout était beaucoup plus simple à partir du moment où l’on était totalement seul et donc éloigné des conflits. Si jamais un Hors-la-loi passait pas là j’étais mort, et à cette pensée j’avais accéléré encore d’avantage mes pas. Autour de moi défilaient les ruines de notre vie, les bâtiments défoncés qui vomissaient leurs débits auxquels j’essayais de ne pas penser. Je tentais de me remémorer les choses comme elles l’étaient avant les bombardements, de repérer une boutique dans laquelle j’aurais trouvé ces satanées pellicules et rentrer le plus rapidement chez moi. Seulement cette tâche n’était pas aisée et je m’éloignais toujours plus du point de retour. Parfois, je rentrais dans certaines boutiques mieux conservées que d’autres et cherchais des yeux quelque chose d’utile à ramener ; quitte à sortir autant que cela serve à quelque chose. Mais la plupart du temps je ressortais bredouille et poursuivais mes recherches, en silence, arpentant ces longues rues désertes et incroyablement silencieuses. Et puis, il y eut ce magasin. La façade était ternie, le vernis craquelé et brûlé par endroit, les murs quasiment entièrement détruit si bien que la porte qui ne tenait plus que sur un gond ne servait à rien. Ce magasin attirait immédiatement mon attention car je le connaissais. C’était une bijouterie, autrefois. Le bar dans lequel je travaillais il y a bien longtemps en était proche, si bien que je passais chaque jour devant en jetant un bref coup d’œil. Je me rendis alors compte de la distance parcourue, et compris que j’étais allé beaucoup plus loin que prévu. Il me faudrait au moins une bonne heure pour rentrer. Sur le moment je n’y avais pas prêté attention et sans attendre, étais entré par une des ouvertures de ces murs éventrés. A l’intérieur tout était tombé, recouvert de poussière et de gravas, si bien que rien n’était reconnaissable. Le sol était jonché d’éclats de verre coupants, d’anciens présentoirs au plastique fondu et de papiers en tout genre. La vue de ce désastre me donna envie de pleurer, sans que je sache réellement pourquoi. Après tout j’avais déjà vu tellement d’horreur qu’une de plus ou une de moins, mais cette boutique qui était jadis si belle me brisait le cœur. Du pied j’avais poussé quelques déchets, avançant avec précaution au travers de la pièce, fouillant du regard la pièce réduite à néant. Je m’étais alors accroupis pour observer quelques vieilles chaînes en or noircies par les flammes, les caressant du bout des doigts. Je ne savais pas réellement pourquoi mais j’étais sincèrement ému. Peut-être parce qu’un jour ces bijoux auraient dû être portés, auraient dû appartenir à quelqu’un et les voir ainsi abandonné me faisait mal au cœur. Une sensibilité à fleur de peau, oui. J’avais fouillé encore quelques minutes cette caverne d’Ali Baba avant de tomber sur quelque chose d’incroyable. Quelque chose dont mes yeux n’avait plus pu se détacher. Quelque chose de magnifique.

Il s’agissait d’une bague. Cet endroit devait jadis être à présentoir, car plusieurs du même genre étaient éparpillées autour. Mais ce fut celle là qui retint mon attention, de part sa beauté. Elle était très simple, fine et brillante, sans doute en or blanc. Cette bague ressemblait fortement à une alliance, en y réfléchissant. Seulement elle était tellement sobre, classique et à la fois sublime que presque sans y réfléchir je l’avais prise pour la regarder de plus près. Une fois nettoyée de sa poussière, elle paraissait encore d’avantage lumineuse, et cette lumière, ce doux éclat brillant avec sobriété dans le noir me fit immédiatement penser à Samuel. Elle lui aurait si bien allée… Seulement je me voyais difficilement lui offrir une bague, à fortiori de fiançailles. Que représentait un tel bijou ? L’attachement, l’appartenance, l’affection. Il était vrai que malgré la fraîcheur de notre relation, j’aurais aimé passer le reste de ma vie avec lui car mon amour à son égard me paraissait inébranlable. Mais une bague, c’était sans doute un peu exagéré. J’aurais mal accepté une moquerie ou un refus de sa part si jamais je lui avais offert, cela m’aurait fait souffrir bien qu’il me soit possible de le comprendre. Nous nous connaissions trop peu pour vouloir nous lier ainsi, même si ce n’était qu’un symbole. Ceci dit, notre histoire se révélait si intense, si pure et en même temps si forte. Son amour m’apparaissait tout aussi puissant que le mien alors, peut-être que ce présent lui aurait fait plaisir. Peut-être. J’avais passé la bague à mon doigt, me demandant si elle aurait pu lui aller. Elle se révélait un peu trop grande pour moi, mais pour Samuel cela me semblait bien. Je possédais des doigts plus fins que la plupart des hommes, et bien que je n’ai jamais réellement prêté attention à ceux de Samuel je supposais que c’était à peu près ça. J’aurais eu l’air malin si jamais il n’arrivait pas à la passer ou si elle était beaucoup trop grande. Observant longuement ma main, j’avais pensé à Natacha. Je me souvenais parfaitement du jour où je lui avais offert sa bague. Elle était tout aussi lumineuse. Etrangement, je n’avais pas souffert à ce souvenir. Mon passé avec Natacha avait beau me hanter, petit à petit je commençais à me dire qu’il fallait que je tourne cette page pour en écrire une nouvelle avec Samuel. J’éprouvais de nouveau cet amour sincère et authentique et ne voulais pas le gâcher alors oui, peut-être que mon deuil approchait de sa fin.

J’étais totalement perdu dans mes pensées, les yeux braqués sur le doigt où trônait cette fine ligne d’or lorsque j’entendis du bruit derrière moi. Mon premier réflexe fut de me retourner brutalement, faisant ainsi face à un homme, ou ce qui devait en être autrefois un. Il se tenait dans un coin opposé de la pièce, ses yeux brillant comme deux billes noires au milieu d’un visage sale à vous en faire pâlir. Ses cheveux et sa barbe hirsutes lui donnaient l’aspect d’un homme préhistorique et ses doigts crispés sur un restant de brique épaisse faisaient de lui un danger menaçant. Mes yeux s’étaient écarquillés d’horreur, et comme pour me protéger j’avais immédiatement mis mes mains en avant, vers lui, comme si cela l’aurait empêché de me charger. Ce sauvage semblait tout aussi effrayé que moi, n’ayant certainement pas eu de contact avec l’Homme depuis la guerre, ou alors de très mauvais. Ses vêtements déchirés me laissaient entrevoir de nombreux hématomes et griffures. Il s’était passé quelques secondes de silence qui m’avaient paru interminables, l’un et l’autre se dévisageant avec appréhension. Finalement, j’avais réussit à reprendre suffisamment de contenance pour lui murmurer un « je ne vous ferai pas de mal ». La terreur m’empoignait suffisamment fort pour faire trembler mes mains, et visiblement cette tentative afin de rassurer l’homme qui me faisait face ne fut pas convaincante. Avant d’avoir pu faire quoi que ce soit, il s’était jeté sur moi, comme une furie, ses yeux s’élargissant tels de profonds et sombres trous menant tout droit vers le néant. Le néant. Je me souvins avoir reçu un coup à la tête sans pouvoir me protéger. Et ensuite le néant.

Le néant est plus reposant que cette souffrance atroce.

Des picotements dans les membres. Les doigts, que j’avais fébrilement tenté de faire bouger. Des picotements de plus en plus douloureux, comme des morsures. Des morsures. Mes yeux s’étaient ouverts d’un seul coup, comme un mort vivant. J’avais alors horriblement mal au crâne, et sentant quelque chose d’épais et de chaux couler le long de ma tempe. Mais cela ne m’importait pas. Cela n’avait absolument aucune importance car mes doigts semblaient alors se faire transpercés par des centaines de fines aiguilles qui me charcutaient, me déchiraient. Et lorsque j’avais enfin osé regarder mes doigts, l’horreur se fit encore plus vive, encore plus transcendante jusqu’au point d’en hurler d’effrois : des rats. Des rats étaient entrain de manger mes chaires, les déchiqueter avec leurs longues et brillantes dents. Mes hurlements les avaient au moins fait fuir, mais la douleur était si tenace que je ressentais toujours leurs crocs vénéneux en moi. Portant comme par réflexe ma main à la bouche, j’avais fébrilement sucé et mes plaies en pensant que cela atténuerait la souffrance, sentant le goût métallique du sang sous ma langue. Ma tête me tournait tellement que j’en avais de violents vertiges, seulement lorsque j’avais posé mes mains au sol afin de me retenir dans un bête instinct animal, des morceaux de verre s’incrustèrent dans ma peau et la douleur redoubla d’intensité. Je demeurais ainsi, la tête baissée, yeux fermés à me demander comment j’avais fini dans cet état là. Seulement mes pensées s’arrêtaient toujours avant leur chute finale car je ne parvenais pas à suivre de schéma de réflexion ordonné et clair. Dans mon esprit tout était sur pause, à partir du moment où je me retrouvais nez à nez avec un homme qui à défaut de me vouloir réellement du mal, avait suffisamment peur de moi pour vouloir se défendre à tort. J’avais pris un coup, oui, mais je ne me souvenais plus pourquoi ni comment. Tout ce que je savais c’était que j’avais terriblement mal et que j’étais à deux doigts de vomir tant je ressentais cette impression vertigineuse de vide autour de moi. Et puis les rats ? Sur le moment cette image me paraissait tellement absurde, tellement improbable que je préférai tout bonnement la rayer de mon esprit. Les rats ne s’attaquent pas aux hommes, pas comme ça. Dans ma tête rien n’avait plus de sens, si ce n’est ce besoin irrépressible de m’en aller.

J’avais dû rester dans les pommes un laps de temps relativement court, assez court pour que la lumière extérieure n’ai pas changé et qu’ainsi je ne sois pas paniqué à l’idée que quelque part, l’on puisse me chercher. Lorsque je m’étais péniblement relevé, ôtant comme je le pouvais les éclats de verre et essuyant mes mains tremblantes sur mes vêtements, la bague était toujours là. Elle s’était revêtis d’une couleur pourpre qui me donnait la nausée mais au moins, je ne l’avais pas perdue. Mes idées n’étaient plus vraiment en place mais quelque part j’avais le souvenir d’avoir voulu ramener ce bijou avec moi, aussi ne l’avais-je pas retiré. J’avais titubé longtemps avant d’enfin trouver la sortie et reprendre, je l’espérais, le chemin de la Communauté. L’air frais me fit un peu de bien et je pu réfléchir avec plus d’aisance. Je savais que j’étais dans un sale état et que j’allais très certainement me faire tuer en rentrant mais j’étais beaucoup trop choqué pour m’en soucier. Je venais de me faire attaquer, certes sans trop de dégâts mais quand même assez pour me flanquer une bonne trouille. Je m’étais stupidement mis à courir, manquant de tomber à chaque pas, dans l’espoir de rentrer plus vite là où j’étais en sécurité et où rien ne m’arriverait, mais je ressentais un tel mal à m’orienter que cela fut encore plus long que l’allée. Je me perdais, me tordais les chevilles ou ressentais soudainement l’envie de vomir qui m’obligeait à m’arrêter quelques instants. Mes points de côtés ne m’aidaient pas beaucoup. Au bout de quelques minutes, je me mis à pleurer comme un enfant, perturbé, altéré, totalement désorienté et de plus en plus affolé. Tout autour de moi j’avais l’impression que de sombres silhouettes allaient m’attaquer, entendais des millions de bruits menaçants alors qu’au final, ce n’étaient que mes pas qui résonnaient avec fracas sur le pavé détraqué. Je sanglotais si fort que n’importe qui aurait facilement me repérer mais je n’y songeais même pas, perdu dans mes tourments et ma douleur lancinante qui ne cessait de s’accroître. Ce manège infernal ne s’arrêta que lorsque je franchis les derniers mètres me séparant de mon seul foyer, ayant au final trouvé ce repère sans embûches. Lorsque les hommes me virent, ils eurent d’abord une mine horrifiée avant de m’harceler de questions auxquelles je n’avais pas le temps de répondre. Mes larmes, purs produits de crainte, s’étaient taries, mais le sang séché sur ma peau et mes vêtements devait donner matière à réflexion. Je ne marchais pas tout à fait droit non plus, mais dans l’ensemble je n’étais pas non plus à l’aube de la mort : pas encore. J’avais pris un coup et après l’affolement, la détresse et l’angoisse, je commençais à reprendre tout à fait mes esprits.

Après avoir brièvement rassuré les gardes puis les personnes que je croisais, je m’étais directement dirigé vers l’infirmerie. Un affreux mal de tête menaçait de me faire exploser si je ne trouvais pas très rapidement soulagement, de plus je supposais que Mathilda me tuerait de ses propres mains si jamais elle savait que j’avais pris un coup à la tête et omettait de venir la consulter. Plus les minutes à l’abri passaient, et mieux j’allais. Je ne comprenais plus pourquoi mes doigts étaient en sang, mettant cela sur le compte du verre et des autres débris tranchants. J’avais complètement occulté l’épisode des rats, le choc psychologique étant trop fort. Tout en marchant, je priai pour ne pas rencontrer Samuel qui aurait certainement fait une crise cardiaque en me voyant dans un tel état, à tort. Heureusement, ou non d’ailleurs, j’étais arrivé jusqu’à Mathilda sans voir de personnes qui m’étaient proches. Seulement quelques visages à peu près familiers. Et là commença la véritable torture. Si Mathilda ne se montrait pas très agréable à l’ordinaire, je crois que je l’avais rarement vu aussi furieuse qu’au moment où je lui expliquais pourquoi j’étais dans un tel état. Par de tranchantes répliques elle me démontra ma stupidité, mon manque de prudence et par-dessus tout de jugeote, avant d’enfin concéder à m’ausculter. Elle me posa des tonnes de questions auxquelles je ne trouvais pas de réponses, bafouillais, mélangeais les mots et au final, son regard devint beaucoup plus attentif et soupçonneux. Ses doigts se posèrent alors sur mon front et bien que je ne sache pas réellement ce qu’elle cherchait, je devinais au bout de quelques minutes que son constat serait négatif. Elle ne laissait bien évidemment rien paraître mais plus son regard devenait froid, plus sa concentration semblait vive, plus mon visage se décomposait. Qu’est-ce que j’avais ? Pourquoi ne disait-elle rien ? Pourquoi ne disait-elle rien bon sang ? J’étais à deux doigts d’exploser lorsqu’elle se recula un peu, m’observant avec ce même air étrangement indéchiffrable. Je détestais cela. J’aurais voulu me lever et la secouer jusqu’à ce qu’elle me dise ce qu’elle pensait car plus ça allait, et plus une peur insidieuse montait en moi. On m’avait frappé et j’avais peut-être quelque chose qui n’allait pas, seulement pour le savoir, j’allais encore attendre longtemps…

« Quelle est la date de naissance des jumeaux ? »
Ou pas.
« Quoi ? »
« La date de naissance des jumeaux, Liam ? »

Je demeurais abasourdis, la regardant avec un air de poisson rouge alors qu’elle, était parfaitement sérieuse. En apparences cette question se montrait tout à fait banale, les jumeaux vivaient avec moi depuis deux ans déjà et j’aurais dû connaître leur date de naissance comme la mienne. En réalité je la connaissais aussi bien que la mienne sauf que, sur le coup, rien ne me vint. C’était comme si l’évidence me bloquait, comme si quelque chose me freinait et m’empêchait de répondre. Face à mon trouble, Mathilda me sourit doucement et enfila une paire de gants en plastique blanc, affectant de regarder de nouveau ma blessure. Pour ma part, c’était le vide total. Je ne parvenais pas à me rendre compte de ce qui se passait, à réaliser l’ampleur des dégâts. Etais-je réellement entrain de perdre la mémoire ? Non, ce n’était pas possible. Je me souvenais parfaitement des jumeaux, de Samuel, de mon prénom, de mon histoire. Je me souvenais de tout mais cette question là m’échappait. Combien d’autres encore allaient m’échapper ? Ce coup se révélerait-il beaucoup plus grave que je ne l’imaginais ? Je n’en revenais pas. Comme pour me soulager, Mathilda prit la parole et m’expliqua sur un ton plus que médical que ce n’était pas grave, qu’il était tout à fait possible que le choc m’ait tellement sonné que ma mémoire en soit temporairement altérée. Il paraîtrait que c’était courant, mais moi je n’y croyais pas. Je sentais que quelque chose de tragique allait se passer, bien au-delà de mon entendement, bien au-delà de mon imagination. Sauf que je n’aurais jamais songé à l’horreur qui allait me prendre en otage. Mathilda s’était alors emparée de désinfectant et avait nettoyé la plaie, avant de poser les yeux sur mes mains et de me demander avec une froideur propre à la colère comment j’avais bien pu me faire ça. La simple réponse « je suis tombé » n’avait alors pas semblé lui apporter beaucoup de satisfaction mais elle s’en était également occupée, retirant les quelques éclats de verre qui demeuraient dans mes chaires et pendant mes doigts, là où des traces ressemblant fortement à des morsures subsistaient. Une fois nettoyés du sang qui les tâchaient, mes doigts furent soigneusement embaumés dans de longs bandages blancs qui me gênaient. Pour cela, la bague de Samuel m’avait été retiré, et un étrange vide s’était emparé de moi. Mathilda l’avait posé un peu plus loin, n’y prêtant pas vraiment attention, avant de me dire qu’elle allait la désinfecter également. Il y eut alors un long moment de silence durant lequel je n’avais pas osé affronter le regard de Mathilda. J’étais perdu. J’avais peur.

« Tu vas rester ici quelques jours afin de te reposer. Même si ce n’est pas très grave, je tiens à garder un œil sur toi. Je vais faire en sorte que quelqu’un s’occupe de Lucy et Lucas pendant ce temps, ne t’en fais pas. »

Je n’avais pas répondu. Peut-être parce que tout dans son ton me disait de ne pas objecter, peut-être parce que j’étais trop démoralisé pour oser lui opposer résistance. Ce n’était pas grave…Seulement quelques jours… J’avais toujours mal un peu partout mais n’y réfléchissait plus. Je ne réfléchissais plus à rien, incapable de remettre de l’ordre dans mes pensées. Et puis, finalement…

« Juin 2002. Ils sont nés le 12 juin 2002. Pour leur dernier anniversaire, nous avons tous chanté dans la salle à manger. C’était le 12 juin. »

Elle avait lentement hoché la tête avant de me demander à qui je voulais laisser mes enfants. A qui je voulais laisser Lucy et Lucas ? A personne ! Je ne voulais pas les abandonner, je ne voulais pas être séparés d’eux, ne serait-ce que quelques jours. Seulement mes objections n’eurent absolument aucun effet sur Mathilda, qui m’interdisait arbitrairement de sortir de l’infirmerie. Il fallait que je me repose, mais je ne le voulais pas. J’allais très bien, très très bien !

« Ne fais pas l’idiot Liam. Je n’ai pas assez de matériel pour te faire des scanners mais je sais que quelque chose cloche et il vaut mieux que je sois là au cas où il y aurait un problème. Peut-être qu’il n’y en aura pas, peut-être que ce n’est rien mais en attendant de voir tu restes ici. Alors tu vas retourner sur ce lit, t’y coucher, et attendre que ça aille mieux ou je t’y collerai de force. Compris ? »

Son ton menaçant eut l’effet d’une douche froide me faisant soudainement perdre tous mes moyens. J’étais réduis à demeurer ici que cela me plaise ou non, c’était aussi limpide que de l’eau de roche. Mathilda me faisait face, se postant à l’entrée de l’infirmerie comme Cerbère devant la porte des Enfers et moi, moi je n’avais plus la force de lui répondre tant mon sang semblait bouillir dans mes veines, tant mon crâne paraissait proche de l’explosion. J’avais finis par abdiquer et lui demander d’une voix faible d’aller demander à Samuel s’il acceptait de garder mes enfants le temps de quelques jours. Si elle ne brocha pas, j’étais néanmoins certain que ce choix paraîtrait louche. En apparences Samuel et moi n’étions pas spécialement proches, ou en tout cas moins que je n’aurais pu l’être avec Lilly qui était la personne gardant le plus souvent les jumeaux, seulement il était hors de question que ce soit quelqu’un d’autre que Sam qui les garde. Non seulement j’avais la certitude de pouvoir entièrement lui faire confiance, mais en plus je savais qu’il s’en occuperait tout aussi bien que ce qu’il s’occupait de moi, car il éprouvait visiblement beaucoup d’affection à leur égard également. Lilly était également une personne en qui j’avais confiance mais son rôle dans ma vie n’était bien évidemment le même que celui de Samuel et je me voyais difficilement lui faire porter un si lourd fardeau pendant des jours entiers. Le lien qui nous unissait Samuel et moi me laissait croire que lui accepterait sans problèmes. Demandant à Mathilda si je pouvais au moins aller embrasser mes enfants avant de les laisser à quelqu’un d’autre, elle fut catégoriquement contre et me donna seulement la permission d’aller chercher quelques vêtements de rechange. Elle m’avait alors promis de les faire venir me voir par la suite et je l’avais cru, obéissant à ses directives. Ce fut à partir du moment où je retournais à l’infirmerie, les bras chargés de vêtements propres, que commença mon long séjour. Comme prévu Samuel avait accepté et bien que je ne sache pas exactement ce qu’il avait dit, je supposais qu’il avait parfaitement su garder son masque. Mathilda m’avait installé dans un des lits avant de m’examiner de nouveau et changer mes pansements aux mains. Elle n’avait pas vraiment l’air rassurée, mais ses gestes demeuraient précis et sûrs. Mon mal de tête ne passait pas malgré les nombreux cachets d’aspirine que Mathilda me donnait. J’aurais alors aimé lui demander de la morphine, ou n’importe quoi d’autre d’assez fort, mais au fond cela aurait signifié que j’étais réellement malade et je refusais de m’y résigner.

Nous arrivons vers la fin de l’histoire, la fin de ma vie. Je suis resté à la l’infirmerie toute cette première journée en me demandant comment allaient se passer les jours suivants car malgré le silence de Mathilda, j’étais conscient que la suite des événements révéleraient ou non une anomalie. Je m’étais allongé sur le lit désigné sans conviction, attendant les yeux rivés au plafond que quelque chose ne se passe, sans que rien ne vint. De temps en temps Mathilda me reposait des questions dont les réponses m’étaient plus ou moins familières, venait inspecter mon état ou s’asseyait à son bureau et remplissait des papiers. Je ne savais pas trop ce qu’elle trafiquait mais cette première après-midi fut calme. Lorsque des personnes entraient, Mathilda s’en chargeait sous mes yeux puis les laissait repartir, puisque ce n’était rien de grave. Il n’y avait que moi qui me retrouvais coincé là. Finalement, Samuel était passé me voir avec les jumeaux en début de soirée, certainement un peu avant le premier service. Je fus soulagé de ne pas retrouver mes enfants en pleurs ou terrorisés à l’idée de vivre quelques temps avec quelqu’un qui leur était presque totalement inconnu. Même s’ils semblaient tristes et troublés, je savais que cela passerait car la situation n’était pas dramatique : Je m’étais cogné (version pour les jumeaux) et je devais me faire soigner. Banale comme histoire, ça pouvait arriver à n’importe qui. Samuel n’eut aucun geste tendre à mon égard et je n’en eus pas plus, le remerciant simplement comme un ami de prendre soin de mes enfants. Devant Mathilda et les jumeaux nous étions plus que jamais éloignés mais cela était nécessaire, aussi n’eus-je pas mal au cœur en les voyant repartir sans un regard de la part de mon Amour. C’était beaucoup mieux ainsi, d’un choix commun nous avions décidé de garder jalousement notre bonheur secret et nous devions nous y tenir. Après cela Mathilda était allée chercher mon repas et j’avais mangé seul avec elle, en silence, attendant que le temps passe. Mathilda n’était pas beaucoup plus bavarde que moi, aussi cette absence de mots ne me paraissait elle pas inconfortable. Mon mal de tête passait peu à peu, il m’était cependant peu aisé de manger les doigts bandés mais cela ne faisait rien, je n’avais pas très faim ce soir là.

Les autres non plus. Le deuxième jour à l’infirmerie se déroula comme le troisième, comme le quatrième. Ils s’étiraient à l’infinie, rythmés par les allées et venues des malades qui remplissaient, l’espace de quelques minutes, la pièce habituellement figée dans son silence. Seul l’ennui m’accompagnait continuellement. Mathilda prenait de plus en plus garde à mes réponses, à mes réactions et mes douleurs. En fait, elle me demandait de plus en plus de choses, de plus en plus précises, et cela me faisait un peu peur car je ne savais jamais quoi répondre. Je ne savais pas quelle était la seule bonne formule à donner pour qu’elle me laisse m’en aller. En tout cas, rien ne se passait. Il n’y arriva rien de notable pendant ces jours. Parfois l’on venait me rendre visite et coupait ainsi mon calvaire baigné d’ennui mais cela se révélait si rare qu’au final, je passais mon temps à compter les moutons. Si les jumeaux venaient me voir chaque jour, Samuel moins. Je ne savais pas s’il avait peur de réveiller les soupçons mais il semblait espacer ses visites le plus possible. Au bout du troisième jour Mathilda jugea qu’il ne m’était plus nécessaire de porter des bandages aux doigts et je pu de nouveau porter l’alliance que je destinais à Samuel, espérant fortement qu’il viendrait le lendemain. Mais il ne vint pas. Et après… Tout dérapa. Ne me demandez pas pourquoi, mais d’un coup tout sembla s’obscurcir alors qu’enfin, je voyais la lumière au bout du tunnel. Visiblement le choc à la tête n’avait pas provoqué de lésions ni d’amnésie, puisque cette dernière avait seulement été passagère. Mes maux de tête avaient finit par disparaître et quant à mes mains, elles cicatrisaient normalement. Tout aurait alors pu prédire que je m’en irai et que cette histoire n’aurait aucune incidence sur ma vie. Si seulement cela s’était révélé vrai. Si seulement j’avais pu simplement guérir et reprendre ma vie là où je l’avais laissé. Rien ne se passa malheureusement comme prévu. Absolument rien.

Je n’en peux plus.

J’avais perdu l’appétit. Ou plutôt : je ne parvenais pas à manger sans rejeter tout ce que j’avalais. Tout commença à partir de ces vomissements à répétition qui m’épuisèrent rapidement. Le pire c’est qu’ils n’avaient pas de causes visibles, Mathilda ne semblait pas comprendre. Un soir, alors que nous étions seuls, j’avais rejeté tout mon dîner et depuis plus rien ne passait, même l’eau me barbouillait et me donnait d’horribles crampes d’estomac. On aurait alors pu croire que j’étais simplement malade, j’avais peut-être attrapé quelque chose dehors et le fait que je sois à l’infirmerie au moment où ça se déclara n’était qu’une coïncidence, seulement rien n’accompagnait ces vomissements. Ce n’était pas une gastrœntérite, pas une grippe, rien, rien du tout. J’allais mal et c’était là tout ce que l’on savait. Mis appart moi, personne ne présentait de tels symptômes et l’hypothèse de la nourriture avariée fut très vite mise de côté, laissant imaginer quelques problèmes invisibles à l’œil nu. Je ne présentais pendant quelques jours aucun autre symptôme susceptible d’éclairer Mathilda. La privation de nourriture eut un effet désastreux sur ma santé : Je devenais faible, constamment fatigué, perdais beaucoup de poids. Dire que je n’étais déjà pas bien épais au début, au bout de quelques jours on pouvait sentir mes os par endroits. Et puis, rien ne s’arrangea, bien sûr. Avoir des nausées sans raison peut paraître étrange mais ce n’est pas réellement grave si rien n’arrive après, sauf que dans mon cas, ce n’était que le commencement d’une longue procession. Mes maux de tête revinrent au pas de course, de plus en plus longs et de moins en moins supportables. Il m’arrivait de pleurer de douleur, mes doigts se crispants sur les draps. C’est à partir de là que Mathilda comprit que quelque chose de grave se profilait, et décida de m’isoler. Au départ je ne compris pas pourquoi mais j’étais tellement faible que je n’avais pas la force de demander. Même lorsque l’on venait me voir mon état ne s’améliorait pas alors, à la limite, je préférais que personne ne constate pour état. Je devais très certainement fait peur, à vomir mes tripes et gémir de douleur. Mathilda me donnait des cachets, essayait de me soigner mais ne savait clairement pas ce que j’avais puisque rien ne fonctionnait, rien ne me soulageait. Alors elle m’installa dans une autre pièce, à l’abris des regards mais surtout là où je pourrais d’avantage me reposer. Cette pièce était en réalité la réserve de l’infirmerie, dans laquelle Mathilda avait installé un lit d’à point. Il était un peu moins confortable que les autres, mais au moins je n’avais plus à subir le bruit des autres patients. La réserve n’était pas très grande, juste assez pour contenir quelques armoires, une chaise et mon lit. Bien loin d’être plus à l’aise, j’avais l’impression d’étouffer dans cet espace confiné.

Plus personne n’eut accès à cette « chambre » mis appart Mathilda qui passait le plus clair de son temps avec moi. Ses yeux bleu acier me surveillaient avec cet air concentré, réfléchissant visiblement à toute vitesse. Lorsque je lui demandais ce que j’avais, si c’était lié avec le coup que j’avais reçu, nulle réponse ne m’était offerte. En réalité elle ne répondit plus, à aucune de mes questions. Pourquoi me mettre en quarantaine ? Ce n’était très certainement pas pour me reposer, contrairement à ce qu’elle pouvait affirmer, puisque cette pièce dans laquelle je me trouvais sentait le désinfectant à plein nez et était aussi grande qu’une cage d’hamster. Ce n’était peut-être pas lié à cela mais je me sentais de plus en plus mal, dormais de plus en plus longtemps pour finir par perdre toute notion du temps. Etait-ce la nuit ? Etait-ce le jour ? Depuis combien de temps n’avais-je rien mangé ? Je buvais très peu également. Mathilda tentait de me nourrir par intraveineuse mais je ne reprenais pas pour autant des forces. J’avais l’impression de lentement m’enfoncer dans des sables mouvants qui m’entraîneraient tôt ou tard vers le fin fond du monde. Samuel me manquait, les jumeaux me manquaient. Mais seule Mathilda entrait, seule elle posait ses mains sur moi afin de prendre mon pouls et autre. Seule elle s’occupait de moi sans pour autant soulager mes souffrances. Je ne sais plus exactement quand tout s’accéléra réellement. Au bout d’une semaine peut-être, je fus pris d’une forte fièvre qui amplifia mes douleurs multiples. J’avais l’impression de crever de froid alors que j’étais brûlant, frissonnant malgré les nombreuses couvertures dont me recouvrait une Mathilda de plus en plus fébrile et susceptible. Je ne prêtais même plus attention à ce qu’elle me faisait ou me donnait, ne parvenant plus réellement à suivre le monde qui m’entourait. C’était comme si d’un coup je me retrouvais enfermé dans une bulle, cette bulle qui éloigne les autres et nous laisse totalement seul, vide, perdu. Cette bulle portait un nom : La maladie. Sauf que personne ne semblait savoir exactement ce dont je souffrais, et c’était cela le plus terrible. Le temps passait et mon état se dégradait, encore, toujours. Jusqu’au moment où j’eus des crises de toux frénétiques et incontrôlables. Jusqu’au moment où même respirer devint douloureux et fatigant, tellement usant qu’au final, j’eus carrément des pertes de conscience. Vous savez cette chose qui ressemble au sommeil mais qui n’en est pas parce que quand vous vous réveillez, vous avez l’impression d’être tombé du vingtième étage d’un de ces grattes ciel stupides. C’était presque la phase finale de ma déperdition : Je « m’endormais » n’importe quand pour me réveiller cinq minutes, 5 heures plus tard. Je n’avais jamais aucune idée du temps passé dans cet état d’inconscience indésirée, et passais mon temps à me poser cette éternelle question : Quelle heure était-il ?

« 18h37. Il semble que tu te sois endormis à 14h55, ce qui nous fait un décalage de 5 heures et 04 minutes. »

Mathilda notait tout cela sur des feuilles et des feuilles auxquelles je n’avais pas le droit de jeter de coup d’œil. Elle notait toute l’évolution de mon mal, dans l’espoir que peut-être elle trouverait ce qui me tiraillait, mais rien ne marchait. Aucun de ses sirops, de ses médicaments, de ses piqûres n’eurent d’effets sur moi. Malheureusement, cette absence de réponse la forçait à passer d’avantage de temps encore à mes côtés, si bien qu’au final il y eut peu d’instants durant lesquels je me retrouvais parfaitement seul. Bien sûr, lorsque quelqu’un entrait s’en occupait-elle, mais elle me revenait aussi vite qu’elle ne m’avait quitté. Au final cela me permettait de me sentir un peu moins perdu, un peu moins abandonné. Lorsque la nuit venait, cette nuit que j’appréhendais tant, Mathilda finissait par me quitter et me souhaiter une bonne nuit, ce qui bien sûr se révélait impossible. Voilà où nous en sommes. Voilà l’échéance du cycle de la vie qui ne reprendra jamais plus pour moi. Cela faisait à présent deux semaines complètes durant lesquelles j’étais resté à l’infirmerie, devenait petit à petit un cadavre sur un lit inconfortable. Oui, je ressemblais à présent à un cadavre. Ma peau diaphane, mes yeux d’un bleu terne et inexpressif, rougis d’avoir trop pleuré, et ces tremblements incessants, tout cela devait donner froid dans le dos. Un vrai mort-vivant. Je transpirais sous ses couvertures et pourtant ma peau était glacée, mes muscles contractés et douloureux. Je venais de me réveiller et Mathilda n’était pas là, à côté j’entendais de l’eau couler. J’avais le cœur au bord des lèvres, comme toujours. Soudainement, la porte de ma chambre de misère s’ouvrit et Mathilda entra, une bassine d’eau et un gant à la main. Lorsqu’elle vit que j’étais éveillé elle déposa le tout sur la chaise située tout près de mon lit puis attrapa son calepin pour y griffonner quelques mots après avoir regardé sa montre.

« Quelle heure est-il ? »
« 16h23. »

Ma voix était rauque tant ma gorge me faisait souffrir, décapée à force de trop vomir. Parfois je sentais le sang couler le long de mon œsophage, me donnant de nouveau la nausée mais mis appart mon cœur, je n’avais plus rien à rejeter. Mathilda lâcha son stylo pour attraper le gant et l’imbiber d’eau, avant de le frotter contre un savon et de me retirer doucement mon alliance pour me laver les mains, puis le bras. L’odeur de ce savon était putride, me retournait l’estomac mais je ne dis rien tant ma lassitude était profonde. De toute manière il ne servait plus à rien que de s’occuper ainsi de moi : J’allais mourir. C’était une certitude acquise depuis quelques temps déjà, depuis l’instant où je m’étais rendu compte qu’en dépit de tous ses efforts, Mathilda ne parviendrait jamais à me soigner car il n’y avait aucun remède. Lorsque l’on ne peut plus se défendre, la fin devient une promesse indestructible. Je fermai les yeux alors qu’elle passa son gant sur mon visage, affectant de m’ôter toute cette sueur froide comme la mort, puis toussai si fort qu’elle en recula. Je toussais jusqu’à en avoir de nouveau envie de vomir, jusqu’à être au bord de l’évanouissement tant cet effort était rude pour mon corps considérablement fragilisé. Mais elle reprit, sans un mot, sans même un regard. Comme un automate, une petite machine parfaitement étanche quant à ma souffrance. Il faisait froid. Et j’allais mourir. L’eau me paraissait brûlante, le froid de plus en plus tenace tandis qu’elle abaissait mes couvertures afin de me frotter comme un enfant. Elle retira mes vêtements, m’en passa d’autres qui puaient le désinfectent, comme si cela allait changer quelque chose. Tout avait cette odeur âcre de putréfaction. Je toussai de nouveau avant de me redresser brutalement et vomir dans le seau posé de l’autre côté de mon lit. Ca, c’étaient les carottes durement acquises le midi même. Dire que j’avais mis au moins une heure pour les avaler… Mathilda s’empara immédiatement du seau et alla le nettoyer, avant de me le rapporter et le reposer à sa place. Je tâchai laborieusement de reprendre ma respiration, fermant les yeux sous l’horreur qui me serrait la gorge. Elle acheva ma toilette et me remit la bague, sans dire mot, puis rabattit toutes les couches protectrices sur mon corps glacé d’épouvante. Mes doigts se crispèrent sur les draps lorsque Mathilda sorti de nouveau pour vider sa bassine d’eau souillée, emportant avec elle la dernière chaleur humaine qu’il me restait. J’aurais tant voulu pouvoir dire au revoir aux jumeaux, mais je savais que cela me serait fortement prohibé : Mathilda ne laissait absolument personne m’approcher. La possibilité de contagion n’était pas à éloigner tant qu’elle ne connaissait pas exactement les causes de ma souffrance. Pourtant elle, elle allait bien. Elle demeurait à mes côtés, me touchait, chaque jour mais sa santé n’en était pas altérée. Dans le doute je supposais qu’il était mieux que de m’isoler totalement. Lorsqu’elle revint je ne pu m’empêcher de tourner la tête vers elle et la dévisager. Il y avait trop de questions auxquelles elle ne répondait jamais.

« Que ferez-vous de mon cadavre ?
- Ca suffit Liam. Tu ne vas pas mourir.
- Vous allez le brûler, n’est ce pas ?
- Repose toi. »

Je toussai avant de me fixer de nouveau sur le plafond, ma vue se brouillant quelque peu, rendant flou les objets qui m’entouraient. Un fou s’amusait à cogner furieusement contre les parois de mon crâne. Je ne parvenais pas à comprendre pourquoi Mathilda se refusait ainsi à m’avouer que oui, c’en était fini de moi. Je ne comprenais pas pourquoi elle essayait toujours de trouver la solution et poursuivait ses soins comme si j’étais simplement atteint d’un rhume. J’allais crever putain, et même dans cet état fatidiquement morbide elle s’obstinait à me mentir. Si j’en avais eu la force, j’aurais éprouvé de la colère. Seulement j’étais terrassé de fatigue et ne pouvais rien faire mis appart soupirer difficilement. Mes yeux se fermèrent tous seul, mon visage se crispant sous un pique de douleur soudainement beaucoup plus intense que les autres. Elle le remarqua et s’empressa de venir prendre mon pouls, ma tension, toutes ses choses inutiles puisque de toute façon j’allais bientôt rendre l’âme. Préparez-vous à l’atterrissage, le voyage est terminé. Ses doigts me brûlaient la peau, créaient d’affreuses cloques dans mon cou, pleines de sueur, de pu, de sang. Elles allaient bientôt éclater et répandre sur ces draps trop blancs toute l’horreur de ma décomposition humaine. Ce ne fut que lorsque la porte de l’infirmerie s’ouvrit que Mathilda daigna retirer ses doigts chauffés à blanc de moi, se redressant. Elle murmura un « je reviens » avant de sortir, laissant la porte entrebâillée derrière elle. Au départ je ne prêtai pas attention à la discussion qui se déroulait dans la pièce d’à côté, m’intéressant de moins en moins aux autres malades qui eux, allaient guérir. Ce ne fut que lorsque je reconnu la voix de Samuel que mes yeux s’ouvrirent et que je tournai le plus rapidement possible – c'est-à-dire très doucement – la tête vers l’ouverture qui me rapprochait de lui Seulement je ne comprenais rien à l’échange qui paraissait agressif entre lui et Mathilda, je ne comprenais rien du tout à ce qu’il se passait. Ce ne fut que lorsque l’on se rapprocha de la porte, la refermant brutalement que j’entendis suffisamment distinctement la voix de Mathilda pour comprendre ses mots.

« Je t’interdis d’entrer. Je te l’interdis formellement ! »

Il y eut un autre échange avant que Mathilda ne réponde sur un ton cinglant.

« Il est mourant, Samuel. MOURANT. Va-t-en maintenant. »

Et dans ma tête plus rien ne subsistait mis appart le mot « mourant » enfin prononcé de la bouche d’un médecin. Alors cette fois c’était véridique, il n’y avait plus aucune lueur d’espoir, et le pire était que c’était à Samuel qu’elle le disait. A Samuel…A l’homme de ma vie… Je perdis de nouveau connaissance, m’enfonçant dans ces sables mouvants que je connaissais à présent si bien et qui me faisait presque moins peur qu’avant. Le monde s’évaporait autour de moi, formait de grosses bulles de savon qui explosaient dans les airs, ne laissant que le néant après elles. …Ne t’approches pas… Le temps et l’espace n’existaient plus, la matière ne possédait plus aucune signification. Seuls quelques sons, quelques bribes de phrases dont le sens m’échappait me parvenaient encore, inutilement. …De lui… Mes souffrances s’atténuaient pour au final disparaître tandis que je dégringolai le long de ces étages infernaux. 19ème, 18ème, 17ème Ne le… Le vide obscur à l’intérieur d’un corps à l’âme déserteuse, traîtresse ayant quitté le navire entrain de couler. Comme une coquille d’œuf vide, une chrysalide sans papillon, un Kinder Surprise sans jouet. Il n’y avait plus rien dans mon vieux corps décharné. 16ème, 15ème, 14èmeTouche pas… Il est même impossible de penser car l’intelligence elle-même n’a plus aucune raison d’être, là où rien n’existe, ni même la raison, ni même la maladie. Les monstres les plus colossaux sont parfois terrassé parce qui n’a aucune équivalence, si ce n’est cette chute interminable le long d’un immeuble haut à en donner le vertige. 13ème, 12ème, 11ème Laisse la… Alors seules les conneries d’un fou peuvent encore couvrir le bruit de ce silence assourdissant, d’un fou qui n’a plus rien à perdre puisque sa vie ne sera bientôt plus qu’un vaste souvenir, se ternissant au fil des années qui passeront. Oublier, oublier jusqu’à ignorer qu’il y eut un début et une fin. Oublier le contenu de l’histoire et en jeter les papiers au feu. 10ème, 9ème, 8ème Porte ouverte… Parce que l’histoire n’a aucune importance si personne ne daigne la lire, mieux vaut-il encore la détruire, la détruire jusqu’au dernier mot pour en écrire une nouvelle. Ne jamais avoir peur de tout écraser pour tout reconstruire. Ne jamais craindre que le nouvel essai soit encore moins réussi que le précédent car ce n’est pas possible. Réécrivez votre histoire jusqu’à ce que l’encre vous manque et les idées vous écartèlent. 7ème, 6ème, 5ème Ne fais pas l’idiot… Le temps et l’espace n’existent plus, vos pages se perdront dans l’infinité du néant pour ne jamais se terminer. Mais n’écrivez jamais vos rêves car eux s’envoleront. Les rêves sont des traîtres qui, comme l’âme, vous abandonnent à la première difficulté. 4ème, 3ème, 2ème S’il te plait… L’espoir, le bonheur, l’illusion. Rien de tout cela n’a plus d’importance car ce sont eux qui ternissent nos histoires et les rendent impossibles. Arrachez ces pages, arrachez les jusqu’à ce qu’il n’y en ai plus aucune. Rapetissez vous de vos idolâtries impossibles envers de concepts qui n’ont jamais existé et qui demeurent purs fantasmes : Personne n’est heureux. 1er étage, rez-de-chaussée.

Je suppose que vous n’avez rien compris ; n’ayez pas peur. Vous venez seulement de dévaler 20 étages à l’intérieur de vous-même. Le voyage touche à sa fin.

Lorsque je rouvris les yeux, je n’avais absolument aucune idée de la durée de mon absence. Une heure ? Une journée ? Ce n’était pas la silhouette de Mathilda qui se dessinait assise à côté de moi sur cette chaise, alors que je tournai la tête. Mathilda se serait précipitée sur son bloc note pour inscrire cet élément futile, un de plus. Non, cette silhouette ne lui appartenait pas, mais la lumière provenant de l’infirmerie qui filtrait par la porte entrouverte m’éblouissait et je ne parvenais pas à distinguer le visage du corps qui me surplombait. Seulement… Je n’avais pas besoin de voir son visage pour savoir que c’était là Samuel qui m’observait. Une larme coula sur ma joue, si chaude que ma peau s’en dissout immédiatement. La vie et la mort se trouvaient dans la même pièce. Ma Vie…et ma Mort.
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeSam 5 Fév - 16:40

-Bon appétit.

J'avais beau le répéter des dizaines et des dizaines de fois par jour, cela ne m'ennuyait pas. J'aimais adresser ces simples mots accompagnés d'un sourire aux personnes de la communauté lorsque leur tendais leur plat. J'aimais ce petit sourire que la plupart me rendant en me remerciant. Tout le monde semblait content de ma cuisine et cela me faisait énormément plaisir : C'était comme si j'avais enfin réellement trouvé ma place. Une place que je n'échangerais pour rien au monde, en particulier quand j'avais le plaisir de croiser ce magnifique regard qu'était celui de Liam. Certes, quand nous nous trouvions entourés de nos camarades, nos regard étaient furtifs, discrets et nous ne laissons rien paraître : Une simple amitié tout au plus, alors qu'en réalité, c'était bien plus qu'une amitié qui nous liait. C'était un amour incroyablement fort qui nous liait pour notre plus grand bonheur même si les choses n'étaient pas simples. J'étais cependant tellement fou de Liam que les obstacles, quels qu'ils puissent être, ne me paraissaient pas insurmontables, bien au contraire. Deux semaines avaient passées depuis que nous avions échangé nos sentiments et j'avais sans cesse l'impression que tout allait de mieux en mieux. Liam qui au départ s'était montré un peu distant et m'avait souvent repoussé ne le faisait plus du tout. C'était au contraire souvent lui qui avait un geste vers moi, une tendresse caresse, un doux baiser. Oh, n'allez pas croire que je n'étais pas du genre à faire le premier pas : J'adorais aller jusqu'à lui mais je dois être honnête et avouer que j'aimais quand c'était lui qui venait à moi. Cela signifiait qu'il commençait à m'accepter, à s'accepter, à nous accepter et que notre relation était en bonne voie. Si au départ j'avais renoncé à faire un jour complètement partie de sa vie, d'élever les jumeaux avec lui, de me montrer au grand jour avec lui, cet espoir était à présent revenu se nicher dans le creux de mon cœur pour ne plus en sortir. Je n'en disais rien à Liam mais cette flamme brûlait de nouveau en moi et elle m'aidait à faire face aux longues heures où je demeurais séparé de lui. Nos rencontres étaient trop brèves à mon goût, tout comme au sien, mais c'était tout ce que nous pouvions nous accorder à l'heure actuelle. Bien des fois, j'avais eu envie de lui effleurer la main en passant à côté lui dans le couloir mais j'avais préféré m'abstenir, ayant trop peur que la réaction qu'il aurait pu avoir ne réveille des soupçons. J'étais cependant heureux car nous partagions notre secret avec au moins une personne : Lilly.

Un soir, Liam m'avait annoncé qu'il avait fini par tout avouer à Lilly et j'en avais été très heureux. Comme il était agréable de pouvoir être moi-même vis à vis de Liam alors qu'une autre personne était dans la même pièce que nous. Comme il était agréable de pouvoir partager cet amour avec une tierce personne et le rendre à mes yeux encore plus réel. Pour combler à ce bonheur déjà intense, je me rapprochais des jumeaux et plus particulièrement de Lucy. Les enfants ne voyaient en moi qu'un simple ami de leur père mais j'étais heureux de pouvoir partager quelques moments avec eux tout en nourrissant toujours l'espoir de devenir un second père pour eux un jour. Que pouvais-je vouloir de plus? La réponse est simple : Recommencer à prendre des photos. Dès que je me retrouvais seul dans ma chambre, je ne pouvais quitter des yeux cet appareil qui n'attendait qu'une simple pellicule pour pouvoir à nouveau figer des souvenirs. Malheureusement, impossible de trouver une pellicule. Un soir, alors que Liam et moi étions entrelacés sur mon lit en train de parler de notre journée, je finis par lui parler de ce manque qui me pesait beaucoup plus que je ne l'aurais pensé. La photographie était ma plus grande passion, bien avant la cuisine, et j'avais de plus en plus besoin de prendre des photos : Parfois, ça en devenait même une obsession. J'avais même montré mon appareil à Liam, décidé à lui faire partager cette passion même si malheureusement je ne pouvais pas le faire pleinement : Comment réussir à lui faire pleinement comprendre ce que représentait la photo pour moi sans prendre de photos?... J'avais finalement reposé mon appareil et avait trouvé du réconfort dans les bras de cet homme que j'aimais plus que tout. La photo pouvait attendre, mais pas Liam. Lui, il était là, près de moi, et il était hors de question que je ne gâche nos si brefs moments à cause d'une passion qui ne pouvait pour l'instant plus trouver sa place : Pas dans ce monde-là.

Tic, tac, tic, tac, tic, tac. J'avais l'impression que le bruit de l'horloge qui se trouvait accroché au dessus de la porte de ma chambre était amplifié. Cela venait sans doute de cette attente qui semblait interminable. J'étais seul, assis sur mon lit, et cette fin de journée commençait à me paraître horriblement longue. D'ordinaire, à cette heure là, Liam était déjà à mes côtés en train de me raconter sa journée. D'ordinaire, à cette heure là, nos lèvres s'étaient déjà retrouvées, nos doigts entrelacés. D'ordinaire, à cette heure là, j'avais retrouvé l'homme de ma vie. Pourquoi n'était-il pas là? En général, quand il arrivait un peu plus tard, c'était parce qu'il était parti faire une expédition avec les autres mais là, je savais qu'il n'y avait pas eu d'expédition aujourd'hui et puis, il n'était un peu retard : Il était très en retard. Cela faisait déjà plus d'une heure que je l'attendais. Hors, il ne m'avait fait attendre. Jamais... L'impatience céda rapidement à l'inquiétude et je me mis à repenser à cette journée : Je n'avais pas vu Liam au déjeuner, ni au dîner. Sur le moment, cela m'avait paru étrange mais je n'avais pas pu me permettre d'aller poser des questions car cela aurait pu paraître suspect : Oui, un simple ami pouvait s'inquiéter, mais pas de cette façon, pas parce qu'il n'avait pas Liam depuis quelques heures seulement. Hors, je n'étais pas qu'un simple ami et les sentiments que j'éprouvais pour lui amplifiait ma peur et donc, j'aurais forcément paru suspect. Bref, j'étais sans nouvelle de lui. J'essayais de comprendre : Peut-être qu'un des jumeaux était malade et qu'il avait préféré rester à ses côtés? Je n'arrivais cependant pas à croire qu'il ne m'aurait pas prévenu... Je devais en avoir le cœur net. Avant de sortir de ma chambre, je pris soin de remettre mon masque afin que, si je venais à croiser quelqu'un, on ne puisse rien percevoir de mon trouble. Lorsque je sortis, je faillis faire tomber Mathilda en la percutant : Elle avait apparemment été sur le point de frapper à ma porte que j'étais sorti. L'air qu'elle arborait m'inquiéta : Elle semblait perturbée, inquiète elle aussi et j'avais cette horrible sensation que la raison pour laquelle elle se trouvait là n'allait pas me plaire, bien au contraire. Elle fut rapide, brève et ne tourna pas autour du pot, comme à son habitude.

-Liam est malade. Il voudrait que tu gardes les jumeaux le temps qu'il se rétablisse. Tu es d'accord?

Il fallait garder le masque. Pourtant...

-Qu'est-ce qu'il a?

-Est-ce que tu es d'accord pour les jumeaux? Oui ou non?

Bon... Elle n'avait pas l'intention de me répondre. Je me devais de paraître imperturbable et surtout à peine inquiet comme l'aurait été un simple ami pour ne pas éveiller ses soupçons. Alors, je décidai de laisser tomber et de ne pas insister même si rester dans l'ignorance allait être très douloureux.

-Bien sûr. Je vais aller leur parler.

-Dis-leur simplement qu'il s'est cogné la tête.

Puis elle tourna les talons sans me laisser le temps d'ajouter quoi que ce soit et retourna, je l'imaginais, à l'infirmerie pour s'occuper de Liam. Lorsque j'arrivai dans la chambre de Liam où Lilly gardait les jumeaux, je leur expliquai à tous les trois la situation. Les explications furent très brèves puisque je ne savais rien de l'état de Liam. Je me contentai donc de leur dire qu'il s'était cogné la tête comme Mathilda me l'avait demandé et que j'allais m'occuper des jumeaux en son absence. Lucas ne sembla pas très emballé contrairement à Lucy même si je savais qu'elle était très inquiète pour Liam. Si seulement elle avait pu savoir à quel point moi aussi j'étais inquiet pour lui... Cette première nuit dans la chambre de Liam fut une nuit blanche pour moi : Je fus incapable de trouver le sommeil. J'entendis à plusieurs reprises les jumeaux bouger dans leur lit et même s'ils dormaient, je me doutais que leur sommeil était sans doute peuplé de rêves désagréables et peut-être même de cauchemars parce qu'ils étaient inquiets pour leur père. J'étais cependant persuadé que notre inquiétude allait bientôt s'envoler et ce, dès que Liam irait mieux et viendrait nous retrouver. Ca devait être l'affaire de quelques jours tout au plus. Le lendemain, en début de soirée, j'amenai les jumeaux à l'infirmerie pour rendre visite à Liam : Je pensais que le fait de nous avoir allait lui faire du bien et lui remonter le moral. Je savais d'expérience que le mental jouait beaucoup lorsqu'on était sur le chemin de la guérison. Ce fut cependant très difficile pour moi de me retrouver dans la même pièce que Liam, de le voir étendu sur ce lit, faible, souffrant, sans pouvoir l'approcher, l'embrasser et le prendre dans mes bras. Je devais être un simple ami et je pris donc sur moi pour jouer parfaitement mon rôle. Liam fit de même. Nous ne restâmes pas longtemps, trop peu à mon goût et bientôt, je me retrouvai seul dans la chambre de Liam avec les jumeaux, leur affirmant que Liam allait bientôt revenir mais étant pris d'un immense doute qui me glaça le sang. Je décidai de mettre ce doute de côté et de ne pas y penser : L'affaire de quelques jours. Rien que quelques jours... Le deuxième jour, nous retournâmes voir Liam à l'infirmerie mais cette visite fut encore une fois très brèves et finalement, ce fut mieux ainsi : J'avais de plus en plus de mal à garder mon masque en présence de Liam. J'avais besoin d'être auprès de lui, de m'occuper de lui mais je ne le pouvais pas... Finalement, je demandai à Lilly d'être celle qui allait accompagner les jumeaux voir Liam : C'était mieux pour lui comme pour moi. Si je souffrais de son absence et encore plus de la distance nécessaire quand on se voyait, j'imaginais qu'il en était de même pour lui et je préférais ne pas lui imposer ça : Il fallait qu'il se concentre sur sa guérison qui semblait tarder. L'horrible doute revint rôder autour de moi telle un ombre mais très vite je le chassai : Des idioties tout ça. L'affaire de quelques jours. Rien que quelques jours... Je me tournais tous les jours vers Lilly pour qu'elle me donne des nouvelles de Liam : Caché du regard et des oreilles des jumeaux, elle m'expliqua qu'il n'était pas au mieux de sa forme et qu'il semblait ne pas se remettre aussi vite qu'il aurait dû. En face d'elle, je pouvais me laisser aller à mon angoisse, à mon inquiétude. En face d'elle, je pouvais laisser parler ma peur de la suite. Lilly essaya de me rassurer en me disant qu'il faudrait simplement un peu plus de temps à Liam pour se remettre car le choc avait été rude. En effet, contrairement à la version des jumeaux, nous avions eu droit à la vraie version dans laquelle Liam s'était en réalité fait attaquer par un type alors qu'il se trouvait... En fait, il n'avait pas dit où il se trouvait exactement ni pourquoi il était parti seul de la communauté. En tout cas, peu importait le pourquoi : Il avait reçu un gros choc à la tête et avait eu de la chance car Mathilda avait bien dit que ça aurait pu être plus grave. Lilly avait raison : L'affaire de quelques jours. Rien que quelques jours...

Sauf que bientôt, Mathilda interdit toute visite à Liam : Elle seule avait le droit de s'approcher de lui. Cette fois-ci, je décidai d'intervenir et d'aller la voir mais elle m'expliqua que Liam avait probablement attrapé une maladie et qu'il pouvait être contagieux. Je me foutais qu'il soit contagieux, et je voulais le voir mais elle me refusa l'accès à l'infirmerie. J'aurais voulu avoir le temps d'essayer de m'y faufiler en son absence mais entre la cuisine et les jumeaux, je n'avais finalement pas beaucoup de temps et Mathilda passait à présent presque tout son temps à l'infirmerie : Impossible donc d'y entrer en douce. Ce doute effroyable avait refait son apparition et je n'arrivais plus à le faire partir : Les jours se succédaient et Liam ne sortait pas de l'infirmerie. Il était gravement malade et je ne pouvais pas me mentir : Je savais au fond de moi qu'il risquait sa vie. Je l'avais su dès le départ, dès l'instant où ce petit doute avait percé mes défenses... Je ne laissais cependant rien paraître, décidé à m'accrocher comme lui devait s'accrocher de son côté : Je savais qu'il se battait pour les jumeaux, et pour moi. Je savais qu'il s'accrochait et que gardais espoir : Il allait se remettre et si ça devait prendre plus de temps, ça prendrait plus de temps, le principal étant qu'il soit de nouveau sur pieds. Dès que je croisais Mathilda, je lui demandais des nouvelles mais son visage restait impassible et elle restait étrangement vague sur l'état de Liam : « Aucun changement » me disait-elle, ou « Il y a des hauts et des bas » mais jamais « Il va mieux » ou « Il est sur la bonne voie ». Mon inquiétude ne faisait que grandir et plus les jours passaient, plus j'avais peur pour lui. Puis, Mathilda finit par devenir encore plus distante et silencieuse. Au bout d'un moment, je finis par remarquer qu'elle m'évitait et c'était sans aucun doute parce qu'elle ne voulait pas répondre à mes questions. Un jour, n'y tenant plus, je fonçai jusqu'à l'infirmerie et ouvrit la porte à la volée : J'étais décidé à entrer même si je devais employer la force. Je devais savoir comment allait Liam. Je devais le voir. Je devais absolument le voir. En voyant que l'infirmerie était vide je fronçai les sourcils puis je vis Mathilda sortir rapidement de la réserve. En apercevant le bord d'un lit de camp à travers la porte entrebaillée, je sentis une bouffée de colère monter en moi. Je m'avançais vers elle, frémissant de rage.

-Tu l'as mis là-dedans?! TU TE FOUS DE MOI MATHILDA!!!

Comment avait-elle osée? S'il était à ce point contagieux, elle aurait au moins pu le mettre dans une chambre, en quarantaine, on aurait fait le nécessaire, mais l'enfermer là-dedans...

-ALORS C'EST COMME CA QUE TU LE SOIGNES? EN L'ENFERMANT LA-DEDANS?!!!

-Sors d'ici tout de suite Samuel!

-Hors de question! Je veux le voir!

-Je t’interdis d’entrer. Je te l’interdis formellement!

Sa main se referma sur la poignée et elle referma la porte de la réserve ce qui ne fit qu'amplifier ma fureur. Savoir qu'elle traitait l'homme que j'aimais de cette façon me mettait hors de moi.

-Il est resté seul trop longtemps et enfermé là-dedans! Maintenant ça suffit!

-Il est mourant, Samuel. MOURANT. Va-t-en maintenant.

J'eus l'impression que mon corps entier était devenu aussi lourd que du plombs, mes pieds s'enfonçant dans le sol avant que ce dernier ne se dérobe sous moi et me fasse tomber dans un trou sans fond. « Mourant. » Ce mot résonnait à mes oreilles. Non... Non c'était impossible. Il ne pouvait pas être en train de mourir... Mais le regard de Mathilda, l'expression de son visage ne laissait entrevoir que cette effroyable vérité : Liam allait mourir. Il me fallut quelques instants avant d'être capable de bouger et je fis un pas en avant : J'avais été décidé à le voir avant d'apprendre l'horrible vérité et j'étais plus que jamais décidé à le voir à présent que je savais cette horrible vérité. Il était hors de question que je laisse mourir seul. Mathilda ne semblait cependant toujours pas décidée à me laisser entrer puisqu'elle se plaça devant moi.

-Ne t’approche pas.

-Laisse-moi passer...

Ma voix me parût affreusement éteinte. C'était comme si, à l'instant même où Mathilda m'avait annoncé que Liam était mourant, j'avais commencé à mourir avec lui. Je fis un mouvement pour la contourner et elle referma sa main sur mon poignet pour m'arrêter.

-Ne t’approches pas de lui. Ne le touche pas.

Je tournai mon visage vers elle et la regardai droit dans les yeux : Je n'avais jamais levé la main sur une femme mais en cet instant, j'étais sur le point de la frapper. J'étais sur le point de la frapper parce qu'elle avait été trop loin et qu'elle allait encore trop loin. Je ne dis pas un mot mais mon regard parla probablement pour moi car elle relâcha rapidement mon poignet et eut un mouvement de recul. Plus rien n'allait se mettre entre Liam et moi, et surtout pas elle. Quand je pensais au fait qu'elle l'avait laissé seul alors qu'il était en train de mourir... Quand je pensais aux instants que j'aurais pu passer auprès de lui alors qu'il se sentait partir... Il avait été seul, Mathilda en était responsable et jamais je ne lui pardonnerais ça. Jamais. Je m'avançai jusqu'à la porte de la réserver et l'ouvris.

-Laisse la porte ouverte...

Ses mots parvinrent à peine jusqu'à moi tant j'étais figé d'horreur par la vision que j'avais devant moi : Liam était méconnaissable. Il avait la pâleur d'un mort, semblait épuisé et était plus maigre que jamais. Son regard qui avait été si flamboyant était à présent terne et presque quitté de toute vie. Je m'avançai doucement, les jambes tremblantes avant de me laisser tomber à genoux à côté du lit. J'esquissai un geste pour prendre sa main quand j'entendis la voix de Mathilda dans mon dos.

-Ne fais pas l'idiot.

Qu'elle aille au diable. Je me foutais complètement de tomber malade, au contraire : Que la maladie de Liam m' atteigne... Qu'elle m'atteigne et que je l'accompagne dans la mort car il était clair que j'allais être incapable de supporter sa perte. Mes doigts se refermèrent sur ceux de Liam : Il avait la main moite et pourtant glaciale. Je la portai à mes lèvres et y déposai un baiser avant de la poser contre ma joue. Bientôt, les larmes coulèrent sur mes joues alors que mon regard croisait celui de Liam. Je vis ses lèvres esquisser un sourire avant de se figer au moment où il fermait les yeux. Je sentis sa main se détendre entre mes doigts et soudain pris d'horreur, je me penchai vers lui et posai ma main sur son cou pour rechercher son pouls. Je cessai de respirer, cherchant les battements de son cœur sous mes doigts. Au bout de quelques instants qui me semblèrent interminables, je sentis de faibles battements et soupirai : Il n'était pas mort. Il était idiot de se sentir soulagé alors qu'il ne s'agissait que de reculer pour mieux sauter. Ne voulant pas le quitter, je finis par appeler Mathilda et lui demander qu'elle aille voir Lilly pour lui demander de garder les jumeaux pour la nuit : J'avais promis à Liam de m'occuper d'eux mais à présent, c'était de lui dont je devais m'occuper. Mathilda ne discuta pas, le ton de ma voix l'incitant sans doute à ne pas chercher à me faire changer d'avis ou même à s'approcher de moi. Les minutes passèrent, puis les heures et finalement, je finis par m'endormir à genoux, le visage posé sur le torse de l'être que j'allais bientôt perdre pour toujours. Ce fut Mathilda qui me réveilla le lendemain matin : Liam était toujours inconscient et elle me demanda de sortir pour pouvoir lui faire ses soins quotidiens. J'acceptai, profitant de ces quelques minutes pour aller prendre une douche et me changer. Une fois changé, je pris le chemin de l'infirmerie mais en chemin m'arrêtai à la chambre de Lilly. Je frappai avant d'entrer : J'avais affiché mon éternel masque de peur que les jumeaux soient encore avec elle mais ils n'étaient déjà plus là. Lorsque je vis qu'elle était seule, je refermai la porte derrière moi et m'écroulai au sol, en larmes. Lilly fonça jusqu'à moi et me prit dans ses bras : Devant son air horrifié, je lui expliquai entre deux sanglots que Liam était au plus mal et que Mathilda pensait qu'il n'allait finalement pas s'en sortir. Nous restâmes un moment tous les deux, à réconforter l'autre quand au bout d'un moment je finis par lui dire que je retournais à l'infirmerie pour être avec lui. Elle griffonna sur son cahier d'une main tremblante quelques mots : Elle me demandait de la tenir au courant. J'acquiesçai d'un bref signe de la tête avant de déposer un baiser sur son front et de sortir de la chambre pour me diriger vers l'infirmerie ou plutôt, vers ce lieu de mort et de désolation.

Lorsque je ne pénétrai à l'intérieur de l'infirmerie, Mathilda me salua mais je ne lui répondis pas. Ma colère ne la veille ne s'était pas apaisée et elle n'était pas prête de disparaître. Je m'avançai donc simplement jusqu'à la réserve que Mathilda avait laissé ouverte et vis qu'elle avait déposé une chaise près du lit du Liam. J'aurais pu la remercier, mais je ne le fis pas. Je m'installai simplement sur la chaise avant de déposer un bref baiser sur les lèvres de Liam et de le regarder. Il ne semblait pas y avoir de changement par rapport à la veille. Comme la veille, je me mis à le fixer, comme si j'avais besoin d'agir ainsi afin d'imprimer chaque image dans mon esprit avant que Liam ne me quitte pour toujours. C'est alors que je vis ses paupières frémir. Mon cœur se mit à battre à tout rompre : Il était en train de se réveiller. Il lui fallut quelques instants avant d'ouvrir complètement les yeux et de tourner le visage vers moi. J'esquissai un sourire tendre, rassurant, essayant de cacher ma peur et ma détresse. Un bref instant passa et une larme coula sur la joue de Liam. J'y glissai tout de suite ma main avant de me pencher vers lui et de poser délicatement mon front contre le sien.

-Je suis là maintenant. Je suis là... Je vais rester avec toi... Je ne te quitte plus...

Je fermai les yeux, réalisant l'ampleur de ce mensonge : Bien sûr que j'allais le quitter, ou plutôt, c'était lui qui allait me quitter. Je me reculai à peine avant de rouvrir les yeux et de le regarder. En le voyant ainsi, après l'inquiétude, la colère et la détresse, ce fut l'incompréhension qui me frappa en plein cœur : Comment avait-il pu terminer dans cet état? Comment un simple choc à la tête avait pu dégrader sa santé à ce point?

-Bon sang Liam... Mais qu'est-ce qui s'est passé?...

J'allais le perdre et j'avais besoin de savoir pourquoi.
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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeMar 15 Fév - 19:54

D'une manière aussi soudaine que désagréable, mon coeur se met à battre la chamade, comme si la présence de Samuel le ramenait aussitôt à la vie. Cet organe plein d'espoir me donnait la nausée sans que je ne puisse rien faire pour le calmer : L'homme que j'aimais, le seul que je n'avais jamais aimé, se trouvait dans la même pièce que moi alors que ma dernière heure approchait et il était simplement impossible que tout l'amour que j'éprouvais pour lui ne se manifeste pas, même dans une situation si peu propice à nos murmures amoureux. Ces murmures que j'aimais tant allaient aujourd'hui prendre l'aspect d'adieux, je le savais, il n'y avait aucune autre solution. Mon regard tentait vainement de croiser celui de Samuel, mes lèvres cherchaient à se mouvoir pour lui susurrer un quelconque mot, or j'étais bien incapable d'effectuer le moindre geste. J'aurais voulu le prendre dans mes bras, l'embrasser jusqu'à ce que retentisse l'heure du départ. J'aurais aimé mourir dans ses bras, de la même manière que j'avais repris vie entre ses bras. Ces dernières semaines, j'avais cru pouvoir me comporter de nouveau avec quelqu'un comme j'avais pu le faire autrefois, me laisser toucher, embrasser, aimer sans penser à Natacha. Depuis elle jamais je n'avais éprouvé l'envie de telles choses, emprisonné dans un deuil qui me détruisait de l'intérieur, me faisait suffoquer d'effrois. Mais Samuel était entré dans ma vie, et y avait opéré des changements aussi doux que radicaux. J'étais amoureux de lui, heureux en sa présence. Mais pas ce soir. Ce soir il s'agissait de nos derniers moments ensemble et à défaut de pouvoir totalement les vivre, je pouvais du moins l'observer, le dévorer du regard comme j'aimais à si souvent le faire. Je pouvais emporter avec moi ce souvenir d'un homme tendre, d'un homme incroyable qui me surprenait et m'émerveillait chaque jour. Je crois qu'en cet instant, cette infime seconde où nous nous regardions l'un l'autre sans prononcer un mot; Je sus. Véritablement, je compris à quel point je m'étais attaché à lui. Ce n'était pas qu'un "petit ami", non... Samuel représentait bien plus à mes yeux qu'un simple compagnon, je ne possédais néanmoins aucun mot pour qualifier la nature de notre relation. Tous ces moments, tous ces regards, toutes ces paroles... Nous nous étions mutuellement offert l'un à l'autre d'une manière aussi rapide qu'évidente : Pourquoi nier l'évidence ? Samuel était la personne que j'aimais le plus au monde. Qu'importe que je ne le connaisse que depuis quelques semaines, ou quelques minutes. Il est parfois ce genre d'amour aussi fort que soudain, inattendu et tellement doux... Tellement simple. Cet amour est rare, son authenticité ne peut laisser de place au doute : Oui, parfois, certaines personnes se rencontrent et comprennent qu'elles sont faites l'une pour l'autre. Comprennent que leur existence n'a plus aucun sens si cet autre s'en va. J'avais vécu ça deux fois dans ma vie. La première avec Natacha. La deuxième avec Samuel, et je ne m'en rendais réellement, totalement compte, que maintenant.

Son masque est presque parfait lorsqu'il esquisse un sourire rassurant, presque efficace. Pourtant il ne me convainc pas, plus. A force d'observer un visage dont l'on connait tous les détails par coeur, que l'on adore par dessus tout, je peux vous assurer qu'on finit vite par déceler les fausses notes, lorsque fausse note il y a. Il y en avait souvent avec lui, je m'en étais rendu compte au fil du temps. Sans que je ne puisse réellement définir la différence entre le vrai et le faux de ces émotions, de ce qu'il laissait transparaître, je parvenais néanmoins à reconnaître les moments où il me cachait quelque chose ou feintait avec moi, sans que je ne comprenne réellement pourquoi. Parfois je lui disais de me dire ce qu'il avait sur le coeur au lieu de jouer la comédie, je l'obligeais à se laisser aller avec moi, mais il y avait également des moments où je sentais qu'il ne fallait pas poser de question et me taisais, le laissant se protéger s'il en éprouvait le besoin. Après tout, il m'arrivait à moi aussi de ne pas vouloir trop me dévoiler sur des sujets encore sensibles, douloureux, alors je n'allais pas le forcer, lui, à le faire. Aujourd'hui pourtant, je ne voulais pas qu'il joue une quelconque comédie afin de me rassurer. Je ne voulais pas qu'il soit faux sous prétexte de vouloir me protéger ou m'épargner sa véritable tristesse. A quoi bon ? J'imaginais ce qu'il pouvait ressentir, j'imaginais sa détresse et sa colère pour l'avoir vécu moi aussi. J'avais perdu cet être que l'on aime jusqu'à en oublier de respirer lorsqu'il rit, jusqu'à n'en plus dormir lorsqu'il est sorti sans nous. Je connaissais cette douleur insurmontable, brûlante que l'on éprouve lorsque soudain, tout ce en quoi nos espoirs se plaçaient s'effondre et nous laisse seul, terriblement seul alors que le futur promettait de si belles images. Me dire que j'allais lui faire vivre cette perte incommensurable me plongeait dans un profond état de culpabilité, une profonde et pourtant muette colère envers moi-même. Comme j'aurais voulu lui épargner ça... Comme j'aurais voulu qu'il n'ai pas à souffrir de mes erreurs, de ma stupidité, de mon absence lorsque tout sera fini. Il aurait mieux valu qu'il ne vienne pas, qu'il me laisse mourir là et recommence dès maintenant sa vie. Il aurait mieux valu qu'il m'oublie dès l'instant où il avait appris l'état dans lequel je me trouvais, bien que cela m'aurait achevé, bien que l'idée même de perdre son amour me tuait déjà. Il posa doucement sa main sur ma joue et essuya mes larmes, si brûlantes qu'elles m'en faisaient souffrir, pour finalement poser son front contre le mien. A ce contact, je ne pu m'empêcher de sourire doucement, mes pensées précédentes se voyant très brutalement chassées par une vague d'amour qui les emporta loin, loin au large. Même en cet instant terrible où nous savions tout deux ce qui allait suivre, nous ne pouvions nous éloigner. Il ne pouvait pas m'oublier sous prétexte que j'allais mourir, quand bien même c'en fut un excellent. Les choses ne marchent pas comme ça. Je le savais pourtant. Et je savais aussi à quel point il allait souffrir de ne pouvoir m'effacer de sa vie en une seconde, sans pouvoir rien changer à cette douleur atroce.

Sa peau était délicieusement chaude contre la mienne, lueur de vie tant espérée dans mon univers si sombre, comme figé dans la froideur horripilante de la mort. C'était étrange... Lorsque Mathilda me touchait j'avais l'impression que d'énormes cloques se formaient sous ses doigts, que ma peau se dissolvait pour ne former qu'une purée sanguinolente, or à l'instant je ne souffrais pas de ce contact, au contraire. Samuel m'apportait du réconfort, de la douceur, il ne m'insupportait pas comme tout le reste du monde tandis que même respirer m'arrachait les poumons. L'instinct le plus basique de l'Homme m'était insupportable et lui, lui ne m'offrait que du bonheur, encore maintenant. N'était-ce pas la preuve que lui seul pouvait me ramener à la vie ? Pourtant, je n'espérais plus. Je n'osais pas croire une seule seconde que je m'en sortirais, que nous serions de nouveau heureux... Non. Je n'y croyais plus. Maintenant je voulais seulement profiter de lui avant la fin, m'imprégner de lui un peu, juste un peu, avant de m'en aller... Philosophie certes très défaitiste mais du moins réaliste. Il ne servirait à rien que de se faire de faux espoirs et de vaines hypothèse de survie : C'était fini. J'éprouvai alors l'envie de l'embrasser, de relever un peu la tête et coller mes lèvres aux siennes, lorsqu'il prononça quelques mots. Mon coeur accéléra un peu plus sa course désespérément vaine tandis qu'une esquisse de sourire naissait sur mon visage : C'était là tout ce dont j'avais envie. Qu'il ne me laisse plus, qu'il ne m'abandonne plus dans cette chambre vide de toute lueur d'espoir, qu'il reste avec moi jusqu'à la fin. Cette envie se révélait sans doute égoïste, après tout ne lui souhaitais-je pas quelques secondes plus tôt de m'oublier définitivement, comme il aurait dû le faire pour son bien ? Si, sauf qu'une petite partie de moi, celle qui avait terriblement peur de la mort, ne souhaitait absolument pas affronter ça seule. Ma mort, plus que n'importe quelle autre, était atroce. Il ne s'agissait pas d'une crise cardiaque, ni d'une balle dans la tête, ni d'une décapitation : Je n'allais pas mourir sur le coup sans avoir même le temps de former le mot "m.o.r.t" dans mon esprit, non. Je me voyais lentement dépérir, jour après jour la douleur s'intensifiait, poussant son acuité de plus en plus loin sans qu'elle ne m'emporte définitivement. La mort allait me gagner à l'usure, et non pas d'une manière beaucoup plus radicale et rapide. J'avais l'impression d'être la pauvre souris avec laquelle le chat s'amuse des heures et des heures avant qu'elle ne meure finalement de ses blessures. On jouait avec moi sans que je ne puisse rien pour abréger mes souffrances. Très clairement, je vivais ma mort. Quel paradoxe atroce. Alors, qu'il ne m'abandonne pas avec cette chose, cette tyrannique attente de la fin, me réconfortait bien qu'il n'y ai pas vraiment de raison à cela. Le fait que Samuel demeure à mes côtés n'allait rien changer à ma déperdition. Néanmoins je lui fus étrangement reconnaissant de cette dernière attention, ce dernier geste qui pour l'un comme pour l'autre serait douloureux, terriblement douloureux. Cette promesse me fit soudainement penser au premier soir durant lequel je m'étais glissé dans sa chambre, le soir où je lui avais finalement avoué l'aimer bien malgré ma peur et mes doutes. Ces doutes n'avaient ceci dit rien à voir avec lui, immédiatement j'avais été sûr de mon choix en choisissant Samuel. Il représentait à mes yeux tout ce qu'il y avait encore d'aimable en ce monde, et ce bien que je m'en sois rendu compte un peu tard.

Et puis, soudainement, il se recula. Ce n'était peut-être que psychologique mais j'eus de nouveau cette impression de froid intense, dévorant, comme si sa seule chaleur m'était encore agréable mais surtout utile. Mathilda avait beau me couvrir d'une multitudes de couches de tissus, ce froid glacial ne semblait pas vouloir déserter mes chaires meurtries, et pourtant à l'instant où il s'était penché sur moi, j'avais ressentis de nouveau cette douce flamme de vie courir sur ma peau, la caramélisant au passage. J'aurais pu esquisser un geste pour le prier de revenir plus près de moi, de me serrer contre lui et ne plus me lâcher mais il ne m'en laissa pas le temps, ses lèvres laissant de nouveau s'échapper des mots qui cette fois, me plongèrent dans un profond malaise. On pourrait considérer que c'était son droit le plus absolu que de comprendre pourquoi, si tôt, j'allais m'en aller. Pourquoi à l'instant je me trouvais allongé sur un lit désespérément blanc, proche d'une mort aussi étrange que foudroyante. En quelques semaines à peine j'avais perdu beaucoup de poids, ne mangeant quasiment plus, m'était considérablement affaiblis au point d'en avoir du mal à effectuer le moindre geste et me révélait malade à en crever, le mot est juste. C'était incompréhensible, même moi je ne savais pas... Que s'est-il passé ? Bonne question. J'aurais pu, bien sûr, lui parler de la bijouterie, de cet homme menaçant, mais qu'avait-ce à voir avec la maladie ? Et surtout, pourquoi lui en parler alors que je savais que cela allait lui faire du mal, tandis qu'il n'y avait aucun rapport logique entre cet épisode et mon état actuel ? Car j'étais à peu près certain qu'au moment où je lui avouerais que je voulais lui faire plaisir, lui offrir ces pellicules qu'il désirait tant juste pour voir une seconde ce sourire splendide sur son visage, il allait se sentir coupable. Ou m'en vouloir ardemment. Si je pouvais comprendre la deuxième solution, la partageant, la première m'était moins facile. Ce n'était pas de sa faute, mais uniquement de la mienne. C'était moi l'idiot, moi le fou qui s'est cru assez malin pour trouver l'introuvable et partir seul à sa recherche. Lui n'avait rien fait, rien demandé... Comment lui expliquer ? A cet instant où ma vie ne tenait plus qu'à un fil, il m'était bien évidemment impossible de lui mentir, ou de lui cacher des choses, impossible de m'en aller en le laissant dans le mensonge, et pourtant il m'était également impossible de le laisser se détruire par le remord tandis qu'il n'avait rien à se reprocher. Je savais combien il était difficile de vivre avec ce genre de chose sur la conscience, m'en étant longtemps voulu pour la mort de Natacha. Et puis, j'avais fini par accepter, et me pardonner. Ca m'avait prit dix ans mais j'avais réussi à admettre que tout n'était pas que de ma faute, que je n'aurais rien pu changer même avec toute la bonne volonté du monde. Il n'y a qu'à partir de là que j'avais pu recommencer à vivre... Pour mourir si vite. Je gardai le silence un long moment durant lequel le regard de Samuel ne me lâchait pas, partagé entre des sentiments que je parvenais à lire sans trop de mal. L'amour, la tendresse, la tristesse, l'incompréhension... Tout cela se mélangeait dans ses yeux sans que je ne puisse lui répondre encore. Je composai dans ma tête les mots justes, sachant pertinemment qu'il me serait impossible que de formuler de longues phrases, économisant au maximum mes paroles qui allaient être aussi douloureuses que hachées... Je composai, comme je le pouvais, partagé entre un mal de crâne assourdissant et une violente nausée tenace. Il fallait que je parvienne à concentrer le peu de force que je possédais, le peu de volonté pour lui expliquer car il méritait de savoir. Il méritait que je lui dise la vérité, quand bien même j'aurais dû en cracher mes poumons. J'ouvris doucement la bouche, respirant avec difficulté.

« Je...»

Me redressai subitement, le repoussant, prit d'une nouvelle crise de toux. Je sentis très nettement ma gorge se déchirer sous l'assaut de ces violents rejets, et mes soupçons se confirmèrent lorsque je retirai ma main de devant ma bouche et y vis une sombre traînée rougeâtre. Je savais que je ne crachais pas du sang, à force de vomissements à répétition et de toux violentes ma gorge semblait néanmoins raclée, râpée de l'intérieur. La tête que fit Samuel me laissa cependant comprendre que lui ne savait pas, d'un geste je tentai de le rassurer en me laissant retomber dans le fond de mon lit mais n'y parvins sûrement pas. Sans un mot il attrapa un mouchoir puis ma main pour l'essuyer, passa ensuite son pouce à la commissure de mes lèvres pour retirer, je le supposai, un mince filet de sang qui devait traîner. A ce moment là dû prendre énormément sur moi pour poser ma main sur la sienne et la conserver entre mes doigts. J'y parvins tout de même. De nouveau le silence, avant que je ne parvienne à reprendre ma respiration et retente de prononcer quelques mots, d'une voix très faible et quelque peu éraillée :

« J'ai été agressé.... Et après... Je ne sais plus...»

Et c'était vrai, j'avais oublié. Une chose, celle qui tenait toute l'histoire.

« Je voulais te faire plaisir...»

Soudainement, les larmes coulèrent de nouveau sur mes joues. Comme j'avais été bête, comme je m'en voulais d'avoir pris autant de risque pour des foutues pellicules ! J'allais mourir pour des pellicules photo. Bon sang... J'allais mourir pour ça... J'allais laisser mes enfants, Samuel, ce monde, pour ça...

« Je voulais... seulement... te faire plaisir...»

Murmurai-je entre deux sanglots. Mon crâne semblait sur le point d'exploser, mes poumons se consumaient dans ma poitrine. Pendant quelques secondes, je fermai les yeux et tentai de me persuader qu'il ne s'agissait que d'un mauvais rêve, que bientôt j'allais me réveiller et le raconter à Samuel qui rirait, que nous ririons ensemble puis oublierions cette histoire stupide, ce délire étrange mais irréel. C'était pourtant bien la réalité, ma douleur était réelle, il n'y avait aucun doute là-dessus. Plus aucun espoir. Plus les larmes coulaient sur mes joues, plus j'avais l'impression de me vider de mon peu d'énergie, de devenir encore plus vide de cet élan vital qui me manquait déjà énormément. C'est à cet instant que Mathilda entra, nous observant une seconde sans un mot avant de finalement s'avancer, un plateau dans les mains. A l'odeur, simplement, je manquai de vomir. Il s'agissait du repas que j'étais sensé avaler, et qui me répugnait par dessus tout. Ma main glissa de celle de Samuel et je me redressai légèrement, secouant doucement la tête de gauche à droite en signe de négation : Je n'avais pas faim. Je n'avais jamais faim. Et la plupart du temps tout finissait par me déserter, autant laisser la nourriture aux vivants, à ceux qui nécessitaient réellement de se nourrir. Mon visage dû très clairement laisser voir mon appréhension ainsi que ma peur, puisque Mathilda hésita une seconde. Oui, ma peur, car imaginez bien que les repas ne faisaient plus du tout partie des instants de plaisir désormais. Pour moi manger voulait seulement dire souffrir, encore, à présent. Régurgiter chacun des aliments avalés jusqu'à être vidé, épuisé, terrassé ne faisait qu'accroître la rapidité avec laquelle la mort viendrait me chercher, me laissant chaque jour un peu plus faible contre elle. Finalement, elle jeta un regard à Samuel avant de se reconcentrer sur moi et prononcer d'une voix encore plus froide que d'habitude :

« Je reviendrai un peu plus tard, mais tu dois manger.»

Elle regarda de nouveau Samuel avec un drôle d'air, et je ne pu m'empêcher de froncer les sourcils, me souvenant de la dispute que j'avais entendu. Je savais que Mathilda avait interdit l'accès à ma chambre, et je connaissais suffisamment Samuel pour présumer qu'il en aurait forcé l'entrée mais... Je n'aimais pas ça. Pas du tout même. Mathilda avait ses bons et ses mauvais côtés, mais elle ne pensait jamais à mal. Si elle avait refusé que quiconque m'approche, il ne s'agissait que d'une raison médicale sans doute fondée et raisonnée, cela ne méritait pas qu'on lui en veuille. Personnellement, je ne lui en voulais plus. Au début, je l'avais haïs pour ne pas me dire clairement les choses, pour me laisser si souvent seul, pour me donner l'impression ignoble que j'allais mourir mais finalement, elle n'avait pas eu tort. Elle ne faisait que son travail, et la situation n'était drôle ni pour elle ni pour moi. Nous étions bons amis, je savais qu'il devait lui coûter que de me voir dans cet état, bien qu'elle ne laissait rien paraître. Je penchai alors doucement la tête vers Samuel et murmurai faiblement :

« Ne sois pas trop dur avec elle.»

J'eus un léger sourire, qui très vite m'arracha une grimace, avant de me rendre compte que je ne pleurai plus. L'arrivée de Mathilda avait comme fracassé l'atmosphère de douleur qui régnait dans la pièce, et c'était pour le mieux, bien qu'elle demeurait forte. Je me contentai alors d'observer Samuel, de laisser mon regard le dévorer de nouveau, tant qu'il en avait encore la possibilité. Malheureusement, je les sentais se fermer doucement, saisis d'une trop grande fatigue, d'une trop grande usure déjà. J'aurais pu dormir mille ans que cela n'aurait rien changé. Je sentis les doigts de Samuel serrer de nouveau les miens et tentai de lui rendre la pareille afin de me retenir à la réalité, de ne pas me laisser happer par ce vide infernal, cette chute à l'intérieur de moi-même qui allait m'éloigner de lui alors que mon seul souhait était de ne pas le quitter, surtout pas le quitter. Alors j'essayai, le plus possible, de serrer moi aussi ses doigts, de me raccrocher à lui comme je l'avais toujours fait, de me battre pour lui afin de ne pas sombrer. C'était atroce, je me battais contre moi-même, contre un monstre invisible, contre quelque chose d'invincible qui finirait par m'emporter à un moment ou à un autre. Mais je luttai. Je sais que ce genre de chose ne s'explique pas, qu'il n'y a pas de mot pour décrire ce qu'un mourant ressent lorsqu'il éprouve cette sensation de vide à l'intérieur de lui, qu'il se sent partir et que d'un coup, la peur que ce soit pour la dernière fois, qu'il ne se réveille plus jamais, le prend à la gorge. Il n'y a pas de mot pour exprimer l'épouvante, l'affolement, qui prend soudain le contrôle de son être, et je crois qu'à moins de l'avoir vécu il est impossible que de ne serait-ce imaginer. Les gens en bonne santé n'ont jamais peur de ne plus se réveiller, ils n'y songent pas lorsqu'ils s'endorment paisiblement le soir. Et si c'étaient les dernières minutes, la dernière nuit, le dernier soupir ? Et si à l'issue de ton rêve, tu mourrais, comme ça, subitement. D'une manière aussi injuste qu'aléatoire. Non, les gens n'y pensent jamais et pourtant, ils devraient, car cela leur ferait prendre conscience de la réalité de la vie, cela les empêcherait de faire les innombrables bêtises qu'ils font toujours. Il avait fallu que je sois à l'aube de la mort pour comprendre tout ce que j'avais loupé avec Samuel, tous les moments que j'avais gâché au nom de quoi, la peur ? La peur que j'avais précédemment ressentie n'était rien en comparaison à cette qui me nouait à présent les entrailles. J'avais cru que vivre au grand jour avec lui allait m'anéantir, que je ne supporterais jamais les regards, les jugements, les critiques, mais après tout que représentaient-elles, mis appart des mots qui s'envolent, s'envolent puis retombent et s'écrasent au sol ? Au nom de stupidité j'avais gâché la fin de ma vie. Si j'avais su... Si j'avais su j'aurais pris d'avantage de plaisir à respirer, à rire, à l'observer... Mais je ne savais pas. On ne peut jamais savoir avant qu'il ne soit trop tard, et cette fatalité me donna soudain envie de hurler. Me plongea brutalement dans une colère bien étrange, qui, étonnement, me donna suffisamment de force pour parler d'une voix à peine plus assurée.

« Je t'aime. Je crois...que je ne te l'ai pas assez dit ; Je n'en ai pas eu le temps. Mais on se fiche de ce qu'il s'est passé, nous savons où ça mène... Je vais mourir Samuel, et je me rends compte que je n'ai pas suffisamment profité de toi, de ta présence... Je t'aime. J'aimerais te le dire encore mille fois...»

Je lâchai sa main et retirai la bague que j'avais au doigt depuis ce jour où, sans le savoir, j'avais moi-même signé mon arrêt de mort. Sa bague. Doucement, je la passai au sien et constatai avec un sourire plein de tendresse qu'elle lui allait parfaitement. Je ne m'étais pas trompé... Elle lui allait...C'était sa bague, et elle lui allait tellement bien que les larmes me montèrent de nouveau. Cet éclat qui brille avec sobriété dans le noir... Cet éclat qui m'avait guidé, aidé... Que j'aimais tant. En relevant les yeux vers lui, je ne pu m'empêcher de sourire encore même si cela m'était douloureux : Je me foutais totalement de crever de douleur à l'instant, parce que cette bague, ce simple anneau, représentait énormément à mes yeux. Il s’agissait d’une bague de fiançailles, elle signifiait confiance, fidélité, amour. Des sentiments que j’éprouvais pour lui d’une manière si pure, si profonde qu’en cet instant il ne subsistait plus aucun doute. C’est drôle comme certains évènements qui nous apparaissent premièrement bénins se révèlent finalement fondateurs de tout un futur, de toute une vie. Pourquoi avais-je pris la peine de ramener cette bague avec moi ? Parce que sur le moment je l’avais simplement trouvé belle, elle m’avait fait penser à l’homme que j’aimais et en cela m’avait donné envie de la lui offrir. A présent je comprenais néanmoins la raison cachée, profonde de ce choix. Pour les personnes qui comme moi ont été écorchées par la vie, privées de leur plus grand bonheur, leur plus grand amour, ces mots deviennent un véritable supplice, une torture continuelle qui nous poursuit où que nous allions. On ne croit plus en l’amour. On ne pense pas être heureux de nouveau. Or, Samuel avait sur son passage anéanti toute trace de culpabilité, de douleur et de tristesse. Chaque minute en sa présence m’enivrait de telle sorte que jamais je ne voulais le quitter, jamais je ne m’y décidais réellement puisque je l’emportais toujours avec moi, dans la valise de mon cœur. Je le gardais jalousement caché là, rien qu’à moi, juste à moi. Parce que Samuel était à moi. Cette phrase, bien loin d’être le pur produit d’un égoïsme tordant, révolutionnait totalement ma vie. Samuel était à moi, ou en tout cas, je désirais ardemment qu’il le soit. En réalité je souhaitais plus que tout qu’il reste auprès de moi, qu’il continue de m’aider, qu’il apporte encore et encore cette douce chaleur dans ma vie. Parce que j’étais dingue de lui, tout simplement. Que je n’avais éprouvé cela qu’une seule fois, une seule et unique fois avant lui. Cette fois là avait été la femme de ma vie, que Samuel en soit l’homme me paraissait d’une évidence limpide. Limpide. Depuis la mort de ma femme jamais je n’avais pu aimer, jamais je n’avais regardé quelqu’un d’autre, alors ressentir ça à nouveau, avec une telle intensité, m’ôtait tout doute, toute crainte : Je savais. C’était lui, et personne d’autre, mais il était trop tard… Beaucoup trop tard.

Je serrai les dents pour ne pas laisser aller mes larmes, pour ne pas lui montrer à quel point le voir avec cette bague au doigt me tuait un peu plus car nous n’avions pas eu le temps de profiter de cet amour, de le laisser grandir en nous. J’aurais voulu lui dire des milliers de choses, en étais cependant bien incapable. J’aurais voulu pouvoir lui expliquer à quel point il était important pour moi, à quel point je l’aimais, qu’il était tout simplement ma vie mais à quoi bon ? Cette vie misérable, faite de défaites et d’incertitude pour si peu de bonheur touchait à sa fin, je ne possédais plus rien à lui offrir. La douleur devint alors insupportable, et je ne pu me contenir de pleurer, soufflant entre deux sanglots :

« Viens, serre moi contre toi. Serre moi »

Samuel se leva aussitôt et ses bras m’entourèrent, son visage se nicha dans le creux de mon cou sans que je n’ai à le supplier davantage. Je ne pouvais qu’imaginer ce qu’il ressentait en cet instant, supposant qu’il s’agissait d’une souffrance similaire à la mienne. Nous étions fait l’un pour l’autre, nous étions fait pour nous aimer et vivre ensemble… Pas être si vite séparés, tout comme j’avais trop vite été séparé de Natacha. En fait, cette situation était parfaitement la même : J’avais possédé une personne que j’avais aimé plus que tout au monde, avant de finalement la perdre, bien trop tôt. La seule différence résidait dans le fait que c’était moi qui m’apprêtais à quitter Samuel, et non le contraire. Alors je tentai, vainement certes, de profiter de lui au maximum avant que tout ne s’arrête définitivement, avant que nous nous disions pour la dernière fois « au revoir ». Je passai difficilement mes bras dans son dos, respirant à plein poumon son odeur, ce parfum qui n’appartenait qu’à lui et que j’avais toujours adoré, depuis le début. De la même manière que le contact de sa peau ne me brûlait pas, son odeur ne me répugnait pas, mais au contraire me réconfortait, m’apaisait, me calmait rapidement. Les larmes coulaient avec lenteur sur mes joues, mes poumons criaient à l’asphyxie et pourtant je n’éloignais pas Samuel ; Je pris sur moi, du mieux que je pouvais, pour pouvoir demeurer ainsi coller à lui, ainsi proche de cet être que j’aimais plus que de raison. « Serre-moi » répétai-je à plusieurs reprises, ma voix se faisant suppliante, désespérée bien malgré la faiblesse qu’elle trahissait. Comme j’avais peur qu’il m’abandonne désormais, comme je craignais qu’il ne me quitte et me laisse de nouveau seul ici… Depuis qu’il était là, depuis que je ressentais sa présence, la folle impression d’une légère amélioration me caressait, me redonnait de l’espoir. Pourtant, il ne fallait pas conserver le moindre espoir, ce n’étaient que de vastes utopies, de sombres illusions qui se verraient forcément broyées par les mâchoires impitoyables de la Maladie. Un monde existait à présente Samuel et moi, un monde séparant les vivants des morts, puisque j’en faisais déjà partie. Comme une bombe à retardement dont l’échéance restait inconnue : A un moment donné tout serait irrémédiablement terminé.
Je posai une main tremblante sur sa joue et le fis doucement reculer le visage, mon regard effectuant aussitôt le saut de l’ange dans le sien.

« Tu as été une évidence, un besoin, un espoir pour moi… Tu as été… l’homme de ma vie. Pardonne-moi… Je…je voulais que tout soit différent, qu’on hurle au monde entier notre amour… J’ai tout gâché… pour des pellicules… Je te cherchai des pellicules photo, pour que tu puisses…vivre ta passion. Je voulais…seulement…te faire plaisir. »

Mon corps entier tremblait de plus en plus, l’épuisement me gagnant à une vitesse impressionnante. Il m’était très douloureux, très difficile que de parler, que de lui caresser la joue du bout des doigts comme j’étais entrain de le faire, il m’était même difficile que de respirer or j’y parvenais. Il le fallait, tout simplement, car il s’agissait de nos derniers moments et je ne voulais pas les gâcher. J’avais encore trop de choses à lui dire avant de m’en aller, trop de baisers à lui accorder.

« Maintenant écoute-moi … J’ai trois choses à te demander … Les jumeaux…je ne veux les laisser à personne d’autre que toi…S’il te plait… Et… Tu dois refaire ta vie… tu dois avancer, même sans moi… Mais… Promets moi une chose… Une seule chose… Ne m’oublie pas. Je t’en supplie… Ne m’oublie jamais. »

Ma main retomba mollement sur les draps : Je me sentais de nouveau partir, me faire engloutir par ces sables mouvants. Peut-être pour la dernière fois. Mes yeux commencèrent à se fermer d’eux-mêmes tandis que mes lèvres susurraient « serre-moi », une nouvelle fois, tout comme de mon côté je tentai encore de le serrer contre moi. J’essayais de me raccrocher à lui, à la vie, de ne pas sombrer entièrement dans ce vide effrayant, sombre. Je devais me raccrocher à lui. Alors je me battais, comme quelques instants plus tôt, afin de ne pas partir. Je songeais aux jumeaux, à ces enfants que j’aimais tant et que j’allais laisser orphelins, une nouvelle fois. Non…Ils ne seraient pas seuls. Samuel était là. Et il me serrait contre lui, fort, suffisamment pour me faire mal mais cela ne faisait rien, la douleur me maintenant sévèrement accroché à la vie. Je parvins à rouvrir mes yeux noyés de larmes, songeant que non, il ne devait pas m’oublier, car alors je serai définitivement mort. Plus seulement dans le sens physique du terme, mourir dans son cœur était à mes yeux mille fois pire que mourir d’un point de vue médical. Même si je ne lui souhaitais pas les mêmes souffrances que celles que j’avais connu, même si je désirais qu’il refasse sa vie et aime de nouveau, qu’il se reconstruise car il méritait d’être heureux. Avec moi ou un autre, il méritait ce bonheur immense, cet amour incommensurable, mais au fond de lui, qu’il garde une petite part de moi, un faible souvenir de notre amour à nous.
Juste le souvenir de Nous.
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeMer 16 Fév - 15:07

Aucune réponse ne vint. Ce fut le silence total. Il me regardait, mais ne laissait rien paraître et ne semblait pas décidé à me parler. Pourquoi? Avait-il peur de m'avouer la vérité? Qu'est-ce qui pouvait bien le faire hésiter à ce point? Je regrettais d'avoir posé cette question alors qu'il était déjà si faible et si mal... Mais en même temps... En même temps, j'avais ce besoin de savoir afin de comprendre. Il fallait que je puisse comprendre pourquoi nous allions être séparés même si rien ne pouvait justifier cette séparation car c'était beaucoup trop tôt. Mais j'avais besoin de savoir pourquoi j'allais le perdre si vite... Quand, au bout d'un moment qui parut durer une éternité, je le vis entrouvrir la bouche, mon cœur se mit à battre plus vite. Il eut à peine le temps de murmurer un seul et unique mot que déjà, il se redressai et me repoussai, prit d'une quinte de toux. Je dois bien avouer qu'il y avait en moi une part de panique qui venait de s'éveiller mais je pris sur moi pour ne pas la laisser me submerger : Il avait besoin de moi et même si le voir souffrir ainsi me tordait les entrailles, même si cela me rendait malade de douleur, je devais tenir le coup. Je devais absolument le soutenir et être là pour lui : Que pouvais-je faire d'autre? Je l'aimais tellement, plus que je n'avais jamais aimé au cours de mon existence et je ne pouvais pas l'abandonner. C'était tout simplement impossible. Mais j'avais peur. J'avais terriblement peur. Peur de le perdre là, maintenant, tout de suite, sans avoir pu tout lui dire, sans avoir pu lui crier mon amour... Ma peur s'intensifia et j'eus vraiment du mal à ne pas paniquer quand je vis du sang dans la main de Liam. Ce sang me rappelait la réalité, me rappelait son état plus que dramatique, son état proche de la mort : De ma propre mort. Liam se laissa retomber dans son lit, avec un air qui, il me semblait, essayait d'être rassurant, sauf que c'était peine perdue. Comment pouvais-je être rassuré? Il allait mourir. C'était un fait. La réalité. Le futur. Le futur bien trop proche... Étant pour l'instant incapable d'articuler le moindre mot parce que si je l'avais fait, Liam aurait pu entendre dans ma voix toute la panique qui m'habitait, je me penchai pour prendre un mouchoir et essuyer sa main. Puis, doucement, je glissai ma main contre sa joue et essuyai du bout du doigt un filet de sang qui se trouvait près de ses lèvres. Je regardais l'homme que j'aimais. Je le regardais mourir.

A ma grande surprise, car je ne le pensais pas capable de bouger beaucoup plus, Liam posa sa main sur la mienne et je la serrai, avec peut-être un peu trop de force. J'avais cependant besoin de sentir ne serait-ce qu'une toute petite partie de lui contre moi. Un nouveau silence s'installa car il avait du mal à reprendre sa respiration. Imaginer à quel point il devait souffrir me donnait envie de hurler et de tout détruire. Pourquoi lui? Pourquoi?... Lorsque j'entendis sa voix s'élever doucement, mon estomac se noua et une boule se forma dans ma gorge : Il était si faible. Il m'annonça qu'il avait été agressé et pendant une fraction de secondes, un éclair de violence me submergea : Si un jour je venais à croiser celui qui avait fait ça, tant mieux pour moi et tant pis pour lui. Ça ne dura pas longtemps et très vite, la voix de Liam, bien qu'elle fut très faible, récupéra toute mon attention. Il ne souvenait plus ce qu'il s'était passé mais il avait voulu me faire plaisir. Les larmes coulèrent sur ses joues tandis qu'un poids tombait dans mon estomac à m'en donner la nausée : Il avait voulu ME faire plaisir. Alors... Tout ça... C'était à cause de moi? C'était ma faute?... Mes yeux me piquèrent et je les fermai quelques instants pour retenir mes larmes. Ainsi, j'étais la raison de tout. Et en fait, c'était vrai : J'étais celui qui avait tout chamboulé dans sa vie. J'étais arrivé, j'étais tombé amoureux de lui et lui, il était tombé amoureux de moi mais il avait eu peur et j'avais refusé que nous nous quittions, j'avais voulu rester à ses côtés. Comme j'aurais du le quitter quand il me l'avait demandé. Comme j'aurais du mettre de la distance entre nous. Si je l'avais fait, jamais nous n'en serions arrivés là. Si je l'avais fait, il serait en bonne santé, heureux avec les jumeaux et pas sur le point de mourir. J'aurais pu tout aussi bien pointer une arme sur lui et lui tirer une balle entre les deux yeux : Ça revenait exactement au même. Il allait mourir, comme Jason était mort. C'était comme si je portais moi-même le costume de la mort et désignais d'une geste ceux qui devait passer de vie à trépas.

J'étais dans ces sombres pensées lorsque Mathilda entra. Aussitôt, mon regard se tourna vers elle : Un regard qui était loin d'être aimable, bien au contraire. Mon attitude envers elle était glaciale et ça n'allait pas changer de si tôt. Je ne savais pas si j'allais être un jour capable de lui pardonner la façon dont elle avait traité Liam... Elle était là pour apporter le repas de Liam mais il sembla pris de nausées rien qu'en observant le plateau, ou était-ce l'odeur? En tout cas, il n'était pas prêt à avaler quoi que ce soit. Liam retira alors sa main de la mienne et je sentis un horrible frisson me parcourir le corps : Son contact m'était vital. En l'observant, je pus voir... Non, je devais me tromper... Et pourtant, si : Il avait peur. Il avait peur de se nourrir. Du coin de l'œil, je vis Mathilda poser les yeux sur moi mais je ne pris pas la peine de relever mon regard vers elle : A quoi s'attendait-elle? Du soutien? Elle pouvait toujours rêver. Si Liam ne voulait pas manger, si cela lui était trop douloureux, je n'allais pas le forcer. Elle l'avait dit elle-même : Il était mourant. Pourquoi faire subir des épreuves supplémentaires à quelqu'un qui va de toute façon bientôt quitter cette vie? Non. Tout ce que je voulais, c'était rendre les choses plus faciles pour Liam. Elle annonça qu'elle allait revenir plus tard et qu'il devait manger, tout en me regardant. Cette fois-ci, je relevai un regard pour le moins assassin vers elle : C'est ça, qu'elle s'en aille et nous laisse seuls. Nous n'avions pas besoin d'elle. Il n'avait pas besoin d'elle. A peine s'était-elle éloignée que je reportais déjà toute mon attention sur Liam. Ce dernier murmura quelques mots concernant Mathilda « Ne sois pas trop dur avec elle. ». Je décidai de ne pas répondre, refusant de parler d'elle, refusant d'entrer dans un débat sur les bonnes ou mauvaises raisons que j'avais de lui en vouloir. Il eut un léger sourire qui se transforma en grimace. Ma haine pour Mathilda n'en fut que plus vive : Au lieu d'essayer de le faire manger, elle aurait mieux fait de lui donner de la morphine pour éviter qu'il ne souffre trop. Mon regard croisa celui de Liam et ce qu'il avait dit juste avant l'arrivée de Mathilda me frappa à nouveau de plein fouet : J'en voulais à Mathilda oui, mais celui à qui j'en voulais le plus c'était bien moi. Je vis les paupières de Liam frémir et se fermer doucement et mon cœur se mit à battre à tout rompre. Je me penchai un peu vers lui, à nouveau paniqué, et posai ma main sur la sienne avant de lui serrer les doigts avec force. Je voulais lui faire sentir que j'étais là, à ses côtés, qu'il n'était pas seul. De cette façon j'essayais, tant bien que mal, de le raccrocher à la vie, à cet instant que nous partagions. Il était encore vivant, il devait tenir bon. Il devait... C'était illusoire, puisqu'il allait de toute façon mourir mais si nous avions pu avoir encore des minutes, des heures ou même quelques jours... C'était tout ce que je voulais... Non! Mensonges! Ce n'était pas tout ce que je voulais! Ce que je voulais c'était qu'il guérisse, qu'il soit de nouveau en bonne santé, que nous puissions continuer à nous aimer et plus encore, que nous ne nous séparions jamais! Voilà ce que je voulais! Je ne voulais pas des minutes ou des heures, je voulais des années, des décennies... Je voulais une vie entière à ses côtés.

Je m'en voulais, j'en voulais à Mathilda, j'en voulais à la terre entière. Je maudissais tous ceux et toutes celles qui avaient encore toute une vie devant eux, tout le bonheur que Liam méritait d'avoir. « Je t'aime. » L'entendre prononcer ces mots me sortit de mes pensées toutes plus noires et amères les unes que les autres. Mes doigts se refermèrent un peu plus sur les siens tandis qu'il me parlait d'une voix qui me parut plus assurée que quelques minutes auparavant. Je pensais être assez fort pour encaisser ses mots, mais je ne l'étais pas. Non, nous n'avions pas assez profité l'un de l'autre... Je sentis les larmes me monter aux yeux et serrai la mâchoire pour essayer de ne pas pleurer : Je ne voulais pas lui montrer ça. Je ne voulais pas lui faire plus de mal... Puis, ce fut comme si les choses se passèrent au ralentis : Je le vis lâcher ma main, retirer la bague qu'il avait au doigt (que finalement je n'avais même pas remarquée), reprendre ma main et passer la bague à mon propre doigt. J'observai la bague, incapable cette fois-ci de me retenir de pleurer. Un symbole de notre amour, de notre union. Où avait-il trouvé ça? Quand? Était-ce pour ça qu'il était sorti? Il avait dit qu'il avait voulu me faire plaisir et que c'était pour ça qu'il était sorti. Était-il parti chercher cette bague? Bien sûr, j'étais heureux de recevoir un tel cadeau qui représentait tant, qui en disait long sur ce que je représentais pour lui, mais si à cause de ça je devais le perdre... Alors, je n'en voulais pas. Je préférais rendre la bague et qu'il vive, plutôt qu'il ne disparaisse et que je garde avec moi cette bague qui ne serait plus uniquement le symbole de notre amour mais aussi un souvenir de lui. Je ne voulais pas un souvenir de lui : Je le voulais lui. D'un geste vif de la main j'essuyai mes larmes, essayant de me contrôler à nouveau mais c'était peine perdue. J'avais beau essuyer mes joues, elles finissaient par être de nouveau noyées par de nouvelles larmes. Le silence s'était de nouveau installé entre nous quand Liam fondit en larmes. Il avait réussi à se contenir un peu, contrairement à moi, mais à présent il se laissait aller. « Viens, serre moi contre toi. Serre moi. » Je m'exécutai dans la seconde et me penchai vers lui avant de le prendre dans mes bras et de le soulever un peu avant de le serrer contre moi avec force. J'enfouis mon visage dans le creux de son cou et le serrai encore, et encore. Je ne pensais même pas au fait que je pouvais lui faire mal : Je voulais juste être près de lui, le serrer dans mes bras, sentir son cœur battre contre mon torse. Je voulais sentir chacun de ces battements qui bientôt disparaitraient. Je serrais les dents, pleurais en silence. Comme c'était cruel. J'allais le perdre. Jamais je n'avais autant aimé et j'allais le perdre. Plus jamais je n'allais me plonger dans ses yeux, plus jamais je n'allais le voir me sourire, plus jamais je n'allais l'entendre me jouer ses magnifiques morceaux, plus jamais je n'allais l'entendre me dire qu'il m'aimait, plus jamais je n'allais l'embrasser, le sentir contre moi. Jamais. A quoi allait bien pouvoir me servir ma vie sans lui? A rien. A rien du tout. Ma vie, c'était lui. Il était ma vie, ma raison de vivre, mon âme sœur. Nous avions été unis dans l'amour et nous serions unis dans la mort. J'avais déjà trop souffert, trop perdu pour supporter de le perdre lui alors qu'il était l'amour de ma vie. Cette fois-ci, c'en était trop. Je ne disais rien mais dans ma tête, tout était déjà fait : A l'instant où il allait mourir, j'allais le rejoindre car plus rien ne me retiendrait. Rien.

Je sentis ses mains glisser dans mon dos, je sentis sa respiration s'intensifier tandis que je glissai une main dans ses cheveux pour les caresser doucement et le blottir un peu plus contre moi. Il murmura encore à plusieurs reprises et mon étreinte s'intensifia à chaque fois et ce, même si je le serrais déjà à presque l'en étouffer. Cette étreinte était à la fois merveilleuse et terrible. Merveilleuse, parce qu'elle laissait parler notre cœur pour nous, elle laissait transparaître tout notre amour. Un amour infini, un amour inconditionnel, un amour qui jamais ne disparaitrait. Et terrible parce qu'elle avait le goût amer des adieux... Elle avait cette détresse d'une séparation proche et impossible à éviter. A cette pensée, mes sanglots redoublèrent. Quelques instants plus tard, Liam posa une main tremblante sur ma joue et me fis doucement reculer le visage. Je plongeai alors mon regard brouillé de larmes dans le sien. Ce regard si bleu, si profond qui me faisait tant chavirer. A l'instant même où il me parla, je sentis la panique m'envahir. Il parlait au passé. Il parlait déjà au passé... J'avais été une évidence pour lui tout comme lui avait été une évidence pour moi. J'avais été l'homme de sa vie tout comme il avait été l'homme de ma vie. Ses mots emplissaient mon cœur de joie tout en le mettant en pièces mais ce furent ses derniers mots qui m'achevèrent. Je sentis mon corps se mettre à trembler d'horreur, ma mâchoire se mettre à claquer sous le choc : Des pellicules... Il était sorti pour me trouver des pellicules. Tout ça... Pour ça? Pour que je puisse vivre ma passion? Non... Non... Ma passion c'était lui. C'était Liam... A travers mes propres tremblements, je sentis son corps se mettre à trembler à son tour. Mes mains se resserrèrent autour de lui et l'agripèrent. Les adieux n'étaient pas terminés non. Il avait des volontés. Des dernières volontés. La réalité n'avait jamais été aussi brutale. Au départ, pendant quelques secondes, je me dis dans ma tête que j'allais dire oui à tout ce qu'il allait pouvoir me demander mais très vite, cette idée s'en alla. Non. Non... Je n'allais pas m'occuper des jumeaux... Je n'allais pas refaire ma vie... Je n'allais pas avancer sans lui... Et je n'allais pas l'oublier. Non. Rien de tout ça. Mon esprit s'embruma pendant un instant et puis, une pensée illusoire s'insinua en moi mais en un instant, tout changea. Baigné dans une illusion, je pris son visage entre mes mains et le regardai fixement.

-Je n'ai pas besoin de te promettre quoi que ce soit.

Je vis son regard se voiler : Il faiblissait mais moi, j'étais toujours dans mon illusion. Dans cet espoir de fou qui venait de naître en moi. Dans cette certitude qui n'était que chimère.

-Regardes-moi. Écoutes-moi! Tu vas pas mourir Liam. Tu peux pas. T'as pas le droit. C'est impossible. Tu vas pas mourir. On va... On va... On va trouver. On va chercher et on va trouver. C'est sûr! On va... Tu vas t'en sortir... Tout va s'arranger... Ça va aller...

Je nous voyais déjà, dans quelques jours, en train de rire de tout ça, en train de nous dire que nous avions été stupides de croire que tout était terminé. Les jumeaux étaient avec nous, en train de rire, heureux d'avoir retrouvé leur père. Je portais avec un bonheur non dissimulé la bague qu'il m'avait offert et nous nous aimions au grand jour. Nous étions heureux. Ensemble. Le débit avec lequel je parlais laissait pourtant entrevoir une détresse qui n'avait pas lieu d'être puisque j'étais certain de ce que j'avançais. Comme j'aurais voulu que tout cela soit vrai. Comme j'aurais voulu pouvoir continuer à vivre dans cette illusion. Mais sa main retomba mollement sur les draps et ses yeux commèrent à se fermer alors que dans un murmure, il me demanda une nouvelle fois de le serrer. Je le pris de nouveau dans mes bras et le serrai avec force contre moi.

-Tu ne vas pas mourir...

Mais je n'avais plus la même conviction. Non, à présent, ma voix n'était plus qu'une supplique.

-Liam... Je t'aime... Je t'en prie... Pars pas...

Mes mains s'accrochèrent à lui. Les battements de son cœur me paraissaient horriblement moins forts qu'un peu plus tôt.

-Je te demande pardon... Mais je peux pas... Pas sans toi... Liam, si tu meurs... Oh Seigneur, si tu meurs... Je suis désolé... Je suis désolé parce que tu voulais que je m'occupe de tes enfants et que je sois heureux mais c'est pas possible. Ne me demande pas ça... Je t'aime... Et je peux pas vivre sans toi, c'est au-dessus des mes forces... Pardon... Mais si tu t'en vas, je m'en vais aussi...

Comme j'étais faible. Trop faible. Au lieu de le rassurer, de lui promettre que j'allais veiller sur ses enfants, je lui annonçais qu'à l'instant où il allait mourir, j'allais mettre fin à mes jours. Je n'avais pas peur de mourir, j'avais déjà vu la mort. Alors, s'il n'était plus là, oui, j'allais partir. Parce qu'une vie sans lui ne serait pas une vie. Parce que ce monde ne pouvait pas exister si Liam n'en faisait pas partie. Je me penchai doucement, lui dans mes bras et l'allongeai avec précaution, restant tout contre lui, le serrant dans mes bras, le berçant doucement. Nos corps étaient l'un contre l'autre, collés, soudés, et rien n'allait nous séparer : Pas même la mort. Le silence s'installa, uniquement interrompu par nos respirations, celle de Liam bien plus faible que la mienne. Du pouce, je caressai doucement la bague quand soudain, l'espoir revint. J'étais cinglé. Complètement cinglé d'y croire mais je n'arrivais pas à accepter sa mort. Je n'arrivais pas à accepter qu'on ne puisse rien faire pour l'aider et le sauver. C'était là, en lui... Il disait ne pas se souvenir mais ça s'était passé et c'était dans sa tête. Il suffisait qu'il retrouve ce bout qui nous manquait, ce bout essentiel. J'en étais persuadé. Il avait oublié et j'avais l'espoir que la solution était là, tout près et qu'il suffisait de tendre la main pour la toucher, l'attraper et en faire quelque chose. Il y avait forcément un moyen parce que ça ne pouvait pas finir comme ça. Comme je vous l'ai dit, je n'avais pas peur de mourir et s'il devait partir, j'allais partir, mais une vie... Une vie entière à ses côtés...

-Liam... Tu m'entends?...

J'avais peur qu'il n'ait perdu connaissance mais un bref mouvement de sa tête me fit comprendre qu'il était toujours conscient. Faible, mais conscient.

-Mon amour... Écoutes-moi... Tu ne vas pas mourir...

Et cette fois-ci, ma voix n'avait plus cette détresse : J'avais confiance. Cinglé, je vous l'ai dit...

-Tu dois faire un effort pour te souvenir de ce qu'il s'est passé parce que... Un simple choc à la tête ne peut pas être responsable de ton état... Il y a forcément autre chose... Liam, je sais que tu dois croire que c'est la fin mais... Ça ne peut pas se finir comme ça. Pas maintenant. Pas si vite. Réfléchis... Souviens-toi... Si on pouvait savoir, on pourrait te sauver...

Je sentis ses mains s'accrocher à moi. Je savais qu'il n'en pouvait plus, qu'il souffrait atrocement et qu'il était prêt à accueillir la mort. Moi aussi, mais s'il y avait la moindre chance pour qu'il puisse s'en sortir, je ne voulais pas que nous passions à côté. Je déposai un baiser sur front avant de murmurer plus bas.

-Je sais que tu en as marre... Que tu es fatigué, que tu voudrais que tout s'arrête mais je t'en supplie... Pour moi... Pour Lucy et Lucas... Fais cet effort... Essayes de fouiller dans ta mémoire... On pourrait... Pense à tout ce qui nous attend... Je t'en supplie Liam...

Je finis par me taire. J'étais moi aussi fatigué. Bien moins que lui, mais j'étais épuisé. Épuisé d'avoir tant pleuré, épuisé d'avoir tant peur de le perdre, épuisé de tant l'aimer. Au fond, tout ne se résumait qu'à cela : Mon amour pour lui. Cet amour incroyable si fort, si présent dans chaque parcelle de mon corps... J'en arrivais presque à le haïr tant je l'aimais. A le haïr parce que je ne voulais pas qu'il abandonne, qu'il m'abandonne. Je voulais passer ma vie à ses côtés. J'avais besoin qu'il soit fort.

Pour nous deux.
Pour que nous puissions à nouveau être heureux.
Pour que notre amour ne s'éteigne pas avant même d'avoir réellement brûlé.
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Liam Marsden
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeSam 19 Fév - 20:51

J’avais eu tort en pensant que l’exil dont j’étais victime représentait une torture atroce. Tort en imaginant que rien n’aurait pu aggraver mon cas que cette extrême solitude, ce sentiment d’être déjà mort et enterré dans l’esprit de tous. Les larmes de Samuel constituaient une torture mille fois plus sadique que l’enfermement, déceler dans son regard cette lueur de désespoir achevait de manière tragique mon cœur au bord du trépas. Je haïssais, avais toujours haïs, voir son visage emprunt de cette tristesse, ces traînées salées déferlant sur ses joues comme une tempête ravageant tout sur son passage. Mathilda avait fait preuve d’une grande clémence en m’épargnant le spectacle révoltant de la peine de mes proches : Elle ne faisait que m’enfoncer dans ma propre douleur, ma propre culpabilité. Il aurait mieux valu pour nous que Samuel ne puisse accéder à l’image morbide que je reflétais à présent, fantôme de l’être passé, esquisse du cadavre futur. Il ne nécessitait pas ce poids supplémentaire, n’avait pas besoin de conserver cette dernière image de moi dans son esprit lorsque je m’en irai enfin. J’aurais préféré qu’il continue à ne voir de moi que l’homme qu’il avait aimé, un homme doux, souriant, et non pas ce tas d’os au teint livide qui s’époumonait jusqu’à en cracher son cœur. Pour lui comme pour moi, il s’agissait d’un moment à la cruauté ineffable. Je le sentais pleurer jusqu’à son âme contre moi, son corps tremblant tout comme le mien tremblait si bien qu’il était dorénavant impossible de les dissocier dans leurs mouvements. Je sentais ses larmes brûlantes couler sur ma peau, l’arrachant au passage par lambeaux entiers sans pouvoir le repousser d’une quelconque manière. Après tout, c’était moi qui lui demandais de me serrer, je n’allais pas le repousser à présent bien que cette étreinte me soit terriblement douloureuse. Je devais profiter de ces derniers moments, or ils étaient bien trop loin de nos soirées passées pour que je ne puisse les apprécier. Non, en cet instant, je n’appréciais nullement la présence de Samuel qui m’enfonçait un véritable couteau dans le cœur, m’arrachait les entrailles. J’aurais dû lui demander de partir, lui demander d’oublier ce qu’il avait vu et même de m’oublier moi mais j’en étais bien incapable, trop égoïste, préférant qu’il demeure à mes côtés et vive avec ce souvenir de moi. Oui, il s’agissait là d’une demande cruelle, sadique, et pourtant je ne pouvais me résoudre à l’idée qu’il continuerait sa vie comme si je n’y étais jamais passé. Brièvement certes, mais du moins assez pour nous lier à jamais. Nous étions faits l’un pour l’autre. Nous étions faits pour une vie ensemble. Cette vie qui, dans quelques instants, quelques minutes ou quelques heures, prendrait définitivement fin sans possibilité de marche arrière. Cet espoir auquel j’avais tant rêvé s’évanouissait sous mes yeux, et plus ses larmes coulaient, plus Samuel l’enterrait. Au fond je crois que j’aurais aimé qu’il soit fort, suffisamment pour ne pas me révéler la douleur profonde qui l’habitait quand bien même elle aurait été cuisante. Oui, c’était égoïste, mais à l’aube de la mort mon souhait le plus cher aurait été de voir l’homme que j’aimais heureux, souriant, comme je l’avais toujours connu. Partir avec cette image profondément gravée sur mes rétines de sorte à ce qu’elle ne s’efface jamais, qu’importe l’était de non-existence dans lequel je me trouverais.

Et je glissais lentement dans les limbes de la mort, ce trou à la noirceur infernale qui me hantait. Il pleurait. Il me noyait avec ses larmes, me tuait doucement. Plus je lui murmurais de me serrer, plus l’étau de ses bras se refermait autour de moi, plus j’avais mal. J’avais l’impression que mes côtes allaient craquer, que mes poumons se contractaient et exploseraient dans quelques instants. C’est à cet instant qu’il desserra son étreinte et prit mon visage entre ses mains, me regardant fixement. Ce regard me donna soudainement des frissons, y lisant une détermination qui me faisait peur. Qu’est ce qui lui prenait ? Il m’annonça alors d’une voix assurée qu’il n’avait pas besoin de me promettre quoi que ce soit mais je ne compris pas… Non, je ne comprenais pas où il voulait en venir, et plus les secondes passaient, plus je me faisais happer par ce vide qui tapait du pied, m’appelant avec rage. L’épuisement qui me retenait en otage était tel que chacun des membres de mon corps était douloureux, courbaturé, chacune des pulsions de mon cœur semblait résonner à l’infini à l’intérieur de moi. Pourtant, ces battements allaient bientôt s’éteindre, c’était évident. Très vite, ses mots ne me parvinrent plus que par bribes, si bien que je ne comprenais plus le sens de ses phrases. Le silence recouvrait peu à peu la pièce comme une épaisse gelée brunâtre formant une bulle insonorisée dont je ne pouvais m’enfuir. Et je glissais, encore. Mes lèvres murmuraient toujours pour qu’il me serre, j’en souffrais toujours autant, et pourtant je glissais toujours. Je ne parvenais plus à me raccrocher à quoi que ce soit, même pas à lui et très vite la peur me serra de nouveau la gorge. Et si c’était la fin ? Et si j’étais entrain de me voir mourir, là, maintenant ? Non, je ne devais pas abandonner. Je ne devais pas me laisser partir, il fallait que je m’accroche coûte que coûte. Il fallait que je surmonte la douleur parce que je ne voulais pas mourir, je ne voulais pas le laisser. Pourtant mes yeux terminèrent de se fermer, sans que je ne puisse résister à l’appel délicieusement macabre d’un sommeil sans fin. Un sourire m’effleura la joue, mes douleurs s’atténuant légèrement, sans qu’il n’y ai de raison évidente à cela. Il s’agissait d’un froid qui endormait peu à peu mon corps de sorte à ce que ses blessures s’éteignent elles aussi et me laissent en paix. Un froid de plus en plus profond dans lequel je plongeai avec ravissement car il représentait la fin de mes souffrances, la fin de cette vie horrible que j’avais arrosée de mes larmes un bon million de fois. Au loin j’entendis la voix de Samuel m’appeler, me suppliant de ne pas partir. Pourquoi… ? Pourquoi vouloir me garder sur cette terre tandis que j’y souffrais le martyr ? Pourquoi désirer prolonger mon calvaire alors que tout ce à quoi j’aspirais désormais était la mort ? J’avais voulu me raccrocher à lui, être fort pour lui, mais je ne l’avais pas pu, et à présent que je sentais mes fardeaux s’envoler, je ne pouvais pas faire marche arrière. Je ne pouvais pas demander à ce qu’on me torture de nouveau alors que doucement cette incroyable béatitude s’emparait de mon corps, cette absence de toute souffrance… Une délicieuse léthargie à laquelle j’ouvrais grand les bras.

Soudain, mon cœur qui avait pris un rythme beaucoup plus doux que la normale s’accélère de nouveau, saute dans ma poitrine, explose tout à l’intérieur en hurlant de douleur. Un grand sursaut intérieur qui ravage tout sur son passage lorsque Samuel reprend la parole, lorsqu’il m’annonce qu’il ne veut pas, qu’il ne peut pas sans moi… Qu’il se tuera dès que je serai parti. Comment pouvait-il dire ça ? Comment pouvait-il le désirer ? Alors il allait laisser Lucy et Lucas seuls, il allait les abandonner, tout quitter parce que moi aussi j’allais tout quitter… Mais je n’avais pas le choix. Moi je n’avais pas le choix, j’étais obligé de partir. Pas lui, non, pas lui… Comme j’avais mal d’apprendre cela… Comme je m’en voulais de savoir qu’à cause de moi sa vie prendrait fin dans quelques instants tout comme la mienne prendrait fin… J’étais en larmes. A l’intérieur, je pleurais toutes les larmes de mon cœur. Il m’avait supplié de tenir bon mais lui n’essayait même pas de garder la tête hors de l’eau, il ne voulait pas me survivre. Je le savais pourtant, j’avais su dès le départ qu’il finirait par souffrir de notre relation, souffrir à cause de moi… A présent il voulait mourir à cause de moi. Comment aurais-je pu ne pas m’en vouloir, tout était de ma faute. Uniquement de ma faute. Il ne s’agissait pas d’un suicide, mais bel et bien d’un meurtre. J’étais son meurtrier. En tombant malade, en étant au bord du précipice, je le poussai lui aussi. Je l’emmenai avec moi dans les profondeurs terribles et inconnues d’une vie qui nous abandonne. Nous allions bientôt traverser la frontière, ensemble, unis, mais cela n’était pas mon souhait. Je refusais catégoriquement qu’il commette cet acte car dès lors, il aurait complètement baissé les bras. Il aurait lâché prise. Je savais qu’il avait déjà vécu cette situation, il avait déjà perdu un homme qu’il aimait tout comme j’avais perdu Natacha… Et pourtant il s’en était tiré. Il avait surmonté cet obstacle, cette perte terrible tout comme je l’avais surmonté. Même si recommencer allait être encore plus dur, même s’il devait être épuisé, révolté, il ne devait pas abandonner. Il devait tenter de s’en sortir de nouveau et de refaire sa vie, comme je le lui avais demandé. De retomber amoureux, de sourire, de rire parfois même. De ne faire de moi qu’un souvenir pour laisser la place à un autre homme dans son cœur, tout comme il m’avait laissé de la place dans le sien après cet autre homme. Tout comme je lui en avais fait après Natacha. Savoir qu’il avait pris cette décision, savoir qu’il était prêt et acceptait me rendait dingue, tellement fou que j’en repris un peu conscience. J’étais en colère, en plus de ravagé, et cela me raccrocha quelque peu à la vie. Assez pour réagir lorsqu’il me demanda doucement si je l’entendais encore. J’effectuai un très léger mouvement de la tête, dans l’incapacité de lui répondre ou même d’ouvrir les yeux, appréhendant la suite. J’avais peur de ce qu’il allait encore m’annoncer, peur qu’il ne s’agisse du même genre de nouvelle que la bombe qui venait de faire exploser mon cœur. Et d’une certaine manière, il s’agissait de cela.

Il y croyait encore. Dans son être, rempli de crainte, de doute, de détermination quant au suicide, subsistait une toute petite part d’espoir qui lui permettait de parler d’une voix assurée, d’une voix pleine de confiance, d’une voix qui n’avait en clair rien à faire ici. Qu’est ce qui lui prenait bon sang ? Pourquoi maintenant, pourquoi se laisser bercer par de telles illusions ? Si, j’allais mourir. C’était un fait indéniable, une évidence, une promesse. Bientôt, j’allais m’en aller en le laissant là. Bien que ce soit atroce, bien que ce soit injuste, il avait bien fallu me faire une raison, je ne pouvais nier l’évidence et lui non plus. Qu’il me regarde une seconde, qu’il voie ma peau diaphane, mes os saillant, la faiblesse d’un regard autrefois plein de tendresse. Qu’il ouvre les yeux, bon sang ! Au lieu de cela il croyait encore qu’en sachant comment j’étais tombé malade nous pourrions me guérir, il me demandait de fouiller dans ma mémoire mais c’était impossible. Je ne savais pas, je ne savais plus… Si, ça allait se finir comme ça, si vite, si tôt, et plus jamais nous ne nous serrerions l’un contre l’autre. Plus jamais nous ne nous croiserions au détour d’un simple couloir, nos regards se faisant soudainement plus doux. Plus jamais nos lèvres ne s’effleureront, plus jamais nos doigts ne se lieront, plus jamais, jamais, JAMAIS. J’aurais voulu lui crier, lui hurler que c’était la fin pour qu’il le comprenne une bonne fois pour toutes, mais je ne le pouvais pas. D’une part cela aurait été cruel, de l’autre il m’était trop difficile que de parler pour en plus me mettre à crier. Le silence représentait ma seule possibilité de réponse et au fond tant mieux, sans quoi j’aurais pu devenir soudain très désagréable, mais savoir qu’il y croyait encore… Savoir qu’il espérait encore, et qu’au pire il se tuerait lui aussi... Cela me mettait dans une colère noire, m’était inadmissible. J’étais tombé amoureux d’un homme profondément têtu en dépit des apparences, d’un homme au caractère incroyablement borné. Pas avec moi, non, je crois que j’aurais pu lui demander la lune, il serait aller me la chercher. Mais parfois… Il ne se laissait pas marcher sur les pieds. Et croyez moi, j’aurais aimé qu’en cet instant, ce tragique instant où j’allais rendre l’âme, il ne se laisse pas faire par la vie. Qu’il se borne à l’aimer malgré toutes ses injustices et ses défaites. Qu’il ne lâche pas prise pour moi, juste pour moi… Juste pour ça… J’allais mourir. Comme des millions de gens, comme lui allait mourir. Plus tôt, certes, mais qu’est ce que ça changeait ? N’allez pas croire que je ne souffrais pas de cette séparation précoce mais que lui abandonne… Que lui espère encore me voir survivre ou meure avec moi… Ce n’était pas le Samuel que je connaissais, ni celui que j’aimais. Ce n’était pas là l’homme incroyablement fort qui m’avait relevé en dépit de toutes mes craintes, toutes mes peurs, tous mes sanglots. Seulement à présent je me rendais compte que malgré ce qu’il voulait laisser paraître, Samuel était terriblement faible. Il était un être d’amour, un être sensible, et cette sensibilité risquait de lui coûter la vie. Qu’aurais-je fais à sa place, je n’en savais rien, mais lui… J’aurais cru qu’il aurait fait autre chose. Je me promis alors intérieurement que si finalement je m’en sortais, si par un coup du sort quelconque, une volonté divine tardive, un coup de chance énormissible, je survivais, la première chose que je ferai serait de l’engueuler un bon coup et lui remettre les idées bien en place car il m’était juste intolérable, inadmissible, impensable, qu’il décide de mettre fin à ses jours à cause de moi. Pour si peu.

Sous l’effet de cette forte colère mes mains se crispèrent et s’accrochèrent à lui, essayant de lui faire comprendre qu’il devait arrêter ces stupidités et accepter la vérité sans quoi il ne guérirait jamais de moi. Il devait accepter ma mort, comme j’avais accepté celle de Natacha, même si tardivement, car sinon il ne pourra jamais revivre. Qu’il se suicide me paraissait à présent tellement inimaginable que je ne l’imaginais justement même plus ; Non, il n’allait pas mettre fin à ses jours. Jamais. Il se pencha alors vers moi et déposa un baiser sur mon front avant de reprendre. Ses mots détruisirent en l’espace d’une seconde toute la colère que j’avais pu ressentir un peu plus tôt, me plongeant dans une profonde tristesse. Il y croyait vraiment… Il croyait vraiment qu’il suffisait de savoir comment j’étais tombé malade pour me soigner, et qu’alors je m’en sortirais… Ses supplications me donnèrent envie de pleurer. Je ne pouvais pas me souvenir. Je ne pouvais pas fouiller ma mémoire, il n’y avait plus rien. Mais il me suppliait d’essayer, pour lui, pour mes enfants. Lucy et Lucas… Pouvais-je refuser d’au moins tenter ? Pouvais-je me braquer à ce point ? Non… Même si j’étais persuadé de ne me souvenir de rien, je ne pouvais partir en le laissant avec ce doute immense que si jamais j’avais retrouvé ce souvenir, si jamais j’en avais été capable, on aurait pu me sauver. On ne guérit jamais avec des « si ». Au bout de quelques secondes je parvins à prendre une profonde inspiration et hocher doucement, presque imperceptiblement, la tête en signe d’accord. Je pouvais toujours essayer de me replonger dans mes souvenirs, de trouver cette clef manquante même si j’étais persuadé que cela ne servirait strictement à rien. Je commençais à avoir la migraine et cela ne m’aida pas tellement à me concentrer mais au bout de quelques instants, je pu me replonger dans cette journée tragique et me remémorer chacun de mes gestes, chacun de mes actes. J’étais parti de la communauté dans l’idée de trouver des pellicules à Samuel… En chemin je suis tombé sur une bijouterie que je connaissais… Mon émotion avait été grande sans que je comprenne pourquoi… J’ai trouvé sa bague… Et un homme m’a agressé. Son visage m’apparaissait beaucoup plus clairement que n’importe quoi d’autre dans ce souvenir. Il était immonde, mais pas méchant, non. J’étais encore certain de lui avoir fait peur, d’avoir représenté une menace pour lui et c’est pourquoi il s’était défendu, sans doute pas dans l’intention formelle et arbitraire de me tuer. Ce n’était pas le même genre que les hors la loi, eux étaient sans cœur et sans moral. Lui semblait seulement perdu, effrayé. Et après… Et après… Je m’étais réveillé. Quelque chose me piquait. Quelque chose me pique. Là, tout de suite, je sens quelque chose qui me touche.

En dépit de mon extrême fatigue, ma terrible faiblesse, je commençai à gigoter dans mon lit, ayant l’impression que quelque chose me touchait, m’effleurait…

« ARRÊTE ! »

Hurlai-je, m’en arrachant les cordes vocales au passage. J’ouvris brusquement les yeux, tant que la lumière m’éblouit d’abord mais cela n’avait aucune importance. Quelque chose venait de me mordre. Il y avait quelque chose dans mon lit qui venait de me mordre. Sous l’épaisse couche de couverture je distinguai alors des mouvements autres que les miens, ne sachant cependant pas de quoi il pouvait s’agir. La panique prit très vite mon corps et mon esprit en otages, si bien que je cherchai brusquement à me dégager de ce lit, à retirer toutes mes couvertures et sortir, juste sortir de ce putain de lit ! Ce besoin irrépressible, ces mouvements brusques que j’effectuai en dépit de la douleur qui se répercutait contre chacun de mes os et de mes muscles s’accentua d’une manière dramatique lorsque soudain l’animal qui se trouvait dans mon lit bondit sur mon torse. J’hurlai de nouveau et me précipitai hors du lit, tombant lamentablement par terre bien que Samuel tenta de me rattraper. Je l’ignorais totalement, ne le voyais même plus car dans mon lit… Il y avait un rat. Il y avait un rat dans mon lit et il venait de me mordre ! Tombant à plein ventre au sol, j’eus un instant la respiration coupée et ne criai plus, tentant de me relever. Mais mes bras s’effondraient sous mon poids et il m’était impossible de parvenir au résultat désiré, condamné à simplement me traîner sur ce sol froid jusqu’à ce que quelqu’un ne m’aide. Jusqu’à ce que je ne vois un autre rat courir juste devant moi avant de se faufiler sous une étagère. Mon cœur loupa un battement, je suffoquai soudainement et m’apprêtai à appeler Samuel, lui demander qu’est ce qu’il se passait lorsque un autre passa, puis un autre, et bientôt des dizaines. Des dizaines de gros rats dégoûtants qui couraient dans tous les sens, y compris sur moi, qui couraient et s’évanouissaient Dieu sait où. La pièce entière en était infestée. Pris d’une panique suffocante, tétanisante, je me retournai vers la chaise sur laquelle se trouvait Samuel et vis… Un rat. Enorme. De la taille d’un humain. Samuel n’était plus là, mais cet animal, cette foutue bestioles me regardait droit dans les yeux. Les larmes me montèrent très vite aux yeux et je me mis à pleurer comme un bébé, me recroquevillant au sol en tentant d’éviter un maximum le contact de ces autres bêtes qui continuaient leurs va et viens. Ma respiration ne parvenait pas à se calmer, secouée de mes sanglots, et très vite j’eus l’impression que tout était fini. Que j’étais entrain de m’étouffer faute de pouvoir respirer. Je me mis de nouveau à crier, bien que cela n’arrange en rien la course effrénée de mes poumons.

« SAMUEL ! AIDE MOI, AIDE MOI SAM ! »

J’hoquetai entre deux sanglots, mon regard plein d’horreur, de peur, posé sur cet énorme rat qui se mit soudain à bouger, à faire du bruit, et finalement se lever pour s’avancer vers moi. Mes yeux s’écarquillèrent d’horreur et je reculai, tant bien que mal, avec le peu de force qu’il me restait. Il s’approchait de moi, il s’approchait de moi ! Et j’hurlai, de plus en plus fort, des mots incompréhensibles, mélanges de « Samuel », « aide », « Mathilda », « au secours ». Plus il s’approchait et plus je distinguai ses yeux, petits et noirs, ses dents, longues et blanches, ses moustaches, visiblement dures, ses poils, incroyablement sales, ses pâtes, avec de longues griffes. Je n’en pouvais plus, de crier, de pleurer, et ce rat qui s’avançai, pâtes en avant, vers moi. Lorsqu’il me toucha finalement, je cru que j’allais mourir. Qu’il allait me dévorer. Qu’il allait me mordre, me mordre ME MORDRE. D’une manière aussi inattendue que brutale je fus pris de nausée et vomis, sur lui, sur moi, qu’importe ? Mon corps était soulevé de violents soubresauts répandant partout autour de nous, sur nous, lui et moi, mes repas durement acquis et mes dernières forces. Il couinait, de plus en plus fort, produisant un bruit comparable à des cris humains or ce n’en étaient pas. C’était un rat, un rat, un enfoiré de rat aussi gros qu’une putain de maison qui me serrait contre lui, qui enfonçait ses griffes dans ma peau, qui allait me dévorer et je vomissais, jusqu’à n’en plus pouvoir. Vomissais pleurais hurlais. Peur panique terreur affolement. Mon cœur battait à tout rompre, mon crâne allait exploser et les morceaux se perdraient dans les poils gris de cette bête. Ses amis qui courraient tout autour de nous l’aiderait à se nettoyer. Ils allaient tous me mordre, me mordre, ME MORDRE. Je suffoquai tellement que j’en étais au bord de l’évanouissement lorsque l’horreur se prolongea. Derrière ce rat qui me charcutait déjà, derrière cette bestiole déjà immonde… Venait d’en entrer une deuxième. Tout aussi grosse, tout aussi répugnante. Elle me fixait de la même manière et s’agita beaucoup plus rapidement. Je me débattu avec force pour leur échapper, échapper à celui qui me serrait déjà, tentant de le frapper, tentant de m’enfuir, mais j’étais bien trop faible et lui bien trop fort. L’autre prit alors ce que j’entraperçu comme une seringue et se jeta à son tour sur moi, repoussant brutalement le premier, m’enfonçant l’aiguille dans la peau. Je me débattu encore quelques secondes en hurlant le nom de Samuel, et de Mathilda, en implorant du secours.
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« …en étais sûre, j’étais certaine qu’il ne fallait pas que tu le voies ! Bon sang, mais qu’est ce que tu as fais pour le mettre dans un état pareil ?! Arrête ! C’était une véritable crise d’hystérie, ça n’arrive pas pour rien, c’est forcément de ta faute. Oh non Samuel, ça ne va pas se passer comme ça ! … » Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Riiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiieeeeeeeeeeeeeeen…..
« …sous sédatifs. La dose administrée n’aurait pas dû lui procurer un sommeil supérieur à 12h… Je ne comprends pas… » Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. 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Riiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiieeeeeeeeeeeeeeen…..« …ne suis pas devin Samuel bon sang ! Je ne sais pas ! S’il se réveille, et je dis bien « si », il risque de refaire une crise. Pour l’instant mieux vaut-il qu’il dorme… »Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Et puis plus rien. Plus rien. Plus rien. Plus rien. 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« …78 heures. Je dois être honnête avec toi… J’ignore s’il se réveillera un jour… »

J’ai l’impression de flotter… D’être au dessus des nuages, au dessus du monde, au dessus de tout… Mon être tout entier n’est que légèreté et volupté, je suis aussi souple que l’air et je vagabonde loin du monde… Et puis… Parfois… Des voix me parviennent, pleines de rancoeurs, de colère, de tristesse. Elles arrivent sous forme de cordes et se noues autour de mes chevilles, me ramenant brutalement sur terre. Plus je m’approche d’elles et mieux je comprends qu’elles se déchirent pour moi, mais je ne sais pas pourquoi. Aujourd’hui les cordes ne se défont plus, je semble restreint à demeurer sur terre avec elles. Leurs débits augmentent en même temps que leurs hauteurs, se fracassant contre les parois fragiles de ma tranquillité. Je suis dans une bulle d’où rien ne me provient, rien ne s’échappe. Je suis bien. Le silence n’est pas pesant, ce sont ces voix au contraire qui le sont. Elles hurlent de plus en plus fort et aujourd’hui, je sais, je sens, que je ne pourrais pas m’envoler. Peu à peu mes douleurs refont leurs apparitions, comme à chaque fois que les cordes me ramènent, et une migraine supportable s’empare de moi. Elles ne sont plus aussi dures qu’avant, mais toujours bien présentes cependant. Je ne sais pas… Pourquoi suis-je obligé de rester ? J’aimerais m’envoler… Définitivement… Juste partir. Mais on me retient, et doucement, très doucement…

J’ouvris les yeux. La pièce plongée dans une quasi-totale obscurité me permit de ne pas trop souffrir de ce geste, ne m’éblouissant donc pas. Sur le moment je ne compris pas vraiment où j’étais, ni ce qui se passait, mais très vite je me souvins, de tout. Ou presque. Je constatai avec une stupeur et un soulagement soudain que je pouvais bouger, même si cela restait très douloureux. Je portai alors une main à mes yeux et les frottai doucement, fronçant les sourcils. C’est alors que je me rendis compte de la présence de quelqu’un assis à côté de moi. Tournant la tête, je découvris Samuel qui, assis sur une chaise, se tenait le visage entre les mains et fixait obstinément le sol. Soudain il bougea et posa son regard sur les draps, ne voyant de toute évidence pas que j’étais là, vraiment là, bien réveillé. En l’observant un peu plus je remarquai les traits tirés de son visage, les cernes sous les yeux, rouges d’avoir certainement dû pleurer des litres d’eau de mer. A mon tour, j’eus envie de pleurer. J’avais mal, pas seulement physiquement mais aussi parce que je me rendais compte que nous en revenions au même point. J’étais toujours entrain de mourir, même si, pour je ne sais quelle raison, je me sentais légèrement mieux. Même si pour je ne sais quelle raison ma migraine avait baissé, je pouvais bouger sans hurler de douleur et ma respiration était plus apaisée. Au fond de moi, bien au fond, je crois qu’une petite lueur d’espoir se mit à briller car tout n’était pas encore fini, car j’étais encore là. Néanmoins, je sentais toujours ce vide immense m’attendre, bien que je fusse beaucoup moins fatigué. Je crois que j’avais dormis suffisamment déjà… Il fixait le drap, encore, le regard vide et perdu dont la fatigue ne devait pas aider à se retrouver. Je ne pu m’empêcher d’avoir un sourire tendre, même si triste, en le découvrant encore là… Il n’avait pas mentis, il ne m’avait pas abandonné… Je ne savais pas très bien ce qu’il s’était passé mais il était toujours là… Et moi aussi, aussi surprenant que cela puisse paraître.

« Samuel… »

Murmurai-je, ma voix me paraissait toujours horriblement faible, quelque peu éraillée également. Je toussai doucement, avant de lui sourire de nouveau. Pour lui ce n’était peut-être rien, seulement un délais accordé, mais savoir que j’étais encore là, que je m’étais battu pour lui, que j’avais tenu le coup quelques jours encore, me rendait, au fond, heureux dans ma misère. J’avais été fort.

Pour nous deux.
Dans l’espérance d’être de nouveau heureux.
Pour que notre amour puisse un jour réellement brûler.
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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeMar 22 Fév - 20:45

Un simple petit mouvement de la tête qui représentait un immense espoir. Il allait faire l'effort d'essayer de se souvenir. Il allait replonger dans ce qu'il avait vécu de façon à tout tenter une dernière fois pour qu'il puisse être sauvé. Pour que nous puissions être sauvés. Je le gardai contre moi, lui caressant doucement les cheveux de façon à essayer de le rassurer au maximum, de lui faire savoir que j'étais là, juste là, à ses côtés et que je n'allais pas l'abandonner, que même s'il replongeait dans ses souvenirs, il n'y resterait pas enfermé car j'allais le ramener jusqu'à moi. Oui, j'allais le ramener, j'allais le sauver. Je fermai les yeux, essayant de garder ce calme que j'avais réussi à obtenir en à peine quelques secondes : Je devais continuer d'espérer, continuer de croire... En lui. Jusqu'au bout. Les minutes passaient et je ne pouvais deviner ce que Liam était en train de traverser. Que lui était-il réellement arrivé? Qui lui avait fait du mal? Pourquoi? Comment? De quelle façon? Toutes ces questions dont les réponses étaient en train de défiler dans l'esprit de Liam et qui me restaient inaccessibles. Comme j'aurais voulu pouvoir lire dans ses pensées, comme j'aurais voulu pouvoir glisser mon esprit dans le sien pour enfin voir et comprendre. C'était cependant impossible et je devais me contenter d'attendre qu'il finisse par se souvenir et qu'il me donne des explications. Je savais que malgré sa faiblesse, malgré sa fatigue, malgré sa peur, il allait faire les efforts nécessaires pour m'aider à le sauver, c'était certain. Ce long silence qui nous enveloppait fut soudain percé par un hurlement : Le sien. Je sursautais et me crispai, ne comprenant pas ce qu'il me demandait d'arrêter. De le tenir? De le serrer contre moi? C'était pourtant lui qui m'avait demandé de le faire. Et lui qui était si faible, comment trouvait-il la force de hurler de cette façon. Lorsque je me reculai doucement pour le regarder, je croisai un regard terrifié. Je n'eus pas le temps de dire quoi que ce soit, étant moi-même pétrifié d'horreur puisque je ne comprenais pas ce qu'il se passait, que Liam se mit à bouger, pris d'une soudaine panique. Ces mouvements devinrent rapidement brusques et je tentai de le garder contre moi, en vain. Cette soudaine force et vivacité provenait sans aucun doute de cette peur panique qui l'habitait, mais pourquoi avait-il peur? A cause de ses souvenirs? Il avait réveillé quelque chose qui l'effrayait à ce point?... Malgré ma force, il réussit à se faufiler et quitta mes bras en hurlant pour se précipiter hors du lit. Il n'était cependant pas capable de tenir debout et je n'eus pas le temps de le rattraper qu'il était déjà tombé par terre.

Panique totale. Pas que pour lui : Pour moi aussi. J'avais le souffle coupé, le coeur qui battait à tout rompre : J'étais dans le flou le plus total parce qu'en dehors de hurler, Liam ne me disait pas ce qu'il avait revu, ce dont il s'était souvenu. En l'observant, je me rendis soudain compte qu'il ne me regardait plus du tout mais qu'il fixait les draps. Mon regard se porta sur l'endroit où Liam avait fixé ses yeux mais je ne vis rien à part ces draps. Plusieurs fois, mon regard alla des draps à Liam, de Liam aux draps, sans comprendre. Il voyait quelque chose que moi je ne voyais pas. Il voyait... Des rats? Etait-ce bien de cela qu'il parlait à travers ses hurlements? Etait-il en pleine hallucination? Alors, cela voulait-il dire qu'au lieu de se souvenir il était en train d'halluciner et que son état s'aggravait? Avais-je moi-même provoqué cela? Ou était-il justement en train de souvenir? Etait-il en train de revivre ce qu'il avait vécu? Seigneur... Lorsque mon regard se reporta une nouvelle fois sur Liam, je le vis en train de ramper au sol et lorsque Liam croisa mon regard, au lieu d'y lire du soulagement (je pensais le rassurer, lui faire comprendre que ce qui lui faisait tant peur n'était qu'une illusion que moi-même je ne voyais pas), j'y lus une nouvelle panique, encore plus grande. Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas ce qui venait d'amplifier sa panique. Quand il se mit à pleurer, je fis un mouvement, près à me lever en murmurant doucement son nom pour essayer de le rassurer mais ce fut alors pire que tout. Sa panique n'en fut que plus grande. Entre deux sanglots, il cria mon nom, me demanda de l'aider mais comment pouvais-je le faire alors qu'il avait si peur de moi? Pendant un instant, je n'osai plus bouger, ayant trop peur d'aggraver la situation. Puis, je décidai que je ne pouvais pas le laisser comme ça. Même s'il ne me voyait plus, même s'il ne m'entendait plus, même si à ma place il voyait une chose qui l'effrayait, je devais essayer de l'aider, essayer de le ramener à la réalité, à ma réalité, à notre réalité... Je me levai alors et m'avançai doucement vers lui, mains levées en signe de paix pour lui montrer que ce qu'il voyait ne lui voulait aucun mal. Malheureusement, ses cris redoublèrent d'intensité... Je n'étais cependant pas décidé à abandonner. Je m'avançai donc jusqu'à sa hauteur et posai mes mains sur ses épaules. Est-il utile de vous dire que cela ne fit qu'empirer les choses?... Mais je ne pouvais pas abandonner, je ne pouvais pas juste sortir de cette pièce et demander de l'aide à Mathilda. C'était impossible. Je devais aider Liam. Je devais être là pour lui. Je devais...

Bon sang, je ne savais pas réellement ce que je devais faire à part rester à ses côtés....

Lorsqu'il fut pris de nausées et finit par vomir, je ne m'en occupais pas, bien trop préoccupé par sa terreur. Pourquoi m'occuper de quelques restes de nourriture? Croyez-vous vraiment que j'allais être choqué par cela, ou même dégouté? Si oui, vous oubliez que j'ai fait la guerre, vu la guerre, vécu la guerre et que des images bien pires que celle-ci étaient gravées dans ma mémoire. Mes pensées étaient cependant bien loin de ce traumatisme toujours présent en moi. Mes pensées étaient toutes dirigées vers Liam. Mes mains se crispèrent sur ses épaules et j'essayai tant bien que mal de le forcer à me regarder, à me regarder vraiment, à me voir. Je lui répétais que j'étais là, que c'était moi qui était près de lui et non pas une hallucination terrible et sordide... Mais cela n'y faisait rien. J'avais beau le serrer, lui parler, crier même, il hurlait, pleurait, et vomissait. Finalement, je décidai soudain de tenter le pour le tout et de le prendre carrément dans mes bras avant de murmurer quelques mots à son oreille « C'est moi Liam. C'est Sam... Je suis là... Fais-moi confiance, je ne te veux aucun mal... Je t'aime... ». C'était malheureusement de pire en pire. Bientôt, je me mis moi aussi à pleurer tant j'étais effrayé par son état et alors que je le serrai contre moi, je l'entendis suffoquer. Je ne pouvais pas repousser l'aide de Mathilda plus longtemps... Au moment où je commençai à murmurer son nom, cette dernière entra dans la pièce. Je sentis tout le corps de Liam se crisper davantage et il tenta, en vain, d'échapper à mes bras : Il était trop faible pour pouvoir me faire lâcher prise, contrairement à moi qui, malgré la situation, possédait toujours la même force. J'ignore combien de temps passa mais à un moment je tenais Liam dans mes bras et l'instant d'après, j'étais contre le mur, les mains plaquées contre ma bouche : Mathilda venait de me pousser et d'enfoncer une seringue dans le bras de Liam. Il hurla encore nos noms, à moi et Mathilda, pendant un instant avant de s'écrouler au sol, inconscient. J'étais incapable de bouger, pétrifié d'horreur et il me fallut un certain pour me rendre compte que Mathilda me parlait.

-...moi! SAMUEL!

Je sursautai et glissai mon regard sur elle.

-Je t'ai demandé de m'aider à le remettre dans son lit! Vite!

Tel un robot, je me levai et l'aidai à remettre Liam sous les draps. Mon regard se porta sur mon Amour pendant un instant, je glissai ma main sur sa joue avant de déposer un baiser sur son front et entendit la voix de Mathilda s'élever derrière moi.

-J'avais raison de ne pas te parler de son état! J'en étais sûre, j’étais certaine qu’il ne fallait pas que tu le voies !

Je me redressai et me retournai doucement vers elle. Le regard froid et assassin que je lui réservais avait disparu : J'étais trop déboussolé pour me souvenir de ma haine à son égard.

-Bon sang, mais qu’est ce que tu as fais pour le mettre dans un état pareil?!

-Rien...

Murmurai-je tout bas, d'une voix cassée que je ne me connaissais pas.

-Arrête ! C’était une véritable crise d’hystérie, ça n’arrive pas pour rien, c’est forcément de ta faute.

-Je t'ai dit que...

-Oh non Samuel, ça ne va pas se passer comme ça!

Elle glissa son regard sur Liam et m'intima de sortir de la pièce, ce que je fis sans même essayer de protester. Une fois à l'intérieur de l'infirmerie, elle posa sur moi un regard froid, déterminé. Je soupirai avant de me laisser tomber sur une chaise et de me frotter le visage.

-Dis-moi ce que tu lui as fais!

Je restai silencieux, réfléchissant à ce qu'il s'était passé. Comment avait-il pu terminer dans un tel état de terreur? Je lui avais demandé d'essayer de se souvenir de ce qui lui était arrivé de façon à le guérir et le sauver, il avait accepté, s'était plongé dans les souvenirs et il avait cru voir...

-Des rats.

Un bref silence.

-Quoi?

Je retirai les mains de mon visage et relevai mon regard vers Mathilda qui me regardait sans comprendre ce à quoi je faisais allusion. Comment l'aurait-elle pu? Je devais m'expliquer.

-J'ai... J'ai pensé qu'il y avait autre chose... Tu as cherché ce qu'il avait mais tu n'as rien trouvé et tu n'as pas compris pourquoi il avait tous ces symptômes qui ne pouvaient pas venir d'un choc à la tête. Et j'ai pensé à ça... Je me suis dit qu'il avait oublié quelque chose d'important, quelque chose qui pourrait t'aider à le sauver et je lui ai demandé de faire un effort pour se souvenir et... Il l'a fait... Il l'a fait... Et après un moment, il est devenu hystérique, il a dit qu'il voyait des rats partout... C'était comme si la pièce en était envahi et il en avait très peur. Pourquoi, j'en sais rien mais c'est ça qu'il voyait. Et... Quand j'ai voulu essayer de le calmer, je me suis rendu qu'il avait aussi peur de moi. Je ne sais pas ce qu'il a vu mais... Il a aussi eu peur de toi quand tu es entrée...

Je m'arrêtai là, n'ayant pas besoin d'en dire plus et surtout, n'ayant rien de plus à dire à Mathilda. Je lui avais dit ce qu'il s'était passé et ce que Liam avait cru voir. Ce que moi, j'avais vu, était au-delà de ce que je pouvais supporter. Le voir mourant avait été terrible mais le voir dans un tel état d'hystérie, le voir paniquer à ce point, pleurer, hurler... La main de Mathilda se posa brièvement sur mon épaule et je réalisai qu'elle s'était rapprochée et que je pleurais.

-Va prendre une douche.

Et comme je lui avais obéi quelques instants auparavant, j'acceptai une nouvelle fois sans broncher, me levai et quittai l'infirmerie. Je restai un long moment sous la douche à pleurer, à trembler, ayant particulièrement du mal à me remettre de ce qu'il venait de se passer. Une fois séché et habillé, je restai un long moment dans ma chambre, assis sur mon lit, sans oser bouger ne serait-ce qu'un orteil. Immobile à la manière d'une statue, je restais là, mon regard fixé sur cette porte que je n'osais pas franchir. Je réalisai qu'à cause de mon envie de sauver Liam, j'avais probablement accéléré l'aggravation de son état... J'avais tellement bercé dans mon illusion qu'il pouvait encore être sauvé que j'avais finalement fait tout l'inverse de ce que je souhaitais : J'avais précipité sa mort. Mort... Non. Il ne l'était pas! Pas encore! Et je lui avais promis d'être à ses côtés, de ne pas l'abandonner! Je me redressai, pris mon courage à deux mains et pris la direction de l'infirmerie, le coeur serré, la peur au ventre. Lorsque j'entrai, Mathilda ne s'opposa pas à ce que je retourne auprès de Liam : Il dormait paisiblement alors je ne risquais pas de provoquer une nouvelle crise d'hystérie. Lorsque j'entrai, je remarquai tout de suite que Mathilda avait nettoyé la pièce, et Liam. Elle l'avait changé et avait pris soin de lui. Je l'avais détestée pour la façon dont elle l'avait traité alors qu'en fait, elle le traitait avec toute l'attention qu'il méritait. Des excuses? Pas pour tout de suite. Pourquoi? Parce que, même si elle s'occupait bien de Liam, m'excuser auprès d'elle n'était ma priorité : C'était Liam ma priorité. J'avais sans doute fait beaucoup de dégâts en le forçant à se souvenir et je ne pouvais que prier pour qu'il se réveille et que je puisse être à ses côtés jusqu'au bout. Surtout, je souhaitais pouvoir lui apporter la paix avant... Avant qu'il ne s'en aille pour toujours. Je dois avouer que je ne pensais même plus à ma propre mort qui allait très vite suivre la sienne : Il n'y avait que lui dans mes pensées. Lui. Lui seul. Rien d'autre. Rien. Les minutes passèrent... Les heures passèrent... Je finis par m'endormir sur ma chaise, ma main dans celle de Liam, essayant ainsi de le raccrocher à moi, à la vie, à ce qu'il en restait. Mon sommeil n'était pas très profond, sans rêves et je savais qu'au moindre mouvement de Liam, j'allais me réveiller et en fait, je n'attendais que ça : Sentir ses doigts se serrer doucement aux miens pour me faire comprendre qu'il était enfin réveillé. Cela n'arriva cependant pas. Lorsque je m'éveillai, j'ignorais combien de temps j'avais dormi mais ça m'était égal : Ce qui me préoccupait était le fait que Liam ne se soit toujours réveillé. Il n'avait même pas esquissé le moindre geste dans son sommeil. Je retirai ma main de la sienne et me relevai avant de sortir de la pièce, plus inquiet que jamais. Là, je trouvai Mathilda, assise à son bureau, plongée dans ce qui semblait être des recherches. Quand elle m'entendit, elle leva le nez et posa son regard sur moi.

-Il est réveillé?

Je hochai négativement la tête et la vis baisser la sienne. Il y eut un bref silence avant que je finisse par lui demander ce qu'elle lui avait donné. Elle me répondit sans relever la tête qu'il était sous sédatifs mais que la dose qu'elle lui avait donnée n'aurait pas dû le faire dormir plus de 12 heures et qu'elle ne comprenait pas ce qu'il se passait. Je baissai doucement le regard : Si elle même ne comprenait ce qui arrivait à Liam, alors les choses étaient encore plus graves que je ne le croyais... En la voyant se replonger dans ses recherches, j'eus soudain une lueur d'espoir tellement brillante que j'en vins même à esquisser un sourire.

-Tu as trouvé ce qu'il a?!

Elle releva le regard vers moi, et resta un moment silencieuse avant de me dire qu'elle n'avait rien trouvé. Ma belle lueur d'espoir se teinta de gris avant de devenir aussi noire que de l'encre. Je tournai les talons et retournai dans cette pièce sordide, cette pièce sombre, cette pièce où se jouait sous mes yeux la mort de l'être qui comptait le plus au monde pour moi. Cette pièce où j'allais assister à la disparition de Liam, avant d'être l'acteur de la mienne. Mathilda ne revint pas me dire de partir, d'aller dormir dans ma chambre : Je voulais rester auprès de Liam et elle le savait parfaitement. Seulement les heures passèrent encore, et encore, et encore et je fus incapable de fermer l'oeil, ayant trop peur que Liam ne se réveille et que je ne m'en rende pas compte ou pire... J'avais peur de m'endormir, de me réveiller et de le trouver mort. En restant éveillé, je pouvais voir son torse se soulever doucement, tout doucement, mais au moins, son coeur battait, ses poumons se remplissaient d'oxygène avant de se vider : Il respirait. Il vivait. La fatigue amplifia ma peur, mon inquiétude, mon impatience... Impatience parce que je savais qu'à côté, Mathilda n'avait pas abandonné et continuait à chercher ce que Liam avait. Mais dans cette pièce, à appréhender chaque respiration de Liam de peur que ce soit la dernière, j'avais l'impression de devenir fou. J'avais perdu la notion du temps et lorsque je me levai et rejoignis Mathilda, j'ignorais qu'en réalité je n'avais pas dormi depuis presque deux jours. Au lieu de lui demander avec gentillesse ce qu'elle avait peut-être trouvé, je lui tombai dessus, agressif.

-Dis-moi ce qu'il a!

-Je n'en sais rien.

-Tu passes ton temps à chercher! Tu dois bien avoir trouvé quelque chose maintenant!!!

Et fidèle à elle-même et surtout parce que je n'avais en fait aucune raison valable de lui parler de cette façon, elle me répondit avec froideur qu'elle n'était pas devin et que si Liam se réveillait -elle insista sur le « si » pour bien me faire comprendre qu'il était possible qu'il ne se réveille pas- il risquait de refaire une crise d'hystérie et qu'il était de toute façon préférable qu'il dorme. Je sentis mes épaules s'abaisser et cette agressivité qui était en moi disparut en un clin d'oeil. Lorsque je retournai m'assoir auprès de Liam, j'étais plus désespéré que jamais. Je restai encore à l'observer un long moment avant de me remettre à pleurer, tenant sa main avec fermeté entre mes doigts, la portant à ma joue, à mes lèvres : Je voulais tant qu'il n'esquisse qu'un tout petit geste... Un seul petit geste... Mais rien. Rien... Lorsque je sentis la main de Mathilda se poser sur mon épaule, j'avais l'impression qu'il s'était écoulé plusieurs jours alors qu'en réalité, il ne s'était probablement écoulé que quelques heures. Sans me demander de lâcher la main de Liam, elle l'examina pendant quelques instants avant de se tourner vers moi. Je n'avais presque plus d'espoir mais elle ne m'épargna pas : Pourquoi l'aurait-elle fait? Je préférais de toute façon savoir la vérité. Elle était très inquiète et m'annonça que le sommeil de Liam ressemblait à un coma car cela ne pouvait pas venir de ce qu'elle lui avait donné. Coma. Coma. C. O. M. A. L'avant-propos de la mort... Elle quitta la pièce en me laissant de nouveau seul avec Liam. Elle pouvait continuer à chercher si elle le voulait mais cela n'allait rien changer. Cette fois-ci, c'était terminé : Il allait réellement mourir. Il allait à jamais me quitter. Je quittai ma chaise et me fis une petite place dans le lit à côté de Liam. Je me serrai tout contre lui et posai ma tête sur son torse afin de le sentir se soulever et s'abaisser, afin d'entendre les battements -trop faibles- de son coeur. Ma main était accrochée à son épaule et je finis par murmurer des mots, tout bas... Des mots de tendresse, des mots d'amour, que je répétais encore et encore... J'avais toujours entendu dire que les personnes qui étaient dans le coma entendaient ce qu'on pouvait leur dire pendant qu'ils étaient inconscients. Alors... Alors, je voulais que Liam m'entende. Même s'il ne devait plus jamais ouvrir les yeux, même si là, contre ma joue, je devais entendre cesser les battements de son coeur, je voulais être la dernière personne qu'il entendrait, je voulais qu'il parte en m'entendant lui dire à quel point je l'aimais, je ne voulais pas qu'il parte... Seul. J'allais être avec lui, jusqu'à la fin. J'allais lui parler, jusqu'à la fin. J'allais l'aimer, jusqu'à la fin. Non... J'allais l'aimer bien au-delà de la fin. J'étais dans une sorte de stase, en train de répéter ces mots doux, sans m'arrêter, et cela dura probablement un long moment. Le sommeil me guettait mais je luttais, refusant de fermer les yeux.

-Samuel?

Qu'est-ce qu'elle voulait?... Elle ne pouvait pas nous laisser tranquille? Puisque c'était la fin, elle n'avait qu'à me laisser avec lui, où était le problème? Mais très vite, je regrettais ces pensées : Elle ne s'inquiétait plus que pour lui... Elle s'inquiétait pour moi aussi.

-Tu devrais aller te reposer.

Un bref mouvement de ma tête, toujours posée sur le torse de Liam, lui indiqua clairement que je ne voulais pas bouger de là.

-Je t’appellerai s’il se réveille.

Ma main se crispa sur l'épaule de Liam : Il n'allait pas se réveiller. Il allait s'endormir pour l'éternité et je devais être avec lui au moment où ça allait arriver. Il ne pouvait pas mourir seul. Mathilda était cependant très têtue et elle insista.

-Tu as besoin de repos Samuel, va-t-en. Il n’y a aucun changement pour le moment…

Il y avait beaucoup de vrai dans ce qu'elle disait. J'étais épuisé. J'avais besoin de repos et il n'y avait aucun changement. Je me redressai doucement et plongeai mon regard dans le sien. A sa tête, je compris que je devais probablement faire peur.

-Préviens-moi si ça s'aggrave s'il te plait... Je ne veux pas qu'il soit seul quand...

Oh, je m'arrêtai là et ne terminai pas ma phrase. Y penser était une chose, mais dire à voix haute « Quand il va mourir » était au-dessus de mes forces. Elle comprit cependant où je voulais en venir et accepta d'un bref mouvement de la tête avant de retourner à côté. Je restai encore un moment auprès de Liam, le fixai tout en gardant ma main posée contre son torse afin de sentir ses respirations. Puis, je finis par me pencher, déposer un baiser sur ses lèvres avant de murmurer quelques mots.

-Attends-moi... Je t'aime.

J'eus la mauvaise surprise de trouver Lilly dans ma chambre en y retournant. Mauvaise parce que je n'avais envie de voir personne. La seule chose que je voulais, c'était dormir et ne plus penser à rien (Mathilda m'avait donné quelque chose pour essayer de faire en sorte que je dorme d'un sommeil profond et sans rêves, ce qui n'était pas gagné). Je n'avais pas envie de parler avec Lilly, pas maintenant... Aussi, je lui demandai de quitter les lieux, avec peut-être un peu trop de froideur. Cela lui fit du mal et avant qu'elle ne sorte, je l'arrêtai d'un geste et la pris dans mes bras. La pauvre dut faire face à mes sanglots pendant des longues minutes. Je l'écrasai presque dans mes bras et pourtant, elle me consola. Lorsqu'elle quitta finalement ma chambre, après avoir obtenu de ma part quelques nouvelles de Liam (Je n'en avais cependant pas trop dit), je m'allongeai sur mon lit sans même prendre la peine de me déshabiller et m'endormis.

-Sam? Je veux te montrer quelque chose.

Je me retourne et observe Liam : Il a ce petit sourire en coin qui me fait tant craquer... En le voyant ainsi presque sautiller sur place, je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire à mon tour. Il a l'air tellement heureux. Moi aussi je le suis. Plus le temps passe, et plus je suis heureux. J'ai à mes côtés un homme merveilleux, que j'aime de tout mon coeur et qui me rend tout mon amour. Certes, nous nous cachons encore des autres mais je sais qu'un jour, il sera prêt : J'ai une confiance aveugle en lui. Je referme le livre sur lequel j'avais jusque là porté mon attention et regarde Liam. En fait, non, je ne le regarde pas : Je le dévore des yeux.

-Qu'est-ce que c'est?

-Tu dois d'abord fermer les yeux.

J'hausse un sourcil.

-C'est une surprise. S'il te plaît...

Je secoue presque imperceptiblement la tête avant de fermer les yeux : N'ai-je pas dit que j'avais une confiance aveugle en lui? Je sens qu'il dépose quelque chose au creu de mes mains, je l'entends murmurer « Vas-y, tu peux ouvrir les yeux maintenant. » et obéis : Je découvre alors deux pellicules qui, cela ne fait aucun doute, sont prêtes à être utilisées. Mon sourire s'efface sous la surprise et je sens les larmes me monter aux yeux. Pendant un instant je reste sans voix. Puis, je finis par être capable de bredouiller quelques mots.

-Tu... Tu as... Tu...

Pas terrible, mais je ne sais pas quoi dire. J'allais pouvoir prendre des photos! Je vais pouvoir revivre ma passion grâce à lui. En une seconde, les pellicules terminent sur mon bureau et mes lèvres terminent sur celle de Liam. Entre deux baisers remplis de fougue et d'amour je murmure des « Merci! ». Ma première photo est bien sûr une photo de Liam. Il n'est pas très partant mais finit par accepter. Puis, je prends des photos des jumeaux, de nous deux, d'eux trois, de Lilly, de la communauté, j'enferme des souvenirs dans mon appareil, comme je l'ai tant fait par le passé. Ce sont des moments merveilleux, des moments uniques, comme ces photos le seront. Le soir, une fois que Liam a quitté ma chambre pour aller dormir dans la sienne auprès des jumeaux, je décide d'aller me coucher : La journée a été particulièrement remplie. J'ai pris de nouvelles photos et après avoir terminé la pellicule, j'ai développé les photos qui sont absolument merveilleuses. Je dois bien avouer que j'ai une préférence pour celles où on peut voir Liam. De cette façon, je peux toujours l'avoir près de moi. Bon, il ne quitte jamais mes pensées, c'est vrai, mais pouvoir regarder cette image de lui, pouvoir poser une dernière fois mon regard sur lui avant de m'endormir... Je fronce les sourcils, quelque chose ne va pas sur la photo. Pourtant, elle était parfaite il y a encore quelques minutes. Mais là, je me redresse, l'attrape et me retrouve pétrifié d'horreur : A la place de l'homme que j'aime, c'est un squelette qui se trouve sur la photo.


Mon propre hurlement me réveilla. Un sommeil sans rêves... C'est ça... Je décidai d'aller prendre une douche : J'avais beaucoup transpiré durant mon sommeil. Sur le chemin du retour, alors que je devais probablement donner l'impression d'être un zombie, j'entendis des pas derrière moi et me retournai. Je vis Mathilda s'arrêter à ma hauteur et mon coeur manqua un battement : Il était arrivé quelque chose à Liam. Ce rêve n'était pas qu'un rêve : C'était la réalité. Il était mort! Elle avait un visage impassible lorsqu'elle me demanda de la suivre car elle avait peut-être trouvé quelque chose. Je l'accompagnai à l'infirmerie, sans pour autant avoir le moindre espoir : Liam était dans un état très grave et ce qu'elle me dit, une fois là-bas, me conforta dans cette idée.

-J'ai fini par trouver quelque chose. Ca pourrait être la Leptospirose. Tu as bien dis qu'il croyait voir des rats?

J'acquiesçai d'un bref hochement de tête. Cela ne s'était passé qu'un peu plus de deux jours plus tôt mais c'était encore très vif dans mon esprit, et en même temps, j'étais tellement épuisé que j'avais l'impression que cela s'était passé depuis plus longtemps que cela.

-Oui… Les symptômes collent mais la guérison est très longue… Il faut qu’il tienne le coup, qu’il se réveille. On va commencer une antibiothérapie par intraveineuse, au cas où…

Oui, au cas où. Mais comme elle le disait si bien, encore fallait-il qu'il se réveille. J'oubliai la douche : Maintenant que j'étais de retour dans cette pièce, je n'allais plus le quitter. J'avais obéis, j'avais pris quelques heures pour me reposer et le résultat avait été un cauchemar terrible qui m'avait donné l'impression de ne pas avoir dormi, bien au contraire. Je retournai donc m'installer auprès de Liam mais plutôt que de prendre place sur le lit, je m'installai sur la chaise : Il était sous perfusion et je ne voulais pas prendre le risque de lui faire mal même si, au fond de moi, je pensais qu'il ne devait plus ressentir grand chose à présent. Peut-être m'entendrait-il malgré tout si je lui parlais?... Ma main retrouva la sienne et doucement, je me mis à lui raconter mon rêve, en évitant soigneusement la partie où son image était devenue un squelette... Mathilda revint plusieurs fois vérifier s'il y avait un changement dans son état mais il ne se passait rien : Je le savais, le voyais, le sentais. A un moment, ce fut cependant plus fort que moi : Je ne pus m'empêcher de demander à Mathilda s'il allait mieux. Je connaissais la réponse, mais peut-être avais-je besoin de l'entendre pour vraiment accepter cette idée.

-Pour l'instant, il ne va pas beaucoup mieux. La guérison est longue et compliquée.

Je serrai les dents. Elle m'observa un moment avant de regarder sa montre et d'ajouter :

-Il est comme ça depuis 78 heures. Je dois être honnête avec toi... J'ignore s'il se réveillera un jour...

-Je sais...

Murmurai-je avant de laisser le chagrin m'envahir. Mathilda me prit la main, geste qui me surprit, et je la regardai à travers mes yeux noyés de larmes. Je parvins à esquisser un maigre sourire et à dire tout bas quelques mots.

-Tu as fait tout ce que tu pouvais... Merci Mathilda...

Elle relâcha ma main et quitta la pièce très rapidement : Me voir dans cet état ne devait pas l'aider. J'ignorais comment elle pouvait se sentir. Elle était son médecin, c'était son travail de soigner les gens et quand elle échouait, cela devait être difficile même si elle avait sans doute réussi à se construire une carapace au fil du temps. Mais Liam... Ne pas sauver Liam... Ca devait être particulièrement difficile. Je n'étais cependant pas en état de m'occuper de sa peine, d'aller la consoler : J'étais trop mal pour cela. Je l'avais su. Je l'avais su dès qu'elle avait dit qu'il était dans le coma. Je savais qu'il n'allait plus jamais se réveiller. C'était... Je ne peux pas vous décrire ma douleur tant elle était cuisante, déchirante, insupportable. Cependant, malgré cette douleur, je n'allais pas bouger d'un centimètre. J'allais rester à ses côtés, lui tenir la main : Je m'étais juré de ne pas le laisser partir seul et j'allais être là jusqu'au bout. Je mis à parler de nouveau, j'inventai d'autres rêves que j'aurais pu faire, lui racontai ce que j'aurais pu y voir, ce que nous aurions pu y faire, j'imaginai à haute voix notre vie autrefois future et qui n'était à présent plus qu'une illusion, un doux rêve qui ne deviendrait jamais la réalité. Et puis, ma voix finit par fatiguer, par se casser, par s'éteindre : Je pleurais trop pour continuer à parler. Mes larmes continuèrent à couler pendant un long moment... Jusqu'à ce que je sois trop fatigué pour pleurer... Ma main quitta alors celle de Liam et je pris mon visage entre mes mains : J'étais désespéré. Cette attente était pire que tout. Attendre la mort... Sa mort... C'était un supplice de damné auquel personne ne pouvait mettre fin... Parce que je n'étais pas assez fort pour le soulager et le tuer avant de me tuer... Parce que je n'étais pas assez fort pour lui ôter ce petit souffle de vie qui lui restait. J'étais trop faible. Trop... Faible...

Je relevai le visage et fixai les draps qui ne bougeaient toujours pas, signe que Liam était toujours plongé dans un coma profond. Et si je n'étais pas si faible? Et si je cherchais en moi le courage pour accomplir cet acte qui nous libèrerait tous les deux? Ca pouvait aller très vite. Il me suffisait d'injecter ce qu'il fallait dans sa perfusion avant de me tirer une balle dans la tête. Oui, quoi de plus simple? Il avait été fort. Lui, il avait été fort... Il avait affronté sa peur pour essayer de survivre et à présent, je devais être fort pour le soulager et lui permettre de partir. Je devais être fort. Je devais...

-Samuel…

Rien qu'un murmure, et pourtant... Mon coeur se mit à battre plus vite... C'était pourtant idiot car cela ne devait être que l'effet de mon imagination, que mon esprit qui décidait de me faire entendre la voix de Liam de façon à m'éloigner de mon but, de mon dernier but. Pourtant, lorsque je me risquai à tourner mon visage et poser mon regard sur Liam, je vis ses yeux ouverts, un tendre sourire étirant ses lèvres. Je fermai les yeux un instant avant de les rouvrir pour être sûr que je ne rêvais pas. Lorsque je les rouvris, Liam me regardait toujours avec ce petit sourire aux lèvres. Je recommençai plusieurs fois à fermer les yeux parce que je n'arrivais vraiment pas à y croire. Pourtant, à chaque fois que je les rouvrais, il me regardait. Il me souriait. Il était réveillé. Réveillé! Très vite, les larmes recommencèrent à couler sur mes joues et je sentis mes lèvres s'étirer en un large sourire. J'étais tellement soulagé que je ne pus m'empêcher de laisser échapper un bref rire. Mes lèvres, sèches, craquèrent, ma mâchoire me fit un mal de chien tant sourire m'était devenu douloureux ces derniers jours, mais je n'y prêtai pas attention. Non. Peu m'importait la douleur, quelle qu'elle puisse être : Liam était réveillé et il était vivant. Rien d'autre ne comptait. Je posai mes mains sur ses joues et me penchai vers lui avant d'embrasser son front, ses joues, son nez puis ses lèvres : Oui, j'embrassai avidement ses lèvres avec amour avant de me reculer pour le regarder.

-Tu es réveillé! Tu es... Tu es réveillé! Oh... Ah... Mathilda a trouvé ce que tu avais et elle te soigne!

C'était sorti très vite, plus vite que je ne l'avais pensé mais j'avais eu cette soudaine pensée qu'il fallait que je le lui dise tout de suite au cas où... Au cas où il se rendormirait. J'étais persuadé que s'il savait, il allait encore plus se battre même s'il s'était déjà énormément battu. Oui, il avait été très courageux et ça aussi, il devait le savoir.

-Tu as été si fort... Tu n'a pas abandonné, tu as lutté jusqu'au bout... Merci... Merci d'avoir combattu... Merci...

Mon pouce glissa sur ses lèvres.

-Je t'aime tellement...

Et avant qu'il n'ait pu me répondre, je reposai mes lèvres sur les siennes. Si j'ai été incapable d'expliquer ma douleur, je peux vous expliquer mon bonheur. Rien n'était encore gagné, je le savais, parce qu'il avait encore un long chemin à parcourir mais ce réveil... Ce réveil était le premier pas vers la guérison. Ce réveil était mon réveil. Ce réveil était ma lueur d'espoir. J'avais bien sûr encore très peur de le perdre mais j'avais aussi une nouvelle confiance en l'avenir, en notre avenir. J'oubliai que quelques minutes auparavant, j'avais pris la décision d'en finir avec ses souffrances avant d'en finir avec les miennes. Tout avait changé à présent : Il s'était battu et allait devoir continuer mais il n'allait pas être seul. J'allais être à ses côtés et Mathilda... Mathilda...

-Mathilda!

Je vis Liam faire la grimace parce que j'avais crié et lui murmurai des excuses tout bas avant que Mathilda n'entre précipitamment dans la chambre, visiblement effrayée, pensant probablement que je l'appelais parce que Liam allait encore plus mal. Cependant, en voyant mon sourire, elle porta son regard sur Liam et put voir par elle-même ce qu'il en était. Quant à moi, je gardais précieusement les mains de mon Amour dans les miennes et remerciait secrètement le Ciel, même si je n'avais pas prié depuis des lustres, d'avoir eu la clémence de ne pas m'enlever Liam.
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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeJeu 24 Fév - 5:58

Mon sourire ne pu que s’élargir, à en devenir douloureux, lorsque je vis Samuel cligner plusieurs fois des yeux comme s’il croyait avoir une hallucination. Non mon Amour, tu ne rêves pas. Je suis là, vraiment là. Très soudainement, de nouvelles larmes vinrent mouiller ses joues sans que je n’en comprenne la raison. Etaient-ce des larmes de joie ? Avait-il réellement cru que je m’en irai comme ça ? Sûrement, mais j’étais là. Pour l’instant, j’étais de nouveau là. Heureusement, un sourire resplendissant vint très vite éclaircir ce visage que j’aimais tant, ce visage qui ne me quittait jamais, et lorsqu’il laissa échapper un bref rire, je ne pu m’empêcher de sourire encore plus largement. En l’espace de quelques secondes Samuel semblait avoir retrouvé sa joie de vivre, son bonheur, sa vie même. Lorsque je m’étais réveillé j’avais aperçu un homme fatigué, un homme brisé qui désormais avait complètement disparu. Le Samuel que j’aimais plus que tout au monde était de nouveau de retour, pour mon plus grand bonheur. Ce Samuel rieur, joyeux et incroyablement beau lorsqu’il sourit… C’est cliché, n’est ce pas ? Pourtant je ne saurais trouver de mots plus fins pour décrire cet homme pour lequel mon cœur s’était de nouveau mis à battre avec frénésie. D’ailleurs, je cru qu’il allait carrément lâcher lorsque Samuel se pencha soudainement vers moi pour m’embrasser partout où il pouvait poser ses lèvres. Chaque parcelle de mon visage fut recouverte de son amour jusqu’à ce que ses lèvres ne rejoignent les miennes et qu’il m’embrasse avec une avidité qui n’était que le reflet de la mienne, même si bien plus faible. Ce contact, ce simple baiser me donnait encore davantage de force en dépit de mes douleurs toujours bien présentes. J’avais l’impression que nous ne nous étions plus embrassés depuis des siècles, que nous le ferions plus jamais de cette manière, avec autant de bonheur, autant de soulagement… Et très vite, mon sourire disparu totalement tandis que Samuel se reculait. Du soulagement… Mais pour quelle raison ? Je m’étais réveillé après, j’en avais la certitude, de longues heures d’absence et pourtant… Pourtant cela ne changeait rien à la donne, au fait que j’allais le quitter, même si plus tard. Pourquoi nous réjouir ici d’un simple délai, d’une trêve gracieusement accordée ? Je n’en savais rien. Au fond il était certainement malsain que de rire en ces instants, les dévorer comme des fruits juteux or je n’éprouvais pas le désir de mettre fin au sourire de Samuel. Si le mien avait déserté, je voulais néanmoins profiter de lui, de ce bonheur visible, conserver comme je le souhaitais cette image parfaite qu’il m’avait toujours offert durant notre relation. Qu’importe que cela soit sain ou non, qu’importent les larmes qui viendraient de nouveau… Qu’elles viennent… Qu’elles viennent et détruisent tout ce en quoi nous croyions, qu’elles m’emportent avec elles mais cet instant, ces quelques secondes d’insouciance personne ne pouvait les gâcher. Elles n’appartenaient qu’à nous, et à nous seuls.

Sa joie m’emplissait le cœur, parfumait la pièce d’une odeur singulière de cannelle. J’adorais par-dessus tout la cannelle, voici la seule raison à cette impression. Natacha portait un parfum mêlé de cannelle… Je relayai rapidement cette pensée pour me concentrer sur Samuel, sur mon Amour, dont la voix au débit rapide, excité, me rendait inexplicablement heureux de nouveau. On aurait dit un enfant tant son bonheur était visible, pur, et cela me faisait sourire, comme si souvent. Pourtant, je ne pu que froncer les sourcils lorsqu’il m’annonça que Mathilda avait trouvé ce dont je souffrais et qu’elle me soignait. Oh non… Non… Tout mais pas ça…Samuel avait perdu la raison. Il était devenu dingue de trop m’attendre, fou de douleur, il avait perdu la raison ! Non…Non…Je n’allais pas guérir. C’était impossible. Tout bonnement impossible. Mathilda ne pouvait avoir trouvé la cause de mes souffrances ; Il n’y en avait aucune. J’allais mourir, voilà tout ce que je savais et tout ce que je croyais. Un éclair de souffrance me traversa tout entier et je ne fus pas capable de l’arrêter lorsqu’il me dit à quel point il me trouvait fort. J’éprouvai soudainement l’envie de l’arrêter, de le remettre dans le droit chemin, quand bien même ce dernier serait atroce. Il me remerciait même… Comme cela était horrible, comme supporter ces paroles m’arrachait le cœur… J’avais cru mourir en le voyant reprendre espoir ; Cela n’était rien en comparaison de cette certitude, complètement déraisonnée et utopique, que j’allais survivre. Son pouce coura sur mes lèvres avant qu’il ne dise m’aimer. Je n’eus pas le temps d’esquisser un sourire dans mon horreur, ou même prononcer un mot, que ses lèvres plongeaient déjà dans les miennes, nous mélangeant d’une manière particulièrement cruelle. Il m’était impossible d’ignorer tout l’espoir, tout le soulagement qui se trouvaient dans ce baiser et pourtant j’y restais totalement étranger. Pourquoi ? Pourquoi ça ? Pourquoi lui ? Pourquoi étais-je tomber amoureux de cet homme, cet homme merveilleux qui n’aurait jamais dû connaître la souffrance que je lui imposais ? Il en était devenu complètement dingue… Complètement fou… Il se recula alors et cria subitement le nom de Mathilda, qui se répercuta une bonne dizaine de fois contre les parois de mon crâne, m’arrachant un sursaut de douleur. Bon sang… C’était mille fois pire que la pire des pires de mes gueules de bois.

Elle entra précipitamment, visiblement tendue et ce n’était que le commencement. Dès que Samuel lui aurait dit que j’allais guérir, dès l’instant où il partagerait ces folles illusions avec elle, Mathilda tomberait des nues. J’en étais intimement persuadé, et le soulagement qui apparu sur ses traits n’était dû qu’à mon réveil. Il n’était que de courte duré, comme le mien. Pourtant, elle s’avança rapidement vers moi et avant de prononcer le moindre mot observa la perfusion qu’elle m’avait posé, perfusion que je remarquai étonnement seulement maintenant… Est-ce que c’était vrai, alors ? Est-ce qu’elle me soignait réellement ? Je n’osais encore le croire. Elle jeta à Samuel un regard que je ne lui connaissait pas, un regard plein de joie qui dérogeait à son habituelle froideur. J’avais l’impression de vivre un rêve. Peut-être étais-je encore dans mon sommeil profond, peut-être ne s’agissait-il pas de la réalité. Pourtant, Samuel me tenait fermement la main et je sentais très distinctement sa peau contre la mienne, sa chaleur, sa douceur. Je ressentais également ma migraine, mes maux de ventre, mes courbatures. Toute cette douleur ne pouvait être fictive. Et puis, Mathilda se pencha finalement sur moi, prenant son stéthoscope qu’elle posa sur mon cœur et resta quelques instants silencieuse, écoutant attentivement. Elle hocha doucement la tête avant de se reculer, ôter le stéthoscope et me regarder attentivement. Sa voix fut étrangement calme, voire douce.

« J’ai trouvé ce dont tu souffres Liam. Est-ce que tu te souviens de ce qu’il s’est passé ? »

Je secouai lentement la tête en signe de négation. En fait, j’avais bien quelques bribes de souvenir, quelques images en tête mais j’étais bien trop sous le choc pour bafouiller quoi que ce soit. Elle avait vraiment trouvé…Samuel n’était pas dingue… Il ne s’agissait pas réellement de bonheur, j’étais bien trop déboussolé pour être déjà heureux. J’avais tellement cru en ma mort, tellement cru que tout était fini, qu’apprendre le contraire maintenant, bien que ce soit merveilleux, me laissait totalement sans voix.

« Tu as eu de violentes hallucinations, dans lesquelles tu voyais des rats. C’est ça qui m’a donné la piste. Pourquoi ne m’as-tu pas dis qu’on t’avait mordu ? »

Elle fronça doucement les sourcils tandis que je me crispai. Des rats… Oui, je me souvenais maintenant. Je me souvenais très bien de ce jour où je m’étais réveillé, des dizaines de rats me mangeant les doigts. Instinctivement, je serrai un peu plus les doigts de Samuel et me décalai vers lui, contre lui, m’éloignant le plus possible de Mathilda et ses paroles qui me plongeaient dans une nouvelle angoisse. Etait-elle réellement obligée d’aborder ce sujet ? Fallait-il vraiment que nous remuions une nouvelle fois le couteau dans la plaie ? Elle se rapprocha néanmoins de nous et attrapa ma main, avant de me montrer mes doigts sur lesquels on pouvait très distinctement voir de fines traces blanches. Je ne compris pas.

« J’ai pris ça pour des coupures, ce sont en réalités des cicatrices dues aux morsures. Si j’avais su plus tôt… J’aurais compris que tu étais atteint de leptospirose. Après ce coma ton réveil est un signe encourageant de guérison, ceci dit. Comment te sens-tu ? »

J’eus une moue avant de lâcher d’une voix faible :

« Mal. Enfin… J’ai mal à la tête, au ventre, j’ai des courbatures et… des nausées. »

Elle hocha la tête avant de demander :

« Difficultés respiratoires ?

- Ca va mieux, je crois. »

Un fin sourire fit apparition sur son visage.

« Très bien. Tu vas faire une semaine d’antibiotiques puis on spécifiera ton traitement selon l’état dans lequel tu seras après ça. Il va falloir faire très attention à toi, mais ça ira. »

Etrangement, je n’étais toujours pas heureux tandis que le sourire de Samuel ne se fanait pas. Je n’y croyais pas tout simplement. C’était beaucoup trop simpliste, beaucoup trop soudain. Pendant deux semaines Mathilda n’avait rien compris à mon état et d’un coup elle trouvait, savait comment me guérir et me promettait d’être sur pieds bientôt ? Non, il y avait quelque chose qui clochait, et je préférais me l’encrer bien en tête plutôt que croire une seconde à ces fables. Si je me sentais un peu mieux, cela ne signifiait pas pour autant que j’allais vivre, non… Non, j’allais mourir. Et tout ceci n’était qu’un rêve, un cauchemar tyrannique. Le point de non-retour était atteint. J’eus une seconde de flottement avant de relever les yeux vers Samuel et finalement m’écarter de lui aussi, sans même un sourire. Pourquoi sourire à un personnage peuplant mes rêves, qui de toute manière n’était pas le Samuel que j’aimais ? Non, lui il n’était rien d’autre qu’une illusion, un mirage dont je devais à tout prix m’éloigner. Je m’écartai donc, et soupirai profondément avant de laisser toute l’horreur de cette scène me submerger. Il était terrible que de croire à ce genre de rêves, ce fantasme. Voir ces personnes qui m’étaient chères m’annoncer cette nouvelle, ce signe que j’attendais désespérément mais auquel je ne croyais plus… Oui, c’était horrible. Les larmes coulèrent de nouveau sur mes joues, je fermai les yeux pour ne plus voir les regards interloqués que s’échangeaient ces images mensongères de Sam et Mathilda. Je n’avais pas besoin d’elles, mais des vrais Samuel et Mathilda. Il fallait que cette hallucination se termine rapidement, car je n’étais pas certain d’en sortir indemne. Je souffrais, plus seulement physiquement mais également moralement, et j’avais peur. Terriblement peur de me retrouver enfermer dans cette illusion comme j’avais été enfermé dans celle des rats. Pourtant je ne possédais aucun moyen de me dépêtrer de cette folie, de m’en sortir. Je sentis une main se poser sur mon épaule et sursautai, ouvrant les yeux sur une Mathilda qui me regardait fixement en fronçant les sourcils. Je m’écartai du mieux que je pu et prononçai d’une voix claire en dépit de mes sanglots silencieux et de ma faiblesse :

« Ne me touche pas. »

Elle eut un mouvement de recul avant de relever les yeux vers cette imitation de Samuel qui semblait tout aussi perdu. Il tenta de reprendre la main que je lui avais quelques instants plus tôt retiré sans même m’en rendre compte mais je l’évitai une nouvelle fois et me redressai du mieux que je pu, étouffant un râle de douleur. »

« Ne me…Touchez pas. Ni l’un ni l’autre. »

« C’est nous, c’est Samuel et Mathilda. Tu n’as pas à avoir peur Liam, il ne s’agit que de nous… »

Ajouta ce double de Mathilda, un air inquiet sur le visage. Je la dévisageai un instant au travers de mes larmes avant de me recroqueviller et de prendre mon visage entre mes mains, pleurant silencieusement. Je ne pouvais qu’attendre que cette vision terrible passe, qu’elle s’en aille et me laisse en paix avec la mort. J’aurais pu me battre contre elle, j’aurais pu essayer d’être aussi fort que Samuel, mon Samuel, me l’avait demandé mais je n’en pouvais plus. J’étais épuisé à force de devoir toujours me battre pour survivre, depuis des semaines je ne faisais que ça et à présent mon seul souhait était de mourir. Mourir, pour ne plus avoir à subir ces atrocités qui me tiraillaient, m’achevaient. Mourir, pour ne pas devoir supporter ces images de substitution aux êtres que j’aimais profondément. J’entendis qu’on me répétait de nouveau qu’il ne fallait pas que j’aie peur, qu’il ne s’agissait que d’eux deux mais je m’en fichais éperdument, sachant la vérité. Mes doigts se crispèrent sur mon visage, j’étais de plus en plus terrifié. Et finalement, le substitut de Mathilda eut le mot de trop en me disant « Tu vas survivre Liam, écoute moi, regarde moi, on est là. » Cette fois, je baissai doucement les mains et posai un regard plus que froid sur cette fausse femme, ce faux espoir, mes larmes coulant toujours. J’hochai doucement la tête avec un rictus qui ne me ressemblait pas à l’ordinaire, mon était d’épuisement étant cependant tellement fort que j’en devenais mauvais. Puis je regardai cette chose qui avait l’apparence de Samuel avant de lui cracher au visage. Comme j’avais été stupide de croire en son sourire, en ses baisers, en son amour fictif… Je l’avais cru fou, il n’en était cependant rien ; J’étais le seul fou dans cette histoire. Je divaguais totalement. Il eut alors un geste de recul tandis que de mon côté de portai mes doigts à l’aiguille plantée dans ma peau, cherchant à l’en retirer. Tout ce que je voulais, c’était quitter ce monde imaginaire qui m’écrasait, me terrifiait. Je ne pleurais plus, non. Désormais je faisais preuve d’une détermination sans failles, j’aurais fait n’importe quoi pour provoquer ma mort et en finir mais pitié, pitié, épargnez moi une minute de plus dans cette utopie. La femme se précipita pour m’empêcher d’arracher ma perfusion mais je fus plus rapide, le sang coula rapidement sur mon bras sans que je n’y prête attention.

« Je ne vais pas guérir, je vais mourir, MOURIR. Laissez moi tranquille, laissez moi ! »

Il n’y avait rien de comparable entre cette crise soudaine et la précédente. J’étais parfaitement lucide, et maître de mes actes. Avoir retrouvé une certaine mobilité m’aidait énormément dans ma tentative de fuite tandis que je cherchais à repousser les draps mais l’homme tenta de m’arrêter. Je cru alors voir un signe de cette pseudo Mathilda pour l’en empêcher, et il me relâcha finalement, me laissant, comme je le désirai, m’en aller. Pour ne pas aller très loin. Je titubai quelques instants avant de m’écrouler au sol, rampant jusqu’au mur pour finalement m’y appuyer, à bout de souffle. Moi-même ne savais pas très bien dans quel but je m’étais enfui, je cherchais seulement à ne plus me laisser toucher par ces hallucinations nocives qui me charcutaient, m’épuisaient. Je ramenai alors avec difficultés mes genoux vers moi et posai mon front tout contre, murmurant « Je vais me réveiller, je vais me réveiller… » telle une cruelle litanie, une prière également. Je priai Dieu pour qu’il achève mes souffrances et se montre clément. Alors c’était ça l’enfer ? Oui, j’y croyais. Il était probable qu’il s’agisse de ma punition pour avoir aimé un homme, pour avoir rejeté Dieu durant de longues années. Ma foi n’avait jamais été très forte et pourtant, en cet instant je cru réellement à une punition divine. Le liquide épais coulant le long de mon bras me donnait la nausée, je tentai vainement de l’ignorer mais cette odeur insupportable me provoquait de violents tournis. Peu à peu je me calmai, en apparences du moins, ne bougeant plus, ne parlant plus, restant simplement appuyé contre ce mur, les yeux clos afin de ne plus voir ces visions terribles. Soudain, le parfum de cannelle que j’avais plus tôt apprécié dans l’air se manifesta de nouveau, pensant qu’il s’agissait encore du fantôme de mon Samuel je sursautai, et me redressai, sur la défensive. Mais ce n’est pas Samuel. Ce n’est pas son image qui m’apparaît… Mais celle d’une femme, blonde aux yeux bleus, mince et assez petite. Une femme au sourire doux et maternel, une femme pour laquelle mon cœur avait battu durant de longues années… Ma femme.

Je la dévisage de longues secondes tandis qu’elle s’approche un peu de moi, avec cet air tendre que j’avais aperçu des milliers de fois sur son visage. Pourtant… Natacha était morte. Cela voulait-il dire que je l’étais également ? J’observai un instant la pièce qui se trouvait toujours être l’infirmerie. Venait-elle me chercher ? Je n’en savais rien, et n’osai pas poser la question, pétrifié de revoir ainsi ma femme, Natacha, après de si longues années d’absence. Comme elle m’avait manqué…Comme j’avais prié pour la voir de nouveau, ne serait-ce que quelques minutes… Elle était là, debout face à moi et avec un sourire me tendit la main pour m’aider à me relever. Je ne réfléchis pas et l’attrapai, étonné de la sentir si chaude contre ma peau. Nous nous tenions alors face à face, nous dévorant mutuellement du regard avant qu’elle ne murmure « Chéri… Viens. » et que je ne me jette sur elle, m’y accrochant comme à une bouée de sauvetage. Cette fois il était certain qu’elle était venue pour moi, pour m’emmener avec elle et j’étais décidé à la suivre. Parce que je l’aimais, l’avais toujours aimé et qu’elle m’attendait, j’en étais persuadé. Elle m’avait attendu de longues années. Et Samuel… Samuel et moi ne faisions plus partie du même monde désormais… Samuel et moi étions séparés par une frontière infranchissable. J’en souffrais énormément sans pouvoir y remédier, sans pouvoir le rejoindre alors avais-je réellement le choix ? Peut-être que dans des années ce serait moi qui viendrait le chercher, peut-être que nous nous retrouverons mais à présent je ne pouvais rien faire d’autre que suivre celle qui avait été mon premier amour. Après quelques instants je m’écartai un peu d’elle et l’observai, la dévorai du regard. Je me surpris dans l’exactitude de mes souvenirs : Elle était restée la même que celle qui hantait les longs couloirs de ma mémoire. J’aurais voulu l’embrasser, lui murmurer quelque chose, mais elle me prit de court en posant ses mains sur mes joues et m’observant avec une intensité toute particulière. Alors, seulement, elle se hissa sur la pointe des pieds et déposa un doux baiser sur mon front, ses doigts replaçant avec délicatesse une mèche de mes cheveux derrière mon oreille. Finalement, elle se recula avec un sourire qui s’effaça progressivement, sans que je n’en comprenne la cause.

« Tu me manques mon amour… »

Comment aurais-je pu retenir mes larmes ? Elle me manquait tout autant, m’avait manqué pendant dix ans avant que je ne la retrouve enfin. Je fondis alors et lui murmurai qu’elle me manquait également, avant qu’elle ne pose un doigt sur mes lèvres pour me faire taire.

« …Mais il n’est pas encore temps. »

Je fronçai les sourcils et la dévisageai.

« Je sais ce que tu as traversé Liam, j’étais là, à tes côtés…Tu ne peux pas abandonner maintenant. »

« Mais… »

Elle m’interrompt d’un geste puis se retourne sur une scène que je n’avais pas aperçue. Je me voyais allongé sur mon lit, Samuel et Mathilda m’entourant. Malgré leurs lèvres qui bougeaient, je n’entendais pas très bien ce qu’ils disaient.

« Ils t’attendent. Ils attendent que tu te réveilles.
- Je croyais que tu venais me chercher… »

Elle rit une seconde durant laquelle mon cœur s’envola dans ma poitrine, avant de s’avancer vers moi et passer ses bras autour de mon cou.

« Désolé jeune homme, ce sera pour une autre fois. »

Malgré son ton empreint de tendresse et de plaisanterie, je ne me sens pas le cœur à sourire. J’y avais cru, j’avais cru que tout était fini et ne comprenais pourquoi les choses traînaient tant. Pourquoi ne pas vouloir de moi là-bas ? Il était temps d’y aller. Son sourire s’atténue quelque peu, ses doigts effleurent ma joue d’une manière aussi légère que le vent.

« Je ne veux pas t’emporter avec moi, tu dois rester ici.
- Pourquoi ?
- Parce que tu es heureux Liam, parce que tu as la vie devant toi… Non mon ange, tu ne vas pas mourir… »

Elle sourit tristement. Avant de soupirer et se tourner vers mon corps sans vie, laissant toujours ses bras autour de moi.

« Tu t’es seulement évanouis… Mais ça va aller. Il faut que tu y retournes maintenant. »

Je secoue légèrement la tête en signe de négation ; Je ne veux pas la quitter, pas maintenant que je l’ai retrouvé. Elle ajoute avec un sourire tendre.

« Samuel t’attend. »

Surpris qu’elle me parle de lui, je fronce légèrement les sourcils et mon regard se pose quelques secondes dans le dos de cet être que j’aimais également profondément. Il était l’homme de ma vie, Natacha en était la femme. Je les aimais tout deux de la même façon, il m’aurait été impossible de choisir qui suivre et pourtant il s’agissait de cela. En cet instant je devais choisir entre elle et la mort, ou lui et la vie… Et très sincèrement, je penchai plutôt vers la mort. Natacha me manquait atrocement, je souffrais de ma maladie… Je savais que Sam me manquerait cruellement une fois parti mais très égoïstement, je préférais mettre un terme à mes souffrances physiques… Je préférais que tout s’arrête une bonne fois pour toutes. Natacha eut un sourire qui se voulait de toute évidence rassurant.

« Il prendra soin de toi, tu mérites d’être heureux. Je préfères te savoir avec lui que tout seul et puis …- Elle sembla rougir une seconde- Je l’aime bien. »

Elle m’attrapa alors par la main et m’emmena de l’autre côté du lit, face à un Samuel au visage défait. Sa peine était visible, je m’en voulu alors d’avoir désiré le quitter. Non, je ne pouvais pas…Je l’aimais beaucoup trop pour vouloir partir. Même si ma femme me manquait, lui aussi allait me manquer… C’était un choix cornélien auquel je ne pouvais donner de réponse.

« Tu vois comme il t’aime ? C’est pour ça que je l’apprécie. Il te convient, tout comme je t’ai convenu mais ce n’est pas pareil… Je sais que c’est surprenant mais, je préfère te laisser avec lui que t’emporter avec moi, parce qu’il ne mérite pas de te perdre et que je ne suis pas assez égoïste pour t’enlever à lui. Je t’aimerai toujours Liam, mais pour l’instant tu n’as pas ta place avec nous. »

Elle sourit plus largement face à mon incompréhension et pose une main sur son ventre. Je fronce les sourcils sans comprendre.

« C’était un garçon… »

J’aurais dû fondre en larme, crier, tout frapper mais je ne bronchai pas. Alors… Cet enfant qui était le mien, ce bébé mort à la naissance était un garçon ? Sans comprendre pourquoi, je me sentis soudainement étrangement vide et perdu. Mon regard se porta de nouveau sur Samuel qui murmurai mon prénom, ou du moins était-ce que je croyais entendre. Sa voix, au fil des murmures, s’intensifia de façon à ce qu’au bout de quelques minutes je l’entendis très distinctement m’appeler. Je jetai un regard vers Natacha, lui demandant silencieusement ce que je devais faire, si elle allait revenir, quand nous nous reverrons mais elle pencha simplement la tête sur le côté, souriante, avant de passer les doigts dans ses fins cheveux blonds et murmurer tout bas :

« Au revoir mon amour. »

Je portai une main vers elle pour essayer de la retenir mais elle s’avança simplement pour déposer un baiser sur ma joue, et sortie par la porte de l’infirmerie, me laissant seul. Ce sentiment de solitude se décupla tandis que derrière moi j’entendais toujours Samuel murmurer mon prénom, m’incitant à le rejoindre. Je ne savais plus quoi faire, il n’y avait plus aucune frontière entre la réalité et le délire dans mon esprit. Avais-je réellement vu Natacha ou n’était-ce qu’un fantasme morbide ? Allais-je réellement vivre, comme elle me le promettait ? Si tel était le cas, l’épisode que je prenais pour illusion en avait-il vraiment été un, ou bien avais-je réagis de manière déraisonnée une fois de plus ? Je me souvins avoir craché au visage d’un Samuel que je prenais pour imposteur… Et s’il avait bien s’agit de mon Samuel ? Lui avais-je craché dessus ? Mon dieu… J’avais été infect lorsque lui rayonnait, lorsque lui reprenait goût en la vie après avoir souffert de mon départ futur. Il avait eu si peur pour moi, s’en était rendu malade au point de vouloir se suicider et moi… Moi je l’avais abandonné. Si j’avais eu peur de mourir seul et qu’il ne me laisse, la réalité en était toute autre. J’étais celui qui l’avait tué. Celui qui l’avait laissé seul. Celui qui lui avait tourné le dos au point de désirer le quitter à jamais. Natacha avait raison, il ne méritait pas les souffrances que je lui imposais. Dans un élan de tristesse je me jetai sur lui, me blottissant dans ses bras que j’aimais tant avant de le serrer contre moi. Pourtant, ses bras ne se refermèrent pas autour de moi cette fois ci. Ces lèvres ne vinrent pas me chuchoter des mots doux, des mots rassurants comme à chaque fois que je doutais et avais de nouveau peur. Il ne me consolait pas. En me reculant quelque peu je remarquai qu’il n’avait même pas bougé d’un centimètre, le regard posé sur ce corps inanimé qu’était le mien, ne semblant pas apercevoir celui qui tentait désespérément de s’excuser dans ses bras à l’instant. Non, il ne me voyait pas. Ne ressentait sans doute même pas cette étreinte pleine de remords. Je n’entendais plus sa voix m’appeler…Cela signifiait-il qu’il était trop tard ? Qu’il ne voulait plus de moi ? Il s’agissait d’un signe, d’une réponse. Ce refus, cette ignorance n’était que le symbole d’un rejet futur…Il me laissait déjà. Tout son amour avait dû périr en même temps que moi, sauf que lui ne reviendrait pas…Je n’en savais rien. Je ne savais même pas comment me réveiller, alors, de la même manière que j’avais atterri dans cette vision pour en quitter une autre, je retournai près du mur après avoir déposer un baiser sur la joue de Samuel, un baiser au goût amer d’adieu, et m’y laissai glisser. Je fermai alors les yeux et attendis, attendis que quelqu’un ou quelque chose ne décide de me remporter auprès de celui qui était mien, jusqu’à ce qu’il ne m’annonce le contraire.

Je compris avoir réussi lorsque de nouveau je ressentis une migraine cuisante m’assaillir. Pourtant, je n’esquissai premièrement pas un geste, le temps de remettre mes idées en place, le temps de me préparer à ce qui allait suivre. Je sentis des doigts se poser sur mon poignet, recherchant certainement un pouls, avant que la voix de Mathilda ne résonne à mes oreilles, m’appelant. J’inspirai profondément avant de murmurer, dans un souffle :

« Je ne vais pas mourir… »

J’ouvris doucement les yeux et plongeai mon regard sur elle en premier. Ma voix m’avait paru horriblement éteinte mais cela ne faisait plus rien. Elle secoua doucement la tête, se préparant visiblement à une nouvelle réaction pleine d’agressivité mais il n’y en eut pas. Je me contentai de tourner la tête pour poser de nouveau mon regard sur le plafond, mon visage n’exprimant rien de peur de paraître complètement dingue. Je ne me sentais plus en droit de me réjouir après la crise passée… Je remarquai alors que Mathilda m’avait remis la perfusion et nettoyé mon bras tâché de sang. Détail inutile qui ne fit qu’amplifier mon malaise. Il m’était impossible que de poser mon regard sur Samuel, lui sourire, lui dire que je l’aimais tandis que je lui avais craché à la figure… J’avais honte, terriblement honte mais également peur qu’il ne me repousse, qu’il en ai assez, qu’il soit usé de devoir trop me supporter. J’avais été infect alors que lui… Lui était la perfection incarnée, pour moi du moins. Oui, il représentait ma perfection, tout ce dont j’avais besoin, tout ce que j’aimais. Après quelques secondes de silence Mathilda se dirigea vers la sortie, s’arrêta au niveau de Samuel et lui dit de l’appeler en cas de problème, ce qui renforça une nouvelle fois ma honte, au point que j’en tournais la tête du côté opposé à lui. Je sentais son regard sur moi mais étais incapable de le soutenir, de peur d’y trouver de la déception, du doute, de la rancœur même. Je lui avais fait subir mille souffrances car j’allais mourir et tandis que j’apprenais que je m’en sortirai, tandis que j’aurais dû être aussi heureux que lui, je l’avais seulement repoussé et traité comme un étranger. Comment aurait-il pu passer outre ? Je ne le savais pas, et le silence s’étira encore, ni l’un ni l’autre ne semblant décidé à parler. Peut-être qu’il réfléchissait à comment me quitter, peut-être qu’il se disait qu’il n’en pouvait plus, qu’il ne me supportait plus. Ou alors sa colère l’empêchait de prononcer la moindre parole, il ne voulait sans doute pas m’enfoncer encore davantage dans mon malheur et m’épargnait une séparation à présent mais prévoyait de le faire plus tard. Oui, ce devait être ça… Les larmes me montèrent aux yeux à cette simple pensée. A quoi allait me servir une vie s’il m’abandonnait finalement ? En même temps, je n’aurais pu l’en blâmer. J’aurais peut-être dû partir avec Natacha et lui épargner tout ça… J’aurais dû partir avant même qu’on ne se rencontre.

Une larme roula sur ma joue, glissa jusqu’à s’écrouler sur les draps et se fondre dans le tissu. Que pouvais-je faire ? Il ne semblait pas décider à me parler en premier, alors je devais prendre mon courage à deux mains. Je devais le soulager de ce poids qui surplombait son cœur… Je devais faire quelque chose qui l’encouragerait à me quitter une bonne fois pour toutes. Doucement, je tournai de nouveau la tête vers lui, prenant cependant soin de ne pas croiser son regard. C’était récurant chez moi, dès que quelque chose me mettait mal à l’aise je n’osais plus le regarder. En cet instant je craignais surtout ce que j’aurais pu lire dans son regard, et préférai égoïstement m’épargner la réponse. Mes yeux se posèrent alors sur ses mains et je constatai à travers mes larmes qu’il portait toujours la bague que je lui avais offert. Cette bague qui avait tant représenté et qui à présent ne voulait certainement plus rien dire pour lui. Cette idée me faisait terriblement mal mais je ne pouvais me voiler la face : J’allais le perdre, à force d’idiotie. J’allais le perdre à tout jamais tout comme il croyait me perdre plus tôt, sauf que cette fois l’un d’entre nous aura fait un choix. Ce choix terrible. Je reniflai, portai une main à mon visage pour essuyer les larmes qui m’empêchaient totalement de voir cette bague, cette bague qui lui allait si bien. Cette bague que je ne voulais surtout pas me voir rendue.

« Tu n’es pas obligé de la porter tu sais… »

Murmurai-je, désignant d’un faible signe de tête ce bijou que j’observai depuis quelques instants. J’eus un long tremblement dû à mes sanglots avant d’ajouter d’une voix encore plus faible, plus triste, plus désespérée :

« Tu peux juste la jeter ou en faire ce que tu veux… mais ne me la rend pas. »

Sur les derniers mots j’osai relever mon regard vers lui, et ce que je lu dans le sien me pétrifia. Il souffrait, tout comme je souffrais. Tout n’était que de ma faute. Très vite, j’abaissai de nouveau les yeux, incapable de soutenir une seconde de plus cette souffrance que je savais uniquement causée par moi.

« Tu me quittes, n’est-ce pas… »

Ce n’était même pas une question, mais véritablement une affirmation qui tombait, comme ça, prononcée d’une voix complètement dénuée de vie. Comme si, à l’instant même où il me laisserait, j’allais mourir de nouveau. Non plus de maladie, mais de désespoir. Je ne pouvais pas, ne voulais pas vivre sans lui et pourtant… Pourtant je savais que j’avais été, coup sur coup, un vrai calvaire. Le genre d’homme dont on ne veut plus dans sa vie, qu’on cherche simplement à éradiquer avant qu’il ne soit trop tard. Il allait m’éradiquer de sa vie, comme un insecte, comme un nuisible. Mais je l’aimais… Plus que n’importe quoi d’autre au monde j’aimais Samuel… Sans lui laisser le temps de répondre, j’attrapai sa main et le forçai à se pencher vers moi. J’étais conscient que s’il l’avait voulu, il aurait pu résister puisque je demeurais faible mais étonnement il se laissa faire, se laissa entraîner dans cette étreinte qui, une nouvelle fois, avait le goût âpre du désespoir. Je le serrai quelques secondes avant de murmurer à son oreille, mes pleurs secouant mon corps entier contre le sien.

« Je suis désolé, pour tout… Désolé de t’avoir repoussé, désolé n’avoir eu ce geste détestable envers toi, désolé d’avoir failli abandonner… Pardonne-moi, je n’ai pas été aussi fort que tu l’espérais… Je n’ai pas été à la hauteur, une nouvelle fois. Mais je t’aime. Je sais que ça ne suffit pas toujours, je sais que je ne suis pas parfait et que j’accumule les erreurs mais s’il te plait… Je t’en supplie… Ne me laisse pas maintenant parce qu’alors, à quoi me servirait cette vie ? J’aurais mieux fait de me laisser mourir plutôt que d’affronter tant de choses pour finalement… Finalement… Te perdre toi. J’ai eu tellement peur d’halluciner de nouveau, tellement peur d’être enfermé dans un nouveau cauchemar et… Et je croyais que ce n’était pas toi, que ce n’était qu’une vision, qu’une image que je détestais parce qu’elle me mentait… Mais c’était toi…Et puis, je t’ai entendu… Je t’ai entendu m’appeler et j’ai voulu venir à toi mais tu ne me voyais plus, tu ne me sentais plus quand je te touchais… Tu m’ignorais comme si j’avais été mort et pourtant j’étais là, je te voyais, et je me voyais, et je savais que tu m’en voulais, que je t’avais déçu… J’aurais mieux fait de mourir… Il aurait mieux valu que je parte avant que tu n’aies à supporter tout ça... »

Je pleurais des torrents de peur, de culpabilité, de regrets, ressemblais à un enfant perdu mais que voulez-vous ? J’avais déjà perdu le premier amour de ma vie ; Il m’était impossible que de perdre le second. Une certaine pensée populaire veut qu’on ne tombe réellement amoureux qu’une fois dans sa vie, j’étais l’exemple vivant du contraire. J’avais aimé deux fois, deux fois qui représentaient, en réalité, ma vie. Mais peut-être qu’en dépit de tous les pronostics de Mathilda, ma vie allait finalement s’arrêter là…
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeMer 2 Mar - 22:14

Croiser le regard de Mathilda... Croiser ce regard d'ordinaire si distant... Croiser ce regard qui en cet instant débordait de joie... Mon sourire n'en fut que plus large. Oui, il était réveillé. Oui, il était en train de guérir. Ca n'allait pas être facile, je le savais, car ce dont il souffrait était grave et qu'il fallait une longue convalescence mais... Oui, en cet instant précis, ce moment, cette seconde, ce millième de seconde, j'étais persuadé que le pire était derrière nous. Utopiste jusqu'au bout, ou très con, choisissez, c'est à vous de voir. Une chose était certaine : J'étais sur un nuage. Je n'entendis que d'une manière lointaine la brève conversation entre Mathilda et Liam. D'une manière très, très lointaine... Je nous imaginais déjà, Liam et moi, après avoir quitté cette infirmerie et vivant enfin pleinement notre vie, cette vie qui avait failli nous être enlevée. Que c'était bon d'être dans cette bulle de bonheur, ma bulle de bonheur, notre bulle de bonheur. Par contre, j'entendis bien Mathilda dire « Ca ira. » Oui, ces deux mots là me parvinrent avec une netteté incroyable. Tout ce qui était positif, tout ce qui me confortait dans ma belle bulle de bonheur, je l'entendais bien, même mieux que bien. Je sentais les traits de mon visage tirés, tendus, à force de sourire. Vous vous rendez compte? A force de sourire! C'était la quatrième dimension! J'étais là, auprès de l'homme que j'aimais, auprès de l'homme que j'avais cru perdre pour toujours et il était éveillé, il allait s'en sortir, il n'allait pas me quitter alors oui, j'en avais mal de sourire mais c'était plus fort que moi. Et puis, mon sourire se fit moins large lorsque je me rendis compte que Liam, lui, ne souriait pas du tout. Il aurait pourtant dû être rassuré. Peut-être pas complètement mais au moins, il n'était plus à l'article de la mort et c'était le plus important, non? Non... Apparemment pas. Quelque chose n'allait pas. Mais quoi? Je n'allais malheureusement pas tarder à le découvrir. Vous vous souvenez quand j'ai dit de moi que j'étais, au choix un utopiste ou un con? Nous y voilà... Il se recula légèrement pour s'éloigner de Mathilda avant de s'éloigner de moi également. Son attitude froide me glaça le corps tout entier : Je ne comprenais pas ce rejet si soudain, si incompréhensible... Quelques instants auparavant tout avait semblé pour le mieux ou en tout cas bien parti et là, tout à coup, alors que Liam s'était éloigné, qu'il avait fermé les yeux, c'était comme si la pièce avait plongée dans une eau glacée. Il y régnait une atmosphère étrange, dérangeante, oppressante et c'était Liam le responsable de cela : C'était son attitude qui rendait l'atmosphère à la limite du respirable pour moi.

Irrespirable, en fait.

Petit à petit, je sentais que l'air commençait à moins affluer jusqu'à mes poumons car la panique m'envahissait au fur et à mesure que le silence et la distance de Liam se prolongeaient et s'installaient. Je n'osais pas faire le moindre geste et ce fut Mathilda qui prit les devants et se pencha vers Liam avant de poser une main sur son épaule. La réaction de Liam fut rapide et vive : Il sursauta en ouvrant les yeux avant de s'écarter en fixant Mathilda d'un regard pour le moins sombre et glacial. La voix avec laquelle il s'adressa à elle fut à l'image de son regard : Un véritable bloc de glace. Il ne voulait pas qu'elle le touche. Apparemment, il lui en voulait tout autant qu'à moi, mais pourquoi? Qu'avions-nous pu bien faire pour mériter sa colère? Mathilda releva son regard vers moi et je secouai légèrement la tête, incapable de lui dire quoi que ce soit : J'étais complètement perdu. Je ne savais pas ce qui se passait dans la tête de Liam, je ne savais pas ce qu'il nous reprochait. J'eus cependant un geste désespéré, et essayai de reprendre la main de Liam (qu'il avait retirée quelques instants auparavant). Son contact me manquait et j'espérais, qu'à défaut d'accepter que Mathilda le touche, il accepterait que moi, je le touche : Grave erreur. Il évita soigneusement ma main avant de se redresser autant qu'il en était capable, malgré la douleur avant de nous interdire, à Mathilda et à moi, de le toucher. Mathilda essaya de le rassurer en lui rappelant qui nous étions, pensant probablement qu'il devait être de nouveau victime d'une hallucination. C'était sans doute cela, oui, peut-être qu'il voyait encore des rats, ou d'autres personnes qu'il n'avait pas envie de voir. Je devais m'accrocher à cela. Je devais absolument m'accrocher à cela pour ne pas me laisser submerger par ce sentiment de rejet qui était en train de doucement se faire une place au creux de mon coeur. Mais lorsque je vis Liam pleurer, lorsque je le vis se recroqueviller sur lui-même, tant ce qu'il voyait devant lui était douloureux, ce sentiment de rejet naissant fut mis à l'écart, au loin, en tout cas sur le moment. Peu importait ma souffrance : C'était celle de Liam que je devais soulager. Je me foutais de souffrir si je pouvais, lui, le soulager.

Mais comment le soulager? Comment l'aider?

Je ne voyais pas ce que je pouvais faire à part essayer de le rassurer comme Mathilda avait essayer de le faire quelques secondes auparavant. Alors, sans le toucher, je me penchai doucement vers lui afin qu'il m'entende bien et lui répétai plusieurs fois qu'il ne devait pas avoir peur, qu'il n'avait rien à craindre de nous, que j'étais là, que c'était bel et bien moi, que je l'aimais, que j'allais être là, que... Qu'il allait survivre mais ça, ce fut Mathilda qui le lui dit et une nouvelle fois, la réaction de Liam fut rapide : Il releva son regard vers elle, un regard qui, malgré les larmes, était plus glacial que jamais. Il hocha alors la tête, ses lèvres formant un étrange rictus froid et méprisant. A l'instant où je compris quel était le problème, à l'instant où je réalisai que Liam ne croyait pas un mot de ce que nous lui racontions, qu'il était toujours persuadé qu'il allait mourir, il glissa ce même regard glacial vers moi avant de me cracher au visage. Aussitôt, je portai ma main à mon visage tout en reculant : Malgré mon inquiétude, malgré mon amour, malgré cette certitude qu'il ne croyait pas à ce que je lui avais dit, malgré tout cela, le sentiment de rejet m'explosa en pleine figure et j'eus l'impression d'être brisé en mille morceaux. Je m'essuyai rapidement avec ma manche, incapable de retenir mes larmes. Je savais, au fond de moi, qu'il divaguait, qu'il était mal et qu'il était désorienté mais en cet instant, cela passait au second plan : Il m'avait craché au visage. Il ne voulait plus me voir. Il ne voulait plus rien avoir à faire avec moi. Que devais-je faire? Accepter et quitter cette pièce pour ne plus jamais y revenir? Peut-être que ce qu'il avait fait n'avait en fait été que la manifestation du désir qu'il avait de ne plus me voir... Peut-être avais-je été trop insistant, trop envahissant... Peut-être étais-je tout simplement de trop. Puis, encore une fois, en le voyant se débattre avec sa perfusion, en le voyant hurler qu'il n'allait pas guérir mais qu'il allait mourir, en le voyant repousser Mathilda de toutes ses forces, qui n'étaient pas bien nombreuses, en le voyant essayer de sortir de son lit malgré son état, ce que je ressentais repassa une nouvelle fois au second plan : Peu importait s'il me détestait, s'il ne voulait plus de moi... Je n'allais pas le laisser se faire du mal de cette façon, je n'allais pas le laisser mourir. Je me précipitai donc sur Liam, décidé à l'empêcher d'aller trop loin et de mettre sa vie en péril. Mes mains se refermèrent sur ses épaules et je tentai de l'empêcher de bouger. Alors qu'il se débattait, Mathilda me fit signe de le laisser tranquille et, à contre coeur, j'obéis. Un instant plus tard, mes mains avaient quitté les épaules de Liam et j'avais reculé : J'avais confiance en Mathilda et j'allais donc suivre ses directives même si cela me coûtait énormément...

Liam quitta son lit il n'alla pas bien loin puisqu'il tituba quelques instants avant de s'écrouler au sol. J'eus un geste vers lui mais encore une fois, Mathilda m'intima de rester où j'étais : C'était terrible de rester là, à le regarder ramper au sol pour s'éloigner de nous mais si elle était certaine que c'était ce qu'il y avait de mieux à faire... Liam finit par prendre appui contre le mur avant de replier ses genoux contre lui-même. Je l'entendis murmure plusieurs fois « Je vais me réveiller... » et mon coeur se serra : Il était bel et bien enfermé dans une nouvelle hallucination et je ne pouvais rien faire pour l'aider. J'étais impuissant... Inutile. J'aurais tant voulu être capable de faire plus pour lui... J'aurais tant voulu être meilleur et le protéger de ce qui le faisait souffrir... Mais là, c'était moi qui le faisait souffrir. J'ignorais ce qu'était exactement son hallucination mais une chose était certaine : J'y étais, et au lieu de le rassurer, je lui faisais peur et il ne voulait pas de moi. Il ne voulait plus de moi...

-Samuel...

La voix de Mathilda me parût fort lointaine mais elle me parvint malgré tout et, à travers des larmes dont je n'avais même pas remarqué la présence, je l'observai avant de poser mon regard sur Liam puisqu'elle me le désigna d'un bref signe de la tête. Il était allongé au sol, les yeux clos.

-Il a perdu connaissance. On va le remettre au lit.

J'aidai Mathilda, sans rien dire. Elle prit soin de reposer la perfusion avant de me regarder et elle comprit sans doute que j'étais de nouveau désespéré puisqu'elle posa amicalement la main sur mon épaule avant de me dire doucement qu'il allait sans doute se réveiller et que ça irait mieux, qu'il fallait que je sois patient. J'acquiesçai brièvement, juste pour lui faire plaisir je dois l'avouer. Les mots de Mathilda résonnaient dans ma tête mais le problème était que je n'y croyais plus. Je ne pensais même plus au fait qu'il m'ait repoussé ou qu'il m'ait craché au visage. Non, je ne pensais qu'à une seule chose : L'état de Liam s'était de nouveau aggravé. Mathilda avait beau dire ce qu'elle voulait, dans ma tête tout était clair : Il avait eu une nouvelle hallucination et son état, au lieu de s'améliorer comme prévu, avait donc recommencé à s'aggraver. Nous étions donc revenus à ce point de non retour : Il était inconscient, n'allait sans doute pas réveiller et s'il le faisait, il délirerait encore avant de laisser partir son dernier soupir. Voilà où nous en étions. Voilà où j'en étais. J'avais espéré pour rien. Pour rien du tout. Il ne resterait plus rien du tout. Alors, pourquoi continuais-je à lui parler en lui tenant la main? Pourquoi continuais-je de m'allier à Mathilda pour murmurer le prénom de Liam et le supplier de se réveiller et de me revenir? La réponse est simple et vous la connaissez : Utopiste et limite con... Je priais de toutes mes forces pour qu'il me revienne, je priais de toutes mes forces pour qu'il guérisse, je priais de toutes mes forces pour le retrouver et l'aimer comme je désirais tant l'aimer... Mais cette peur quasi incontrôlable me déchirait les entrailles : J'avais peur que mes prières ne soient pas entendues, j'avais peur de le perdre... J'étais en train de le perdre. Plus les minutes passaient, et plus il s'éloignait de moi pour se rapprocher des bras de la mort qu'il allait préférer aux miens... Mais qu'il ne s'inquiète pas : Moi aussi j'allais enlacer cette douce amie lorsqu'il serait parti... « Liam... Liam... Liam... » Je répétai son prénom encore, et encore, et encore... Je devais sans aucun doute faire pitié mais Mathilda ne fit aucune remarque : Je savais qu'elle me comprenait, qu'elle comprenait ma peur, qu'elle comprenait ma peine. « Liam... Liam... Liam... » Il fallait absolument qu'il se réveille. Il devait défier la mort, il ne devait pas l'embrasser. « Liam... Liam... Liam... » Il devait trouver encore un peu de force pour se battre et revenir. Il devait le faire parce que sinon... « Liam... Liam... Liam... » La voix de Mathilda se mêla à la mienne... « Liam... Liam... Liam... » Tout allait s'arranger...

Utopiste, limite con...

« Je ne vais pas mourir… »

Peut-être pas si con que ça, finalement. Je rouvris les yeux dans la seconde qui suivit et fixai mon regard sur Liam : Il fixait le plafond. Son regard ne semblait cependant plus froid... Est-ce que la crise était passée? Est-ce qu'il savait où il était, ce qu'il se passait? Est-ce qu'il avait compris qu'il n'était pas dans une illusion et que nous étions bien là, pour lui? Je ne me rendis même pas compte du mouvement de Mathilda vers la sortie. Mon regard était fixé sur Liam qui lui, de son côté, regardait le plafond avec obstination. Je ne savais pas s'il était de nouveau avec nous ou s'il était toujours enfermé dans son hallucination et étant donné qu'il ne lâchait pas un mot, pas un seul, je ne risquais pas de savoir où il en était et comment il se sentait. Pourtant, je crevais d'envie de savoir, je crevais d'envie d'être sûr et certain que cette fois-ci, il allait bien. J'étais cependant décidé à le laisser parler, refusant de le brusquer parce qu'après tout, c'était peut-être ma brusquerie qui avait provoqué son hallucination. Je lui avais annoncé, comme ça, tout de suite après son réveil, qu'il allait vivre : Ca avait peut-être été trop difficile d'entendre ça de but en blanc, sans préparation. Je ne voulais pas refaire la même erreur. Alors, j'attendis, encore... Et encore... Longtemps... Le silence s'installa et j'avais de plus en plus peur : Peut-être avait-il les yeux ouverts mais qu'il n'était finalement pas vraiment là. Peut-être que son esprit était à des kilomètres de cette pièce et que rien n'allait pouvoir l'aider à y revenir... Et même lorsqu'une larme coula sur sa joue, je me forçai à rester silencieux : J'avais bien trop peur de le brusquer, trop peur de tout gâcher, trop peur de lui faire du mal... Finalement, après encore un long moment, il tourna enfin son visage vers moi tout en prenant cependant soin d'éviter mon regard, comme il l'avait tant fait à une époque. Ce jour, où il m'avait avoué son amour, où il avait du mal à accepter... A s'accepter... Il avait exactement le même comportement... Une horrible pensée s'insinua alors en moi : Avait-il perdu la mémoire? Avait-il subi une amnésie qui l'avait replongé en arrière avant que nous commencions à nous voir sérieusement? Horrible pensée... Cependant, s'il fallait tout recommencer, j'allais tout recommencer, sans l'ombre d'une hésitation. Bien sûr, c'était effrayant mais... « Tu n’es pas obligé de la porter tu sais… » Sa voix me sortit de mes pensées. Je réalisai qu'il observait la bague et c'était de cela dont il parlait. Pourquoi?... Pourquoi n'étais-je pas obligé de la porter? De toute façon, je ne me sentais pas obligé de la porter... J'en étais particulièrement heureux, elle était le symbole de notre amour, de notre union, même secrète aux yeux des autres... Elle était ce que nous étions... Lorsqu'il m'annonça que je pouvais la jeter, en faire ce que je voulais ou la lui rendre, entre deux sanglots et d'une voix brisée par la tristesse, je fronçai les sourcils et me crispai, avant de comprendre où il voulait en venir : C'était une rupture. Tout simplement.

Notre rupture.

J'avais cru souffrir en le sachant à l'aube de sa mort... En cet instant, ma souffrance était bien plus grande parce que, malgré tout, j'allais le perdre. Parce que lui n'allait pas mourir, mais notre relation, si. Nos regards se croisèrent un bref instant avant qu'il ne le détourne une nouvelle fois. Ainsi donc, c'était cela... Il n'osait pas me regarder en face parce qu'il était incapable d'affronter mon regard au moment où il allait me quitter. Au moment où j'allais le quitter. Pardon? Choc. Véritable choc. Moi... Moi, j'allais le quitter? Mais où... Nom d'un chien, où était-il allé chercher une idée pareille? Je n'avais rien dit de tel, ni même pensé de tel! Il était mon coeur, mon amour, ma vie, la raison pour laquelle je respirais... Pourquoi l'aurais-je quitté? Je... Dans ma tête, tout était flou et lorsqu'il pris ma main pour me forcer à me pencher vers lui, il n'eut pas besoin de faire beaucoup d'efforts. J'étais tellement sous le choc que mon corps était comparable à de la guimauve... Liam me prit dans ses bras et me serra fort contre lui alors que dans ma tête, ses mots résonnaient avec de plus en plus de force : « Tu me quittes, n’est-ce pas… ». Et puis, l'explication tomba. A travers ses pleurs, il murmura tout un tas d'excuses : De m'avoir repoussé, de m'avoir craché dessus, d'avoir failli m'abandonner et j'en passe. J'entendis des « Pardonnes-moi » et « Je croyais que ce n'était pas toi » ou encore « Je savais que tu m’en voulais, que je t’avais déçu » ou enfin et, ce fit la phrase de trop « Il aurait mieux valu que je parte avant que tu n’aies à supporter tout ça... ». Comment pouvait-il?... Comment osait-il?... Je le sentais secoué de sanglots mais cela ne m'empêcha pas de me dégager de ses bras et de me relever vivement. Il pleurait, mais il n'était pas le seul. Cependant, à travers mes larmes, ce fut un regard noir, assombri de colère qui croisa le sien. Cela dit, pour une fois, il ne baissa pas le regard, peut-être trop pétrifié par le mien, allez savoir. En tout cas, nous restâmes quelques secondes à nous regarder ainsi avant, qu'enfin, je sois capable de parler et ma voix fut horriblement froide.

-Tais-toi. Je ne veux plus t'entendre. Plus un mot...

Je tremblais presque de colère... Parce que cette colère était en moi, cachée à l'intérieur et pour éviter un désastre, il fallait qu'elle sorte. Je décidai donc de ne pas la contenir plus longtemps, et explosai.

-Comment tu oses me sortir des trucs pareils? Pour qui tu me prends, hein?! POUR QUI?!

Pendant un instant j'en oubliai même qu'il était toujours très malade, même si il était sans doute hors de danger pour l'instant. Mais en le voyant blêmir, je me le rappelai et fermai les yeux avant de prendre une profonde inspiration. Une colère froide et calme valait mieux qu'une explosion... Parce que même s'il venait de me faire très mal, je l'aimais toujours de tout mon coeur. Un instant plus tard, j'avais reporté mon regard sur lui. Je levai doucement ma main pour lui montrer la fameuse bague.

-Je ne me force pas! Si je la porte, c'est parce qu'elle représente énormément pour moi, comme tu représentes tout pour moi! Et toi... Toi, tu crois que parce que tu as eu une hallucination... Parce que tu m'as repoussé et que tu m'as craché dessus, je vais te quitter? Alors, c'est ça que tu penses de moi? Tu penses que je suis le genre de type qui abandonne la personne qu'il aime au moindre problème?! C'est charmant... Vraiment charmant cette opinion que tu as de moi...

D'un geste rageur, j'essuyai mes larmes mais c'était peine perdu puisque bientôt, de nouvelles traitresses vinrent noyer mes joues.

-Je t'aime! Tu l'as pas encore compris? Je t'aime! Je t'aime à en crever! C'est pour ça que je suis resté à tes côtés pendant tout ce temps... C'est pour ça que je n'ai pas fermé l'oeil pendant plusieurs jours... C'est pour ça que je veux mourir si toi tu ne survis pas à ça... C'est pour ça...

Je m'arrêtai un instant avant de me rapprocher du lit.

-Je ne t'en veux pas pour ce que tu as fait... Tu as tant souffert... Tu n'as pas cru à ta guérison et comment aurais-tu pu y croire? Je t'ai annoncé ça trop vite, sans prendre le temps de te préparer... Tu étais tellement persuadé que tu allais mourir...

Et à cette pensée, mon corps en frémit d'horreur.

-Je ne t'en veux pas de m'avoir repoussé et de m'avoir craché au visage... Mais je t'en veux d'avoir cru que j'allais décider de te quitter pour ça... Je t'en veux de ne pas avoir eu confiance en mon amour pour toi... Ca, ça fait mal...

Je soupirai avant de m'assoir sur le lit. Un silence s'installa durant quelques instants. Puis, lorsque ma voix s'éleva de nouveau, elle avait perdu cette horrible froideur.

-Pousse-toi un peu...

Il me regardait fixement, toujours pétrifié...

-Pousse-toi un peu! J'ai besoin de place.

Je le regardai un instant puis, il finit par se pousser un peu et alors, je pris place à côté de lui dans le lit. J'enroulai mes jambes sur les siennes avant de le prendre dans mes bras : Il était crispé, je le sentais, et c'était normal. Après ce que je venais de lui dire, il ne risquait pas d'être détendu. Cependant... Pour moi, c'était déjà derrière. Il m'avait fait mal mais puisque je lui avais dit le fond de ma pensée, j'étais capable de passer à autre chose. Aussi, malgré sa tension, je déposai un baiser sur son front avant de commencer à lui caresser doucement les cheveux.

-Je veux que tu entres dans ton crâne que je t'aime, tel que tu es, pour ce que tu es... Et je ne te quitterai jamais Liam... Sans toi, ma vie n'aurait plus aucun sens... C'est toi ma vie et... Je pensais que tu l'avais compris... J'espère, que maintenant, tu l'as compris...

Je sentis de nouveau son corps secoué de sanglots et resserrai mon étreinte.

-Idiot... Arrête de pleurer maintenant... Je suis là, et je ne vais aller nulle part. Pas maintenant qu'on a la chance de pouvoir vivre ce qu'on a eu tant peur de perdre...

Je fermai les yeux, prenant pleinement conscience de la réalité de mes paroles. Il était réveillé, n'hallucinait plus, et il allait s'en sortir. Cette fois-ci, c'était la bonne. Cette fois-ci, ça allait bien se passer.

Utopiste, limite con.
Mais c'est tellement bon d'être con par amour...
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeLun 7 Mar - 10:11

Il n’avait pas été difficile que de sentir le corps de Samuel se crisper au fur et à mesure de mes mots, et pourtant, je ne m’étais pas tu. Tout simplement parce que j’avais eu besoin de m’excuser, besoin de tenter quelque chose avant qu’il ne me laisse définitivement. Je ne pouvais le laisser filer sans même essayer de le retenir, quand bien même cet effort serait vain. Mes larmes coulaient à flots sans que je ne cherche même à les contenir, à quoi bon ? Je n’allais pas mourir d’un point de vue médical, et pourtant mon cœur était sur le point d’offrir sa dernière impulsion. Dès que Samuel prononcera ces mots terribles qui m’achèveraient, dès qu’il posera un dernier regard sur mon pauvre corps amaigris par la souffrance et qu’il s’en ira, je mourrais. Comment survivre à sa perte inévitable ? Au fond, tout au fond, quelque chose me disait qu’en dépit de toutes mes excuses et tous mes pleurs, il ne me reviendrait pas, que c’était fini. Fini. A présent je comprenais mieux son désir de suicide si jamais j’avais dû mourir plus tôt… Je comprenais qu’il n’ait pas la force de continuer seul puisqu’à l’instant, c’était moi qui n’avais plus la force. Ni même l’envie. J’avais déjà perdu Natacha, y avais survécu de justesse, mais Samuel… Non… Je ne pouvais pas le perdre lui. Pourtant, lorsqu’il s’échappa vivement de mes bras un frisson d’horreur me parcouru car finalement, nous y étions. Il ne voulait même plus que je le touche, pourquoi l’aurait il voulu après tout ? Il allait me quitter. Me laisser. M’abandonner. Un vide glacial avait pris place entre mes bras dès l’instant où il s’en était enfui. Glacial… A l’image du regard qu’il me jeta une fois redressé. Instinctivement je m’éloignai, tentant malgré ma faiblesse de me décaler le plus loin possible de lui et de ce regard assassin que je ne lui connaissais pas, mais ce fut peine perdue. Je ne devais pas fuir, aussi laissai-je, malgré toute mon horreur, mon regard planté dans le sien, jusqu’au moment où il prononcerait enfin ces mots qui dénoueraient nos cœurs jusque là solidement liés. Il fallait que je sois fort et que j’accepte, que j’assume, mais ce regard… Il me donnait des frissons dans le dos. J’avais toujours trouvé à son regard quelque chose de déstabilisant, d’imposant, ce n’était cependant rien en comparaison de ces secondes interminables durant lesquelles il me fixait, de toute sa hauteur, une colère contenue apparaissant très clairement sur ses traits. Nous pleurions tout deux, mais sans doute pas pour les mêmes raisons. Est-ce qu’il souffrait de son geste, souffrait de ce qu’il s’apprêtait à accomplir ? Se pouvait-il qu’il n’hésite qu’une seconde à me quitter ? Egoïstement, et en dépit de mes fautes, je l’espérais ardemment car malgré tout, bon sang… Je ne pouvais pas le perdre. Je ne le voulais pas.

Ses mots anéantirent pourtant mon espoir en une seconde, le fracassèrent violemment tout comme ils faisaient voler mon cœur en éclats. Il voulait que je me taise, que j’arrête de le supplier, et moi, sage, je n’objectai rien, bien trop apeuré pour ne prononcer ne serait-ce qu’une seule syllabe. A ce stade là ce n’était plus de la peur… Je nageais en pleine panique. D’une part car la fin inéluctable de notre relation s’approchait à grands pas, d’autre part parce que je haïssais le voir comme ça. Je haïssais ce regard sombre, qui me clouait sur place, cette voix glaciale qui ne faisait qu’accentuer ma douleur. De nouveau, je souhaitais mourir. Non pas pour échapper à la douleur physique, ni même retrouver Natacha, mais simplement ne plus avoir à subir cette image de Samuel que je ne connaissais pas, et qui m’effrayait. Je priai silencieusement pour me transformer en insecte et m’éclipser discrètement de cette pièce avant qu’il ne poursuive de cette même voix, ce même ton profondément froid. Je priai même pour qu’il ne m’abandonne dès maintenant, sans un mot de plus, qu’il me laisse et s’en aille sans planter plus profondément en moi le couteau que représentait son horrible attitude. Mais c’en aurait été trop demandé. Bien trop demandé… Je sursautai et me recroquevillai instantanément sur moi-même lorsque, finalement, il explosa. Il cria tellement fort que Mathilda avait certainement dû l’entendre, Mathilda que j’implorai silencieusement de venir à mon secours, d’interrompre Samuel, de le jeter dehors. Elle ne vint pas. J’étais seul avec lui, seul avec sa colère, mes larmes inondant de plus en plus rapidement mes joues. Pourtant je ne comprenais pas, pour qui est-ce que je le prenais ? Que voulait dire cette question ? Dans mon crâne tout se mélangeait, plus rien n’avait de sens. J’osai lui dire tout ça car… Je ne savais plus. Je ne savais plus pourquoi, ni comment nous en étions arrivés là. Tout ce dont j’avais pleinement conscience était mon envie de fuir, instinct de survie face à une mort inévitable. Pourtant mes yeux ne pouvaient se détacher de ce visage de marbre, mon cœur battait à tout rompre, si fort qu’il m’en faisait mal. Ce n’était sans doute que le début.

Il ferma une seconde les yeux avant de doucement relever sa main. Impossible pour moi de déterminer son intention, la signification de ce geste. L’espace d’une seconde, j’envisageai même qu’il s’apprête à me frapper, sans réellement y croire. En dépit de toute sa colère, de toute sa fureur, Samuel était incapable de me battre, surtout en sachant que j’aurais été incapable de me défendre. Je ne pouvais, n’osais y croire. Il n’était pas violent, pas dur à ce point… Tout comme j’aurais cru, quelques instants plus tôt, qu’il n’était pas colérique. Finalement, j’avais encore beaucoup à apprendre de lui, mais pas forcément les bonnes choses… Je compris seulement qu’il me parlait de la bague lorsqu’il m’annonça ne pas se forcer à la porter. « Si je la porte, c'est parce qu'elle représente énormément pour moi, comme tu représentes tout pour moi! » Moi…Moi je représente tout pour toi ? Après tout ce que j’ai fait, que puis-je représenter à tes yeux mis appart un défouloir sur lequel tu rejettes toute ta colère ? Je ne comprends pas… Retire cette bague, c’est ridicule, j’ai saisis… J’ai compris que tu me laissais. Arrête. « Et toi... Toi, tu crois que parce que tu as eu une hallucination... Parce que tu m'as repoussé et que tu m'as craché dessus, je vais te quitter? » …Oui, bien sûr que tu vas me quitter…Je le sais, le sens. J’ai tout gâché. « Alors, c'est ça que tu penses de moi? » Je… Quoi ? « Tu penses que je suis le genre de type qui abandonne la personne qu'il aime au moindre problème?! C'est charmant... Vraiment charmant cette opinion que tu as de moi... » Je me figeai, fronçant les sourcils. D’un seul coup, je plongeai dans un océan de reproches dont je ne connaissais pas la cause. Au-delà de la colère de Samuel, mes tristes sens percevaient une pointe de déception qui, pourtant, ne semblait pas venir du point d’origine que je lui consacrais. Elle ne semblait pas due à mes regrettables erreurs, mais aux mots que je venais de prononcer. Inutile de vous dire que je nageais en pleine incompréhension, j’avais l’impression d’être perdu dans un labyrinthe sans fin. A chaque fois que je croyais en découvrir la sortie, l’échéance, Samuel replaçait par ses mots de nouvelles frontières m’empêchant de réfléchir correctement. Quelque chose m’échappait totalement. Il m’avait demandé de ne pas prononcer un mot de plus, aussi ne dis-je rien, mais tout se bousculait très vite à l’intérieur de ma tête. De toute façon, je n’aurais pas été sûr de pouvoir bredouiller quoi que ce soit face à lui, qui m’imposait le silence de par sa simple attitude. Il s’essuya d’un geste rapide, brusque, le visage, ce qui me conforta un peu plus dans mon idée de me taire. Je me faisais tout petit, minuscule dans mon lit, si je l’avais pu je me serrais sans doute cacher sous mes couvertures tant je craignais cette situation. Mais cela n’était pas envisageable, malheureusement. Je n’étais plus âgé de dix ans, impossible de me cacher tandis que j’affronte silencieusement de nombreux monstres qui assaillent mon lit, la nuit. Aujourd’hui j’ai trente trois ans, et force est de constater que je crains Samuel comme le croque mitaine en cet instant. Lamentable, pathétique, faible, comment aurais-je pu avoir la force d’en entendre davantage ? Pourtant il poursuivit. Il ne semblait prêt à s’arrêter.

Ses « je t’aime » auraient pu me rassurer, j’étais cependant bien trop paniqué pour que ces simples mots m’apaisent. De même que je savais que l’amour peut aussi cacher de la haine, et très sincèrement je n’aurais su dire ce que Samuel éprouvait réellement à mon égard en cet instant. Seule la colère était réellement visible. Quant à moi, je sentis de nouveau cette vague de culpabilité me submerger, me noyer tandis qu’il me disait ne pas avoir dormis depuis des jours, m’avoir attendu sans relâches, jusqu’à en décider de partir avec moi si cela s’imposait. Je lui en avais tellement fait subir… Plus qu’il n’aurait dû. Plus qu’il n’en méritait. Peu à peu le brouillard qui embrumait mon cerveau se dissipait, me laissant comprendre que cette colère, cette froideur, n’était pas causée par les épreuves que j’avais involontairement semées sur sa route, mais par la peur que j’éprouvais quant à le perdre. Ainsi… Il plongeait dans une telle fureur simplement parce que j’avais eu terriblement peur de le perdre ? … Non. Ce ne pouvait pas être cela. Il ne pouvait pas s’énerver si fort, si vite et si brutalement pour ça… Et pourtant… Il s’approcha un peu de moi, de nouveau mon premier réflexe fut de me ratatiner sur moi-même. La peur et la souffrance m’habitaient tout entier sans que je ne puisse rien contre, et mes brèves tentatives de compréhension ne faisaient que me plonger plus profondément dans cet océan de doutes. Pourtant… Ses mots ne firent que confirmer ce que j’avais, l’espace d’une seconde, soupçonné. Cette subite crise, je la devais à ma peur de l’avoir perdu en me montrant tout simplement insupportable avec lui. Je ne pu m’empêcher de grimacer lorsqu’il commença à me plaindre et à rejeter la faute sur lui. Non, non, j’avais été stupide. J’avais réagi trop vite, sans réfléchir. Mais en même temps… Comment aurais-je pu réagir ? Comment aurais-je pu avoir confiance en son amour ? Il n’était pas fautif, c’était moi l’idiot dans cette histoire. Toujours est-il que son attitude ne changeait pas, il disait avoir mal et, très sincèrement, il n’était pas le seul. Nous souffrions tout deux, à cause de moi. Pourtant, en moi la conviction qu’il ne me quitterait pas peinait à se faire une petite place, parmi les nombreux reproches que je m’adressais à moi-même, et les terribles incertitudes qui ligotaient mon cœur.

Au bout d’une seconde, je le vis s’approcher encore davantage de moi, avant de finalement s’asseoir à mes côtés. Je n’osai bouger, n’osai parler, bloquai presque ma respiration considérablement altérée par la peur qui serrait toujours mes poumons. J’attendais le « mais », le revers de la médaille, le côté négatif de ses paroles. J’attendais avec cette même panique qui engourdissait mon corps et m’empêchait de détacher mon regard de Samuel, appréhendant le moindre mouvement, le moindre mot. « Mais c’est vrai que tu peux ne pas avoir confiance, puisque finalement je te quitte. Je suis las de tes crises de panique Liam, tu me désespères. Si tu savais le nombre d’hommes qui me plaisent dans cette communauté et qui n’attendent qu’un signe de moi ! C’est fini. J’ai cru que tu me convenais, mais de toute évidence je me suis trompé. Tu n’es qu’un boulet à traîner… » Je déglutis avec difficulté tandis que mes yeux me suppliaient d’arrêter de pleurer, brûlants de fatigue. Comme je redoutais ces mots… Comme je redoutais un discours semblable à celui-ci, mais qui, au final, ne m’aurais pas vraiment étonné. Bien sûr que j’étais un boulet à traîner, bien sûr que des dizaines d’hommes lui auraient beaucoup mieux convenu que moi ici. Bien sûr qu’il s’était trompé, mais ça, je ne lui avais jamais caché. En fait, je ne lui avais jamais rien caché. Dès le soir où je m’étais aventuré dans sa chambre et avoué mes sentiments, je l’avais prévenu. Je lui avais dit tout ce qui nous séparait et tout ce qu’il aurait pu trouver chez d’autres. Mais il n’en avait fait qu’à sa tête. Il avait préféré mettre des œillères et faire comme si tout allait bien. Aujourd’hui le château de cartes allait s’effondrer, j’en étais certain. La maigre illusion sur laquelle reposait notre relation, à savoir que j’étais un homme convenable, fréquentable, s’émiettait au fil des heures. Il comprenait mieux à présent où je voulais en venir, et encore… Ce n’était que le début d’une longue liste.

« Pousse-toi un peu... »

Sa voix me sorti de mes sombres pensées. Je remarquai, sans trop y croire, elle avait perdu pour beaucoup de son extrême froideur qui m’avait tant pétrifié. Pourtant, je n’étais pas davantage détendu qu’auparavant, toujours sur la défensive, en attente du coup qui me mettrait définitivement au tapis. En dépit de tous ses mots, j’étais toujours convaincu qu’il allait me laisser. Je ne bougeai pas, interloqué, sans voix. Qu’est ce qu’il voulait me faire ? Pourquoi me demander cela ? Il insista néanmoins et je fus, en raison de l’impatience que je lu dans sa voix, incapable de résister : Je craignais bien trop une nouvelle colère de sa part. Je me décalai donc de quelques centimètres, comme il le souhaitait. Aussitôt, il se glissa à côté de moi dans le lit et passa ses jambes par-dessus les miennes avant de me prendre dans ses bras, autrement dit de m’enfermer contre lui. Une prison, voilà l’effet que me faisait cette étreinte que je ne comprenais pas. De nouveau je me raidis, trop faible cependant pour pouvoir lui échapper, trop peureux pour lui demander de me laisser. A quoi jouait-il, bon sang ? Pourquoi me prendre dans ses bras juste avant de me quitter ? C’était bien la première fois que je répugnais à ce point être contre lui, et pourtant la vérité était là, claire, implacable : Je voulais qu’il s’en aille. Je voulais qu’il me quitte une bonne fois pour toutes, qu’on en finisse. Cette attente était cruelle, insupportable… Il posa alors ses lèvres sur mon front en un baiser incroyablement tendre en comparaison de la situation, puis caressa avec douceur mes cheveux comme il le faisait si souvent. Je fronçai de nouveau les sourcils, complètement perdu. Je ne savais vraiment pas sur quel pied danser et ce ne fut que lorsqu’il reprit la parole que je compris. Enfin, je compris. Ce fut comme s’il venait de retirer un immense fardeau de mes épaules, qu’il avait libéré mon cœur. Alors… Ce n’était pas la fin. Il ne m’abandonnait pas déjà. Mon soulagement était tel que je ne pu empêcher les larmes de couler un peu plus sur mes joues, si bien qu’il dû me serrer un peu plus fort contre lui. Il me traita d’idiot, mais je m’en fichais. Oui, après tout, j’étais un idiot. Un idiot qui pleurait comme un enfant dans les bras de l’homme qu’il aimait, et qu’il croyait avoir perdu. Je tremblais comme une feuille, sans pouvoir me calmer en dépit des caresses de Samuel. J’avais eu trop peur, j’étais bien trop déboussolé, perdu, choqué, pour que toute cette panique ne déserte d’un seul coup mon corps.

Je me serrai contre lui le plus possible, nichant mon visage trempé contre son torse fort, rassurant. Samuel parvenait toujours à m’apaiser rien que par sa présence, ses baisers, ses sourires. Seulement il venait de me faire une telle frayeur qu’au fond, je savais qu’il fallait que j’évacue au travers de mes pleurs. Je devais très certainement lui faire pitié, à pleurer de cette manière dans ses bras, pourtant je ne le sentis pas soupirer, je ne l’entendis pas me dire que je l’agaçais. Cette situation dura longtemps. Ma respiration ne se calmait pas, et toujours de nouvelles larmes venaient piquer mes yeux. J’ai dû pleurer une bonne demi-heure, là, contre son torse, me détendant au fur et à mesure des minutes. Et puis, finalement, me yeux s’asséchèrent et mon regard se planta dans un coin de la pièce éloigné, perdu dans le vague tandis que je tentai de réfléchir calmement à tout ce qui venait de se passer. A présent que la crise était passée pour nous deux, que la panique s’était apaisée, je devais absolument essayer de comprendre. Tout était de ma faute, une froide colère s’était emparée de lui car j’avais eu peur de le perdre… Mais ça n’avait pas de sens. Il aurait pu me jurer cent fois que jamais il ne me quitterait, l’aurais-je pour autant cru ? Ce n’était pas un manque de confiance en lui, en son amour, contrairement à ce qu’il affirmait… C’était un manque de confiance en moi. Je ne parvenais pas à accepter qu’il m’aimerait toujours comme il le jurait, qu’il serait toujours là pour moi, parce que je ne comprenais pas pourquoi, justement, il m’aimait, moi ! Pourquoi moi ? Je n’étais pas particulièrement séduisant, ni même drôle ou joyeux… J’étais hyper sensible, combien de fois m’étais-je réfugié en larmes dans ses bras, comme aujourd’hui ? Et puis, nous n’avions pas une vie de couple normale. Aux yeux de tous, nous n’étions d’ailleurs pas un couple. Il me fallait me cacher… Nous cacher… C’était atroce. S’il en souffrait autant que moi, cette situation ne pourrait plus durer très longtemps, et pourtant l’idée de tous ses regards braqués sur nous, de tous ces murmures dans nos dos me glaçait. J’avais beau chercher, vraiment, aucune raison à son amour ne m’apparaissait. Alors oui, j’avais peur… J’avais même constamment peur de faire quoi que ce soit qui puisse lui déplaire, et à cet instant encore davantage. Pourtant s’il y avait bien une chose qu’il m’ait apprise, c’était me confier à lui. Il ne fallait pas que je garde tout cela sur le cœur, je le savais. Aussi quand ma voix s’éleva, ne fut-elle qu’un simple murmure, mon regard toujours dans ce vague immense qui submergeait mon crâne.

« Avoir confiance en ton amour… »

Je m’arrêtai, avant de relever mon regard vers le sien. Très clairement, je craignais de ne provoquer une nouvelle colère. Pour autant, je devais l’affronter ; Il le fallait. Il fallait que je lui explique, qu’il comprenne. Pas nécessairement qu’il me rassure puisque c’était peine perdue, mais qu’il sache au moins…

« Comment le pourrais-je ? »

Je le sentis se raidir, n’appréciant sans doute pas. J’eus un sourire triste, avant de glisser difficilement une main dans son cou, caressant du pouce sa joue. A ce geste, j’eus l’impression qu’on m’arrachait un muscle, mais n’y prêtai pas attention : J’avais plus urgent à faire que me lamenter sur ma propre douleur.

« Non, je n’ai pas confiance en ton amour, et non je ne comprends pas, n’envisage même pas pouvoir être ta vie… »

Il s’apprêta à protester mais je m’empressai de poser un doigt sur ses lèvres. Maintenant, c’était à lui de se taire. Lui que je ne voulais plus entendre. Et comme moi m’étais plié à cette volonté de sa part, je comptai bien qu’il s’y plie également.

« …Parce que je ne comprends pas. Je ne te comprends pas. Regarde toi… Tu es parfait… A mes yeux tu l’es, et c’est ce qui m’oblige à me demander ce que tu peux bien faire avec moi. Ne répète pas que tu m’aimes pour ce que je suis, c’est juste idiot… Finalement, c’est sans doute toi l’idiot. Moi j’ai la chance de posséder un homme incroyable, un homme magnifique sous tous points de vue. Toi tu n’as qu’une loque entre les bras. Sens ça. »

Doucement, j’attrapai une de ses mains et la passai sous le vieux t-shirt que je portai, tout contre mes côtes. J’en frissonnai une seconde, sentant ses doigts glisser sur ma peau, mais les fixait tout de même là où je voulais qu’ils aillent : Sur mes côtes. On pouvait les compter juste en les effleurant du bout des doigts, et pour cause, j’avais perdu beaucoup de poids. Oui, j’étais une loque, et il était temps qu’il s’en rende compte. Je déplaçai sa main.

« Juste là… Mon foie. Imagine juste une seconde son état après six ans d’alcoolisme… Ca, plus ces derniers jours… »

J’eus un sourire triste avant de retirer sa main de ma peau et la laisser s’en aller. Il n’y avait ni reproche ni colère dans ma voix. En fait, elle ne trahissait rien, car je n’éprouvais rien mis appart de l’incompréhension. Je ne cherchais pas à l’accabler, ni à le repousser. Je lâchai un soupir avant de me hisser un peu pour l’embrasser sur le front, et me reculai. Très nettement, je sentais que je ne pourrais plus tenir très longtemps cette conversation, le souffle court. Bouger m’était douloureux, parler également. J’étais épuisé, tout simplement. Un instant je fermai les yeux, avant de me reculer encore, pris d’une nouvelle quinte de toux qui m’arracha les poumons. Une fois la tempête passée, mon corps de colla de nouveau au sien et je repris le fil de mon discours, laissant aller ma tête sur son épaule. Ma voix trahissait très clairement ma fatigue ; Je n’allais pas tenir très longtemps encore.

« Pas la peine de t’énerver de nouveau, pas la peine de crier encore… C’est comme ça, tu peux rien y faire. Comme n’importe quelle personne détenant un trésor, j’ai peur à chaque instant de le perdre. Oui…Samuel… J’ai peur de te perdre, et bon sang… Je ne vois pas ce qu’il y a de si mal là-dedans. C’est pas l’opinion que j’ai de toi le problème, mais celle que j’ai de moi… Le problème, c’est moi. »

Ma voix mourut sur le dernier mot et je laissai de nouveau aller ma tête contre son torse, mes yeux se fermant progressivement. Au fond de moi, sous toute cette couche de fatigue qui peu à peu recouvrait mon esprit, j’espérais qu’il ne réagirait pas comme quelques instants plus tôt. J’espérais qu’il n’allait pas de nouveau se dégager de moi avec brutalité pour me crier encore dessus car sincèrement, je n’avais pas besoin de ça. Je n’avais pas besoin de sa colère, ni de sa froideur, bien au contraire. Tout ce que je voulais c’était rester là, dans ses bras, bien au chaud et pouvoir me laisser aller à m’endormir. Sa respiration lente et apaisée constituait une berceuse magnifique à mon pauvre corps endoloris, si bien qu’au bout de quelques instants mes yeux étaient totalement clos, me laissant sombrer. Bon sang… C’était la première fois que j’allais m’endormir –consciemment- dans ses bras, et je constatai avec ravissement qu’on y était mieux que n’importe où. Je n’aurais pu trouver davantage de confort que contre lui, contre sa peau, serré par ses bras forts et rassurants. Cette étreinte était merveilleuse, et se fut avec un doux sourire que je commençai à m’endormir. Ou pas. Soudainement, je le sentis se crisper, avant de poser ses doigts dans mon cou, appuyant. Il ne s’en rendit sans doute pas compte, mais il appuya si fort contre ma peau qu’il m’arracha brutalement à ma délicieuse léthargie. Je m’apprêtai à lui dire d’arrêter, lui demander ce qui lui prenait lorsque je compris ce qu’il faisait… Il cherchait mon pouls… Il avait eu peur que je ne sois mort, là, entre ses bras, ou bien évanoui, ou je ne sais pas. En tout cas, il se trompait. Je fronçai doucement les sourcils avant de porter une main à la sienne, et ôter ses doigts de mon cou. Je les dirigeais par la suite jusqu’à mes lèvres, y déposant un doux baiser, avant de murmurer tout bas :

« J’ai juste sommeil, mais je me réveillerai… C’est promis. »

Sa peur était compréhensible, comment aurait-il pu réagir autrement tandis qu’à chaque fois que je m’endormais ces temps-ci, il tremblait à l’idée de ne jamais me voir m’éveiller ? Cette fois-ci néanmoins, je sentais qu’il ne s’agissait pas de ce vide à présent familier qui me happerait. Non, c’étaient bel et bien les bras de Morphée qui m’enlaçaient désormais et j’étais décidé à me laisser faire, à bout de forces. Pourtant, lorsque j’entendis la porte s’ouvrir, j’entrouvris les yeux et vis Mathilda qui nous jeta à peine un coup d’œil avant de se diriger vers une armoire et l’ouvrir, y farfouillant quelques instants. Après tout, cette pièce demeurait toujours sa réserve. Elle finit par la refermer, une boîte de médicament à la main, et se tourner vers nous. J’ouvris un peu plus les yeux pour lui montrer à elle aussi que je n’étais pas mort, au cas où, mais ce ne fut pas à moi qu’elle s’adressait.

« Il est un peu plus de 20 heures, vous devriez manger un morceau. Tout les deux. »

Ajouta-t-elle avec un air plutôt sévère. Je soupirai avant de jeter un regard à Samuel qui ne me semblait pas beaucoup plus emballé que moi. Le regard de Mathilda devint soudainement beaucoup plus autoritaire tandis qu’elle s’approchait un peu de nous.

« Liam a besoin de manger pour reprendre des forces, il doit se nourrir. Quant à toi, je ne t’ai pas vu une seule fois dans la salle à manger ou aux cuisines depuis quatre jours. Ca suffit maintenant. »

Je ne pu m’empêcher de sourire. Sa voix avait beau être glaciale, Mathilda voulait seulement prendre soin de nous et j’en étais bien conscient. Ce n’était pas par simple envie de nous embêter, elle devait vraiment se faire du souci.

« Alors maintenant tu te bouges Samuel, et tu retournes en cuisines. Si quelqu’un te reproche quoi que ce soit, dis lui que c’est moi qui t’envois préparer le repas de Liam. Alors, écoute moi bien car c’est très important. Aucune forme de protéines : viande, poisson, œufs, champignons,… A proscrire. J’ai lu que certains cas de leptospirose tournent en jaunisse si le foie est en mauvais état, et… Bref. Pas de protéines. »

Je n’avais pas mentis lorsqu’il avait fallu me constituer un dossier médical : J’avais été alcoolique, et Mathilda le savait très bien.

« Privilégie les bouillons, les potages, les soupes, les légumes verts. Très peu de féculent… 40 grammes maximum tous les deux jours je dirais. S’il y en a un peu plus ce n’est pas grave. Du lait seulement au petit déjeuner s’il en veut et encore, il serait mieux de prendre un thé. Bois-en le plus possible dans la journée. D’ailleurs, tu lui prépares une tisane, très très chaude, pour ce soir. Aussi, il faut que matin et soir Liam boive le jus d’une moitié de citron dilué dans de l’eau. C’est infect, mais ça nettoie très bien le foie et les reins. Voilà, c’est à peu près tout. Très peu de matières grasses, très peu de sucre, je crois qu’on ne peut pas mieux faire. »

Ca, ce devait être le plan d’attaque de Mathilda afin de garantir mon rétablissement. Mon Dieu… Comment Samuel allait-il pouvoir retenir tout ça ? Et d’ailleurs, pourquoi serait-ce forcément lui qui s’occuperait de mes repas ? Il y avait bien d’autres cuisiniers, ne serait-ce que pour ce soir… Je n’avais pas envie qu’il me laisse pour aller préparer quelque chose que je ne mangerais de toute façon pas. J’avais l’estomac noué, et savais qu’à la moindre odeur de nourriture les nausées referaient leur apparition. Au bout de quelques instants, Mathilda ressortit, et je sentis que Samuel effectuait également un geste pour se dégager, aussi resserrai-je du mieux que je pu mon étreinte afin qu’il ne me quitte pas. Je n’avais vraiment pas faim, et vu la tête qu’il avait fait lorsque Mathilda lui avait ordonné d’aller se préparer quelque chose aussi, il ne devait pas avoir davantage que moi envie de manger. Je soupirai avant de plonger mon regard dans le sien. Voilà qu’il était tout désigné par Mathilda pour s’occuper de moi, ne serait-ce que d’un point de vue alimentaire. Décidemment, je n’avais pas fini de lui apporter de nouveaux problèmes. Au bout de quelques secondes je tentai néanmoins d’esquisser un faible sourire et tendit le cou pour qu'il m'embrasse.

Ici commence la longue route vers la guérison, pleine d’inconvénients et de contraintes. Mais je ne m’en fais pas, je n’ai pas peur des épreuves. Je sais que je ne serai pas seul.

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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeVen 20 Mai - 21:04

Son cœur. Vérifier que son cœur battait toujours. Sa respiration. Vérifier qu'il respirait toujours. C'était plus fort que moi et c'était surtout une véritable obsession. Oui, même si il avait l'air d'aller mieux, même si j'avais à présent l'espoir qu'il allait s'en sortir, même si j'arrivais à croire en notre avenir, j'avais peur. Peur qu'une nouvelle complication fasse son apparition, peur qu'il ne sombre une nouvelle fois dans un coma duquel, cette fois-ci, il ne reviendrait pas. En cet instant, alors que je le serrais dans mes bras, alors que je le sentais secoué de sanglots, cette peur était toujours présente, seulement bien cachée et en réalité, j'ignorais encore à quel point elle allait me changer. A quel point elle allait tout changer... Si je l'avais su, si j'avais pu le deviner, aurais-je fait en sorte de ne pas en arriver au point de non retour ? J'aurais sans doute voulu faire en sorte de ne pas y arriver mais malheureusement, ce qui était en train de me ronger n'était absolument pas contrôlable et j'allais bientôt m'en rendre compte. Aussi, j'étais non seulement ignorant mais également complètement impuissant. J'étais incapable de maîtriser quoi que ce soit... J'étais incapable de maîtriser ma peur mais j'étais également incapable de rassurer Liam. Tout ce que je pouvais dire, tout ce que je pouvais faire n'allait pas être suffisant. A présent, je le savais. J'essayais de le bercer, de le calmer, mais rien n'y faisait. C'était comme si j'étais en train de lui transmettre mes propres angoisses cachées sauf qu'il n'avait pas besoin de mes angoisses : Il avait suffisamment à faire avec les siennes. J'ignore combien de temps nous restâmes ainsi, l'un contre l'autre, lui ne pouvant s'empêcher de pleurer, moi essayant de le calmer en vain. En tout cas, lorsque sa voix s'éleva, elle me parût bien basse : Ce n'était en fait qu'un murmure que je sentis cependant raisonner contre moi tant nous étions collés l'un à l'autre. Un instant plus tard, je croisai son regard et j'eus mal, terriblement. Je n'avais pas peur de ce qu'il allait me dire, mais j'avais mal de le voir tant souffrir. Et puis la phrase tomba, encore.

Comment pouvait-il avoir confiance en mon amour ? Mais bon sang, je venais tout juste de lui dire à quel point je l'aimais, et cela ne lui suffisait pas ? J'étais prêt à tout pour lui, à mourir pour lui... Ma vie sans lui n'avait absolument aucun sens. Sans lui... Non, c'était tout simplement impensable et impossible de vivre sans lui. Quel autre preuve pouvais-je lui apporter pour le rassurer ? Je fus donc surpris de l'entendre me dire cela, pensant qu'il avait enfin compris et ce fut plus fort que moi : Mon corps réagit sans même que je ne m'en rende compte et que je me raidis, encaissant le coup sans comprendre. Et ce sourire triste qui étira ses lèvres ensuite ne me rassura pas, bien au contraire. Il fit cependant l'effort de glisser sa main dans mon cou avant de caresser délicatement ma joue de son pouce : A cette douce caresse, je sentis mon cœur et mon corps fondre malgré ses paroles. Il n'avait pas confiance en mon amour, ne comprenait pas mon amour et ne comprenait pas comment je pouvais considérer qu'il était toute ma vie. J'étais sincèrement perdu. Comment pouvait-il ne pas comprendre ? Je devais donc lui expliquer une nouvelle fois. Je devais lui dire à nouveau que je l'aimais, qu'il était tout pour moi mais il ne m'en laissait pas le temps et glissa son index sur mes lèvres pour m'empêcher de parler. J'obéissai. S'il avait autre chose à dire, je voulais l'entendre pour pouvoir comprendre ce qui n'allait pas. Et bientôt, l'explication tomba : En réalité, ce n'était pas en moi qu'il n'avait pas confiance, mais en lui-même... Il ne se faisait pas confiance. Il nous comparait, ne comprenait pas qu'un homme comme moi puisse aimer un homme comme lui. Il ne comprenait pas ce que je pouvais lui trouver. Pourquoi parler ainsi ? Pourquoi nous comparer de cette façon ? Ca n'avait rien à voir avec l'amour... Et puis, quel genre de type j'étais ? Hein ? Pourquoi créer des différences et donc un fossé alors que ça n'avait absolument aucune importance. Quand il parla de moi comme d'un homme magnifique je serrai la mâchoire, de plus en plus fâché de cette comparaison, de cette image qu'il avait de moi. Cette fausse image... Moi j'étais parfait et lui n'était qu'une loque ? Non... Je ne pouvais pas le laisser penser ça... Et puis, il mélangeait. Oui, lorsqu'il prit ma main et la posa contre lui je sentis ses côtes, je sentis qu'il n'avait plus que la peau sur les os mais il ne fallait pas oublier qu'il était malade et la faute à qui en plus ?

La mienne...

Alors non, j'étais loin d'être parfait et il était loin d'être cet homme non désirable qu'il me décrivait. Et puis, son alcoolisme, je l'avais accepté. Je connaissais bien l'être humain et il était faible : Nous avions tous une part d'ombres en nous, c'était ainsi. Sa faiblesse à lui c'était l'alcool. Et alors ? Quand on aime quelqu'un, on aime ses bons et ses mauvais côtés. Quand on se lie à quelqu'un, on accepte d'être à ses côtés, quoi qu'il puisse arriver et en particulier si ce quelqu'un a besoin d'aide... On ne peut pas laisser derrière nous une personne que l'on aime sous prétexte qu'elle n'est pas parfaite : Personne ne l'est. Et le pire, c'était que Liam pensait que moi je l'étais alors qu'il ignorait tant... Tout ça était complètement insensé et j'avais l'horrible impression qu'il n'y avait rien que je pouvais dire ou faire pour lui faire comprendre qu'il avait tort. Rien. Alors quoi ? J'allais simplement le laisser avec ses idées ridicules ? Je n'avais pas vraiment le choix. J'avais peur que contrer ses paroles ne rendent la situation encore plus grave et n'empire ce ressentis qu'il avait. Alors, je me tus et le laissai m'embrasser le front sans esquisser le moindre geste, sans pour autant le repousser. J'avais juste besoin de quelques instants pour que tout ceci se fasse une place dans mon esprit et dans mon cœur. C'est là qu'il fut pris d'une nouvelle quinte de toux et je me redressai un peu, inquiet (comme d'habitude me direz-vous). Il n'était pas encore guéri... C'était à cela que je devais penser. Je ne devais pas laisser les paroles de Liam encombrer mon esprit : Je devais les mettre dans une boîte, la fermer et ne l'ouvrir que bien plus tard de façon à être là pour lui, de façon à le soutenir au mieux pour qu'il guérisse : Il devait guérir. J'avais besoin de lui, doutes ou pas doutes de se part, j'avais besoin de lui : Vivant. Je n'osai pas m'approcher pendant sa quinte de toux, ayant peur de lui faire mal en le touchant tant je savais à quel point sa peau, ses muscles et ses os étaient sensibles. Finalement, ce fut lui qui s'approcha à nouveau de moi avant de se blottir dans mes bras et de reprendre la parole. Je le laissai faire, l'enlaçant avec tendresse. Sa voix était faible et ma peur, mon angoisse incontrôlable refit son apparition. De plus, l'entendre me confirmer que je ne pouvais absolument rien pour l'aider et le rassurer ne fit qu'empirer mon angoisse. Alors, il allait toujours en être ainsi ? Jamais il ne comprendrait ?... Très bien. Si cela devait se passer ainsi, cela se passerait ainsi : Plutôt vivre avec lui dans la douleur que vivre sans lui. Je l'avais déjà décidé lorsqu'il m'avait fait sa déclaration et je n'avais pas l'intention de changer d'avis. Il avait peur de me perdre mais ça n'arriverait jamais.

A la vie, à la mort.

Mort. Non. Je ne devais pas y penser. Mais comment ne pas y penser en le voyant fermer ses yeux et s'éteindre doucement ? Comment ne pas avoir peur de la suite ? Comment ne pas avoir peur de voir s'arrêter sa respiration ? Non. Il ne devait pas dormir. Il ne devait pas partir. Il ne devait pas mourir ! Je me crispai, resserrant mon étreinte, pris de panique. Ma main quitta son dos et je la glissai contre son cou, cherchant à sentir son pouls, enfonçant avec sans doute trop de force mes doigts contre sa peau pour pouvoir sentir ce petit battement qui était devenu, à présent, une véritable obsession. J'étais sans doute trop paniqué pour pouvoir sentir son pouls et de toute façon, je n'en eus pas le temps puisqu'il glissa sa main sur la mienne, preuve qu'il était encore vivant. Aussitôt, je sentis mon corps se détendre de lui-même et soupirai d'apaisement quand il porta ma main à ses lèvres avant d'y déposer un baiser. Il me promit qu'il allait se réveiller, qu'il était juste fatigué... J'esquissai alors un maigre sourire, en essayant de le rendre le plus sincère possible. Ce sourire disait « D'accord, tu peux t'endormir. Ca ira. » Je pensais cependant le contraire mais je ne pouvais pas le forcer à rester éveillé : C'aurait entraîné sa chute plutôt que sa guérison. Dans ce cas, j'allais, moi, rester éveillé. Je le vis fermer ses paupières et l'angoisse refit son apparition, sans pour autant que je ne la laisse me submerger : J'allais devoir m'en accommoder et vivre avec. C'est à ce moment-là que Mathilda entra dans la chambre, m'arrachant presque un sursaut et empêchant Liam de s'endormir. J'observai Mathilda et attendis soit qu'elle sorte de la pièce soit qu'elle... Se dresse face à nous et nous annonce l'heure et surtout, qu'il était temps pour nous de manger. Elle avait cet air sévère et résolu qu'on lui connaissait si bien. Cet air qui, quand elle l'arborait, laissait sous entendre qu'elle n'allait pas plier et que nous allions devoir lui obéir. Or, je n'avais pas faim. Mais vraiment, pas du tout, absolument pas faim... Ni Liam, ni moi ne répondîmes et je savais qu'à cause de son état, il n'avait pas très envie de manger vu la façon dont cela se terminait à chaque fois. Seulement, Mathilda s'avança vers nous en prenant un air encore plus autoritaire : J'eus limite un geste de recul, de peur qu'elle ne m'en colle une histoire de me remettre les idées en place et de me faire comprendre qu'elle avait raison. En plus, elle avait raison et j'étais d'accord avec elle : Liam devait absolument se nourrir et... Quoi ? Qu'est-ce-que moi je venais faire là-dedans ? On s'en fichait que personne n'ait vu ma tête dans les cuisines depuis plusieurs jours : Je ne voulais pas quitter Liam. Cependant, Mathilda était décidée et quand elle était comme ça... Eh bien, en général, il n'y avait rien qui pouvait la faire changer d'avis.

Les directives furent claires : Je devais aller en cuisine pour préparer le repas de Liam. En fait, j'allais devenir son cuisinier : Ah, ça, ça m'allait. De cette façon, je pouvais m'occuper de lui et vraiment prendre soin de lui. La cuisine, c'était mon truc et je voulais faire ça pour lui, aussi, j'écoutai avec attention Mathilda pour pouvoir bien enregistrer toutes ses instructions : Liam allait avoir besoin d'un régime particulier. Je n'allais cependant pas pouvoir tout retenir : Note pour plus tard, demander à Mathilda de m'écrire tout ça sur papier de façon à ce que je ne fasse aucune erreur. La guérison de Liam était en jeu. En fait, c'était carrément sa survie qui était en jeu : Il avait le foie très abîmé et nous devions être extrêmement prudents. J'acquiesçai d'un bref hochement de tête, un faible sourire étirant mes lèvres : J'allais pouvoir m'occuper de lui et l'aider à ma façon. A défaut de pouvoir le rassurer, j'allais au moins l'aider à guérir, c'était déjà ça, non ? En tout cas, pour moi c'était très important de pouvoir lui être utile, de participer à sa guérison, de faire partie du processus qui allait, progressivement, le ramener à la vie. Mathilda quitta la pièce et j'amorçais un geste pour me lever à mon tour (je devais aller préparer une tisane pour Liam) quand je sentis l'étreinte de Liam se resserrer autour de moi, en tout cas, autant que le peu de forces qu'il avait le lui permettait. Nos regards se croisièrent et ne se quittèrent plus jusqu'à ce que Liam n'esquisse un sourire et tende le cou : A mon tour, un sourire se dessina sur mes lèvres avant que je ne me penche pour déposer un tendre baiser sur ses lèvres. D'un geste tendre, ma main retrouvant sa nuque et je lui caressai doucement la peau avant de détacher mes lèvres des siennes et de lui faire poser sa tête contre mon épaule. Il avait besoin de se reposer, quand bien même cette idée m'était horriblement effrayante... Le silence s'installa de nouveau et petit à petit, au rythme de nos respirations lentes, je sentis le corps de Liam se détendre jusqu'à ce qu'il soit complètement emporté par le sommeil. Je m'extirpai doucement du petit lit et remontai les draps sur lui avant de me pencher et de déposer un tendre baiser au coin de ses lèvres.

-Je reviens très vite...

Murmurai-je tout bas, avant de me redresser et de sortir de la pièce. La lumière de l'infirmerie m'agressa, littéralement, et je fermai les yeux quelques instants en les frottant avant des les rouvrir doucement pour m'habituer à cette lumière qui me semblait vraiment aveuglante. Une fois mes yeux habitués, je m'avançai vers Mathilda qui me regardait toujours avec ce même air sévère. Je fis doucement craquer ma nuque avant d'y poser ma main et de la frotter un peu : J'étais épuisé, mais il était hors de question que je ferme ne serait-ce qu'un œil.

-Hum... Est-ce-que tu peux me noter ce que...

Je ne terminai pas ma phrase voyant que Mathilda me tendait déjà un petit bout de papier où elle avait probablement déjà pris la peine de tout me préciser. Je le pris et l'observai.

-Si tu as des questions, n'hésite pas.

-Oui.

Répondis-je, ailleurs.

-Samuel ?

-Hein ?

-Après lui avoir préparé la tisane, retourne dormir dans ta chambre : Tu en as besoin.

Je fronçai les sourcils avant de relever mon regard vers elle. Ah non : Pas ça. Je voulais rester près de Liam.

-Non. Je vais rester avec lui.

-Tu ne vas pas passer tes nuits à l'infirmerie ! Tu as besoin de repos Samuel !

-Tu n'es pas mon médecin, et je vais bien ! Je resterai avec lui et il est hors de question...

-Et les jumeaux ?

Elle m'avait coupé la parole mais je la repris pas : Je savais parfaitement où elle voulait en venir. Je soupirai en baissant la tête. Elle avait raison : Je ne pouvais pas laisser les jumeaux tout le temps avec Lily. Ils étaient inquiets pour leur père et j'avais promis à Liam... Bref, je n'avais en fait pas vraiment le choix.

-Oui. Bon... Je vais lui préparer sa tisane.

Sur quoi je sortis de l'infirmerie afin de me diriger vers les cuisine, ne prenant pas la peine de saluer qui croisait ma route, trop perdu dans mes pensées pour cela. Des nuits atroces m'attendaient, à me demander s'il allait bien, s'il était toujours en vie, s'il n'y avait pas de complications... Arrivé à la cuisine, je fus agréablement surpris de n'y trouver personne : Moi qui d'ordinaire était sociable, là je n'avais pas vraiment envie de faire la causette avec qui que ce soit. Je me mis donc à la préparation de la tisane et cela fut relativement rapide. De retour à l'infirmerie, je réveillai Liam pour essayer de lui faire boire la tisane mais cela eut beaucoup de mal à passer. Il finit par l'avaler entièrement. La tisane était passée, mais est-ce-que le reste allait également passer ? Le lendemain midi, nous eûmes la mauvaise surprise de voir Liam rendre son repas une nouvelle fois. J'avais pourtant bien tout préparé comme Mathilda me l'avait demandé... Et oui, j'avais pris mon temps avec lui. Je n'avais pas voulu le brusquer, de ne pas brusquer son corps. Oui, ça avait dépendu de moi parce que Liam était tellement épuisé qu'il avait été incapable de manger seul. J'avais dû lui donner à manger, l'aider à tenir sa cuillère et pour quel résultat? Son organisme refusait toute nourriture, même s'il ne s'agissait que d'un simple potage. Nous refîmes une tentative avec la tisane qui eut du mal à passer mais qu'il ne rendit pas. Cela dura quatre jours : Il faiblissait encore parce qu'il ne se nourrissait pas mais au moins, il buvait cette tisane. Quand le midi du cinquième jour je décidai de retenter de lui faire boire du potage et qu'il passa les minutes suivantes et les heures suivantes sans vomir, inutile de vous cacher que ce fut un véritable soulagement pour nous trois. Pour Liam, ce fut un moment particulièrement important : Je savais qu'en supportant de manger, il pouvait entrevoir le bout du tunnel qu'il n'avait, jusqu'à présent, pas du tout vu. De mon côté, j'étais aussi euphorique que lui à un détail près : J'avais toujours peur que quelque chose vienne tout remettre en question. J'avais peur que son état ne s'aggrave encore une fois. Mathilda était réservée quant à la suite mais positivait énormément. Moi... Moi, j'avais juste peur que tout ça ne soit qu'un simple répit et que le pire soit encore à venir. C'est avec ces pensées que je passais des nuits sans réussir à dormir et quand je parvenais enfin à fermer l'oeil, j'étais emporté par des cauchemars où je voyais Liam mort : En général, je me réveillais en sursaut et j'étais incapable de refermer l'oeil. De toute ma vie, je n'avais jamais été autant inquiet pour quelqu'un. Je n'avais jamais autant eu peur de perdre quelqu'un.

Pas même Jason... Pourtant, je l'avais aimé avec force, avec passion et ce, même si nous n'avions pas pu être ensemble. Pourtant, nous avions fait la guerre ensemble et j'avais eu peur pour lui. Mais cette angoisse qui me tiraillait les entrailles dès que j'étais loin de Liam ou que je le voyais fermer les yeux... Cette angoisse de le voir partir pour ne plus jamais revenir... Non, ça n'égalait rien de ce que j'avais pu ressentir dans ma vie jusque là. Liam était devenu ma vie, ma raison d'être. Je ne pouvais imaginer ma vie sans lui. Je voulais passer ma vie à ses côtés, ne plus le quitter, l'aimer de tout mon être jusqu'à ce que je sois mort et même bien au-delà... J'étais, on peut le dire, dangereusement épris de Liam. C'était un amour à haut risque, un amour sans limite qui pouvait nous rendre heureux mais aussi nous détruire. D'ailleurs, c'était déjà le cas sans même que nous nous en rendions compte. Le bonheur, le malheur... Tout cela se mélangeait et réussir à trouver un équilibré n'allait pas être facile. Comme trouver un juste milieu et ne pas être excessif que ce soit dans la joie ou dans la tristesse ? Ca me paraissait impossible. Alors qu'il était tard, que les jumeaux dormaient depuis plusieurs heures, que je fixais le plafond sans réussir à trouver le sommeil, je réalisai que Liam et moi étions liés par des liens forts, puissants, violents. Oui, il y avait une certaine forme de violence dans cet amour que nous éprouvions. Allais-je un jour lui faire du mal à trop l'aimer ? Il doutait de lui, ne se trouvait pas assez bien mais si finalement c'était moi qui n'était pas digne de lui ? Et si finalement, j'étais celui qui allait entraîner sa perte ? Des peurs, des angoisses, encore et encore. Voilà qu'à présent, moi aussi je me mettais à douter de moi-même... Le manque de sommeil devait sans doute y être pour quelque chose : Je me perdais petit à petit, je m'éloignais de celui que j'étais. Après avoir passé une nuit entière à me poser toutes ces questions plus stupides et sans réponse les uns que les autres, je compris que cela ne pouvait pas durer comme ça : Je devais absolument me reposer sinon je n'allais plus être bon à rien. J'avais peur de dormir, c'était même devenue une véritable phobie mais... Si je ne dormais pas, j'allais finir par être l'ombre de moi-même et Liam avait besoin de moi. Aussi, je demandais à Mathilda de me donner de quoi dormir un peu plus la nuit, ce qu'elle s'empressa de faire. En même temps, étant donné que je devais faire relativement peur, elle n'allait pas refuser. Et puis, je voyais que Liam s'inquiétait pour moi, même s'il ne disait rien. Il passait la plupart de ses journées à se reposer mais le peu que nous parlions, le peu de moments que nous partagions, je voyais qu'il était inquiet et pour qu'il guérisse plus vite, il devait ne penser qu'à lui et ne surtout pas s'inquiéter pour les autres.

Ce soir-là, face à ces deux petites gélules que je devais avaler, je restai un moment pétrifié, incapable d'esquisser le moindre geste, incapable de porter ces gélules à ma bouche pour les avaler. J'observai la porte, craignant de la voir s'ouvrir sur Mathilda qui viendrait m'annoncer une mauvaise nouvelle. Non... Non... Tout allait bien se passer. Liam n'allait pas mourir. Il était juste en train de dormir et je devais faire pareil. Je devais moi aussi dormir et à mon réveil, il allait être là, vivant, prêt à manger le repas que je lui aurais préparé. Il allait être là. Il allait être là... Il allait être là...Il allait être là...Il allait être là...Il allait être là... Cette phrase, je la répétai dans ma tête après avoir avalé les gélules, allongé, attendant ce sommeil que je craignais tant. Lorsque je m'éveillai le lendemain matin, la nuit me parût vraiment courte mais elle avait été sans rêve ou cauchemar ce qui avait été plutôt reposant. Je sautai du lit et fonçai à l'infirmirie sans prendre le temps de passer prendre une douche ou préparer le petit déjeuner de Liam. D'ordinaire, quand j'arrivais le matin, c'était avec le petit déjeuner mais là je ne pouvais pas attendre : J'avais dormi et je voulais savoir s'il allait bien, je voulais le voir, m'assurer qu'il ne lui était rien arrivé. J'entrai avec fracas à l'intérieur de l'infirmerie et Mathilda me jeta un regard noir : La discrétion était de mise en ce lieu pour les malades et j'avais souvent tendance à l'oublier. Je pense qu'elle dut voir la panique sur mon visage parce qu'elle s'empressa de s'avancer vers moi avec un sourire rassurant.

-Il va bien, il dort encore.

Je baissai la tête et m'effondrai par terre avant de me mettre à pleurer comme un bébé, la tête entre mes mains. C'était idiot... Oui, c'était sans doute très idiot mais cette angoisse avec laquelle j'avais vécu pendant de nombreuses nuits avait été tellement oppressante, tellement difficile à supporter qu'en la perdant, un poids immense s'était retiré de mon cœur et j'avais besoin de pleurer parce que j'avais besoin d'évacuer toute cette tension, toute cette peur... Je sentis la main de Mathilda se poser sur mon épaule et aussitôt, ma main s'approcha de sa main pour s'en saisir et la serrer : Je n'avais pas besoin qu'elle me dise quoi que ce soit, je n'avais pas besoin qu'elle me prenne dans ses bras, mais j'avais juste besoin de tenir sa main pendant quelques instants, le tout que tout ça sorte de moi, le temps que je me débarrasse de ce poids. Liam dormait encore et il ne saura jamais que ce jour-là, ce matin-là, j'ai pleuré de cette façon. Si j'ai préféré ne pas lui dire ce n'était pas parce que j'avais honte. Non, je n'avais pas honte d'avoir pleuré... Je voulais juste le protéger : Il n'avait pas besoin de connaître mes angoisses, il n'avait pas besoin de savoir que j'avais encore et toujours peur pour lui, peur de le perdre, peur qu'il ne s'en aille loin de moi, peur que la mort l'emporte... Peur. Alors, après avoir pleuré, je quittai l'infirmier pour aller me préparer avant de m'occuper du petit déjeuner de Liam. Le soir, je mis encore du temps avant d'avaler les gélules, et le lendemain matin, je filai jusqu'à l'infirmerie avant de faire quoi que ce soit d'autre pour m'assurer qu'il allait bien. C'est ainsi que je m'endormais et m'éveillais à présent : Toujours alerte. Toujours dans l'appréhension même si, je commençais doucement à me laisser aller à croire que tout allait bien se passer. Doucement, mais sûrement. Il n'y avait pas d'autre moyen pour faire face et accepter de toute façon. Faire face... Faire face à la maladie de Liam, faire face aux évènements, faire face à qui avait entraîné la chute de Liam, faire face à ce qui avait presque causé sa mort : Sa sortie complètement insensée. J'aurais pu, alors que j'étais assis à côté de lui, parler de cette idée folle d'aller me chercher des pellicules mais en fait, ce fut un tout autre sujet qui me vint à l'esprit tandis que je caressais doucement la main de Liam, alors que je voyais briller cet anneau à mon doigt. Cet anneau qu'il m'avait offert. Cet anneau qui représentait tant pour moi mais pour lui... En fait, j'ignorais ce que ça pouvait bien représenter pour lui. Il faut dire que nous n'avions pas vraiment pu aborder le sujet. Alors, puisqu'il se sentait un peu mieux, je décidai d'en parler, pensant que reparler de cette fameuse journée lui ferait à présent bien moins mal que quelques jours plus tôt, espérant ne pas réveiller des souvenirs encore trop vifs et effrayants pour lui.

-Dis-moi...

Nous n'avions pas beaucoup parlé ces derniers jours. En fait, nous avions passé la plupart de notre temps l'un contre l'autre, à savourer la présence de l'autre, à savourer ce temps que la vie voulait bien nous accorder. Aussi, lorsqu'il releva un regard quelque peu interrogateur vers moi, j'eus un sourire rassurant. Un sourire comme je ne lui en avais pas donné depuis... Depuis sa descente aux enfers en fait. Mais il allait mieux, j'allais mieux, j'arrivais à sourire et ce dont je voulais lui parler n'avait rien de terrible, au contraire. Je voulais savoir. Je voulais comprendre.

-Ce jour-là, quand tu es parti, tu m'as dit que c'était pour me trouver des pellicules mais... Finalement, c'est avec ça que tu es revenu...

Murmurai-je plus bas en désignant l'anneau qui brillait à mon doigt.

-Ce que je voudrais savoir c'est... Pourquoi? Pourquoi m'avoir ramené cette bague?

Ayant peur qu'il se méprenne sur le sens de ma question je m'empressai d'ajouter :

-Je l'adore. Elle est très précieuse pour moi, très importante parce qu'elle vient de toi mais... Toi, justement...

Je soupirai.

-Pourquoi?

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Liam Marsden
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MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeDim 29 Mai - 18:49

Son sourire. Comme j’aimais son sourire, comme le voir de nouveau éclaircir son visage me faisait du bien. Sincèrement, son sourire valait bien mieux que n’importe quel remède de Mathilda à mon mal, rien ni personne mis appart lui ne serait en mesure de me ramener à la vie, j’en avais la certitude. Peut-être simplement car il était, justement, ma vie, qu’appart Samuel je ne trouvais rien de suffisamment fort pour m’aider à me relever et survivre à la maladie. Ou rien qui ne m’en donnerait envie en tout cas. Mon propre sourire ne pu que s’élargir doucement lorsque je le vis se pencher sur moi, ses lèvres s’approchant des miennes pour enfin des effleurer avec tendresse. Je fermai alors les yeux, me laissant simplement aller à l’embrasser comme j’en avais tant besoin, partageant un moment simple d’amour et d’affection. Lorsque je sentis sa main glisser tout contre ma nuque et caresser doucement ma peau ce fut plus fort que moi, je me blottis davantage encore tout contre lui, désirant plus que n’importe quoi être ne serait-ce qu’une minute au plus proche de lui, de son corps, de son cœur. Je ne voulais que lui. J’avais eu tellement peur, tellement mal, que seuls ses bras m’apportaient à présent du réconfort, seule sa présence parvenait à m’apaiser et seul son parfum trouvait grâce à mes yeux. Je ne voulais que Samuel à mes côtés, en cet instant, pour toute ma vie. Un déclic s’était produit en moi, et même si je savais que ce soir ne serait pas le bon moment pour lui en parler, j’espérais ardemment reprendre rapidement des forces pour que nous ayons une discussion plus sérieuse qu’à présent. J’étais encore très faible, n’attendant que la fin de ce baiser pour me laisser aller à m’endormir, or il me faudrait des forces pour oser lui avouer tout ce que mon cœur ressentait déjà en secret. Cependant, ses lèvres quittèrent les miennes et finalement, il me fit doucement poser la tête tout contre son épaule, m’incitant ainsi au sommeil. Il n’y avait aucune force dans son geste et de toute façon, je n’aurais pas voulu protester, trop grisé par l’idée de m’endormir enfin tout contre lui, tout en sentant son adorable présence à mes côtés. J’aurais tant voulu pouvoir profiter davantage des quelques instants qui me séparaient du sommeil, alors que je me lovai dans ses bras, malheureusement Morphée me rattrapa bien vite et doucement, je me laissai emporter. Je sombrais tout d’abord dans un nouvel état de léthargie profonde, savourant avec délice la douce mélodie de son cœur qui pulsait tout contre ma joue, avant de terminer de m’endormir, là, simplement, dans les bras de l’homme que j’aimais le plus au monde.

Le réveil fut brutal. Avant même d’avoir ouvert les yeux, je sentis qu’il n’était plus là, et les ouvrai subitement. J’eus un sursaut en me redressant, le cherchant à tâtons dans le lit alors que la lumière m’éblouissait, soudainement pris de panique. Il était parti. Il m’avait laissé tout seul. Il était parti ! Cependant, lorsque je sentis une main attraper la mienne et que j’entendis sa voix m’appeler avec douceur, je me détendis et clignai plusieurs fois des yeux afin de me réveiller tout à fait. Bêtement, je lui en voulu d’abord pour m’avoir réveillé avant de me rendre compte qu’il tenait en son autre main une tasse dont l’odeur me révulsait. J’eus une grimace lorsqu’il m’annonça le contenu de cette tasse, à savoir une tisane, et qu’il me faudrait dès à présent l’avaler. Mon regard devait sans doute parler pour moi, témoigner de ma réticence puisqu’il la posa finalement sur la chaise et vint s’asseoir à mes côtés, me prenant avec tendresse dans ses bras. Pourquoi fallait-il que j’avale ça ? J’allais souffrir, je le savais, alors pourquoi me forcer et me faire mal ? Au fond, je savais que Samuel ne désirait pas me faire de mal, qu’il obéissait seulement aux directives de Mathilda mais j’aurais voulu qu’il s’y oppose. Très égoïstement j’aurais préféré que Samuel prenne ma défense et ne laisse pas Mathilda m’obliger à m’alimenter tant cela était éprouvant pour moi. Je savais cependant que pour guérir, il me faudrait tôt ou tard manger de nouveau. Mieux aurait-il valu que ce soit tard… Samuel me berça quelques instants dans ses bras, me murmurant tout un tas de choses dont j’avais déjà conscience mais qui ne m’enchantaient pas. Que je devais boire, manger, reprendre des forces. Qu’il serait là, qu’il allait rester avec moi et que tout se passerait bien. Que je ne devais pas avoir peur mais ça, je savais que ce serait impossible. Oui j’avais peur d’avaler ça, et d’avaler tout ce qui suivra parce qu’à chaque fois, je finissais par tout rendre, que j’avais l’impression de mourir à chaque vomissement, que je crachais mon cœur avec les quelques restes de nourritures. Mais je devais le faire, qu’importe la douleur. Il fallait le faire. Alors, faiblement, j’ai fini par hocher la tête et il reprit la tasse avant de me la tendre. L’odeur me donnait déjà la nausée et pourtant, je fis l’effort d’approcher mes lèvres et avaler une petite gorgée de tisane. Je grimaçai de nouveau. C’était tout simplement infect. Il me fallut un long moment pour trouver le courage d’en avaler une seconde sous le regard attentif et sans doute un peu inquiet de Samuel mais finalement, je m’y résous. Et ainsi de suite. A chaque gorgée, je finissais par repousser la tasse avec une grimace de dégoût, à chaque fois il la posait simplement contre sa cuisse en attendant que je rassemble suffisamment de force pour recommencer, ce qui prit de plus en plus de temps vers la fin. La chaleur du breuvage terminait de dissoudre mon palais, ma langue, ma gorge, pour ne donner qu’une eau pâteuse au goût de sang qu’il me fallait quand même avaler. Lorsque je terminai, la tisane était à peine tiède. Mathilda avait sans doute su que je mettrais un temps fou pour la boire, voilà pourquoi elle avait demandé à Samuel de la préparer très chaude. Toujours est-il que malgré la forte nausée qui me prit à la gorge par la suite, je ne vomis pas.

Il se passa quelques instants de silence durant lesquels ni lui ni moi ne parlâmes avant qu’il ne se lève finalement pour aller entrouvrir la porte de la réserve et jeter un coup d’œil à l’infirmerie. Je me demandai ce qu’il trafiquait lorsqu’il referma finalement la porte, m’annonçant que Mathilda était partie. Même si je ne voyais pas très bien où il voulait en venir, j’eus un léger hochement de tête. D’accord, elle était partie… Et alors ? Je ne saisissais pas. Je saisis encore moins lorsque je le vis retirer son t-shirt, effectuant ensuite un geste pour défaire sa ceinture. Ne comprenant pas et imaginant soudainement des choses qui dépassaient de loin mon entendement, je fronçai subitement les sourcils avant de secouer la tête nerveusement. Qu’est ce qu’il voulait ? A quoi pensait-il ? Croyait-il vraiment que j’avais envie de faire l’amour, ce soir, alors que je venais tout juste d’échapper à la mort et que de toute manière je m’étais toujours refusé à lui ? L’absence de Mathilda me parut soudainement très dérangeante et finalement, il s’arrêta dans son élan pour m’expliquer qu’il dormirait, si je le voulais, avec moi ce soir. Apparemment, Mathilda le lui avait interdit mais puisqu’elle n’était pas là, eh bien, nous pouvions faire ce que nous voulions. Je me traitai d’idiot avant d’accepter, un léger sourire aux lèvres. Comment avais-je pu croire qu’il voulait de telles choses dans un moment pareil ? J’étais vraiment stupide… Finalement, je le laissai se mettre en sous vêtements sans un mot, l’observant je dois bien l’avouer avec amour et tendresse. Je le trouvais magnifique, et bien loin de me déranger, découvrir son corps presque nu me faisait sourire de plaisir, quand bien même il n’y ait absolument aucune connotation sexuelle là-dedans. Mes yeux se fermaient déjà tout seuls et ce fut presque un soulagement lorsque je le vis lentement s’approcher du lit pour finalement s’y glisser, me prenant immédiatement dans ses bras. Avec un léger soupir de contentement je me blottis de nouveau contre lui, n’ayant de toute manière pas le choix étant donné la taille du lit. Nous étions littéralement collé l’un à l’autre mais cela me fit du bien et de nouveau, je sombrais avec plaisir dans un sommeil parfumé de cannelle.

Et Mathilda nous trouva, bien évidemment. J’étais toujours endormi lorsqu’elle entra dans la réserve, mais sa voix glaciale me ramena bien vite à la réalité, davantage encore lorsque je sentis Samuel relâcher son étreinte, amorçant déjà un geste pour sortir du lit. J’ouvris les yeux, trouvant Mathilda les bras croisés devant notre lit, nous observant d’un œil sévère.

« C’est vraiment touchant mais il n’a pas besoin de doudou. Aller, oust ! Je vais m’occuper de sa toilette. Va donc t’aérer l’esprit pendant ce temps. »

Elle soupira tandis que Samuel me quittait, ayant déposé un bref baiser sur mes lèvres avant de sortir du lit et se rhabiller. Il termina par sortir de la pièce et aussitôt Mathilda alla chercher une bassine d’eau chaude accompagnée d’un gant de toilette et de savon, puis entreprit de me laver. Même si je n’aimais pas ça, je me laissai faire, sachant pertinemment qu’elle ne s’arrêterait de toute façon pas pour ma pudeur ou ma gêne. La matinée passa sans que je ne revoie Samuel avant le déjeuner, sans doute avait-il été pris par les jumeaux ou rattrapé par son devoir en cuisines. Toujours est-il que lorsqu’il arriva, je ne fus que brièvement soulagé de le revoir. Très brièvement même. La simple odeur de nourriture dû me faire pâlir aussitôt fut-il entré dans la pièce, et lorsque je vis ce qu’il tenait sur un plateau, je m’enfonçai dans mon lit comme pour tenter de fuir. Malheureusement pour moi, aucune fuite ne semblait possible et bien vite, je me retrouvai avec ce plateau sur les genoux sans possibilité de me dérober au supplice qui m’attendait bien gentiment. J’eus un profond soupir de lassitude en me redressant le plus possible, Mathilda calant déjà quelques coussins derrière mon dos afin que je puisse manger en position assise, ce qui était bien plus pratique. Je palis en observant le potage qu’il me fallait à présent boire, serrant les dents rien qu’à l’idée de le sentir couler le long de ma gorge. Après quelques secondes de préparation mentale à ce qui allait suivre, je me décidai afin à porter ma main jusqu’à la cuillère qui tremblait étrangement. En réalité, tout mon bras tremblait tant le poids de cette simple cuillère me paraissait énorme et avant même d’avoir pu la plonger dans le potage je la relâchai, déjà épuisé de ce simple mouvement. Sans relever les yeux vers elle j’entendis Mathilda soupirer puis quitter la pièce étant donné que quelqu’un venait d’entrer dans l’infirmerie. Même si cela ne servirait à rien, j’eus un regard implorant vers Samuel. Il n’était pas obligé de me forcer, Mathilda n’était même pas là… Il pouvait bien la boire lui et lui dire que c’était moi qui l’avais fait… Il le pouvait, n’est ce pas ? Où était le problème ? Un simple potage ne changerait absolument rien à mon état. Je savais cependant qu’il ne cèderait pas et d’ailleurs, lorsque je le vis approcher la chaise de mon lit et s’y asseoir avant de se munir de la cuillère, j’en eus la confirmation. Il la plongea finalement dans le potage et l’approcha de mes lèvres, me laissant complètement muet et immobile. Est-ce qu’il était vraiment entrain de me proposer de me faire boire ce truc lui-même ? Je fronçai les sourcils et tournai légèrement la tête, fâché de son initiative. Samuel ne devait sans doute pas se rendre compte de l’humiliation qu’il voulait me faire subir, après tout je n’étais pas un oisillon : Je n’avais pas besoin qu’on me nourrisse à la becqueté, merci. Pas besoin dutout même, il pouvait bien l’avaler son potage si ça lui faisait plaisir, moi je n’en voulais pas. Et pourtant, il ne broncha pas. Il ne recula pas sa satanée cuillère et ne fit rien pour me laisser tranquille, bien au contraire. Après quelques instants de résistance durant lesquels l’odeur de la nourriture commençait à me monter à la tête, j’abdiquai et entrouvris les lèvres, laissant la cuillère s’y glisser tout doucement, déversant son contenu dans ma bouche. Si j’avais pu le recracher aussi sec, je l’aurais certainement fait. Je me forçai néanmoins à l’avaler et me laissai faire pour une deuxième cuillérée, mais ce fut déjà trop. Au bout de quatre à peine, je sentis que j’allais vomir et ça ne tarda pas. Déjà je repoussai Samuel et me penchai à côté du lit pour rejeter tout ce que j’avais avalé et qui me brûlait les entrailles. Essoufflé, je me laissai ensuite retomber mollement dans le lit, tentant vainement d’éradiquer ce goût ignoble qui régnait dans ma bouche, mais ce fut peine perdue. On me laissa tranquille quelques heures, sombrant déjà dans un sommeil profond dû à l’épuisement que manger représentait pour moi et me réveillai, déjà, pour une nouvelle épreuve dont je me serais bien passé.

Ce manège infernal dura quatre jours complets. Mes journées s’écoulaient au rythme des nombreux repas que je rendais sans exception, potages, bouillons, soupes, légumes entiers, mon corps refusait toute forme de nourriture et devenait encore plus faible après chaque renvoi. Cependant, plus les jours passaient et plus je tentais de cacher au maximum le dégoût qui me serrait la gorge de manière à abréger les nombreux efforts de Samuel qui, en dépit de mes vomissements répétés, s’évertuait à me faire manger avec patience. Cependant, je voyais bien qu’il semblait de plus en plus fatigué, de plus en plus usé et je ne voulais pas en rajouter en continuant à l’implorer du regard pour m’épargner ces quelques repas qui me torturaient. Je ne voulais pas continuer à le faire souffrir lui en lui imposant ma propre souffrance car je sentais que c’en était déjà trop pour lui, qu’il ne supportait pas mon état et en même temps, comment l’aurait-il pu ? A sa place, je savais que j’aurais également souffert de le voir si faible, si fragilisé, et pourtant j’aurais agis comme lui : Malgré tout ce que j’aurais pu ressentir je ne l’aurais pas quitté, je n’aurais pas baissé les bras et je me serais occupé de lui jusqu’à ce qu’il aille mieux. Pour autant, j’aurais aimé qu’il prenne plus de temps pour lui, pour s’aérer l’esprit comme le lui conseillait souvent Mathilda tandis qu’il se bornait à me surveiller des heures durant alors que bien évidemment, il ne se passait rien… J’étais constamment fatigué et passais la plupart de mon temps à me reposer, alors Samuel aurait pu en profiter pour aller voir ailleurs ce qu’il s’y passait. A force, il s’enfermait lui-même dans ma bulle de douleur, ma bulle de maladie qui ne semblait pas vouloir éclater de si tôt. J’aurais tellement voulu le soulager, mais les quelques tentatives que je fis pour l’éloigner un peu de ma chambre ne portèrent pas réellement leurs fruits. J’essayais de lui demander des nouvelles de Lilly, des jumeaux, des amis que nous pourrions avoir en commun mais à chaque fois il se contentait de me répondre sans même voir que je l’incitai par là à retourner les voir. Même si j’avais désespérément besoin de lui, et même si je me languissais de lui dès qu’il s’en allait, je n’étais pas assez égoïste pour le retenir nuit et jour à mes côtés alors que cela l’abîmait tant, mais malheureusement je ne trouvais pas la force de le renvoyer tout simplement. De toute manière, j’étais quasiment sûr qu’il ne m’aurait pas écouté, et je ne désirais pas le blesser alors… Alors je ne disais rien, je laissais faire même si je n’approuvais pas, tout comme Mathilda n’approuvait pas. A présent, elle vérifiait chaque soir que je me trouvais bien seul dans mon lit, n’hésitait jamais à mettre Samuel à la porte lorsqu’elle voulait me laver ou changer mes draps, et ce même s’il ne lui fallait en réalité que quelques minutes pour le faire. Quant aux jumeaux, je refusais catégoriquement de les voir. Après en avoir parlé avec Mathilda, je savais qu’ils auraient pu venir me rendre visite sans crainte de les contaminer puisque je n’étais pas contagieux, seulement je craignais réellement de leur faire peur. J’étais tellement fragile encore… Je me trouvais monstrueux. Même si je n’avais pas vraiment l’aspect d’un squelette, j’avais perdu beaucoup de poids, et ma peau était encore plus pâle que d’ordinaire (j’allais finir translucide à ce rythme là), alors… Oui, j’avais changé, comme n’importe qui souffrant d’une grave maladie, et je ne voulais en rien leur imposer cette image de moi. Surtout qu’ils viendraient pour trouver quoi, au final ? J’étais bien incapable de les serrer contre moi ou les embrasser, les traiter comme n’importe quel enfant ayant besoin de réconfort alors que moi-même, j’en avais déjà énormément besoin. Je ne pouvais pas prendre soin d’eux tout en étant si mal, et bien que cela me brisait le cœur, je refusais toujours de les voir débouler ici, avec leurs petits visages tristes de me découvrir si différent du père qu’ils avaient jusque là connu. J’imposais déjà ce spectacle à Samuel, ce n’était pas pour réitérer la chose avec mes enfants.

Finalement, le fait que l’on ai trouvé ce dont je souffrais ne changeait pas grand-chose à mon état, je n’avais pas l’impression de guérir malgré les doses massives de médicaments dont me gavait Mathilda. Selon elle, le simple fait que je sois encore en vie signifiait que son traitement fonctionnait, cela ne me rassurait pour autant pas vraiment. Bien sûr, je parvenais peu à peu à me faire à l’idée, à envisager de nouveau un futur alors que durant mon enfermement je m’étais résous à la mort et pourtant, quelque chose clochait encore. J’aurais voulu que ce soit plus rapide, visible, palpable… J’aurais voulu pouvoir sortir de ce maudit lit et retourner à ma vie, ce qui était bien évidemment utopique et stupide. Mon état ne s’était pas dégradé en une journée, il faudrait forcément du temps pour éradiquer la maladie de mon corps, surtout que j’avais frôlé le point de non retour. Seulement, les jours passaient et mon état continuait à se détériorer, dans le sens où j’étais toujours incapable de faire quoi que ce soit. Même lorsque Samuel me câlinait tendrement, je ne trouvais pas la force de répondre comme je l’aurais voulu à ses caresses et ses baisers, pas la force de lui montrer mon amour qui pourtant ne faisait que se renforcer jour après jour. Oui, je l’aimais encore plus qu’avant bien que cela me semblait jusqu’alors impossible. Il prenait soin de moi comme personne ne l’avait jamais fait auparavant, sans ciller, sans me montrer sa faiblesse… Il me protégeait de tout ce qui aurait pu nuire à ma guérison pour, je le savais, qu’enfin nous puissions vivre notre rêve d’être enfin ensemble et ce fut seulement durant ces quelques journées que je compris réellement l’étendue de son amour. Je comprenais enfin jusqu’où il serait prêt à aller pour moi, les sacrifices qu’il ferait, et avoir enfin la certitude de ses sentiments, la certitude que nous ressentions les mêmes choses renforçait mon propre amour. Jusqu’où aurais-je moi-même été pour lui ? Très certainement en Enfer, même si, d’une certaine façon, j’y étais déjà pour lui. J’avais failli mourir pour lui, pour simplement lui faire plaisir, et je ne regrettais pas… Ou plutôt, si : Je regrettais de ne pas avoir trouvé une seule pellicule avant la bijouterie, avant l’homme, avant les rats. Si seulement j’avais pu n’en trouver qu’une seule, rien qu’une, et tant pis pour la suite. Voilà ce à quoi je pensais durant ces longs moments. Je réfléchissais à mes sentiments changeants, à tout ce qui évoluait peu à peu en moi, tous ces mécanismes qui doucement se mettaient en marche. J’en venais presque à me demander si je n’aimais pas Samuel bien plus que Natacha… Et j’en eus tellement honte vis-à-vis de ma défunte épouse qu’immédiatement, je repoussais cette question afin de ne pas connaître sa réponse même si mon cœur avait déjà trouvé la solution.

Nous parlions généralement peu, ce pour quoi j’étais énormément reconnaissant envers Samuel. Nous passions le peu de temps durant lequel j’étais éveillé à nous passions notre temps l’un contre l’autre, à savourer silencieusement la présence de l’autre mais nous n’avions pas de réelles conversations, ce qui m’épargnait beaucoup d’efforts pour parler. Je ne savais pas vraiment si Samuel faisait exprès de se taire pour m’éviter de trop me fatiguer en voulant tenir une conversation, mais parfois j’en venais presque à me demander s’il ne s’ennuyait pas un peu à mes côtés. C’était stupide mais, à quoi pouvait-il bien penser tandis que je demeurais si souffrant et si faible, tandis que je ne pouvais même pas le serrer dans mes bras ou simplement lui parler de tout et n’importe quoi comme nous le faisions avant que je ne tombe malade ? Il devait trouver le temps tout aussi long que moi, et pourtant il était toujours là. Il ne se passa qu’une seule chose durant ces quelques jours, à savoir qu’au bout d’un moment je fus capable d’avaler un bol de potage entier sans vomir. Au début j’étais septique, les tisanes que m’apportait régulièrement Samuel avaient déjà beaucoup de mal à passer et manger demeurait compliqué et pourtant, je parvins non seulement à tout finir mais en plus, je ne rejetai absolument rien. Ce fut ma première véritable victoire et ma joie dû se lire sur mon visage plus les heures passaient, alors que je me sentais toujours pas sur le point de vomir même si, je dois bien l’avouer, j’étais carrément barbouillé. Je m’en fichais cependant, considérant cette première amélioration comme un premier pas sur le chemin de la guérison, guérison qui tardait tant et me paraissait bien loin. Ceci dit, mon corps accepta également le premier dîner qui vint immédiatement après le repas, ainsi que le petit déjeuner du soir. J’admettais les tisanes avec moi de difficulté et finalement, recommençais à me nourrir régulièrement même si en faible quantité. Il ne fallait pas forcer les choses, ni tenter d’aller plus vite que ce que mon organisme tolérait pour le moment. Être simplement patient, Mathilda paraissait optimiste pour la suite d’ailleurs. Au bout d’une semaine, comme prévu, elle me retira la perfusion et stoppa les antibiotiques pour me donner d’autres pilules, mais au moins n’avais-je plus un satané fil relié directement à mes vaines. A la longue, la perfusion avait quelque chose de stressant, d’horripilant, mais j’allais un peu mieux et c’était le principal. La voix de Samuel me sortit soudainement de mes pensées.

Je relevai les yeux vers lui alors qu’il me caressait doucement la main depuis quelques minutes déjà, veillant sur moi comme à son habitude avec une tendresse et une douceur incroyable. Surtout que depuis quelques jours, j’avais l’impression qu’il allait un peu mieux, ce qui ne pouvait bien évidemment que me faire plaisir. D’ailleurs, le sourire qu’il m’offrit à ce moment là ne fit que renforcer cette impression, et je ne pu m’empêcher de sourire à mon tour, même si plus faiblement. Je ne savais pas vraiment sur quel sujet il souhaitait m’interroger mais ne m’inquiétait pas, ne songeant même pas à de tristes événements ou de sombres explications sur n’importe quel sujet. Non, je ne pensais à rien de négatif si bien que lorsqu’il évoqua mon départ de la communauté pour lui chercher des pellicules, je tombai d’assez haut. Non pas que j’aie honte ou peur d’en reparler, mais je n’avais pas envie de lui expliquer une nouvelle fois ce qui m’avait poussé à le faire, ni même m’étendre sur ma rencontre avec cet homme qui avait failli, même indirectement, m’arracher à la vie. Je n’avais simplement pas envie, et pourtant, lorsqu’il désigna la bague qu’il portait toujours à son doigt je dois bien admettre que j’avais envie d’entendre la suite. Effectivement, j’étais revenu avec la bague plutôt avec des pellicules et j’en étais désolé, même si je ne regrettais pas de lui avoir rapporté ce bijou. Il lui allait simplement à merveille, alors pourquoi aurais-je regretté ? Parce que c’était ce qui avait entraîné ma chute ? Non, non, je m’en fichais. Ma maladie n’avait rien à voir avec cette bague, elle n’était qu’amour, tendresse, elle n’avait pas ce côté sombre et je refusais de le lui attribuer. Je refusais de la voir comme la cause de mes souffrances car dès lors, je n’aurais plus supporté de la voir au doigt de Samuel, or j’adorais le voir avec. Je ne voulais décidemment pas gâcher ça. Je fronçai néanmoins les sourcils lorsqu’il me demanda finalement pourquoi je la lui avais rapporté, ne comprenant pas. L’espace d’une seconde je me demandais si elle lui était désagréable mais, il fut plus rapide que la montagne de doute qui menaçait de s’effondrer sur moi puisqu’il m’assura immédiatement l’adorer. Dans ce cas, pourquoi s’interroger à son sujet ? Je ne comprenais pas vraiment pourquoi il remettait mon cadeau en cause et finalement, lorsqu’il réitéra sa question je restai quelques instants sans voix.

Voulait-il simplement connaître la signification que j’attribuais à ce bijou, ou bien voulait-il comprendre comment j’avais pu en arriver à lui offrir ceci ? Nous y voilà… J’avais connu un long moment d’hésitation avant de décider de lui offrir parce que justement, je ne savais pas vraiment ce qu’elle pourrait représenter pour nous, surtout en sachant qu’il s’agissait d’une alliance. C’était tellement tôt, tellement rapide d’offrir ce genre de chose après seulement quelques semaines de relation sérieuse. Oui, c’était étrange, je pouvais l’envisager et le comprendre, cependant sa question me mettait franchement mal à l’aise. Je ne savais pas quoi lui dire, peut-être simplement parce que je ne connaissais pas la réponse à son interrogation. Je ne savais pas exactement ce qu’elle signifiait, ou alors n’osais peut-être simplement pas le lui avouer. C’est vrai, d’accord… Pour moi elle voulait effectivement dire quelque chose, mais quelle importance ? Tant qu’elle lui plaisait, avait-il vraiment besoin de savoir pourquoi ? Il pouvait se contenter de la porter et lui donner le sens qu’il souhaitait, cela ne me gênait absolument pas, bien au contraire. Même si j’avais pris conscience de son amour, même si je l’acceptais, j’avais toujours du mal à croire que nous puissions sur ce point là être en accord, parce que justement pour moi les choses avaient évoluées… Tout avait changé, ou presque, et si j’avais pu me cacher derrière ma fatigue pour m’éviter de tout lui avouer, à présent que j’allais mieux c’aurait été purement hypocrite. Avais-je cependant la force de lui ouvrir mon cœur comme j’aurais tant voulu le faire ? La gêne, le doute et l’appréhension me serrèrent quelques instants la gorge, si bien que je fus une nouvelle fois incapable de bredouiller le moindre mot. Si je voulais réellement lui faire comprendre ce que je ressentais à présent, lui faire comprendre le changement en moi, il me faudrait forcément en venir à lui parler de Natacha, or je répugnais cette possibilité. Tout lui avouer de ma vie, tout lui raconter depuis le début de manière à ce qu’il connaisse absolument tout de mon histoire m’aurait soulagé mais en même temps, cela me terrifiait totalement. Que pouvais-je bien lui dire ? Que j’étais sur le point de me marier avec une femme enceinte de moi et que nous étions incroyablement heureux avant qu’elle ne meurt, qu’aujourd’hui je l’aimais lui bien plus qu’elle et qu’à cause de cela, à cause de ce changement, je voulais que notre relation prenne une toute autre envergure ? Non, je ne le pouvais pas. Je ne pouvais pas lui annoncer tout cela de but en blanc car je savais que c’aurait été trop rapide, précipité. J’étais cependant bien obligé de lui apporter une réponse maintenant qu’il me questionnait, et je n’avais pas envie de mentir alors… Disons simplement que j’allais lui dire la vérité, ou du moins une partie. Juste une petite partie. Je soupirai avant de retirer ma main de la sienne et me redresser, tentant de ne pas montrer la douleur qui en résulta. Je pris quelques instants pour réfléchir aux mots que j’allais employer, mon regard se promenant sur les draps.

« Enfait, je… »

Soupirai de nouveau, me mordant la lèvre tandis que je fermai les yeux. Je pris une grande inspiration et mon courage à deux mains pour rouvrir les yeux et oser poser mon regard sur lui. Alors, doucement mes doigts retrouvèrent les siens et je caressai du pouce sa bague que j’aimais tant.

« C’est simplement un symbole de notre amour. J’ai décidé de te la rapporter parce qu’elle exprime parfaitement tout ce que je peux ressentir pour toi… L’affection, l’attachement, la fidélité, l’engagement… Je ne sais pas, je n’ai pas de réponse toute faite à te donner. Pour moi, cette bague est comme une promesse… »

Je soupirai, portant immédiatement mon regard sur les draps.

« C’est ridicule, je sais… Et puis… »

Cette fois je rougis carrément mais fis l’effort de plonger de nouveau mon regard dans le sien.

« De cette manière, même si nous n’affichons pas notre amour, tout le monde peut voir que tu n’es absolument pas libre… Je dois bien admettre qu’éloigner les éventuels intéressés en t’offrant une marque incontestable de relation amoureuse stable me plait assez. »

Un sourire timide se dessina sur mes lèvres. Après tout, cette bague avait une fonction démonstrative importante, que ce soit de notre amour l’un envers l’autre ou envers les autres, non ? Néanmoins, si j’avais voulu être tout à fait honnête, il y aurait encore d’autres choses que j’aurais pu lui dire concernant ce que les autres pouvaient deviner de notre relation, mais comme je me l’étais promis, je passai ces choses sous silence. Alors, plutôt que de laisser ces pensées m’envahir et terminer par influer sur mon attitude, ce que Samuel aurait forcément remarqué, je glissai rapidement ma main tout contre sa joue. Mon sourire devint beaucoup plus tendre et je fis l’effort de me rapprocher un peu de lui pour baiser doucement son front avant de me reculer.

« Je t’aime. C’est pour ça que je t’ai rapporté cette bague : Parce que je t’aime et que je veux que tout le monde le sache. »

Immédiatement, je me mordis la langue en priant pour qu’il n’attache pas trop d’importance à mes dernières paroles. Priant pour qu’il ne comprenne pas ce que je voulais, déjà, et que nous avions décidé ensemble de ne pas faire. Et oui… J’étais prêt, enfin. Prêt à parler aux jumeaux de notre relation, prêt à me montrer au grand jour à ses côtés, prêt à assumer totalement cet amour. Maintenant que j’étais certain de ses sentiments mais surtout que les miens étaient devenus si forts, si puissants, j’envisageais difficilement continuer à nous cacher comme nous le faisions. Cependant, j’avais l’impression que c’était trop tôt, que lui… Lui ne me suivrait pas. J’avais l’impression qu’à partir du moment où nous ne nous cacherions plus, nous ne pourrions plus faire marche arrière et j’avais peur que cela le bloque. Peur que tout devienne encore plus sérieux et ducoup très effrayant… Je savais qu’il m’aimait, oui, mais si nous en parlions aux jumeaux, il entrerait définitivement dans ma vie et je ne savais pas vraiment si c’était réellement ce qu’il souhaitait. Je ne savais pas s’il voulait aller si loin avec moi. Peut-être n’étais-je pas si sûr que ça de ses sentiments finalement… Au final je ne savais plus vraiment où j’en étais, mais la porte de la réserve s’ouvrit soudainement et ne lui laissa pas le temps de poser la moindre question, pour mon plus grand soulagement. Mathilda entra avec une petite boite de comprimés qu’elle rangea dans un tiroir avant de se tourner vers nous et de soupirer en posant ses mains sur ses hanches. Aussitôt, ma main qui était toujours sur la joue de Samuel le quitta, pour finalement se poser sur sa cuisse et tant bien que mal, je me sortis des draps pour m’asseoir avec lui sur le bord du lit. Même si nos discutions étaient assez courtes, nous avions pu parler la veille avec Samuel d’un désir de ma part de retourner dans ma chambre, et nous en avions informé Mathilda, qui avait choisi de prendre son temps pour réfléchir. Nos arguments avaient, à mon avis, suffisamment de poids pour qu’elle accepte mais connaissant Mathilda, il suffirait que cela ne lui plaise pas pour qu’elle me l’interdise et bien évidemment, personne ne pourrait aller à l’encontre de ses ordres. Pourtant, nous avions eu raison lorsque nous lui avions dit que Samuel pourrait toujours s’occuper de mes repas, et que ce serait beaucoup plus simple pour les jumeaux de n’être plus séparés de leur père. Bien sûr, Sam devrait continuer à s’occuper d’eux parce que j’en étais bien incapable mais finalement… Eh bien finalement nous vivrions tous les quatre dans ma chambre et rien que pour pouvoir vivre ça, j’aurais bien pu trouver tous les arguments du monde. Premièrement, je n’avais plus peur du regard de mes enfants puisque j’avais repris du poids et avais un peu meilleure mine et puis, même s’ils ne savaient pas encore pour Samuel et moi… Même s’ils ne savaient pas, nous serions tout les quatre plus proches que nous ne l’avions jamais été. Pourquoi Mathilda s’opposerait-elle à ça ?

« Essaye de marcher jusqu’à moi Liam. »

Je fronçai doucement les sourcils. Je n’avais pas marché depuis… Je ne savais même pas. En même temps, je doutais très sérieusement en avoir la force. Pour autant, je tentai de prendre appuis sur le lit pour me relever, mes jambes tremblant automatiquement, et tentai d’effectuer un premier pas. Mes jambes flanchèrent dès le deuxième et aussitôt, Samuel fut là pour me rattraper. Je savais cependant que Mathilda s’attendait exactement à ce résultat, et que cette petite démonstration n’avait pour but que nous dissuader de me ramener dans ma chambre. Je soupirai en passant un bras autour de Samuel afin de m’appuyer à lui.

« Bon. Samuel, soutiens le jusqu’à sa chambre s’il te plait, je vous rejoindrai plus tard. »

Ne comprenant pas très bien, je fronçai encore davantage les sourcils. Est-ce que cela signifiait que Mathilda m’accordait le droit de retourner dans ma chambre ? Sans même hurler ? Sans même discuter ? Sans nous donner une centaine de conseils ? J’en étais tellement stupéfait que je restai quelques instants sans bouger, incapable du moindre geste, du moindre mot. Et puis, finalement, un sourire apparu sur mon visage lorsque je la vis s’impatienter.

« Aller, filez ! J’en ai assez de vous avoir dans les pattes tout les deux ! »

J’étais soudainement tellement euphorique que je ne pu m’empêcher de me coller un peu plus contre Samuel et écraser mes lèvres contre les siennes avant de me laisser retomber dans mon lit et chercher le plus rapidement une paire de chaussures qui devait se trouver par là. Je les enfilai et me relevai du mieux que je pu, prenant immédiatement appuis contre lui. Mathilda m’apporterait sans doute mes vêtements lorsqu’elle nous rejoindrait, au pire Samuel reviendrait les chercher, ça n’avait aucune importance. J’étais tellement heureux de quitter enfin l’infirmerie que je serais parti tout nu s’il l’avait fallu ! Surtout que si Mathilda acceptait, cela signifiait qu’elle pensait qu’il n’y aurait plus de complications, que ma guérison était en bonne voie ! Je n’avais pas souris aussi largement depuis un bout de temps, et sans doute que Samuel non plus. Maintenant, il suffisait que nous parvenions à retourner jusqu’à ma chambre. J’avais beaucoup de mal à aligner deux pas d’affilée mais finalement, Samuel me portait presque et il ne fut pas trop compliqué de traverser l’infirmerie pour nous retrouver dans le couloir. Ma chambre n’était pas très loin, seulement à une cinquantaine de mètres dont je gravis les premiers sans trop de difficulté. Nous allions très doucement, et même si j’étais déjà relativement essoufflé, je n’avais pas envie de m’arrêter une seule seconde. Je voulais juste retourner dans ma chambre, me coucher dans mon lit, voir mes enfants, être avec mon Amour… Juste nous. Sans Mathilda, sans cette horrible odeur de désinfectant, cette atmosphère de maladie et de mort. Je ne voulais plus jamais me retrouver dans sur ce maudit lit, dans la réserve, là où j’avais failli perdre la vie. Plus jamais. Cependant, nous fûmes arrêté dans notre élan lorsque quelqu’un dans nos dos m’appela. Je reconnaissais la voix mais ne parvins pas immédiatement à mettre de nom dessus et finalement, lorsque je me retournai un bref sourire éclaircit mon visage. Il s’agissait de Barthelemy. Ce n’était pas réellement un ami, plutôt une connaissance même si nous avions effectivement déjà passé plus de deux ans à vivre ici ensemble. Malgré son caractère un peu austère et parfois sectaire, je parvenais à bien m’entendre avec lui de part ma facilité à accepter n’importe quel caractère sans broncher. Même les plus difficiles je m’en accommodais. Cependant, je n’avais absolument pas envie de faire le moindre effort aujourd’hui tant j’étais épuisé, et pourtant… Pourtant je pris quand même sur moi pour accrocher un maigre sourire sur mes lèvres et attendre qu’il arrive à notre hauteur, courrant presque. Le sourire radieux qu’il m’adressa me fit plaisir.

« Liam ! Eh bien, en voilà une bonne nouvelle ! Nous étions très inquiets pour vous, Mathilda refusait de nous donner la moindre indication… Grâce au Ciel, vous êtes sain et sauf. »

Mon sourire devint un peu plus gêné, il ne semblait cependant même pas s’en rendre compte et continua sur sa lancée.

« J’avais cependant la certitude que vous vous en sortirez, Dieu n’abandonne pas ses enfants lorsqu’ils sont aussi vertueux et doux que vous ! Il a certainement entendu mes nombreuses prières à votre égard. »

D’accord… C’était vraiment très gênant comme situation. Avant, je parvenais à ignorer les poussées fanatiques de Bathelemy un peu plus facilement que maintenant, alors que j’avais seulement envie de retourner dans ma chambre et m’écrouler dans mon lit. Même si c’était très gentil de sa part, je ne partageais pas vraiment ses…Convictions. Il s’écoula quelques secondes de silence durant lesquels son sourire ne se fanait pas tandis qu’il m’observait, puis son regard se porta vers Samuel et aussitôt, son visage perdit un peu de sa bonne humeur. Il en perdit encore davantage lorsqu’il remarqua que je tenais Samuel en ayant posé ma main sur son épaule et que lui avait enroulé son bras autour de ma taille, nous collant ainsi tout à fait. Son regard fit plusieurs fois l’allée retour entre Samuel et moi, nos corps si proches, et tout à coup son visage se décomposa totalement. Si vite, et si brutalement que je dû en blêmir un peu plus parce que je savais qu’il avait compris, je savais ce qu’il pensait, et ce fut plus fort que moi : Je tentai de me dérober aux bras de Samuel mais malheureusement, j’étais encore bien trop faible pour esquisser le moindre pas seul. La situation devenait de plus en plus gênante et finalement, je baissai les yeux, honteux de la découverte que Barthelemy venait de faire et qu’il prenait si mal. Oui, je voulais pouvoir m’assumer aux yeux de tous avec Samuel mais avouons que tomber sur l’homme le plus catholique de toute la communauté en premier ne constituait pas vraiment un bon départ… Surtout que finalement, son regard devint très dur et il nous toisa tout les deux avec dureté et sévérité.

« J’en viens à croire que je n’aurais peut-être pas dû prier… On ne prie pas pour les sodomites. »

Ses mots furent comme une énorme gifle pour moi et cette fois, je ne tins pas le coup. Je m’éloignai définitivement de Samuel en m’appuyant contre le mur, soudainement pris de vertiges. Je voulais juste retourner dans ma chambre… Je voulais juste qu’on nous laisse tranquilles… Et, contre toute attente, Samuel choisit justement ce moment là pour prendre la parole. Contrairement à ce que j’aurais pu penser sa voix était parfaitement calme, il expliqua poliment à Barthelemy qu’il se trompait sur toute la ligne et que nous n’étions que des amis. Malheureusement, ses mots ne le convainquirent pas puisque aussitôt, il partit comme une furie en bousculant largement Samuel au passage. J’eus un profond soupir, commençant à me laisser glisser le long du mur. Alors c’était ce que les gens voyaient en nous ? Juste ça ? L’amour que nous pouvions nous porter, il ne le réduisait qu’à une foutue sodomie ? Surtout que nous n’avions même pas couché ensemble une seule fois, pas une seule… C’était profondément injuste et cruel, jamais on ne m’avait traité de cette manière et très sincèrement, j’avais peur que Barthelemy ne soit pas le seul à penser de cette façon. Pas le seul à nous réduire à de vulgaires pratiques sexuelles alors que tous les autres couples, les couples dits « normaux » étaient simplement vus comme deux personnes partageant des sentiments. Mais non, entre les homosexuels il n’y avait pas de sentiments. Juste une sodomie, et nous irions brûler en Enfer ! Juste ça, et nous serions punis. Juste ça… J’étais profondément attristé mais finit par me redresser tant bien que mal et me raccrocher à l’épaule de Samuel. Ce n’était pas de sa faute, et je ne voulais pas m’éloigner de lui pour ça, je ne voulais pas le punir lui parce que j’avais trop de mal à me faire à l’idée que jamais nous ne serions acceptés comme des gens normaux. Alors, je tentai d’accrocher un bien maigre sourire à mes lèvres avant de demander d’une voix pleine de déception et de tristesse :

« C’est ça, le quotidien d’un couple homosexuel ? »

Priant fortement pour que la réponse soit « non ».

Enfin arrivés à la chambre, je m’effondrai immédiatement sur mon lit avec un profond soupir de soulagement. Tous mes muscles me brûlaient, si bien que j’avais l’impression d’avoir couru un marathon mais cela n’avait absolument aucune importance : J’y étais arrivé. Même si Samuel m’avait quasiment porté sur toute la fin, j’y étais arrivé. J’en étais tellement heureux que je finis même par laisser échapper un bref rire qui m’arracha les cordes vocales avant de rouler sur le côté et m’enfoncer dans mes oreillers. Bon sang, j’en avais presque obligé le confort d’un vrai lit ! Et puis, quelque chose d’étrange, d’inhabituel s’imposa soudainement à moi, je relevai vivement la tête vers Samuel qui s’était assis en face de moi et me regardait. Fronçant doucement les sourcils, je demandai :

« Tu as dormis dans mon lit ? »

Il sembla hésiter quelques instants avant de répondre par l’affirmative et de nouveau, je me laissai aller à rire en enfonçant de nouveau ma tête dans les oreillers qui portaient son parfum. Comme j’aimais son parfum… Comme j’aimais le sentir sur mes draps… Ca pouvait paraître stupide mais pour moi, ce détail avait quelque chose d’important. Peut-être simplement parce que maintenant, j’allais avoir comme l’impression de me coucher directement contre lui à chaque fois que je me glisserais entre ses draps qui abritaient une des petites choses que j’adorais chez lui. Ma soudaine euphorie finit par se calmer et avec un petit sourire, je me redressai de nouveau pour tenter de me relever. Si Mathilda m’avait vu me rouler comme un imbécile dans mon lit, elle m’aurait sans doute étriper en prétextant que cet effort était absolument inutile et stupide mais tant pis. J’étais heureux, même si j’avais mal partout, même si l’épisode avec Bathelemy avait été éprouvant, oui, j’étais heureux. Alors, effectuant un dernier effort, je m’appuyais tout contre ma commode pour me relever et jetai finalement un regard à une pile de linge qui se trouvait dessus. A vrai dire, je cherchai seulement de quoi me mettre au lit pour pouvoir bientôt me reposer mais j’avais un peu de mal à m’y retrouver. Ce n’était pas mes vêtements ? J’eus quelque seconde de blanc en réfléchissant, avant de comprendre qu’en réalité il s’agissait de linge appartenant à Samuel. Bon… Tant pis pour lui. Même s’il était plus construit et large d’épaules que moi, je décidai avec un sourire malicieux de lui « emprunter » un de ses t-shirt et le passai sans même lui en demander l’autorisation, avant de chercher dans mes tiroirs un vieux joggings en coton qui me tiendrait chaud. Ce t-shirt, je ne savais pas que je ne lui rendrai jamais en personne, et qu’il signerait définitivement mon refus de le voir avant qu’il ne s’en aille, bientôt… Tant de choses que j’ignorais, que j’aurais voulu éviter… Mais au lieu de cela je me laissai finalement tomber sur les genoux de Samuel, passant avec tendresse mes bras autour de son cou avant de l’embrasser sur la joue, puis le front, puis les lèvres. Oui, j’embrassai ses lèvres avec gourmandise, ma langue se frayant avec audace un chemin jusqu’à la sienne pour un baiser plus passionné que les précédents, simplement dû à la joie que je ressentais d’être enfin hors de cette infirmerie glauque et sombre. Après quelques instants, je me reculai enfin et posai doucement ma main sur la sienne, sentant son alliance sous ma peau. Notre conversation de tout à l’heure me revint à l’esprit et finalement, je songeais que je n’avais même pas pensé à lui demander ce qu’elle signifiait pour lui, ce qu’elle pouvait bien représenter. Je glissai mon front tout contre sa tempe, mes doigts caressant doucement sa bague. Elle n’aurait pas été plus belle au doigt d’une autre personne, j’en étais certain.

« Mon Amour… Tu ne m’as pas dis ce qu’elle signifiait pour toi, cette bague ? Oh, et... »

Je fronçai doucement les sourcils.

« Excuse moi pour ma réaction de tout à l’heure, avec Barthelemy… Je suis désolé de m’être éloigné de toi.»

Même si cela n’avait absolument rien à voir avec notre bague, je tenais à ce qu’il le sache.
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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeDim 5 Juin - 18:53

Il ne s'agissait pas de simple curiosité de ma part mais d'une profonde envie de connaître les sentiments de Liam, de connaître ses intentions et finalement, là où il souhaitait aller avec moi. Parce que cette bague pouvait être un simple bijoux, un simple cadeau comme elle pouvait être beaucoup plus et j'avais besoin de savoir si elle représentait autant pour lui qu'elle représentait pour moi. Il ne fut cependant pas très bavard, en tout cas pas au départ. Il resta un long moment silencieux, cherchant probablement ses mots et pendant ce temps, dans ma tête, un véritable chaos régnait : Mettait-il autant de temps parce que l'émotion était trop forte ou mettait-il autant de temps parce qu'il savait que la réponse n'allait pas me satisfaire ? Je sais, je me posais des questions inutiles mais c'était plus fort que moi. Je n'insistai cependant pas, lui laissant le temps de trouver... Le courage ? Oui, si c'était cela dont il avait besoin. J'étais décidé à lui laisser le temps de trouver les mots : Je l'avais déjà brusqué avec mes questions, inutile d'en rajouter une couche. Malheureusement, en le voyant détourner le regard et en voyant ses yeux se balader ça et là sur les draps, je détournai à mon tour le regard : En général, quand il n'osait pas me regarder dans les yeux, ça n'augurait rien de bon. Avais-je été trop loin en lui demandant la signification de cette bague ? J'avais peut-être été un peu brusque mais de là à le mettre si mal à l'aise... C'était assez déconcertant pour moi. Il bredouilla quelques mots mais toujours aucune réponse. Puis, je l'entendis de nouveau soupirer mais j'étais décidé à garder mon regard détourné de lui, n'ayant pas envie de le voir mal à l'aise, gêné ou pire, pétrifié par ce qu'il était sur le point de me dire. Cependant, lorsque je sentis ses doigts glisser sur les miens, je posai mon regard sur nos mains et vit son pouce caresser doucement la bague. Alors, je décidai de reporter mon regard sur lui et fut soulagé de croiser son regard et non pas de le voir fuyant comme quelques instants auparavant.

Et la réponse tomba. L'explication me fut enfin donnée. Et quelle explication... Petit à petit, un sourire se dessina sur mes lèvres parce qu'il était en train de dire exactement les mots que j'avais envie d'entendre... Non, les mots que je rêvais d'entendre : Affection, attachement, fidélité, engagement et même... Promesse. Une promesse. Notre promesse d'amour. Les larmes m'en montèrent aux yeux tant j'en fus ému. Comment vous expliquez ?... Je savais qu'il m'aimait, je n'en doutais pas, mais l'entendre me dire tout ces mots, l'entendre m'avouer la profondeur de ses sentiments, l'entendre me confesser son amour de cette façon, un amour si semblable au mien, en tout point... C'était tout simplement merveilleux en fait. Pourquoi fallait-il alors qu'il détourne une nouvelle fois le regard et qu'il se trouve ridicule ? Non, il n'était pas ridicule. S'il savait... Si seulement il savait que cette bague représentait exactement la même chose pour moi... Le rouge lui monta aux joues et ce fut assez visible étant donné sa pâleur habituelle et il releva finalement son regard vers moi, un geste qui lui avait sans doute demandé beaucoup de courage. Ainsi, il continua son explication et mon sourire n'en fut que plus large : Alors comme ça, il était possessif. C'était un trait de sa personnalité que j'avais grand plaisir à découvrir. J'étais particulièrement heureux qu'il souhaite m'avoir pour lui, rien qu'à lui, qu'il souhaite retirer aux autres toute envie d'essayer de se rapprocher de moi. Enfin, en matière d'amour en tout cas. Et son sourire... Ce sourire timide qu'il m'adressa ensuite et qui me faisait tant craquer. Oh bon sang, j'étais dingue de lui. Soudain, il glissa sa main sur ma joue et se rapprocha de moi avant de déposer un tendre baiser sur mon front. Nos regards se croisèrent de nouveau lorsqu'il finit par me dire qu'il avait offert cette bague parce qu'il m'aimait et qu'il voulait que tout le monde le sache.

Pause.

Que venait-il de dire ? Qu'il voulait que tout le monde sache qu'il m'aimait ? Alors, avait-il changé d'avis ? Voulait-il rendre notre relation officielle ? Non, ça ne pouvait pas être possible, pas si vite. Pas alors qu'il avait eu si peur du regard des autres, pas alors qu'il n'avait pas encore appris à s'accepter complètement. J'avais dû mal comprendre. Sans doute faisait-il allusion au fait qu'il ne voulait pas que d'autres hommes s'approchent de moi. Oui, cela devait probablement être ça... Aussi, je m'en tins à ce fait et non pas à cette idée folle et insensée qu'il était prêt à se montrer aux autres. J'aurais tant voulu pourtant pouvoir être à ses côtés au quotidien, pouvoir le regarder, lui prendre la main, l'embrasser, sans plus jamais nous soucier de notre secret, de ce lourd secret qui pesait chaque jour un peu plus lourd dans mon cœur. Mais non, il ne fallait pas penser à ça au risque d'être déçu et surtout, je devais savourer ce que j'avais, ce qui m'était offert et du bonheur dont je jouissait déjà. Je ne devais pas trop en demander sinon, je risquais de tout perdre et ça, c'était absolument hors de question. Ce n'était même pas envisageable. Et pourtant... Ses mots... Je n'arrêtais pas de repasser ses mots dans mon esprit « Je veux que tout le monde le sache. ». Et ce regard rempli d'amour... Etait-il prêt ? Avait-il voulu me le faire comprendre et attendait-il une réponse de ma part ? Si c'était cela, il risquait de mal interpréter mon silence mais à l'inverse, si ce n'était pas ça et que je répondais par l'affirmative à une question à laquelle il ne voulait pas encore de réponse... Oh et puis tant pis : Je devais arrêter de trop réfléchir. Il avait bien dit qu'il voulait que tout le monde le sache alors je n'avais qu'à le prendre au mot. Il me suffisait de lui dire que moi aussi je voulais que tout le monde le sache, que moi aussi je voyais en cette bague une promesse véritable. Que...

Rien du tout, puisque Mathilda choisit ce moment-là pour entrer dans la pièce. Bon... Au moins, j'allais gagner quelques instants pour trouver le courage de lui dire ce que je ressentais. Liam retira sa main de ma joue pour la poser sur ma cuisse et je me retournai alors, voyant Mathilda les mains sur les hanches qui nous fixaient. Pour une fois, je n'avais rien fait. J'étais là à une heure correcte et je n'étais pas en train de fatiguer Liam, enfin, pas à ma connaissance. Du coup, il me fallut quelques instants pour comprendre pourquoi elle restait là à nous fixer : Elle avait peut-être pris une décision. En fait, la veille, après avoir discuté avec Liam, nous lui avions demandé s'il pouvait revenir dans sa chambre mais elle avait décidé de réfléchir et de nous donner une réponse plus tard. Réponse qui, apparemment, n'allait plus trop tarder à venir. Liam se dégagea des draps pour s’asseoir à mes côtés au bord du lit et il la regarda, silencieux, tout comme moi. Mathilda brisa finalement le silence en demandant à Liam de marcher jusqu'à elle et je serrai la mâchoire : C'était un test, je le savais. Elle allait se servir de ça pour savoir s'il était prêt ou non à retourner dans sa chambre mais ça n'avait rien à voir... Il pouvait manquer de force pour marcher mais dès l'instant où il se sentait mieux, qu'il buvait, mangeait et surtout qu'il se reposait... Non, là, franchement, c'était bas, surtout venant d'elle... Mais je savais que Liam avait envie de quitter cette infirmerie, sans doute encore plus que moi... Il était resté tellement longtemps allongé, enfermé, coupé de tout et de tout le monde... Quitter cet endroit allait être une véritable délivrance pour lui ainsi qu'un signe supplémentaire qu'il était vraiment sur la voie de la guérison. Alors, il ne se démonta pas, prit appui sur le lit et se releva, les jambes tremblantes. J'arrêtai de respirer, le fixant, prêt à bondir en cas de problème. Il fit un premier pas : Victoire. Il fit un deuxième pas : Défaite. Il s'effondra en avant et je bondis pour le rattraper in extremis avant qu'il ne s'écroule par terre. Liam soupira et glissa un bras autour de moi et je le soutins alors pour l'aider à se tenir debout, sans cesser de regarder Mathilda, essayant de la convaincre avec mon regard insistant ou plutôt, avec mon regard de chien battu... Ca, c'était petit et bas, mais que voulez-vous : Moment désespéré, méthode désespérée.

« Bon. Samuel, soutiens le jusqu’à sa chambre s’il te plait, je vous rejoindrai plus tard. »

Euh... Quoi ? Avais-je bien entendu ? Elle voulait que j'aide Liam à aller jusque dans sa chambre ? Donc... En clair, elle était d'accord ? Le regard de chien battu avait-il marché ? Etait-ce la clef pour faire faiblir la volonté de notre chirurgien ? Apparemment oui, puisqu'elle ne tarda pas à s'impatienter et à nous mettre carrément à la porte ! Un large sourire étira mes lèvres : C'était fini. Il allait quitter l’infirmerie, il allait revenir dans sa chambre, nous n'allions plus nous quitter. Je tournai mon visage vers lui mais je n'eus pas le temps de lui dire quoi que ce soit car il écrasa ses lèvres sur les miennes : Le baiser fut bref, mais pas moins passionné. Puis, il se laissa retomber sur le lit et, euphorique, il entreprit de fouiller pour trouver des chaussures et je le regardai faire, extrêmement heureux. J'étais heureux qu'il quitte l'infirmerie mais j'étais surtout heureux de le voir si soulagé, souriant... Les moments où il avait frôlé la mort me paraissaient tellement loin maintenant. Oui, tout ça était bel et bien derrière nous : Enfin. Quand il fut prêt, je m'approchai de lui et glissai un bras autour de sa taille et le serrai contre moi pour l'aider à se tenir debout et à marcher. Sa chambre ne se trouvait pas très loin mais je savais qu'il souffrait encore : J'allais donc l'y emmener, quitte à le porter ce qui fut presque le cas en réalité. Mais il avait tellement maigri qu'il était léger comme une plume, alors cela ne me posa pas de problèmes. Et puis, sincèrement, l'avoir ainsi tout contre moi me faisait tellement de bien que je n'allais pas m'en plaindre. Nous marchions lentement parce que je voulais éviter à Liam d'avoir un malaise qui lui aurait fait gagner son retour à l'infirmerie et nous voulions tous les deux éviter cela. Alors que je le tenais contre moi, je repensais à ce qu'il m'avait dit et un nouveau sourire étira mes lèvres : J'allais lui dire. A l'instant même où nous allions franchir la porte de sa chambre, j'allais lui dire. J'allais lui dire que je l'aimais, que je ne voulais que lui, que je voulais n'être qu'à lui, et que je voulais montrer notre amour à tout le monde et former une famille avec lui et les jumeaux. Finalement, ce que j'avais cru impossible, ce que j'avais cru inaccessible, était là, juste devant moi, n'attendant plus qu'un geste et qu'un mot de ma part : C'était merveilleux.

J'étais tellement perdu dans mes pensées que je sursautai en entendant une voix derrière nous : J'effectuai un mouvement pour me retourner, Liam esquissant le même geste au même moment et nous nous retrouvâmes face à un homme dont je ne me rappelais plus le nom. Je ne l'avais croisé qu'au moment des repas et en fait, je ne croyais pas lui avoir déjà parlé plus que ce que la politesse me réclamait. Je n'allais pas parler avec chaque personne à laquelle je servais le repas, si ? Non, nous sommes bien d'accord. Bref, je ne le connaissais que de vue. Je lui adressai un sourire même si j'aurais préféré que nous ne soyons pas interceptés dans le couloir : Liam était fatigué et même si je le soutenais, il n'était pas bon pour lui de rester trop longtemps debout. C'était trop tôt et, encore une fois, je voulais à tout prix lui éviter un malaise. Malheureusement, le type semblait tellement heureux de voir Liam que nous n'allions pas l'envoyer sur les roses : Il s'était apparemment beaucoup inquiété pour Liam et il était soulagé de le voir debout. Bon, quelqu'un qui s'en faisait autant pour mon amour, je ne pouvais que l'apprécier et ce, même s'il parlait en bon catholique qu'il était. J'étais croyant, enfin d'une certaine façon, mais les phrases de... Non, rien à faire, je n'avais toujours pas son prénom. Bref, ses phrases me gênèrent, elles avaient quelque chose de... Dérangeant... La façon dont il présentait la situation ne me plaisait pas t : Il parlait comme si Liam avait mérité la clémence de Dieu et que c'était pour cette raison qu'il avait survécu. Non... Pas vraiment. Si Liam avait survécu, il ne le devait qu'à lui-même et à la façon dont il s'était battu fièrement et courageusement contre la maladie : Dieu n'avait rien à voir là-dedans. C'était en tout cas mon point vue mais je n'allais pas le lui imposer car je n'avais pas du tout envie d'entrer dans un débat : Nous n'avions pas le temps pour ça. Liam devait regagner son lit le plus vite possible. Un bref silence s'installa et l'homme finit par porter son regard sur moi : En fait, depuis le début de cette entrevue, il n'avait regardé que Liam et ce que je vis dans son regard me déplut fortement. A l'instant où il croisa mes yeux, son sourire disparût et finalement, son regard quitta le mien pour aller se poser sur la main de Liam puis sur les miennes : Nous étions littéralement collés l'un à l'autre. Certes, je l'aidais pour marcher mais il faut être honnête : Nous en avions profité pour nous blottir un peu plus l'un contre l'autre. Le regard du type alla de Liam à moi et ce, plusieurs fois, jusqu'à ce que son visage se décompose complètement : Apparemment, il avait compris et ça ne lui plaisait pas du tout.

Quelle surprise... Ironique, bien entendu. Rares voir inexistants, étaient les catholiques acceptant l'homosexualité. Selon eux, si deux personnes du même sexe, hommes ou femmes, s'aimaient, ils méritaient d'aller en Enfer. Une image bien particulièreme du péché selon moi. En tout cas, son comportement changea radicalement et si d'ordinaire cela ne me touchait pas ou plus, là, ce fut différent. Pourquoi ? Mais parce que ça touchait Liam et tout ce qui touchait Liam me touchait moi. Je le sentis se raidir et esquisser un geste pour se dérober de moi mais il était trop faible pour marcher seul et j'étais décidé à ne pas le lâcher. Je glissai mon regard sur lui et le vit baisser son regard, honteux. Une froide colère monta doucement en moi : Non, il n'avait pas à baisser les yeux, il n'avait pas à avoir honte, bon sang ! Non, je ne voulais pas qu'il traverse ça lui aussi, je ne voulais pas qu'il traverse ce que j'avais traversé adolescent... Pas lui... Et surtout pas maintenant... Quand j'entendis la voix de l'autre s'élever avec froideur, je relevai mon regard vers lui avec une profonde envie de l'attraper à la gorge et de l'étrangler. Comment osait-il ?... Cependant, je n'eus pas le temps de me jeter sur lui que Liam s'éloigna de moi, malgré sa faiblesse, et s'appuya contre le mur. Je reportai mon regard sur lui et sa pâleur me fit peur, et pire que tout : Il souffrait. Pas forcément physiquement, mais moralement de ce que le type venait de dire. J'aurais pu me retourner et foncer dans le tas, j'aurais pu lui refaire le portrait et croyez-moi, j'en avais très envie. Seulement, cela risquait juste d'empirer la situation au lieu d'arranger les choses alors, je fis ce que j'avais fait pendant des années avec mes parents : Je refoulai ma colère, affichai un sourire serein et déclarai d'un ton on ne peut plus calme:

-Vous vous trompez. Nous sommes de simples amis mais il était trop faible pour pouvoir faire le chemin tout seul et vous connaissez Mathilda : Elle ne laisse rien passer et c'était la condition pour qu'il retourne dans sa chambre. Ce n'est donc pas la peine de nous insulter et vous devez des excuses à mon ami...

Comme si il allait s'excuser cet enfoiré... Non, il se contenta de me jeter un regard furieux, ne croyant apparemment pas un seul mot de ce que je venais de dire, me bouscula et s'éloigna. Mon sourire s'effaça instantanément et je fus même incapable de me tourner vers Liam pendant quelques instants. Tout venait de remonter à la surface : Les mensonges, le mal être pendant tant d'années jusqu'à la fameuse révélation. Cette fameuse soirée où j'avait présenté mon premier amour, Freddie, à mes parents. Cette fameuse soirée où mon père avait été horrible, où ma mère avait énormément pleuré, où Freddie m'avait finalement quitté et où j'avais fugué, incapable de continuer à vivre dans ce foyer où on ne voulait pas du vrai moi, de celui que j'étais réellement. Finalement, trois semaines après cette fugue mes parents avaient fini par accepter (plus ou moins) et ils avaient réussi à me convaincre de rentrer mais, malgré tout, le mal avait été fait. Et si avec le temps, j'avais fini par leur pardonner, devoir faire face à une réaction similaire à la leur fut très choquant et même, profondément perturbant. Pas tant pour moi... Enfin, si mine de rien parce que je n'avais pas fait face à une telle réaction depuis bien longtemps, mais surtout pour Liam parce qu'il était en train de vivre exactement la même chose que moi et je ne le voulais pas. Je m'assumais et j'avais appris à ne pas m'occuper de ce que les autres pouvaient penser mais Liam... Il était encore si fragile... J'en aurais pleuré mais je fis l'effort de me retenir, pour lui. Pour lui que j'osais enfin regarder à présent, qui me parût horriblement triste et qui me fendit le cœur : Je ne supportais pas de le voir comme ça. Je ne fis cependant aucun geste vers lui car j'étais décidé à le laisser venir jusqu'à moi, s'il en avait encore envie après ce qu'il venait de se passer. Il finit par se redresser et par se raccrocher à moi. Aussitôt, je repassai mon bras autour de lui pour le soutenir mais sans trop le coller cette fois-ci, juste au cas où nous croiserions quelqu'un d'autre : Une fois, pas deux. Nous reprîmes la route de sa chambre et doucement, il me demanda si c'était à cela que ressemblait le quotidien d'un couple homosexuel. J'aurais voulu lui répondre « non » mais ça aurait été un mensonge et en même temps, je ne pouvais pas non plus lui répondre « oui » car ça aurait également été un mensonge... Je soupirai.

-Ca dépend avec qui...

Réponse évasive mais je ne pouvais pas faire mieux et je n'avais pas envie d'entrer dans les détails maintenant. Lui expliquer que certains proches ne pouvaient pas comprendre, comme mes parents au début, et que les personnes croyantes et pratiquantes avaient en général beaucoup de mal à accepter les homosexuels comme des personnes normales : J'allais sans doute le faire, mais pas dans ce couloir : C'était pas l'endroit idéal pour cela. Nous arrivâmes finalement à la chambre, sans avoir croisé personne d'autre (Merci mon Dieu ?...). Liam s'effondra sur le lit, quant à moi... Eh bien, mon esprit était malheureusement bien loin de cette chambre, bien loin du bonheur que j'aurais dû ressentir. Je repensais à tout ça, au fait que Liam m'ait dit qu'il voulait que tout le monde sache pour nous juste avant de croiser ce type comme si... Comme si justement, ce Dieu qu'il chérissait tant avait fait en sorte de briser le peu de confiance que Liam avait pu gagner en lui. J'avais eu envie d'accepter mais maintenant. Maintenant... Là, ça devenait de plus en plus dur de ne pas pleurer. C'est à ce moment-là que j'entendis Liam rire. Mon regard se porta instantanément sur lui, surpris de l'entendre rire de cette façon. En fait, je n'aurais pas dû être surpris : Il était tout simplement heureux d'être de retour dans sa chambre. En m'asseyant, j'esquissai un sourire qui devait sans doute contraster fortement avec mon regard : J'avais envie de profiter de cet instant, de me réjouir pour lui mais j'avais vraiment du mal à mettre le reste de côté. Finalement, après s'être enfoncé dans ses oreillers, il releva vivement la tête vers moi et fronça les sourcils avant de me demander si j'avais dormi dans son lit. Ah... Ca... Oui... J'avais pris cette liberté parce que les draps et les oreillers avaient son odeur et j'en avais eu besoin comme pour sentir sa présence à mes côtés. J'avais eu tant de mal à dormir et ça m'était encore difficile même si ça allait un peu mieux mais... Oui... Seulement il n'avait pas l'air ravi. Je n'allais cependant pas mentir, ni me cacher : Il y avait assez des mensonges et de secrets à garder comme ça. Je hochai simplement la tête, incapable et ce à ma propre surprise, de prononcer le moindre mot sur le moment. J'eus peur d'une tempête, d'une dispute, mais il se remit à rire avant de s'enfoncer à nouveau dans les oreillers. Il était heureux. Une partie de moi l'était aussi mais elle était pour l'instant trop absorbée par l'autre partie qui était dans un tout autre état... Je l'observai se redresser et se relever, silencieux, prêt à le rattraper si jamais il était pris d'une faiblesse comme c'était arrivé à l'infirmerie. Il ne tomba cependant pas et j'en fus rassuré.

Il allait reprendre des forces et il irait de mieux en mieux.

Je vis son regard se poser sur la pile de linge qui se trouvait sur la commode dont il s'était servi pour arriver à se relever et réalisai qu'il s'agissait de mon linge : J'avais complètement oublié de le ranger. Maintenant, j'allais devoir reprendre mes affaires et retourner dans ma chambre. Enfin... C'était en tout cas ce que je croyais et ce, uniquement à cause de l'autre type... Oui, j'étais persuadé qu'il avait perturbé Liam et que, du coup, il allait faire marche arrière dans son envie d'officialiser notre relation. Dormir avec lui à l'infirmerie était une chose, s'installer dans sa chambre pour vivre en couple avec lui et former une famille avec les jumeaux en était une toute autre. J'allais me relever et m'excuser quand je vis Liam se saisir d'un de mes t-shirt et l'enfiler avant de fouiller dans les tiroirs pour finalement en ressortir un bas de jogging. Je ne m'attendais pas à ce qu'il enfile un des mes t-shirt mais ne protestai pas, au contraire : J'étais heureux qu'il veuille porter un vêtement à moi. C'était comme s'il me disait qu'il voulait me garder toujours près de lui, enfin, c'était de cette façon que moi je comprenais ce geste mais j'avais peut-être tort. Après tout, j'avais eu tort sur tant de points... Il s'approcha finalement de moi, se laissa tomber sur mes genoux et m'enlaça : Un geste que je lui rendis même si j'étais encore ailleurs. Ses lèvres trouvèrent bientôt ma joue, mon front, puis mes lèvres, pour un baiser dont la fougue me surprit un peu. Malheureusement, j'étais tellement perturbé et tellement mal que même ce baiser, que je lui rendis, ne parvint pas à me faire oublier le reste. Si seulement ça avait été le cas... Il glissa sa main sur la mienne tout en posant son front contre ma tempe, restant blotti tout contre moi : Il était étrange de voir à quel point il avait des gestes tendres envers moi alors que moi, pour une fois, j'étais beaucoup moins démonstratif, conséquence directe de l'entrevue avec l'autre... D'ailleurs, Liam ne tarda pas à en parler. D'accord, il me demanda d'abord ce que représentait la bague pour moi étant donné que je ne lui avais pas dit, mais sa remarque sur ce qu'il s'était passé avec Barthelemy (alors c'était ça son nom à ce connard fini ?) passa la question sur la bague au second plan. Il s'excusa de s'être éloigné de moi mais comment aurais-je pu lui en vouloir ?... Il n'y était pour rien, il avait eu une réaction humaine, de rejet à cause de la peur du regard des autres, preuve qu'il n'était pas prêt.

Preuve que j'avais espéré pour rien, mais je ne lui en voulais pas. Je restai un instant silencieux avant de soupirer.

-Tu n'as pas t'excuser de quoi que ce soit... C'est normal que tu aies réagi comme ça. Il a été... Horrible. Liam...

J'eus enfin un geste envers lui et glissai ma main contre sa nuque avant de le serrer avec force contre moi, oubliant qu'il était encore très maigre et très faible, mais j'avais besoin de lui, besoin de le sentir contre moi, de le serrer fort...

-Je ne pourrai pas te protéger de ce genre de personnes si...

Il fallait que je le dise. Je devais le dire. Maintenant.

-Si tout le monde est au courant...

Je le sentis se raidir et me reculai doucement pour croiser son regard : Un regard pétrifié autant que le mien était à présent remplis de larmes.

-J'ai peur pour toi... Peur que tu souffres de leurs regards, de leurs mots... Si je dis ça, c'est parce que je suis passé par là et j'ai réussi à ne plus m'en occuper et ça a fini par ne plus me toucher mais toi...

Je glissai tendrement ma main sur sa joue pour essayer de le rassurer : Il était clair que mes mots n'étaient pas ceux auxquels il s'était attendu.

-Toi, ça te touche... Ce qu'il a dit t'a fait mal et c'est normal mais je ne veux pas que tu aies mal... Je veux juste que tu sois heureux et j'ai peur... J'ai peur que tu ne le sois pas si tu dois supporter tout ça...

Il eut un mouvement de recul mais je le gardai contre moi, l'empêchant de s'échapper : Il ne fallait pas qu'il se méprenne sur mes intentions, sur mes sentiments.

-Non, écoutes moi... Je t'aime... Et crois-moi, je rêve de pouvoir te prendre la main en public, de pouvoir te regarder avec amour sans avoir peur d'être pris sur le fait, pouvoir crier mon amour pour toi à tout le monde... J'en rêve Liam... Et je veux que les autres sachent mais pas si tu ne te sens pas prêt... La décision, elle t'appartient et moi, je te suivrai, quoi que tu décides... Je te suivrai. Je veux juste que tu sois heureux... C'est tout ce qui m'importe parce que...

Je réitérai une tendre caresse sur sa joue.

-Tu voulais savoir ce que cette bague signifie pour moi... Tout à l'heure, tu as dis que tu étais ridicule parce qu'elle représentait ton amour, ta fidélité, ton engagement... Une promesse. Ce n'est pas ridicule... Elle représente exactement la même chose pour moi... Une promesse d'amour, notre promesse... Je t'aime. Je t'aimerai toujours et cette bague, elle représente notre lien et il sera comme elle : Solide, incassable.

Sauf qu'il était possible de briser une bague, mais je ne le savais pas encore. J'esquissai un tendre sourire : Il me restait encore une chose à lui dire et cette fois-ci, j'allais le faire, quitte à en payer le prix.

-Je veux vivre à tes côtés et aux côtés des jumeaux. Je veux qu'on forme une famille et je me fous des mots des autres... Je me fous de ce qu'ils pensent et si toi, tu te sens prêt, alors, oui : Je veux vivre avec toi. Je veux passer ma vie avec toi...

Je ne pouvais pas être plus clair : Je voulais ce qu'il avait dit vouloir, je voulais ce qu'il ne voulait peut-être plus, mais je le voulais. La décision lui appartenait et quoi qu'il puisse choisir, j'allais l'accepter, et rester à ses côtés parce que c'est ça aimer.

En tout cas, pour moi, c'est ça aimer.

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Liam Marsden
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Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Empty
MessageSujet: Re: Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B]   Give me a kiss before you tell me Goodbye. [Samuel. B] Icon_minitimeMar 21 Juin - 17:57

Ca dépend avec qui. La vie d’un couple homosexuel pouvait donc être tout à fait normale selon les personnes avec lesquelles nous nous trouvions ? Je fronçai les sourcils, sans dire mot. Bien évidemment, j’imaginais que certaines personnes se révélaient bien plus ouvertes d’esprit que d’autres, que le niveau de tolérance dépendait de beaucoup d’éléments. L’éducation, la religion, peut-être même le statut social… En toute sincérité je ne m’étais jamais penché sur la cause homosexuelle, même si j’avais comme tout le monde un avis dessus bien avant de m’être moi-même rendu compte de mon attirance pour les hommes. Etant plutôt tolérant de nature, ce genre de personnes ne m’avait jamais dérangé, quand bien même je n’en ai pas fréquenté des milliers. Je n’avais jamais tenu de propos homophobes et personne dans mon entourage ne soutenait ce genre de thèse ridicule au possible : Je n’avais simplement pas évolué dans ce genre de milieu. C’est pour cela que je pouvais comprendre l’homo phobie, qu’importe que cela me blesse ou me révolte, au fond je comprenais. Je comprenais qu’un fervent catholique me traite de sodomite dans un couloir, je comprenais qu’une mère de famille puisse éloigner ses enfants de moi par peur que je les influence, je comprenais que mes amis hommes préfèrent désormais garder leurs distances. Il m’avait fallu du temps pour cela mais à présent, oui, je parvenais à trouver une justification à ce genre de comportements, quand bien même ils soient insupportables lorsque l’on en est la cible. Même si c’était profondément injuste et infondé, il m’était possible de me mettre à la place des autres et imaginer ce qu’ils pouvaient penser, ressentir. C’était peut-être bête de ma part que de faire l’effort de me mettre à leurs places tandis qu’eux s’épargnaient bien cette action mais tant pis, j’avais toujours été comme cela, j’avais toujours cherché à comprendre en restant totalement objectif et, objectivement, je pensais surtout que les homosexuels étaient victimes de pas mal de préjugés. Accusés d’être plus efféminés qu’une femme, d’avoir une sexualité très libérée, de draguer ouvertement les hétérosexuels et d’être très hostiles à l’égard des femmes… Peut-être que certaines personnes pensaient cela, mais regardez nous une seconde. Regardez Samuel, était-il le moins du monde efféminé ? Regardez moi, étais-je volage, ou particulièrement actif sexuellement, même avec mon compagnon ? Non. Absolument pas. Ces clichés ne nous correspondaient pas, ni aujourd’hui, ni dans dix ans, nous ne serions jamais ce genre de personnes, c’était certain. Certes étions-nous émotifs, sensibles, peut-être trop doux pour des hommes, mais nous ne rentrions pas dans le stéréotype de la grande folle parfaite ni l’un ni l’autre. Pour être franc, je détestais cela. Je détestais les hommes beaucoup trop maniérés et je détestais également le principe de la Gay Pride. Aujourd’hui bien sûr, cela n’avait plus aucune importance, mais même si je m’étais découvert cette nouvelle sexualité auparavant, je n’y aurais jamais participé. Pourquoi ? Je ne trouvais simplement pas plus de fierté dans le fait d’être homosexuel qu’hétéro, et inversement. C’aurait été aussi révoltant de créer une « Black Pride » ou une « Jewish Pride ». Tout ça pour quoi ? Représenter les minorités persécutées durant des années, des siècles parfois ? Peut-être, oui… Peut-être qu’en partant du principe disant que l’on souhaiterait simplement montrer que nous n’avions plus aucun tabou vis-à-vis de ces personnes, ce genre de manifestations se légitimeraient. Mais en partant du principe de l’égalité, celui que je chérissais personnellement, celui affirmant que tout être est égal à son voisin, qu’importe sa couleur, son origine, sa religion ou son orientation sexuelle, il n’y aurait pas davantage de fierté à être homo qu’hétéro, noir que blanc, rouge que gris. L’un ne vaudrait pas mieux que l’autre, nous serions seulement tous sur un pied d’égalité.

Mes pensées étaient cependant bien loin de ces questions une fois arrivé à ma chambre. Le voyage depuis l’infirmerie m’avait épuisé, quand bien même je trouve encore la force de rire et embrasser Samuel à pleine bouche, bientôt viendrait le moment d’aller me coucher. Non pas que je veuille jouer au rabat-joie, mais je ne désirais pas vraiment me retrouver de nouveau à l’infirmerie parce que je ne me serais pas assez reposé car croyez-moi, si Mathilda trouvait quoi que ce soit à redire sur l’évolution de ma guérison, elle me ramènerait rapidement là-bas sans possibilité de discussion. Mieux valait-il être sage et conserver un rythme de vie propice à la guérison plutôt que de forcer les choses et risquer de les aggraver, aussi allais-je simplement profiter quelques instants de la douceur des bras de Samuel avant de retourner au lit. Néanmoins, je sentis immédiatement que quelque chose n’allait pas lorsque je lui parlais de la bague, puis de Barthelemy. Il resta quelques instants silencieux, et bien que mon regard ne soit pas plongé dans le sien, je devinais un malaise qui m’aurait jusque là échappé. L’avais-je blessé en m’éloignant de lui dans le couloir lorsque nous nous étions fait traités de sodomites ? J’espérais que non… J’espérais que non car sincèrement, ce n’était pas là mon attention. Même si ducoup ce rejet avait été dirigé contre lui, c’était plutôt les mots de Barthelemy que j’avais rejeté, ces insultes, sa haine… L’espace de quelques instants j’avais effectivement eu honte, mais comment aurais-je pu réagir autrement que comme cela ? C’était la toute première fois que l’on me traitait de cette manière au sujet de ma relation avec Samuel, la première réaction négative à laquelle je devais faire face et très sincèrement, cela n’avait absolument rien de simple. Il ne suffisait pas d’accepter ce que l’on est, il faut également accepter que les autres vous rejette et, même si à présent je parvenais à le comprendre, seul le temps pourrait atténuer la douleur qui en découlerait. Je ne voulais pas que nous nous disputions à ce sujet, ni même qu’il nourrisse la moindre rancune à mon encontre pour cela, j’avais peur qu’il me reproche ma faiblesse. Peur qui ne fit que s’accentuer lorsque je le sentis et l’entendis soupirer tout contre moi, laissant entrevoir une lassitude à laquelle je m’attendais depuis bien longtemps déjà et qui, immanquablement, avait fini par me rattraper.

Nous y voilà. Il en avait assez de mon inconstance, assez de mes peurs, assez de mon manque de courage face à la situation. Au fond, je pouvais le comprendre et pourtant, l’échéance de la discussion à venir me terrifiait encore davantage. Parce que malgré toute ma bonne volonté, malgré mon envie de m’assumer à ses côtés, malgré tout cela je ne parviendrai jamais à demeurer de marbre lorsque l’on m’insulte. Cela ne tenait pas tant à mon homosexualité mais simplement à ma personnalité : J’étais sensible, et généralement on m’appréciait, alors être rejeté pour si peu se révélait particulièrement douloureux pour moi. Et pourtant, il ne voulait pas d’excuses. Il trouvait ma réaction normale. Alors que se passait-il ? Dans ma tête plus rien n’était vraiment clair et j’eus du mal à remettre de l’ordre dans mes idées, ne comprenant pas quelle pouvait être la cause de ce malaise désormais présent entre nous, ou du moins pour lui. Qu’avais-je bien pu faire pour provoquer cela ? Etait-ce à cause du t-shirt que je lui avais emprunté ? De ma soudaine et stupide joie ? D’une indélicatesse commise plus tôt, à l’infirmerie ? J’avais beau me repasser les heures passées dans ma tête, je n’y trouvais nul motif de froideur. Ou bien avais-je loupé quelque chose… Etait-ce à cause des mots de Barthelemy ? Je ne parvenais pas à m’en convaincre. Si moi j’étais faible, lâche, facilement blessé, Samuel non et je ne pouvais croire qu’un vieux con catho parviendrait à le mettre si mal à l’aise. Je fus néanmoins arraché à ces suppositions lorsqu’il passa sa main contre ma nuque et me serra contre lui, en profitant pour me blottir un peu plus contre son torse, nichant mon visage dans le creux de son cou. Ce que je voulais en cet instant aurait pu se résumer à notre étreinte : Etre avec lui, tout contre lui, oublier tout motif de souffrance et ne nous concentrer que sur nous, notre amour, notre bonheur désormais accessible. Je venais de passer à côté de la mort, nombre de choses avaient évolué dans mon esprit, certains obstacles à présent tombés et peurs abolies. Pourquoi continuer à ne songer qu’au mal, qu’aux difficultés de l’existence tandis que je venais de frôler la mort ? J’avais envie de voir le bon côté des choses, oui ; Pour une fois, j’avais envie d’être optimiste. Malheureusement, Samuel reprit bien vite la parole et dès le début de sa phrase, je sentis que le bon côté des choses, justement, il n’y avait finalement que moi qui désirais le voir en cet instant.

Je me crispai automatiquement, réalisant qu’il avait bel et bien compris mon envie, mon besoin d’officialiser notre relation et qu’il ne souhaitait pas réellement y donner de suite. Il disait ne pas pouvoir me protéger si jamais tout le monde était au courant de notre relation, mais je n’avais pas besoin d’être protégé… Je n’avais pas besoin d’un bouclier, mais simplement de lui, de son amour, de son soutien. Je n’étais pas en sucre bon sang ! Certes était-il plus solide que moi, plus courageux également mais cela ne signifiait pas pour autant que je cherchais sa protection, ou que je lui réclamais quoi que ce soit de ce genre. Pour moi, ce n’était que mon problème, et même s’il nous touchait tout deux, il ne devait surtout pas se sentir obligé de me protéger du monde entier simplement parce que je pouvais me retrouver confronté à n’importe quel connard en allant n’importe où… Fronçant les sourcils, je lui jetai un regard un peu perdu lorsqu’il me força à me reculer pour me regarder dans les yeux. Pourquoi était-il au bord des larmes ? Pourquoi lisais-je tant de douleur dans ses yeux ?... Bien sûr que j’allais souffrir de leurs regards, de leurs mots, mais je ne pouvais y réchapper. C’était un passage presque obligatoire, et décider de ne pas officialiser notre relation par peur que j’en souffre ne résoudrait pas le problème… Malheureusement, j’avais déjà bien trop mal pour pouvoir bredouiller le moindre mot. Il voulait m’éviter la douleur de futurs rejets mais finalement, c’était lui qui me faisait du mal en m’annonçant plus ou moins qu’il ne voulait pas franchir ce pas avec moi, qu’il ne voulait pas qu’on nous voie ensemble, qu’il ne voulait pas faire totalement partie de ma vie. Pourtant, tout cela aurait fini par ne plus me toucher également, tout comme lui j’aurais forcément à un moment ou à un autre cessé de m’occuper de l’avis des gens, si lui y était arrivé, pourquoi pas moi ? Pourquoi semblait-il persuadé que je n’y parviendrais jamais ? Pourquoi me croyait-il encore plus faible que je ne l’étais en réalité ? Et surtout, pourquoi décidait-il de me faire souffrir de ses propres mains plutôt que celles des autres… J’avais crains qu’il refuse d’aller aussi loin avec moi, crains que ses sentiments ne soient pas aussi forts que les miens, et j’aurais pu le tolérer. J’aurais pu demeurer à ses côtés quand bien même il ne désire pas faire sa vie à mes côtés parce que pour moi, il n’y avait que lui, et tant qu’il voudrait de moi je ne comptais pas m’éloigner. Mais qu’il me repousse pour ça… Qu’il me rejette pour ça… Non, je ne l’avais même pas envisagé, et il ne suffirait pas d’une tendre caresse sur la joue pour que la douleur s’atténue. Il ne suffirait pas de me donner un su-sucre pour que j’oublie le poignard qu’il venait de m’enfoncer en plein cœur sans raison valable. J’étais en colère, mais bien au-delà de cette colère, c’était la souffrance qui dominait.

Mais ce que j’avais pris pour un poignard n’était en réalité qu’un misérable cure-dents, dont la morsure me paraissait minime en comparaison du coup qu’il venait de m’asséner. Je savais très bien ce que ses mots signifiaient. Je savais très bien ce que voulais dire le « je veux que tu sois heureux mais j’ai peur que tu ne le sois pas si tu dois supporter tout ça.» Je le savais ! J’avais moi-même voulu le quitter pour son bien avant que nous ne nous voyions sérieusement, je lui avais proposé de tout arrêter de peur de lui faire du mal parce que je n’étais pas capable de répondre à tous ses désirs. Et je refusais qu’il me fasse le même coup ! Je refusais qu’il me quitte de peur de me faire souffrir parce que bon sang, c’était de cette manière là que j’allais réellement souffrir, je me foutais des autres, je ne voulais que lui, juste lui, pourquoi ne comprenait-il pas ? La panique devint bel et bien présente en moi, si bien qu’immédiatement, je tentai de lui échapper, tentai d’échapper à cette séparation qui se profilait et dont je ne voulais même pas entendre parler. Il n’avait pas le droit de me faire ça, il n’avait pas le droit de me faire ce coup là… La simple idée d’une séparation m’achevait, me détruisait, je n’avais pas affronté tout cela pour finalement devoir vivre seul, sans lui. Je n’avais pas affronté la mort pour devoir mener une vie faite de solitude et de regrets.

« Tais toi, tais toi ! »

Je tentai de le repousser mais malheureusement, mes quelques efforts ne représentaient rien en comparaison de sa force et il me retint sans aucune difficulté. En cet instant, Samuel me paraissait d’une cruauté sans pareille, non seulement il voulait m’abandonner mais en plus, il me forçait à affronter cette séparation. Il me forçait à demeurer dans ses bras alors que bientôt, il me les interdirait. Il voulait que je l’écoute, or je n’en avais aucune envie. Je n’avais pas envie de faire face à ses raisons plus stupides les autres que les autres et ses justifications absurdes quant à notre séparation, aussi pouvait-il se les garder. S’il parvenait à s’en convaincre, à se convaincre qu’il sacrifiait notre amour pour mon bien, tant mieux pour lui mais moi je ne voulais même pas entendre parler de cela. Cependant, ses mots n’étaient pas ceux auxquels je m’attendais, me plongeant dans une incompréhension totale. S’il m’aimait, si nous partagions les mêmes rêves, les mêmes espérances, pourquoi m’infliger tout cela ? Ses sentiments étaient donc aussi profonds que les miens mais la peur de ne pas me savoir prêt le freinait totalement, il craignait qu’officialiser notre relation me fasse plus de bien que de mal, or cela était impossible. Je ne parvenais même pas à comprendre comment il pouvait en arriver à penser cela. Néanmoins, je me calmai lorsqu’il affirma me suivre, qu’importe ma décision. Il disait ne vouloir que mon bonheur et accepter mon choix, qu’importe sa nature. Je serrai les dents car même s’il ne s’agissait pas d’une séparation, Samuel me mettait à présent au pied d’un mur qu’il avait lui-même construit et je ne savais absolument pas comment réagir. Pour le moment, mon cerveau ne parvenait pas à analyser les événements et en tirer une conclusion ou une décision : Il ne fonctionnait plus. Il restait bloqué sur cette obsession de me protéger chez Samuel, obsession qui n’avait pas lieu d’être, quand bien même il se soucie de mon bien. En même temps, j’étais exactement pareil… J’avais agis exactement de la même manière en me rendant compte qu’il pourrait souffrir en demeurant à mes côtés, alors… Mieux valait-il que je me calme et réfléchisse posément à tout ce qu’il venait de me dire, même si très sincèrement je n’éprouvais pas le besoin de me poser toutes ces questions dès à présent.

Je fus cependant bien incapable d’esquisser le moindre geste lorsque sa main vint doucement effleurer ma joue. J’aurais voulu lui rendre ce geste d’affection, oui, mais ne le pouvais pas, trop sonné encore par ma récente frayeur. Puis, il en vint de nouveau à la bague tandis que j’avais, pour le coup, totalement oublié ma question. Mon regard retrouva doucement le sien, ne sachant ce que j’allais y lire et surtout, craignant que la réponse à cette question me déplaise fortement. Je tins quelque secondes seulement, puis baissai de nouveau les yeux sur mes genoux. Si lui disait ne pas trouver ma représentation de la bague complètement ridicule, moi oui, et généralement lorsque j’éprouvais ce genre de sentiments je ne pouvais maintenir son regard si intimidant. Cependant, lorsqu’il m’avoua que cette alliance signifiait exactement la même chose pour lui, je fus tellement surpris que sans même réfléchir je reportai mon regard au sien. Au fond, je ne savais plus vraiment que croire ou que comprendre de ses mots tant mes interprétations en étaient différentes et contradictoires mais finalement, je cessai de me poser toutes ces questions sans débouchées. Oui, il s’agissait de notre promesse d’amour… Oui, notre lien serait indestructible… Ces mots réchauffaient mon cœur, à tel point qu’un faible sourire vint se lover tout contre mes joues alors que Samuel aussi souriait. De ce sourire tendre, doux, parfait que je lui connaissais si bien. Rien n’allait nous séparer, ni la mort, ni la peur, ni le rejet des autres : Rien. Il était mon âme sœur, l’amour de ma vie, la personne que j’attendais sans même le savoir depuis tant d’années. Je n’oubliais pas Natacha, mon amour pour elle ne perdait pas en intensité mais il fallait être honnête et avouer que notre relation n’avait absolument rien eu à voir avec Samuel. Tout avait été si simple, si lent, si doux… Nous avions les mêmes passions, les mêmes ambitions, les mêmes rêves… La vie nous avait réuni de la manière la plus simple qui soit, notre couple n’avait étonné personne, tout était si… Parfait. Presque banal en réalité. Qu’importe l’amour que j’avais pu lui porter, je l’avouais, oui, notre histoire avait été banale. Alors qu’avec Samuel, tout était pour le moment très compliqué, seul notre amour nous liait réellement, et nous allions devoir nous battre pour lui. Voilà ce qui rendait notre relation beaucoup plus intense, beaucoup plus passionnée.

-Je veux vivre à tes côtés et aux côtés des jumeaux. Je veux qu'on forme une famille et je me fous des mots des autres... Je me fous de ce qu'ils pensent et si toi, tu te sens prêt, alors, oui : Je veux vivre avec toi. Je veux passer ma vie avec toi...

Mon visage se décomposa brutalement. Je demeurai quelques instants si abasourdis que je fus incapable de prononcer le moindre mot, me contentant de le dévisager. Qu’est ce qu’il venait de dire ? Mais… Je fronçai soudainement les sourcils et ouvris la bouche pour dire quelque chose mais les mots ne vinrent pas. Mis appart ressembler à un poisson mort, cela ne servit pas à grand-chose : Les informations ne montaient plus jusqu’à mon cerveau, j’étais totalement figé sur place. Et puis, au bout de longues secondes, je me mis à secouer vivement la tête, sourcils toujours froncés.

« Tu… Tu quoi ? Tu veux vivre avec moi ?! »

Ma voix trahissait une certaine colère que je ressentais, mais devinais cependant que Samuel lui dévouait une autre raison que la vraie et décidai de ne pas le laisser dans le doute plus longtemps :

« Et tu n’aurais pas pu le dire plus tôt, espèce de…! »

C’était la chose la plus importante de tout son discours et il ne le disait que maintenant ?! Je me fichais bien des autres, de leurs avis, or ses mots leur avaient principalement été destinés alors qu’il voulait vivre avec moi, alors qu’il désirait fonder une famille à mes côtés, alors que nous ressentions point sur point la même chose et que j’avais cru qu’il était sur le point de me quitter ?! Bien évidemment, le bonheur d’apprendre cette nouvelle compensait de loin mais colère et pourtant, j’avais envie de le faire tourner en bourrique tout comme lui l’avait fait pour moi. Aussi, mes doigts se glissèrent jusqu’à une de ses petites poignées d’amour (Que j’adorais !) et le pinça, pas assez fort pour lui faire mal mais bien assez pour provoquer un sursaut de stupéfaction. Un grand sourire remplaça mon air renfrogné et, tout en le traitant d’idiot, je le pinçai encore puis le repoussai sur le dos, allongé sur le lit. Nos nuits à l’infirmerie m’avaient au moins appris une chose : Le beau, le grand, le parfait Samuel surprotecteur et incroyablement sexy craignait les… Guilis ! De quoi casser le mythe, certes, mais en l’occurrence je m’en fichais éperdument. Mes doigts agiles glissèrent sur lui tout en le chatouillant allègrement, je tentai vainement de demeurer au dessus de lui tandis qu’il gesticulait dans tous les sens, son rire répondant au mien. Il eut beau me prier d’arrêter à plusieurs reprises, je persévérai, trouvant que c’était là une bien juste punition. Et puis… Je m’essoufflai rapidement, obligé de mettre fin à la torture je me laissai tomber à côté de lui sur le lit puis glissai mes jambes par-dessus les siennes avant de le prendre dans mes bras. Quelques éclats de rires fusèrent encore durant quelques instants avant que je ne parvienne à me calmer et reprendre finalement ma respiration, un sourire radieux toujours accroché aux lèvres. De vrais gamins, voilà ce que nous étions. J’étais cependant bien trop heureux pour me soucier de ce qu’on aurait pu en penser si quelqu’un nous avait vu. Alors, doucement, une de mes mains glissa sous son menton et j’approchai ses lèvres des miennes, l’embrassant avec douceur. Dès que mes propres lèvres les eurent quitté, mon pouce vint à son tour glisser sur ses lèvres, les caressant lentement. Mon sourire ne se tarissait pas et pourtant, ce fut surtout la tendresse qui parfuma ma voix.

« Je veux aussi passer ma vie avec toi, idiot… Comment as-tu pu croire que l’avis des gens allait me freiner ? Je m’en fiche, c’est terminé tout ça… Terminé le temps où je tremblais à l’idée de te tenir la main en publique, terminé le temps où je redoutais qu’on nous trouve ensemble. Je vais souffrir de leurs mots, c’est sûr, mais ça n’a absolument aucune importance, ça ne pèse rien en comparaison d’une vie entière à tes côtés. »

Doucement, je glissai ma joue tout contre l’oreiller sans le quitter des yeux. Je ne parvenais toujours pas à croire qu’il avait pu s’inquiéter de ça, seulement de ça… J’attrapai sa main et lui montrai de nouveau l’alliance qui épousait son doigt.

« Ce qu’elle signifie, c’est que tu es l’homme de ma vie et que rien n’a plus d’importance que toi, que ton amour, que ta présence chaque jour… Ils pourront en penser ce qu’ils voudront, nous insulter à leur guise si cela les amuse mais je n’ai pas l’intention de gâcher nos vies pour leurs avis. Je ne veux pas passer à côté de ce bonheur avec toi pour des choses aussi futiles.»

Même si je m’en rendais compte un peu tard.

« N’aies pas peur pour moi, je vais tenir le coup… Ce sera difficile au début mais je ne vais pas ciller, et surtout pas plier : Tu es la seule personne avec laquelle j’ai envie d’être, que ça plaise aux gens ou non, je m’en fous. Alors… On va parler aux jumeaux ensemble, je tiens à ce que tu sois là, et nous allons leur dire que nous nous aimons profondément. Sincèrement, je ne sais pas du tout comment ils vont réagir mais avec le temps, je suppose qu’ils accepteront l’idée… Lucy t’adore, et tu t’es déjà tellement occupé d’eux… Je crois qu’ils s’en doutent, au fond. Ils sont beaucoup plus perspicaces que ce que l’on pourrait imaginer. »

De nouveau je lui caressai tendrement la joue du bout des doigts.

« Et nous serons une famille, tout les quatre… C’est tout ce que je désire parce que les jumeaux, toi, et moi… Juste le bonheur d’être ensemble et construire jour après jour une vraie famille… C’est exactement la vie dont je rêvais. Mais… Est-ce qu’on pourrait seulement attendre que j’aille un peu mieux pour leur annoncer ? Je n’ai pas envie de leur imposer tout de suite mon état de fatigue, plus notre relation… J’ai peur que ça fasse un peu trop d’un coup. »

Il sembla comprendre, voire même être d’accord et finalement, un sourire plus timide étira mes lèvres.

« Et ensuite tu ne seras plus qu’à moi, juste à moi… Cette chambre deviendra notre chambre, et notre lit, nos enfants, notre vie, notre bonheur, nous, juste nous, rien que nous et puis… »

Je n’eus pas le temps de terminer ma phrase. Samuel venait de m’attirer à lui et m’embrassa avec une fougue qui me fit bien comprendre que je n’avais plus besoin de prononcer le moindre mot : Nous étions tout les deux prêts, nous voulions exactement la même chose, et nous l’attendions avec impatience.

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