Surprise!!! ( Pv Vitali)

Je discutais avec les hommes de mon père. Avec les récents évènements, tout le monde était sur les dents. Entre ses déboires professionnels et personnels, mon père avait de quoi péter un plomb et quand Armando Venezzio pétait un plomb, c'était tout l'entourage qui trinquait. J'avais ma part de responsabilité. J'avais quand même aidé Ethan à reprendre Katarina, l'instrument de sa vengeance contre Alexeï. Je ne pouvais pas cautionner cela. J'avais fermé les yeux sur beaucoup de choses, mais je ne pouvais pas ignorer ça. Je ne pouvais pas laisser mon amie se faire torturer pour assouvir la vengeance de son esprit détraqué. Je n'avais pas hésité... Même si cela mettait Eden en danger si mon père découvrait le pot aux roses, je ne pouvais pas ne pas agir. Eden l'avait compris... Ma merveilleuse femme ne pouvait pas rester sourde à ce genre de supplications. Elle savait que Katarina était comme une sœur et même si cela l'avait angoissée, elle m'avait encouragée. Etait-elle fière que j'ose ainsi défier mon père dans l'ombre, une fois de plus? Après les vivres aux Survivants, l'évasion de Katarina. Je ne sais pas si je m'enhardissais, mais je devais faire attention à ne pas devenir trop téméraire.

Je m'étais donc fait tout petit suite à tout cela, n'attirant pas l'attention.

Je sentis alors quelque chose me frapper les jambes et je fronçai les sourcils, me retournant pour apercevoir... Wow, une revenante... Sarah, la poulette de mon père. Enfin, ex-poulette, il l'avait viré et elle avait interdiction de séjour maintenant. Apparemment, elle lui avait offert son cul, mais pas son coeur et elle, elle avait le béguin pour Nathaniel, le tueur chéri de mon père, qui l'avait ainsi trahi. Hop, mon père avait ainsi perdu son poulain et sa pute, dur coup du sort...

Et voilà qu'elle se retrouve là... Cherchant à attirer mon attention, sans attirer celle des autres apparemment. Pas folle la guêpe. Je pouvais choisir de l'ignorer, lui tourner le dos et la laisser dans le caniveau... Ou aller la voir et savoir ce qu'elle me voulait. Je soupirai : j'étais vraiment trop bon. Trop bon, trop con.

Je m'excusai auprès des gars, avant de me diriger l'air de rien vers l'endroit où j'avais entrevu Sarah et d'enfin me retrouver nez à nez avec elle. Je la trouvais rudement pâle. Mais très jolie. Et jeune. Je ne lui avais guère adressé la parole quand elle était la copine de mon père.

- "Tu es folle d'être revenue Sarah, tu n'es plus la bienvenue ici."

Si mon père apprenait qu'elle était là, il la tuerait illico.

- "Qu'est-ce que tu veux?"

Je n'étais pas agressif, mais je cherchais à aller vite droit au but, je n'avais pas spécialement envie d'être vu avec elle. Je ne voulais pas m'attirer les foudres de mon père.

[Sarah est charmante ptdr]

Je fronçai les sourcils alors qu'elle me répondait amèrement qu'elle n'avait pas vraiment le choix. Comment ça elle n'avait pas le choix? Bien sûr que si, il l'avait viré, elle était libre de faire sa vie loin d'ici et voilà qu'elle revenait. Était-elle folle? Si mon père m'excluait de sa vie, je serais trop heureux de pouvoir prendre la poudre d'escampette, d'emmener Eden avec moi et adieu toute cette violence, toute cette folie. La vie dehors ne devait pas être facile, elle était même dangereuse, je n'étais pas naïf à ce point, mais je me demandais s'il existait plus grand danger que de côtoyer Armando Venezzio.

Réponse : oui, s'en faire un ennemi.

Et Sarah avait une épée de Damoclès au dessus de la tête. Et voilà qu'elle m'annonçait qu'elle devait voir mon père. Je dus la regarder d'une drôle de façon quand elle me dit ça, genre comme si elle était suicidaire ou qu'elle avait perdu la tête. Elle leva alors son pull et je me demandai ce qu'elle voulait me montrer, avant d'esquisser un oh muet de surprise en voyant son ventre légèrement arrondi.

- "Merde..."

Oui je sais, très intelligent, mais que voulez-vous dire face à ça? La nana de mon père, qui était plus jeune que moi allait me donner un petit frère, alors que mon père voulait la tuer. Il y avait de quoi tomber des nues, non? Et voilà qu'elle me disait de me bouger.

- "Tu me parles sur un autre ton Sarah."

Je n'étais pas un des larbins de mon père et je n'avais pas à recevoir d'ordres de sa pute. Fallait pas déconner. Mon cerveau fonctionnait à toute allure : elle allait lui donner un autre enfant. Fils ou fille, peu importe, il lui enseignerait ce qu'il m'avait enseigné et réussirait là où j'avais échoué. Il serait son héritier parfait et moi... Et moi là dedans? Serais-je remplacé? Mon père m'éliminerait-il maintenant que je n'étais plus son seul héritier? Un reste d'amour paternel retiendrait-il sa main? Ou est-ce que je serais tranquille et que je pourrais me barrer avec Eden? Aucune idée.

- "Tu permets, je viens d'apprendre que j'allais avoir un frangin ou une frangine, en même temps que je vais devenir père à mon tour, alors deux minutes."

Bon, comment allait réagir mon père? Allait-il tuer Sarah? Non, l'occasion était trop belle, il allait la garder sous contrôle pour avoir son héritier, puis... Puis quoi? Il s'en débarrasserait? Je regardai la jeune femme.

- "Tu y as bien réfléchi? Parce que je doute qu'il te tuera alors que tu portes son enfant, mais il va te garder sous surveillance et je ne garantis pas qu'il ne cherche pas à t'éliminer une fois que tu auras mis le petit au monde..."

Quand même, ça faisait un sacré drôle d'effet...

Je dus poser les mauvaises questions, parce qu'elle se mit aussitôt en colère, me crachant toute sa rage au visage. Je dus me retenir violemment de lui balancer que si elle était si attachée à sa religion, elle n'aurait pas été couché partout comme elle l'avait ait et qu'elle n'était pas prête d'aller dans son paradis étant donné sa conduite plus que légère. Mais je n'étais pas quelqu'un de méchant, ni de cruel et enfoncer une femme déjà à terre, ce n'était pas moi. N'empêche que je la trouvais gonflée de revenir ici, enceinte, pour demander à mon père d'assumer le gosse qu'il lui avait fait, pensant que cela serait son sauf conduit. Certes, elle serait en relative sécurité pendant 6 mois, mais une fois le bébé né... Je ne pouvais jurer de la suite des évènements. Et je ne voulais pas être mêlé à ça, je ne voulais pas que Sarah me demande ensuite de l'aide pour s'en sortir, j'avais déjà assez défié mon père, même s'il n'en savait rien.

Mais toutes mes mauvaises pensées s'envolèrent quand elle répliqua qu'elle s'en foutait qu'il la tue, que sa vie était gâchée et qu'elle éclata en sanglots, cessant d'être la jeune femme agressive et mal embouchée que j'avais toujours connu et révélant sa faiblesse. Elle était seule, elle était enceinte et le père de son enfant voulait la tuer. Il y avait de quoi pleurer.

- "Oui, il est doué pour ça."

Pour gâcher des vies... En tuant un frère, un mari, ou en mettant enceinte une fille qui en aimait un autre... Et qui semblait s'être fait larguer comme une mal propre. J'avais de la peine pour Sarah. Finalement, j'approchai d'elle, un peu hésitant, ne sachant si elle allait se laisser faire ou m'en coller une. Je la pris doucement dans mes bras, incapable de résister à la détresse d'une femme.

- "Sarah. Je... Je suis désolé."

Conscient qu'elle s'en foutait sûrement complètement, voir que cela allait l'offenser que je la prenne en pitié, je repris très vite.

- "Je vais t'emmener le voir."

Contre toute attente, Sarah ne m'envoya pas promener. Je l'imaginais bien me virer sans ménagement et me balancer un truc acerbe pour bien me refroidir, mais elle n'en fit rien, se laissant même aller dans mes bras et pleurant davantage encore. Ses larmes ne me gênaient pas outre mesure. Je préférais ça à son agressivité. Là, elle était une femme en détresse, qui voyait tous ses projets d'avenirs totalement bousillés. Elle l'avait dit elle-même : il avait gâché sa vie. Elle se retrouvait enceinte alors qu'elle ne semblait pas du tout prête à cela. Et elle n'était, de toute évidence, plus avec celui qu'elle avait choisi.

Je crus judicieux de la ramener à la réalité en faisant ce qu'elle attendait de moi plutôt que de la laisser s'apitoyer, mais j'eus tort. Je ne connaissais pas bien Sarah et, apparemment, tout ce que je pensais savoir était faux. Je ne parvenais pas à prévoir ses réactions. Était-ce du à ses hormones qui la fragilisaient ou bien ne portait-elle qu'un masque en permanence qui s'était effondré? Je n'en avais aucune idée.

- "D'accord, on ira quand tu seras prête Sarah."

Je ne voulais pas la brusquer. Qu'elle se défoule, qu'elle pleure, qu'elle hurle avant, il lui faudrait des nerfs d'acier pour affronter mon père, elle le savait aussi bien que moi. je ne la pensais pas assez sotte pour avoir fréquenté Armando sans savoir quel homme il était. Elle n'était pas une petite cruche enamourée d'un bad boy, mais une femme qui avait du négocier sa pseudo liberté pour avoir ses privilèges. On pouvait trouver cela révoltant, mais le fait était qu'elle avait simplement cherché à survivre et à s'en tirer le moins mal possible. Ce n'était pas la pute que tout le monde pensait. Et j'étais le premier surpris d'en arriver à cette conclusion.

Elle s'essuya la bouche avec un mouchoir, avant de plonger ses grands yeux sombres et désespérés dans les miens. Je souris malgré moi quand elle s'excusa pour ses larmes, en disant que je savais ce que c'était.

- "Dans une moindre mesure oui. Eden a toujours été sensible, ses sautes d'humeur sont moins impressionnantes. Et elle n'est pas dans la même situation, elle a moins de raisons de pleurer."

Sous entendu que Sarah avait toutes les raisons du monde de le faire et que je le comprenais parfaitement, ne lui tenant pas du tout rigueur de cette crise. Eden était à a fin de sa grossesse, la délivrance était proche et nous étions tous les deux impatients et terriblement nerveux. Elle m'a alors demandé de parler d'un truc et je l'ai regardée un instant, méfiant. De quoi voulait-elle parler?

- "Vas-y, je t'écoute."

Pourquoi est-ce que j'avais une désagréable sensation au creux de l'estomac? il n'y avait aucune raison à cela. Elle voulait peut-être me parler de Nathaniel, de ses chances de survie...

J'attendais, non sans une certaine appréhension, que Sarah me dise de quoi elle voulait m'entretenir. Il n'y avait aucune raison d'angoisser. J'étais trop nerveux et je me faisais des films pour rien. En même temps, j'avais une épée de Damoclès au dessus de la tête et il suffisait d'un faux pas pour qu'elle me tranche le cou. Quoique non, ça, encore, c'était une mort rapide et miséricordieuse. Si mon père apprenait que je l'avais trahi, ce serait long et douloureux... Et Eden souffrirait, parce que cela me ferait énormément de mal. Je ne parvenais même pas à imaginer la scène, c'était trop horrible et mon imagination avait ses limites... Pourtant, je revoyais ma Katarina, battue, humiliée, ayant souffert le martyr et mon esprit retors s'amusait à y substituer l'image de ma précieuse Eden...

Elle commença par des paroles qui ne voulaient rien dire. Elle m'avait vu... Pourtant mon estomac se tordit. Impossible qu'elle m'ait vu trahir mon père en donnant des vivres aux Survivants, ni en sauvant Katarina. C'était totalement impossible! Et je n'avais rien d'autre à me reprocher! Allez Vit', calme-toi, respire, reste de marbre, tu te montes la tête pour rien!

Sarah m'entraîna plus à l'écart encore, alors que des bruits de pas se faisaient entendre et je la suivis machinalement, attendant avidement la suite, pour me rassurer et pouvoir pousser un soupir de soulagement... Ce qui ne fut jamais le cas. je me figeai quand elle parla de la Communauté. Non... Elle ne pouvait pas savoir, c'était impossible! Et pourtant... Il n'y avait pas 36 Communautés. Mon sang se glaça. Sarah savait... Et elle avait le moyen de me faire faire tout ce qu'elle désirait. Mais, comme si elle avait deviné le cour de mes pensées, elle reprit très vite qu'elle se foutait de ce que je faisais là bas, que c'étaient des gens bien et qu'elle comprenait que je voulais les aider... Avant de me rappeler que mon père était dangereux et n'aimerait pas ça. J'eus alors un sourire désabusé. A quoi bon nier, elle m'avait vu.

- "Je ne suis pas le fils que mon père aurait aimé avoir. Je ne suis pas sadique, je n'aime pas dealer ni faire le maquereau, la torture me donne la nausée et tuer des cauchemars."

Quoique, j'avais tué le type qui s'en prenait à Katarina et là, je le vivais bien. Mais j'avais tué pour la sauver, c'était différent de plomber un mec parce qu'il avait essayé d'entourlouper mon père. Tuer de sang froid me révulsait. Tuer pour sauver un innocent, beaucoup moins. Je me passai une main dans les cheveux, soudain épuisé de devoir sans cesse faire semblant.

- "J'ai rien à faire ici. Et ces pauvres gens qui essaient de survivre ne font de mal à personne. Mais ils sont une alternative au business de mon père, alors il voit ça comme une menace... En plus, des Hors La Lois sont abattus ces derniers temps, alors ça l'énerve légèrement... C'est la guerre Sarah. Et si mon sang est de ce côté si, mon cœur va aux innocents."

Je soupirai, concluant de façon fataliste :

- "Je sais que je joue avec le feu et que je risque de me brûler. Si cela ne concernait que moi, je m'en ficherais, mais il y a Eden et bientôt notre enfant... Je ne peux pas les mettre en danger ainsi, mais je ne peux pas rester indifférent à ce qu'il se passe."

Je conclue en la regardant droit dans les yeux :

- "Tu as le pouvoir de me réduire en miette de quelques paroles à qui de droit Sarah. Sache quand même que je n'ai pas besoin de raisons pour t'aider."

Donc, pas de chantage. Quel vilain mot... Elle me mettait au courant qu'elle savait. C'était une carte maîtresse dans son jeu. Si elle l'abattait, j'étais mort. Voulait-elle me mettre en garde ou me faire comprendre que quand elle en aurait besoin, elle s'en servirait pour obtenir de l'aide de ma part?

Je l'avais blessé. En sous entendant qu'elle pouvait me balancer, j'avais atteint un point sensible. Marrant ça, je l'aurais traité de pute qu'elle n'aurait pas eu ce regard là. L'honneur semblait avoir plusieurs formes pour Sarah et si elle se fichait de son corps, il semblerait qu'il lui restait tout de même des principes moraux louables. Peut-être était-ce une chic fille, qui s'était retrouvée propulser dans un monde dans lequel elle n'avait que son corps et sa détermination pour survivre. Sérieusement, qui étais-je pour lui lancer la pierre?

- "Désolé. Je ne sais pas qui tu es Sarah, ni de quoi tu es capable. Je sais juste que tu as couché avec mon père, passé un arrangement avec lui, mais je ne sais pas jusqu'à quel point tu as trempé dans ses magouilles ou t'es immiscé dans sa vie privée. Me balancer te permettrait peut-être de rentrer dans ses bonnes grâces tu sais."

Et il me semblait que c'était bien le genre de nana à ne pas s'encombrer longtemps d'un sens moral trop lourd qui les empêchait d'avoir ce qu'elle voulait. Mais peut-être me trompais-je après tout. Je lui avais assuré pourtant que je l'aiderais quand même. Je restai un instant muet quand elle me laissa comprendre qu'un service donné valait un service rendu. Si je l'aidais, elle m'aiderait. C'était honorable. Je posai un regard neuf sur elle, avant de tendre la main vers elle pour sceller notre accord.

- "C'est équitable."

Je penchai la tête un instant, la scrutant de mes yeux vert d'eau, une idée me traversant l'esprit, maintenant que la surprise était passée.

- "Comment l'as-tu apprit? J'ai toujours pris grand soin d'être discret et si mon père ne le sait pas, c'est que personne n'est au courant..."

Je n'étais pas stupide. J'avais beau avoir un petit côté lunaire parfois, rêveur, voire naïf, il était vraiment idiot de me sous estimer et de penser que parce que je ne prenais pas mon pied à tuer et torturer des types, j'étais totalement inoffensif ou débile. Mon intelligence, je la réservais à d'autres tâches : jouer double jeu par exemple, même si je savais que cela ne durerait pas éternellement. Sarah savait que j'étais allé là bas. Elle m'avait vu. Pendant son "exil"...

- "Tu étais là-bas?"

Je ne l'avais pas vue. Mais on ne m'avait pas exactement fait faire le tour du propriétaire non plus. Je rejoignais Kat en catimini et voilà tout. Si on apprenait ma venue, j'étais un homme mort, d'un côté, comme d'un autre. Je n'appartenais à aucun camps et je naviguais entre les deux. Pas facile de trouver sa place.

- "Pourquoi ne pas être restée avec eux?"

De ce que j'en savais, ils ne l'auraient pas rejeté. Je pouvais toujours glisser un mot à Kat et Ethan pour s'occuper de Sarah, ils le feraient surement, même si elle avait couché avec l'ennemi. Mais Katarina comprendrait, non?

Je gardai le silence alors que Sarah m'expliquait les termes de son contrat avec mon père. C'était vrai que je ne les connaissais pas. Je ne savais pas exactement ce qui les avait lié, même si je me doutais que Sarah avait fait cela pour survivre, dans des conditions pas trop misérables... Elle couchait avec lui, il la protégeait. Marché assez... honnête, finalement. Sauf que passer un marché avec mon père, c'était comme pactiser avec le diable. Mon père avait un sens de l'honneur tordu et savait toujours trouver la faille pour assurer son emprise sur vous et vous rouler. Mais je ne doutais pas de l'intelligence de Sarah qui avait du en avoir conscience. Et si elle revenait près de lui, c'était pour qu'il la protège, le temps qu'elle mette son héritier au monde. Je savais déjà qu'il allait voir là une opportunité de façonner enfin un fils ou une fille à son image. Et dés lors, je pouvais numéroter mes abattis, il n'aurait plus aucun scrupule à se débarrasser de moi.

Sarah avait raison, je ne voulais pas de ce concurrent. Certes, mon père pourrait me lâcher un temps, mais ce n'était pas pour cela que je pourrais fuir avec Eden sans craindre de représailles. On ne trahissait pas Armando Venezzio et cet enfant était un rival, même si je détestais penser ainsi. Pas encore né et déjà objet de discorde et de convoitise.

Mais voilà que Sarah m'apprenait savoir ce que je trafiquais avec les Survivants. Si mon cœur rata un battement en songeant aussitôt à ce qu'elle pourrait tirer de cette information, elle me rassura en me disant qu'elle n'était pas une balance. Que si je l'aidais, elle m'aiderait. Échange de bons procédés. Une poignée de mains scella notre accord. Je n'avais aucune idée de son sens de l'honneur. On aurait pu le penser peu développé vu qu'elle offrait son cœur pour s'attirer les faveurs du big boss, mais quelque chose dans son regard, dans sa façon de parler, me faisait penser qu'elle ne me trahirait pas. Pas sans une excellente raison.

Mais voilà qu'une question me traversa l'esprit : comment savait-elle cela? Il n'y avait pas 36 explications et elle me la donna sans rechigner, sans m'envoyer bouler comme je l'aurais pensé capable de le faire il y a quelques semaines... Ça vous changeait à ce point un caractère une grossesse? Avec Eden, cela n'avait pas été flagrant, mais elle était déjà ultra sensible avant.

Elle y était restée un mois avec Nathaniel. Ah... Le tueur chéri de mon père, qui avait commis l'erreur de ne pas suivre les ordres et de tomber amoureux de sa nana. S'il recroisait mon père, il était un homme mort. D'ailleurs, je pense que s'il recroisait n'importe quel hors la loi, il serait mort. Sauf qu'il était plus doué que la plupart. Je ne me faisais pas trop de bile pour lui pour les abattre avant d'être abattu. Mais tu parlais d'une vie... Je sentis mon cœur se serrer en voyant son désarroi. Elle aussi était amoureuse de lui... J'étais décidément trop sensible, il suffisait qu'une femme pleure devant moi pour que j'ai envie de la serrer et de lui assurer que tout irait bien. Pathétique. Elle m'avoua alors avoir quitté mon père pour Nathaniel et revenir parce que celui-ci ne voulait pas de cet enfant. j'avais vraiment de la peine pour elle. Elle devait renoncer à son bonheur parce qu'on l'avait rejeté. Et là, de nouveau, je me suis approché pour la prendre dans mes bras et caresser doucement ses cheveux. Que pouvais-je faire d'autre?

- "Je suis désolé Sarah."

Désolé de la voir si malheureuse, même si je n'y pouvais rien. Tout ce que je pouvais faire, c'était l'aider à affronter mon père. Et à survivre à la naissance du bébé. Parce qu'il pouvait très bien la tuer ensuite. Je ne pouvais pas lui ramener Nathaniel. Juste adoucir son séjour ici.

- "Je ferais tout ce que je peux pour que les choses se passent bien ici, je t'en fais la promesse."

Pourrais-je seulement la tenir?

Je laissais à Sarah tout le temps de pleurer et d'évacuer ce chagrin qui la gangrénait. Je l'avais méjugé. Je m'étais basé sur ce qu'on disait d'elle, sur l'image qu'elle renvoyait. Et je m'étais trompé. Je n'avais pas cherché à l'approcher. Je laissais souvent les affaires de cul de mon père là où elles étaient et ne m'en mêlais pas. Sa vie privée ne me regardait pas et s'il voulait se trouver un coup pour se sentir homme, grand bien lui fasse. Il ne s'était jamais attaché à aucune femme, même pas à celle qui fut ma mère. Elles étaient juste bonnes à lui permettre de se défouler, rien de plus rien de moins. Je ne savais même pas pourquoi j'avais soupçonné Sarah de tremper dans ses affaires. Jamais il n'aurait permis qu'une de ses conquêtes prenne ce genre d'importance.

Pourtant, il était davantage accroc à Sarah qu'à nulle autre avant elle. J'étais son fils, et aussi différent sois-je de lui, je le connaissais et savais interpréter certains de ses faits et gestes. Sarah lui appartenait et il ne tolérait pas la trahison. Était-il amoureux d'elle? Difficile à dire, surtout que je ne le pensais pas capable d'éprouver ce genre de sentiment. La possession était davantage dans ses cordes. Donc Sarah était à lui et elle était amoureuse d'un autre. Aussi primitif qu'un animal, il avait vu cela comme un défi et les avait chassé... ou avait essayé de les tuer. Je penchais pour la deuxième solution, qui lui ressemblait davantage.

Sarah revenait aujourd'hui vers lui, pour qu'il assume l'enfant qu'il lui avait fait. De un, il fallait qu'il la croit quand elle dirait qu'il était de lui. Il aurait pu être de Nathaniel. Il pouvait très bien penser qu'elle avait monté cette histoire de toutes pièces. Mais moi, je la croyais. Aussi bonne comédienne soit-elle, elle n'aurait pas pu inventer tout cela et me l'avouer avec autant de sincérité dans ses réactions. De deux, il fallait qu'il accepte l'enfant. Là-dessus, je ne me faisais aucun soucis. Je n'imaginais que trop bien son cerveau échafauder tout un tas de scénarios dés qu'il saurait avoir un second enfant.

Sarah finit par s'écarter de moi, en me remerciant et je vis la jeune fille fragile disparaitre pour laisser place à la femme pleine d'assurance et de morgue que j'avais connu avec mon père. Impressionnant. Deux Sarah... L'une vraie et authentique, qui devait se laisser étouffer par l'autre, rouée et arriviste, pour ne pas mourir. Je hochai la tête à ses paroles.

- "J'espère que tu as évacué toutes tes larmes Sarah."

Elles ne lui serviraient à rien contre mon père. Elle ne devait montrer aucune faiblesse, où il l'abattrait, tel un prédateur.

- "Oh ça, oui, il va adorer!"

Et je payerais cher pour voir sa tête. Je conduisis donc Sarah jusqu'à lui, non sans croiser les regards torves des hors la loi qui savaient très bien que Sarah ne devait pas être ici. Un ou deux me prirent la tête avec ça, en voulant jouer les caïds, mais je les remis vertement à leur place, en leur rappelant qui j'étais. Et que je possédais des informations que ces petits larbins n'avaient pas. Ouais, il fallait jouer au dur pour se faire respecter ici. Je savais être incisif et désagréable, même si je détestais cela. Sarah jouait la comédie, moi aussi. Avec plus ou moins de brio. Mais j'avais promis de l'aider et cela me donnait des ailes.

Arrivés devant la porte de mon père, je dus amadouer ses deux gorilles, avant de souffler un bonne chance à Sarah. Puis, j'entrai chez mon père sans plus de cérémonie, en lui annonçant qu'il y avait quelqu'un qui désirait lui parler, que c'était de la plus haute importance et qu'il valait mieux qu'il laisse cette personne s'expliquer jusqu'au bout. Il me regarda bizarrement, sans doute peu habitué à ce que je me montre si volubile et sûr de moi. Mon regard était déterminé et je fis signe à Sarah d'entrer. Je m'éclipsais alors, non sans lui faire un clin d'œil en aparté et refermai les lourdes portes sur elle.

Le reste se jouerait sans moi.

Que Dieu, Allah, ou n'importe qui là haut ai pitié de Sarah.